A. Les crédits du Régime de pensions du Canada

Les crédits du RPC sont compris dans la définition de la LDF portant sur les « biens familiaux », ce qui les soumet donc au régime d’égalisation de la Loi, même s’il semble que cette réalité soit largement ignorée en pratique, alors que l’on choisit simplement d’omettre les crédits du RPC du calcul des biens familiaux nets.[212] Ceci constitue un piège pour les personnes qui ne se méfient pas ou qui font trop confiance aux autres.

Le RPC prévoit un partage des crédits en cas d’échec du mariage, les crédits gagnés au cours du mariage par un conjoint étant partagés également entre lui et l’autre conjoint; lorsqu’une demande de partage est faite, les instances fédérales sont tenues de partager les crédits sauf si les deux conjoints ont convenu qu’il ne devrait pas y avoir de partage et si la loi sur le droit de la famille de la province en question autorise la conclusion de telles ententes. Même si certaines des autres provinces ont adopté des lois l’autorisant,[213] l’Ontario n’a pas cru bon de le faire. Ceci a parfois mené à des instances où une partie a convenu en vertu d’un règlement aux fins d’égalisation de ne pas faire de demande visant le partage de crédits, pour ensuite déposer une telle demande à une date ultérieure.

Dans l’affaire Albrecht v. Albrecht,[214] la Cour de district de l’Ontario a fait face précisément à cette situation. S’efforçant de faire preuve de justice, elle a statué qu’il était préclus à une conjointe, qui avait demandé le partage de crédits du RPC en dépit du fait qu’elle avait reçu une contrepartie pour la renonciation à l’ensemble des réclamations à l’endroit des biens de l’autre conjoint, de conserver pour ses propres fins toute partie du régime de retraite qui lui avait été versé par les autorités fédérales et la Cour a ordonné qu’elle lui restitue cette partie. La décision a été cassée par la Cour divisionnaire de l’Ontario,[215] qui a statué qu’aucun pouvoir ne permettait de rendre une telle ordonnance compte tenu de l’absence de lois provinciales permettant de se soustraire par contrat aux dispositions relatives au partage des crédits du RPC.

Certaines affaires troublantes soulèvent la question de la pertinence, pour l’Ontario, d’édicter une loi excluant expressément ces crédits des biens familiaux nets[216] ou, du moins, qui permet aux parties de s’entendre pour éviter d’effectuer un partage selon le RPC.[217]

 

B. Conjoints de fait

Ainsi qu’il a été observé ci-dessus, la partie I de la LDF ne s’applique pas aux conjoints de fait. La CDO n’a pas l’intention de traiter dans ce rapport de l’opportunité ou non de leur rendre applicable la partie I, puisqu’il s’agit d’une question qui dépasse celle des régimes de retraite.[218] Nous remarquons toutefois que les conjoints de fait qui font face à l’échec de leur relation de couple peuvent avoir à décider de questions de propriété (comme lorsqu’une fiducie constructoire est imposée relativement à un bien appartenant à un conjoint, en faveur de l’autre) et que, quel que soit le cas, certains couples puissent désirer parvenir à (ou du moins tendre vers) l’égalisation, simplement selon leur propre optique d’équité. Dans la mesure où le partage du régime de retraite d’un des conjoints est envisagé, cependant, le couple aurait à faire face aux mêmes difficultés qu’un couple marié, compte tenu du manque de bonnes options de règlement offertes, c’est-à-dire qu’il n’existe aucune faculté d’effectuer un transfert immédiat d’une quote-part du droit du participant aux termes d’un régime de retraite à son ancien conjoint (sauf dans le cas de la cessation d’emploi du participant), ni une solution de type MRD n’est-elle disponible. (Le participant et l’ancien conjoint de fait, à l’instar d’anciennes parties à un mariage, pourraient convenir d’un arrangement conditionnel, même si de tels arrangements posent énormément de problèmes, ainsi qu’il a été exposé ci-dessus).

Précédent Suivant
D’abord Bout
Table des matières