A. Introduction
Le présent chapitre résume la législation, les orientations et les programmes en vigueur en Ontario. Les chapitres suivants analysent des questions auxquelles des réformes pourraient être profitables.
On présente tout d’abord le cadre de la réglementation ontarienne pour le financement, la planification et la prestation des soins de santé, puis à l’intérieur de ce cadre, les soins palliatifs, la prise des décisions pour les soins, l’aide médicale à mourir et le règlement des différends. Le présent chapitre se termine avec l’examen de plusieurs lois qui, tout en étant distinctes, recoupent malgré tout ces domaines.
Le régime ontarien de la santé étant actuellement en pleine évolution, on s’attache ci-après à fournir des informations sommaires sur la réglementation en vigueur.
B. Cadre du financement, de la planification et de la prestation des soins de santé
1. Cadre de la réglementation ontarienne — aperçu
On a présenté au chapitre 3 le fondement constitutionnel de la santé en Ontario, basé sur la répartition des pouvoirs entre les provinces et le Gouvernement du Canada. Celui-ci se sert des pouvoirs de dépenser que lui garantit la Constitution pour transférer des fonds aux provinces, lesquelles dispensent des services de santé par l’intermédiaire de régimes d’assurance – Assurance-santé de l’Ontario est le régime ontarien pour la santé. La planification et la prestation des services incombent en grande partie aux provinces.
La Loi canadienne sur la santé, qui régit cette entente, prévoit uniquement les services médicalement nécessaires que fournissent hôpitaux et médecins. Divers services de santé nommés « complémentaires » ne bénéficient pas de financement fédéral et sont importants pour les derniers moments de la vie – dont les médicaments prescrits en ambulatoire et la plupart des soins palliatifs prodigués en établissement privé et en foyer de soins de longue durée. C’est pourquoi l’Ontario complète par des fonds provinciaux l’arrangement en vertu de la LCS, tout en contrôlant la planification et la prestation des soins médicalement nécessaires.
L’admissibilité aux services financés par la province peut toutefois être limitée, et quelques services peuvent être financés partiellement ou pas du tout. À titre d’exemple, les patients bénéficiant de soins continus et complexes à l’hôpital, en attendant d’être admis à des soins de longue durée, peuvent être tenus de payer une quote-part du coût de leurs repas et de leur hébergement[145]. Une fois en foyer de soins de longue durée, il faut également verser des quotes-parts pour la nourriture et le logement. S’il s’agit d’un logement avec des services réguliers ou de base, les personnes qui sont dans l’incapacité de verser la quote-part peuvent avoir droit à une aide financière et à une réduction de leur quote-part, en fonction de leur revenu[146].
Les maisons de retraite sont un exemple d’arrangement entièrement privé. Elles sont assujetties à la Loi de 2010 sur les maisons de retraite, mais leurs résidents sont juridiquement des locataires qui ont des droits en vertu de la Loi de 2006 sur la location à usage d’habitation[147]. Les maisons de retraite peuvent, sans y être tenues, proposer des soins qui répondent aux besoins des personnes en fin de vie[148]. La CDO étudie dans le projet les inquiétudes que des intervenants ont exprimées à propos des soins palliatifs dans les maisons de retraite (au chapitre 5. Accès à la justice pour les groupes ayant des besoins non satisfaits).
Le cadre actuel des soins de fin de vie financés par l’Ontario est présenté ci-après. Il ne faut pas perdre de vue que quelques-uns de ces services exigent peut-être des quotes-parts.
2. Cadre des soins de fin de vie financés par l’Ontario
Le cadre des soins financés par l’Ontario est décentralisé. Le MSSLD a certes la responsabilité générale du secteur, mais d’importantes fonctions de planification, de financement et d’imputabilité sont déléguées à des organismes qui fonctionnent dans les 14 régions de la province.
En dépit de cette répartition des pouvoirs, le MSSLD conserve le contrôle de certaines affaires. Il finance en partie les maisons de soins palliatifs[149]; il finance les soins de base, les honoraires des médecins, les médicaments pris en charge à l’hôpital et d’autres programmes pour les médicaments[150]. Le MSSLD exerce de plus des fonctions de financement et de réglementation des actions de santé publique[151], ainsi que de gestion axée sur la réglementation, la planification stratégique, l’élaboration des orientations et des règles, l’investissement, le rendement, l’imputabilité pour l’ensemble du système[152].
Les réseaux locaux d’intégration des services de santé relèvent du MSSLD. Organismes d’État, ils sont chargés de promouvoir dans leur région respective l’intégration des services locaux de santé en vertu de la Loi de 2006 sur l’intégration du système de santé local[153]. Ils planifient, financent et responsabilisent des services de santé très divers, dispensés à l’hôpital et en foyer de soins de longue durée, ainsi que des services de soutien communautaire :
les hôpitaux dispensent dans leurs services – urgences, soins intensifs, soins continus complexes, soins palliatifs — de nombreux services essentiels en cas de maladie limitant l’espérance de vie. Quelques-uns disposent d’équipes de consultation de soins palliatifs, qui se rendent auprès de patients d’autres services[154]. Des programmes et des équipes de consultation pour les soins palliatifs en milieu hospitalier peuvent assurer des programmes et des visites à domicile[155]. Les hôpitaux publics relèvent de la Loi sur les hôpitaux publics[156];
les foyers de soins de longue durée hébergent des milliers de personnes, dont beaucoup sont très fragiles et souffrent de maladies chroniques et de démence[157]. Chaque année, presque le tiers des bénéficiaires de soins de longue durée décèdent[158]. Aux termes de la Loi de 2007 sur les foyers de soins de longue durée, les titulaires de permis sont tenus de former aux soins palliatifs tout le personnel qui fournit des soins directs aux résidents[159]. Ils doivent également « veille[r] à ce que chaque résident reçoive des soins en fin de vie, au besoin, fournis d’une manière susceptible de répondre à [ses] […] besoins. »[160];
les services de soutien communautaire incluent diverses mesures gérées par des organismes communautaires[161]. Les programmes de soins palliatifs itinérants en sont un exemple : leurs bénévoles aident des milliers d’Ontariens dans leurs activités du quotidien, assurent des services de relève pour les aidants, conseillent et mènent des activités de loisir[162].
Les RLISS financent et contrôlent également les CASC, organismes indépendants qui facilitent l’accès aux soins à domicile et en milieu communautaire en vertu de la Loi de 1994 sur les services de soins à domicile et les services communautaires[163]. Les CASC coordonnent l’admission aux soins de longue durée, et évaluent l’admissibilité à divers services dispensés à domicile[164]. Cette loi prévoit le nombre maximal d’heures pour l’aide familiale et les services de soutien à la personne[165]. En pratique toutefois, ce sont les CASC qui déterminent l’admissibilité aux services[166]. Il se peut que les personnes qui peuvent bénéficier de soins palliatifs reçoivent des services supplémentaires, afin de les aider à mourir chez elles; les personnes qui les aident peuvent elles aussi bénéficier de soutien[167].
Action cancer Ontario relève du MSSLD, parallèlement aux RLISS. Aux termes de la Loi sur le cancer, l’organisme planifie et finance des services pour les personnes atteintes ou risquant d’être atteintes de cancer ou de néphropathie, et garantit l’imputabilité de ces services[168]. Il gère des programmes de lutte contre le cancer dans chacune des 14 régions, et travaille avec les RLISS et des prestataires à dispenser des soins dans différents établissements[169].
Le Réseau ontarien de soins palliatifs a récemment été ajouté au système provincial. Comme on le verra ci-dessous, de par l’absence de coordination entre les institutions décentralisées et les établissements de soins, et de par l’absence de politique unificatrice, l’Ontario a éprouvé d’immenses difficultés pour assurer un accès équitable aux soins palliatifs. Le ROSP a été établi pour améliorer, pour tous les Ontariens, la qualité des soins palliatifs ainsi que l’équité de l’accès à ceux-ci. Son historique et son mandat sont détaillés en C.2 ci-après.
- Il faut garder à l’esprit que cette description du système ontarien (et la figure 2) va bientôt évoluer, du fait de la restructuration qui a été légiférée dans le projet de loi 41 récemment adopté, Loi de 2016 donnant la priorité aux patients[170]. Celle-ci donne aux RLISS des responsabilités accrues pour les soins à domicile et en milieu communautaire, les soins de base et les soins de santé publics. Le plus important pour le projet, c’est que les RLISS vont assumer les responsabilités qui sont actuellement celles des CASC, et des sous-zones géographiques vont être créées afin que des soins soient dispensés dans les 14 RLISS régionaux.
Figure 2 Le système ontarien des soins dispensés en fin de vie et financés par le secteur public
Ministère de la Santé et des Soins de longue durée
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Produits pharmaceutiques | Soins de base
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RLISS des régions
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Action cancer Ontario | Maisons de soins palliatifs
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Les médicaments à l’hôpital sont pris en charge par l’Assurance-santé de l’Ontario.
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Le MSSLD finance et contrôle la plupart des soins de base, soit les soins dispensés en « première intervention » par les équipes de santé familiale notamment.
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Le MSSLD finance les 14 RLISS.
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Action cancer Ontario contrôle les soins de cancérologie et de néphrologie par le biais de 14 programmes régionaux.
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Le MSSLD finance les maisons de soins palliatifs, dont beaucoup reçoivent des fonds privés.
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Les personnes admissibles peuvent recevoir certains médicaments en ambulatoire dans le cadre de programmes tels que le Programme de médicaments de l’Ontario.
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Les RLISS financent et surveillent les centres d’accès aux soins communautaires, qui achètent des services de soins à domicile – soins palliatifs, relève — et facilitent l’accès à ceux-ci. Les centres fixent les critères d’admissibilité et coordonnent le placement en foyer de soins de longue durée.
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Les RLISS financent et contrôlent les hôpitaux, dont les services de soins palliatifs et les équipes de consultation.
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Les RLISS financent des services de soutien communautaire, dont les soins palliatifs itinérants, la formation des personnels infirmiers à la gestion de la douleur et des symptômes, les programmes de jour.
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Les RLISS financent les soins de longue durée.
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Quelques RLISS ont mis en place différents réseaux de soins palliatifs qui sont liés au niveau provincial.
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Réseau ontarien des soins palliatifs
- Direction (RLISS, Action cancer Ontario, QSSO, QHPCCO)
- Secrétariat
- Conseils consultatifs
- Réseau régional des soins palliatifs (pour chacune des 14 régions sanitaires)
C. Les soins palliatifs
1. Définition
L’expression « soins palliatifs » désigne à la fois la conception des soins et la grande variété des services dispensés en vue de concrétiser la conception pour les personnes et la société.
Le fait de parler de « conception des soins palliatifs » exprime qu’il s’agit d’une conception générale des soins, fondée sur des postulats, des valeurs et des principes.
Selon l’Organisation mondiale de la santé par exemple, les soins palliatifs « améliorent la qualité de vie des patients et des familles confrontés à une maladie engageant le pronostic vital […] »[171], entre autres caractéristiques. En Ontario, le MSSLD, les RLISS et Quality Hospice Palliative Care Coalition of Ontario leur donnent la définition qui suit.
Les soins palliatifs sont une philosophie de soins qui vise à soulager la souffrance et à améliorer la qualité des derniers moments de vie et le processus entourant la mort. Nous tentons à travers eux d’aider les personnes et les familles à :
- dissiper les problèmes physiques, psychologiques, sociaux, spirituels et pratiques, mais aussi les attentes, les besoins, les espoirs et les craintes qui y sont associés;
- se préparer pour affronter et gérer les choix de fin de vie et le processus entourant la mort;
- surmonter la perte et le chagrin en période de maladie et de deuil;
- traiter tous les problèmes courants et prévenir l’apparition de nouveaux problèmes;
- promouvoir les occasions de vivre des expériences significatives et utiles, le développement personnel et spirituel et la réalisation de soi.
Les personnes qui ont besoin de soins palliatifs sont celles pour qui le point de mire des soins réside en grande partie (mais peut-être pas entièrement) dans le soulagement et la prévention de la souffrance et l’amélioration de leur qualité de vie et de leur confort[172].
Cette conception est mise en pratique : la dimension « service » des soins palliatifs s’entend des services médicaux, sociaux et juridiques et des mesures de soutien dont bénéficient réellement les personnes au quotidien – traitements, conversations visant à faciliter le consentement aux soins et leur planification préalable, activités sociales, counselling. Ces services peuvent être dispensés par des prestataires qui exercent en autonomie ou en équipe dans les différents établissements de soins susmentionnés, dont les suivants :
- foyers privés,
- foyers de soins de longue durée,
- maisons de retraite,
- hôpitaux,
- maisons de soins palliatifs,
- programmes de jour.
L’établissement de soins, les services et les mesures de soutien dépendront des besoins particuliers de la personne, mais idéalement, la façon de la soigner sera conforme aux objectifs que les soins palliatifs visent à obtenir.
2. Origines et évolution des soins palliatifs
i. Début du mouvement en leur faveur et participation des pouvoirs publics
En Ontario, la prestation de soins palliatifs en tant que service public a résulté de l’engagement militant de prestataires de soins et d’organismes communautaires[173]. Depuis les années 1960, les soins palliatifs ont progressivement et de plus en plus retenu l’attention de la population et celle des pouvoirs publics, pour en arriver à faire partie intégrante du système de santé.
Les années 1970 et 1980 ont été les années « fondatrices » du mouvement pour les soins palliatifs en Ontario[174]. La première maison communautaire de soins palliatifs a été ouverte en 1979, un institut de recherche et de formation a été fondé en 1983, et à la fin des années 1980, il y avait deux organisations provinciales de maisons de soins palliatifs (devenues par la suite Hospice Palliative Care Ontario)[175]. D’importants centres d’excellence comme le Temmy Latner Centre for Palliative Care ont vu le jour à cette époque, de même que d’intéressants programmes de soins palliatifs à domicile[176].
Quand les soins palliatifs ont commencé à se développer, ils étaient destinés aux personnes dont la maladie était en phase terminale, le cancer surtout, puis ils ont progressivement concerné davantage de maladies[177]. À leurs débuts toutefois, les services de soins palliatifs ont reflété les exigences dues à des difficultés locales – il s’agissait surtout de programmes isolés, établis par des militants communautaires là où ils et elles travaillaient.
L’engagement des autorités fédérales et provinciales vis-à-vis des soins palliatifs s’est accru à partir des années 1990[178]. L’engagement de l’Ontario en 1992 de financer les soins palliatifs communautaires a été un jalon marquant du mouvement, même s’il [traduction] n’a pas été étroitement coordonné ni diffusé dans la province »[179]. Par ailleurs, quand le Sénat du Canada a entamé une série de rapports sur les soins palliatifs, il les a placés sur la scène nationale dans les années 1990[180].
En 2005, l’Ontario a lancé pour trois ans la Stratégie d’amélioration des soins en fin de vie, qui visait à faire dispenser les soins de fin de vie au domicile, et non plus en établissement de soins de courte durée, et à renforcer la coordination de la prestation des services[181]. Le financement des prestataires communautaires et la mise en place de « réseaux » de soins palliatifs dans quelques-uns des RLISS sont des éléments importants de la stratégie[182]. Tous les RLISS n’ont pas établi de réseau, et tous ne fonctionnent pas avec le même degré de représentation et de participation. Les réseaux en place, liés au niveau provincial, rassemblent des personnes et des organismes s’intéressant aux soins palliatifs en vue de favoriser leur intégration[183].
Selon une évaluation de la Stratégie d’amélioration des soins en fin de vie, celle-ci a eu quelques conséquences positives, tout en présentant des difficultés. Plus de patients ont été pris en charge par exemple, et la stratégie a peut-être permis de définir plus largement les critères; en revanche, [traduction] « les patients n’ont pas utilisé plus de soins à domicile ou moins de soins de courte durée après la mise en place de la Stratégie »[184]. Et elle n’a pas établi de cadre réglementaire général pour les soins palliatifs, si l’on met de côté la création de la gestion par réseau au niveau des RLISS.
ii. Entente sur la Déclaration de partenariat
En 2011, constatant que « le fossé à combler est énorme » dans la prestation des services, le MSSLD, les RLISS et QHPCCO se sont entendus pour formuler une vision commune « pour offrir un accès équitable à des soins palliatifs et à un soutien sûrs, complets et de haute qualité aux personnes et à leurs familles dans l’ensemble de la province. »[185]
Le document produit, Améliorer la qualité et la valeur des soins palliatifs en Ontario – Déclaration de partenariat et d’engagement à l’action (Déclaration de partenariat) permet notamment d’élaborer une définition cohérente des soins palliatifs, de s’entendre sur des valeurs et des principes de base et de formuler un modèle de prestation de services.
La Déclaration de partenariat affirme que les soins palliatifs peuvent renforcer d’autres types de soins analeptiques et de réadaptation, que leur prestation la plus efficace se fait en équipe et qu’il conviendrait de les intégrer à de multiples niveaux au cadre réglementaire ontarien – aux échelons clinique, organisationnel et général.
Importante pour le projet de la CDO, la Déclaration reprend une méthode ouverte en vue de repérer les personnes susceptibles de bénéficier de soins palliatifs. Ceux-ci « se prêtent à toute personne et à toute famille touchées ou risquant d’être touchées par une maladie compromettant le pronostic vital, du moment qu’elles sont prêtes à accepter ce type de soins et de soutien »[186].
La Déclaration met en rapport gestion de la maladie chronique et soins palliatifs, de sorte qu’il y ait coordination de la planification pendant la maladie et pendant le vieillissement. Selon le modèle de prestation de services qu’elle propose, il faut « définir clairement, dans chaque milieu où des personnes viennent mourir, un programme de soins fondé sur une philosophie et une approche adaptées aux soins palliatifs »[187].
En somme, la Déclaration de partenariat constitue la vision la plus complète et la plus ambitieuse des soins palliatifs qui a été exprimée en Ontario jusqu’à présent.
En 2012, pour donner suite à la Déclaration, un comité directeur[188] a été formé, auquel ont siégé notamment des représentants de l’Ontario, des RLISS, des CASC, d’Action cancer Ontario, des associations professionnelles, des hôpitaux et des organismes communautaires[189]. Il a tenu plusieurs réunions, et a délégué des travaux à entreprendre à son Conseil clinique et à des groupes de travail, dont certains ont rendu des rapports d’experts[190].
En dépit de ces mesures initiales, l’enquête sur l’état des soins palliatifs que la vérificatrice générale de l’Ontario a rendue publique en décembre 2014 a montré que « trois ans après sa publication, il reste un travail important à faire pour concrétiser la plupart des engagements de la Déclaration […] »[191].
La vérificatrice générale a souligné qu’en Ontario, les services ont évolué « de façon disparate », là où se trouvaient les militants. « Il en résulte que, malgré les efforts déployés pour créer un système intégré et coordonné […], un tel système n’a pas encore vu le jour »[192]. Elle a constaté en particulier que l’Ontario n’a pas de critères normalisés pour l’admissibilité aux services, ni de procédure commune pour repérer les patients, ni d’accès équitable aux soins palliatifs dans les régions sanitaires, ni de vulgarisation auprès des Ontariens.
La vérificatrice générale a proposé dans ses recommandations la conception d’un cadre stratégique approuvé par le gouvernement :
[l]es engagements de la Déclaration de partenariat doivent […] être liés à un cadre stratégique devant être approuvé par le gouvernement. Ce cadre pourrait exposer l’orientation et le financement nécessaires pour appuyer la mise en œuvre des engagements[193].
iii. Proposition de stratégie provinciale et Réseau ontarien de soins palliatifs
En novembre 2014, pendant la préparation du rapport de la vérificatrice générale, le ministre de la Santé et des Soins de longue durée a chargé son adjoint parlementaire, John Fraser, de mener l’élaboration d’une stratégie pour les soins palliatifs. Il l’a aussi chargé d’augmenter les maisons de soins palliatifs, de façon à doubler ou presque le nombre des lits dans la province[194]. Pendant plusieurs mois, John Fraser a tenu 16 tables rondes avec des douzaines de personnes, d’organismes et de maisons de soins palliatifs[195]. Il a rendu compte des résultats de ses consultations dans le Rapport des tables rondes provinciales sur les soins palliatifs et en fin de vie (rapport Fraser).[196]
Le rapport Fraser a été publié en mars 2016 en même temps que l’annonce par la province de l’augmentation des crédits dans son budget en vue de renforcer les soins palliatifs communautaires[197].
Le rapport Fraser confirme l’essentiel de ce qui avait été précédemment constaté dans la Déclaration de partenariat et dans le rapport de la Vérificatrice générale sur l’état des soins palliatifs en Ontario. Il constate en outre de nouveaux éléments qui intéressent le projet de la CDO et sur lesquels celle-ci s’appuie dans le présent document de travail, en particulier :
- les familles et les aidants jugent qu’il est difficile de s’orienter dans le système de santé;
- des groupes divers – collectivités rurales et du Nord, Francophones, groupes culturels, Autochtones — font face à des obstacles particuliers pour avoir accès aux soins palliatifs;
- les foyers de soins de longue durée devraient faire partie du système des soins palliatifs[198];
- il faudrait améliorer les mesures de soutien aux aidants;
- il faudrait renforcer la vulgarisation et la sensibilisation.
- La CDO examine ces questions dans les chapitres qui suivent.
Parallèlement à la publication du rapport Fraser, le gouvernement a annoncé le lancement du Réseau ontarien de soins palliatifs, à l’échelon provincial, qui rassemble divers partenaires en vue de mener la mise en place de soins palliatifs de qualité égale dans toute la province[199].
Réseau ontarien de soins palliatifs
Partenariat organisé d’intervenants communautaires, de prestataires de services de santé et de planificateurs de système de santé, le ROSP a été chargé d’élaborer dans la province un mode coordonné et normalisé de prestation des soins palliatifs. Il exerce les fonctions suivantes :
- conseil principal auprès du gouvernement ontarien,
- responsabilité des actions d’amélioration de la qualité, de la mesure des données et du rendement, et de la coordination entre les niveaux du système,
- soutien de la mise en œuvre dans les régions.
La structure de gestion du ROSP est complexe : un organe de surveillance, auquel sont représentés les RLISS, Quality Hospice Palliative Care Coalition of Ontario, Action cancer Ontario et QSSO; plusieurs comités consultatifs, travaillant aux sujets suivants : améliorations cliniques, données et renseignements, mise en œuvre et partenariats communautaires (représentation de divers prestataires, établissements, régions et groupes de patients); et un secrétariat, qui assure le soutien des activités de fonctionnement et tactiques et de façon générale, l’exécution du mandat du ROSP.
Des réseaux régionaux de soins palliatifs sont en voie de création dans la structure du ROSP pour les 14 régions sanitaires. Dans chacune de celles-ci, le directeur du RLISS et le vice-président du programme régional de lutte contre le cancer surveilleront conjointement les réseaux afin de garantir que la planification et la mise en œuvre correspondent aux normes du ROSP pour la province.
Le ROSP s’appuie sur les institutions existantes. Les prestataires continueront donc de dispenser des soins palliatifs par le biais du RLISS, du MSSLD et d’Action cancer Ontario, en conformité toutefois avec les nouvelles normes provinciales.
Figure 3 Chronologie des initiatives prises récemment par l’Ontario pour les soins palliatifs | |
2005 | L’Ontario lance la Stratégie d’amélioration des soins en fin de vie (terminée en 2008) |
2011 | Le MSSLD, les RLISS et QHPCCO publient Améliorer la qualité et la valeur des soins palliatifs en Ontario – Déclaration de partenariat et d’engagement à l’action |
2014 | La vérificatrice générale de l’Ontario publie un examen des soins palliatifs, et demande des améliorations, y compris un cadre stratégique qui soit approuvé par le gouvernement |
2014 | Le ministre de la Santé et des Soins de longue durée charge le député John Fraser de soutenir l’élaboration d’une stratégie pour les soins palliatifs et de surveiller l’expansion des maisons de soins palliatifs |
2016 |
Le MSSLD annonce des mesures visant à améliorer les soins palliatifs, notamment :
· mise en place du Réseau ontarien de soins palliatifs · investissement proposé de 75 000 000 $ sur trois ans · publication du Rapport des tables rondes provinciales sur les soins palliatifs et en fin de vie (rapport Fraser) |
iv. Actions non gouvernementales en cours
Le partenariat avec HPCO en vue de former les bénévoles des soins palliatifs est aussi un moyen par lequel le gouvernement ontarien s’est récemment engagé pour l’amélioration les soins palliatifs[200]. Au-delà des actions qu’il soutient, dont celle-ci, des organismes communautaires, des ordres de réglementation et des ordres professionnels ont donné l’exemple dans ce domaine et élaborent de façon indépendante des programmes et des ressources.
L’Association des infirmières et infirmiers autorisés de l’Ontario et l’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario ont par exemple rédigé des orientations et des directives de pratique pour les prestataires[201]. L’Ontario Medical Association a mis en place une stratégie relative à la fin de vie et publié des documents d’orientation[202]. HPCO propose des possibilités fort diverses de formation pour tous les aspects des soins palliatifs, et est à l’origine d’un groupement de praticiens pour le consentement aux soins de santé et la planification préalable des soins[203].
Étant donné l’importance des actions non gouvernementales dans le domaine, des publications connexes et des documents provinciaux majeurs sont énumérés à la Figure 4 ci-dessous.
Figure 4 Documents essentiels pour les soins palliatifs en Ontario |
Modèle de soins palliatifs : Fondé sur les normes de pratique et principes nationaux (Association canadienne de soins palliatifs, version révisée et condensée 2013) |
Améliorer la qualité et la valeur des soins palliatifs en Ontario Déclaration de partenariat et d’engagement à l’action (MSSLD, RLISS, QHPCCO, 2011) |
Rapport des tables rondes provinciales sur les soins palliatifs et en fin de vie (MSSLD, 2016) |
End-of-Life Care During The Pas Days and Hours (guide de pratique clinique de l’AIIAO, 2011) |
Planning for and Providing Quality End-of-Life Care (ligne directrice de l’OMCO, 2015) |
End of Life Strategy Framework (Ontario Medical Association, 2014) |
Health Care Consent Advance Care Planning Community of Practice Glossary (HPCO, 2016) |
Priorité aux patients : Plan d’action en matière de soins de santé (MSSLD, 2015) |
3. Nouvelles orientations : les soins palliatifs selon l’optique de santé publique
i. Introduction
Modèle théorique qui complète les principaux préceptes des soins palliatifs, l’optique de santé publique vise à faire en sorte que ceux-ci soient considérés dans l’intérêt public pris au sens large.
Il a été conseillé à la CDO lors des consultations d’envisager que l’optique de santé publique soit le prochain stade de la théorie évolutive des soins palliatifs. Il lui est apparu toutefois dans son étude que l’optique elle-même est toujours à se construire et donc, difficile à étudier. Les spécialistes reconnaissent d’ailleurs « l’ampleur », « l’ambiguïté » et « l’imprécision » de ce nouveau domaine[204] – et les renseignements à la disposition de ses partisans, des chercheurs et de la CDO elle-même sont limités.
On dégage ci-après les principaux éléments de l’optique de santé publique à partir des documents publiés. La CDO pose ensuite des questions qui à son avis ont besoin de précisions, surtout dans la conclusion, et en particulier, comment cette optique pourrait se concrétiser au plan de la réforme du droit.
ii. L’optique de santé publique – les grandes lignes
L’optique de santé publique se fonde, de façon généralement analogue aux soins palliatifs, sur le « constat que les modèles traditionnels de prestation des soins de santé sont limités »[205]. Les soins axés sur la personne et sur la famille, la participation de travailleurs généralistes (prestataires des soins de base, travailleurs sociaux, préposés aux services de soutien à la personne), l’accès équitable pour l’ensemble de la population sont quelques-uns des principes communs à cette optique et aux stratégies des soins palliatifs[206].
L’optique de santé publique se distingue toutefois en ce qu’elle s’attache aux aspects sociaux des soins : elle vise à les intégrer dans la vie ordinaire, et pour ce, à augmenter la sensibilisation et à favoriser des attitudes saines vis-à-vis de la mort et de l’agonie ainsi que la participation de la collectivité[207]. Elle est critique des soins palliatifs axés sur des « services à l’hôpital, ambulatoires, à domicile, sans intervention de la collectivité »[208].
L’optique de santé publique recoupe des actions que qualifient les expressions « collectivités bienveillantes », « villes bienveillantes », « soins palliatifs favorisant la santé »[209]. Diverses administrations ont intégré à leurs stratégies ces actions qui se multiplient depuis plusieurs dizaines d’années, parallèlement au mouvement pour les soins palliatifs[210].
Parmi les objectifs majeurs de ces actions qui se dégagent des publications (sans recouper les récents modèles de soin palliatif), il y a les deux suivants :
- renforcement des capacités des collectivités et participation de celles-ci,
- sensibilisation et formation concernant la mort et l’agonie.
Ces deux objectifs majeurs de l’optique de santé publique sont discutés ci-après.
iii. Renforcement des capacités des collectivités et participation de celles-ci
Comme on l’a vu précédemment, les progrès des soins palliatifs sont d’abord survenus dans les collectivités, avec le développement des maisons de soins palliatifs et d’autres soins d’excellence. L’optique de santé publique vise à s’appuyer sur ces réussites acquises au niveau local et à susciter davantage de participation des collectivités, avec le soutien de l’État.
La justification de la participation des collectivités se fonde sur plusieurs principes. De par l’orientation sociale de l’optique, elle considère avant tout que la responsabilité des mourants et des personnes qui les accompagnent est certes celle de l’État, mais aussi celle des groupes proches – voisins, lieux de travail, écoles, entreprises locales notamment[211].
Il faut souligner que la notion de « responsabilité communautaire » ne doit pas passer pour un délestage de responsabilités sur les collectivités afin de minimiser la participation de l’État et d’obtenir certains résultats. La participation des collectivités, du point de vue de la santé publique, peut se comprendre au contraire comme un « modèle d’habilitation », qui renforce la capacité des collectivités de mettre au point des réponses pour s’occuper de leurs membres[212].
Selon le professeur Allan Kellehear, qui a fondé les soins palliatifs favorisant la santé, l’isolement social, l’éclatement familial, la perte prématurée de l’emploi, les difficultés financières sont parmi les problèmes qu’éprouvent les personnes dont la maladie limite l’espérance de vie[213]. Selon lui, nombre de ces problèmes « ne sont pas facilement traités par les services de santé »[214]. Il allègue de plus que les services de soins palliatifs ont dû se battre pour obtenir de soutenir les familles et les amis dans leur deuil[215].
Les familles partagent depuis longtemps avec le système de santé la responsabilité de s’occuper des personnes en fin de vie. Or, les partisans de l’optique de santé publique font valoir que les membres de la collectivité ont aussi un rôle à jouer pour aborder ces défis. Selon le professeur Kellehear, « la santé de chacun est la responsabilité de tous »[216].
Selon le professeur Kellehear et d’autres militants, le sens de l’optique de santé publique est de permettre aux collectivités de veiller aux aspects sociaux des soins palliatifs (nourriture, transport, présence par exemple), ce qui vient en supplément des soins cliniques prévus dans le système de santé. Selon eux, la participation des collectivités
[traduction] permet d’assurer en arrière-plan un degré continu de soutien que l’on adapte aux besoins spécifiques dans la collectivité, à partir duquel des interventions professionnelles distinctes peuvent se faire[217].
Exemples de renforcement des capacités des collectivités et de participation de celles-ci |
Il existe, en Ontario notamment, de nombreux exemples de renforcement des capacités des collectivités et de participation de celles-ci aux soins palliatifs. En Ontario, des actions locales qui ont vu le jour à la base, aux côtés du mouvement pour les soins palliatifs, se sont développées et s’identifient aux « collectivités bienveillantes » dans notamment les groupements de praticiens des collectivités bienveillantes de Pallium Canada à l’échelon national, et de HPCO à l’échelon provincial[218].
Le projet de Windsor-Essex est un bon exemple. Il comporte notamment la mobilisation des réseaux de jeunes et de personnes âgées, des réseaux religieux, culturels et non structurés en vue de susciter le bénévolat; un service téléphonique pour conseiller dans les situations de détresse; la formation de réseaux de soins pour les personnes en fin de vie qui sont atteintes de démence ou ont besoin de soutien dans leurs activités quotidiennes. Il fonctionne en partenariat avec les RLISS et avec des ministères et des organismes aux échelons fédéral, provincial, municipal et à celui des comtés[219]. Des collectivités bienveillantes ont suscité une attention et un soutien considérables dans d’autres pays de common law – Angleterre, Australie, Écosse. En Australie, une association nationale pour les soins palliatifs a publié un guide pour les prestataires locaux de services de santé, qui vise à favoriser le développement des collectivités et la formation dans celles-ci[220]. Grâce à son programme « Caring Communities », le ministère fédéral de la santé et du vieillissement a financé plusieurs actions locales[221]. Des administrations locales utilisent une « charte des villes bienveillantes » pour aider celles-ci à formuler et à atteindre des objectifs connexes[222]. La charte témoigne de l’engagement de la ville de veiller à ce que les institutions de son ressort – écoles, lieux de travail, groupes confessionnels, établissements de détention, refuges — soutiennent le bien-être pendant la mort et l’agonie[223]. En Ontario, Windsor-Essex a créé son propre projet avec sa charte et sa déclaration de valeurs[224]. |
Il est à noter que les tenants de la participation des collectivités revendiquent que celle-ci favorise particulièrement les groupes marginalisés et défavorisés[225]. L’optique de santé publique a été proposée par exemple comme cadre visant les « personnes âgées » et favorisant la participation et l’autonomie de celles qui sont en fin de vie[226]. La mobilisation des collectivités a été employée dans quatre collectivités ontariennes des Premières Nations pour permettre à leurs prestataires de soins de créer des programmes de soins palliatifs culturellement adaptés, conçus et contrôlés au niveau local[227].
Puisque l’optique de santé publique est axée sur le renforcement des capacités des collectivités et la participation de celles-ci, la CDO souhaite en apprendre davantage sur la façon dont les cadres juridiques pourraient permettre à des membres des collectivités de prendre part d’eux-mêmes aux soins palliatifs, sans être motivés par le profit.
iv. Sensibilisation et vulgarisation
La sensibilisation et la vulgarisation constituent le deuxième aspect majeur de l’optique de santé publique pour les soins palliatifs.
En Ontario, les soins palliatifs sont peu connus[228]. Le manque de connaissance ou les idées fausses peuvent gêner l’accès aux services et aux mesures de soutien. Selon le rapport de la vérificatrice générale, qui a reconnu ce lien entre vulgarisation, sensibilisation et accès aux soins,
- [p]our aider les patients qui pourraient bénéficier de soins palliatifs, plus de gens doivent savoir ce que l’on entend par soins palliatifs, quels services existent dans la collectivité et comment y accéder. Autrement, il est possible que des patients souffrent inutilement parce qu’ils ne reçoivent pas de soins palliatifs au bon moment [….][229].
Des participants aux consultations menées par John Fraser ont également évoqué les idées fausses qui ont cours à propos des soins palliatifs, considérés comme un service de dernier recours, quand « il n’y a plus rien à faire » [230]. « Trop de gens pensent que les soins palliatifs ne servent qu’à aider les patients à mourir dans le confort, plutôt qu’à les aider à vivre mieux et plus longtemps »[231].
L’optique de santé publique témoigne de la nécessité de mieux comprendre les soins palliatifs, et s’attache plus précisément à celle de transformer la façon dont sont perçus la mort, l’agonie, la perte et le deuil.
L’optique de santé publique vise surtout à promouvoir des comportements sains, qui affirment la vie, à propos des expériences humaines ordinaires que sont la mort et le deuil[232]. Elle lutte donc contre les pratiques qui « nient la mort » et sont susceptibles d’amener [traduction] « beaucoup de personnes, et les êtres qui leur sont chers, à ne pouvoir ni discuter ouvertement leurs préférences et leurs priorités de soins et de mort, leurs opinions sur le don d’organe, ni préparer leur testament, ni planifier leurs funérailles, ou même à refuser le tout[233].
Lors de ses consultations, la CDO a entendu de nombreux avis similaires. On lui a ainsi indiqué qu’il faut en faire plus pour garantir la dignité des patients et celle des personnes qui les accompagnent, en les aidant à comprendre les conséquences de leur situation et les options à leur disposition. Ceci leur permettrait peut-être de participer activement au parcours de leur propre vie. On a aussi indiqué que de grands messages de santé publique pour l’Ontario constitueraient un revirement vis-à-vis de la mort, de l’agonie, de la perte et du deuil[234].
La participation des collectivités est l’un des nombreux moyens par lesquels l’optique de santé publique vise à sensibiliser davantage[235]. Au nombre des autres moyens, citons la lutte contre les comportements négatifs dans les programmes scolaires, dès la petite enfance[236], la sensibilisation des prestataires de soins généralistes (médecins de famille, infirmiers des soins primaires par exemple) au repérage des personnes susceptibles de bénéficier de soins palliatifs, et le fait d’encourager les conversations ouvertes avec les personnes, les familles et les prestataires sur le consentement aux soins de santé et la planification préalable des soins[237].
v. Intégrer l’optique de santé publique aux cadres du droit
Le cadre réglementaire de la planification et de la prestation des soins de santé a été résumé au début du présent chapitre. La CDO s’interroge dans son projet sur la façon dont l’optique de santé publique pour les soins palliatifs s’inscrirait dans ce cadre, dans le cas où elle serait jugée bénéfique pour les Ontariens. Cette question centrale suscite plusieurs pistes d’interrogation.
La CDO se demande ainsi si les partisans de cette optique cherchent à remplacer les modèles de soins palliatifs par quelque chose de radicalement différent, ou bien à compléter les principaux modèles par des mesures publiques améliorées qui appuient la participation des collectivités et la vulgarisation. Elle souhaite en savoir plus sur ce que l’une et l’autre de ces possibilités entraîneraient pour les lois, les orientations, les financements et la prestation des services.
Le MSSLD et les RLISS mènent pour l’instant des actions de participation des collectivités et de vulgarisation. Il se peut que des actions locales pour les soins palliatifs – maisons de soins palliatifs, services de soutien communautaire (bénévoles pour les soins palliatifs itinérants, programmes de jour, formation à la gestion de la douleur et des symptômes par exemple) – correspondent déjà au modèle des collectivités bienveillantes. On peut considérer que de telles actions amalgament l’organisation ascendante des membres des collectivités et le soutien descendant des autorités.
Qui plus est, le rapport Fraser met en évidence des observations dans lesquelles des intervenants souhaitent des modèles communautaires novateurs ainsi que des actions renforcées de sensibilisation et vulgarisation[238]. Le RLISS de Erie St. Clair a clairement reconnu dans son plan stratégique régional des soins palliatifs l’optique de santé publique, et le renforcement des capacités des collectivités, de la participation de celles-ci et de la sensibilisation[239].
En tenant compte de ces actions en cours, la CDO se demande si le fait d’accroître le soutien public à celles-ci répondrait aux aspirations à l’instauration de l’optique de santé publique.
La CDO est également au fait que les militants du domaine cherchent à relier directement les soins palliatifs au système de la santé publique[240].
En Angleterre et en Écosse, des politiques publiques sur les soins palliatifs ont souhaité des partenariats entre les soins palliatifs et le système de santé publique[241]. En outre, le Public Health Network écossais a publié un rapport recommandant notamment que le système de la santé publique expose les fonctions des spécialistes de la santé publique dans le contexte des soins palliatifs[242].
Pour l’instant, la CDO n’a pas été en mesure de déterminer le degré de réussite de ces actions concrètes. Elle s’interroge d’ailleurs sur le degré de pertinence de ces comparaisons dans le contexte du système ontarien de santé publique.
On a déjà indiqué que le MSSLD finance et surveille Santé publique Ontario. Selon le MSSLD, « la santé publique vise avant tout à assurer la santé et le bien-être de l’ensemble de la population grâce à la promotion et à la protection de la santé et à la prévention des maladies. »[243] Les programmes et les services de santé publique visent à tenir compte des déterminants de la santé – revenu, réseaux de soutien social, études, conditions de travail, capacités personnelles d’adaptation – et à réduire les inégalités sanitaires[244].
Le système de santé se préoccupe avant tout de promouvoir la santé et de prévenir les maladies chroniques, par la sensibilisation et le renforcement des capacités des partenaires communautaires – municipalités, écoles, lieux de travail[245] — qui tous pourraient apporter leur expérience pertinente à des actions similaires touchant les soins palliatifs.
Cependant, une grande partie du travail de la santé publique en Ontario porte sur des questions très éloignées des principes et des méthodes des soins palliatifs – préparation aux situations d’urgence, normes relatives à la sécurité environnementale, prévention et contrôle des maladies infectieuses[246].
Qui plus est, des institutions de santé publique sont tout à fait à part du régime général de la santé. Selon la Loi sur la protection et la promotion de la santé, les programmes et les services sont gérés par 36 conseils de santé locaux, et dispensés dans des circonscriptions sanitaires qui disposent de personnel spécialement qualifié. Par ailleurs, les municipalités sont des partenaires importants pour le financement et la gestion de la santé publique[247].
Étant donné la conception particulière et le mandat du système de la santé publique en Ontario, il faut disposer de plus d’informations pour comprendre ce que les militants proposent. La CDO souhaite en apprendre davantage sur ce qui, selon eux, serait nécessaire et ce qui serait gagné, si la santé publique devait participer à la planification et à la prestation des soins palliatifs en Ontario.
4. Questions à aborder dans le projet
Il ressort clairement de la discussion précédente que le cadre réglementaire ontarien pour les soins palliatifs est en évolution. Selon des sources fiables, le régime ontarien des soins palliatifs manque de coordination et éprouve des difficultés pour les services à certaines populations – ce qui a engendré des inégalités d’accès aux soins. Le MSSLD agit pour relever ces défis, avec de nouveaux investissements et la mise en place du ROSP, réseau provincial destiné à coordonner et à améliorer les soins palliatifs dans l’ensemble de la province.
Comme on l’a déjà indiqué, la CDO évite dans le projet d’étudier des questions faisant partie des priorités du MSSLD et du ROSP. Les principales questions qui de ce fait ne sont pas abordées sont les suivantes :
- la coordination institutionnelle,
- la formation des prestataires de soins,
- l’amélioration générale des services et des soutiens ontariens de soins palliatifs.
La CDO aborde néanmoins dans le projet des questions sur l’élaboration du cadre réglementaire ontarien, qui complètent les travaux du MSSLD et du ROSP.
Elle veut aborder notamment les préoccupations des groupes ayant des besoins non satisfaits, afin que soit garantie l’équité de l’accès aux soins indépendamment de l’âge, de l’orientation et de l’identité sexuelle, des capacités et du lieu de résidence (chapitre 5). Elle étudie les prestations pour les aidants, les familles et les amis (5.D.1), ainsi que les services d’orientation qui pourraient aider les personnes qui passent d’un établissement de santé à un autre (chapitre 7).
Le présent chapitre a présenté diverses options d’intégration de l’optique de santé publique au cadre juridique ontarien. Une question à cet égard est posée en fin de chapitre en 1. Questions à discuter.
D. Le processus décisionnel pour les soins de santé
1. Consentement éclairé et planification préalable des soins
Quand il s’agit de faire des choix pour dispenser des traitements – palliatifs ou autres, les lois qui encadrent la prise de décision forment une partie essentielle des soins de fin de vie
Le cadre juridique ontarien concernant le consentement éclairé et la planification préalable des soins a pris forme consécutivement à la réforme monumentale de la fin des années 1980 et du début des années 1990[248]. Vaste, complexe et nuancé, le régime qui en a résulté reflète le principe de dignité et celui d’intégrité, et met en équilibre d’autres principes, susceptibles d’entrer en opposition quand des choix importants sont faits à propos des soins, touchant l’autonomie par exemple ou la protection contre le préjudice.
Deux lois sont au centre du régime ontarien :
- la Loi de 1992 sur la prise de décisions au nom d’autrui traite des décisions relatives à la gestion des biens et au soin de la personne, et prévoit les procédures de nomination et les obligations du tuteur et celles des mandataires;
- la Loi de 1996 sur le consentement aux soins de santé traite du consentement au traitement, de l’admission en foyer de soins de longue durée, et des services d’aide personnelle pour les personnes qui y vivent.
La CDO approfondit ces deux lois dans son projet sur la capacité juridique, la prise de décision et la tutelle. Le projet sur l’amélioration des derniers moments de la vie aborde quant à lui des questions précises qui surgissent souvent au moment de prendre des décisions pour les soins en fin de vie. Pour traiter ces questions précises, il faut en premier lieu énoncer les principaux éléments du cadre ontarien, que l’on résume ci-après : capacité et consentement éclairé, prise de décision au nom d’autrui, planification préalable des soins et plans de traitement.
i. Capacité et consentement éclairé
La capacité et le consentement éclairé sont l’essence du cadre juridique ontarien touchant la prise de décision pour les soins. La personne capable a le droit de décider par elle-même et est tenue responsable de ses décisions. En revanche, il se peut que celle qui a été reconnue incapable de décider dans un domaine particulier ou pour une décision en particulier perde le droit de prendre des décisions corrélatives : d’autres personnes seront responsables de décider à sa place et pourront répondre de la façon dont elles auront décidé[249].
La loi impose aux prestataires de soins d’obtenir le consentement éclairé de la personne capable ou du mandataire spécial avant d’administrer des traitements, sauf s’il y a urgence[250]. C’est-à-dire qu’ils ne peuvent prendre des décisions relatives aux traitements au nom du patient, sauf si une situation d’urgence l’exige.
Aux termes de la LCSS, « traitement » s’entend « de tout ce qui est fait dans un but thérapeutique, préventif, palliatif, diagnostique ou esthétique, ou dans un autre but relié au domaine de la santé, y compris une série de traitements, un plan de traitement ». La LCSS prévoit quelques exceptions[251].
Étant donné que la détermination de la capacité touche le droit à l’autonomie, la LCSS prévoit précisément la présomption de la capacité de décider par soi-même à l’égard des traitements[252]. Et le droit qu’ont notamment les prestataires de soins de s’appuyer sur la présomption de capacité d’une personne, sauf s’ils ont des motifs raisonnables de croire que celle-ci est incapable, vient renforcer la présomption[253].
La loi prévoit le critère que doivent employer les prestataires de soins ayant à évaluer la capacité d’un patient. Selon ce critère, couramment appelé « comprendre et évaluer », la personne doit pouvoir comprendre l’information propre à la décision à prendre, puis apprécier les conséquences raisonnablement prévisibles de la décision (ou de l’absence de décision)[254].
Ce critère est fondé sur les exigences fonctionnelles propres à la décision en cause, et non sur un diagnostic en particulier, sur le résultat des décisions du patient ou sur une appréciation théorique des capacités[255]. De plus, il se peut que le patient ait la capacité de prendre certaines décisions, mais d’autres non, et que cette capacité varie dans la durée[256]. Il se peut par exemple que la personne en fin de vie qui éprouve des pertes momentanées de conscience du fait de sa maladie ou de ses médicaments puisse prendre des décisions à l’égard de son traitement à certains moments, mais pas à d’autres.
Les éléments suivants doivent coexister pour qu’il y ait consentement au traitement : le consentement doit porter sur le traitement en cause, il doit être éclairé, être donné volontairement et ne pas être obtenu au moyen d’une déclaration inexacte ni par fraude. La LCSS prévoit que pour donner son « consentement éclairé », la personne doit avoir reçu des renseignements sur la nature, les effets bénéfiques prévus, les risques importants, les effets secondaires importants du traitement, et sur les autres mesures possibles et les conséquences vraisemblables de l’absence de traitement. Il faut de plus que la personne ait reçu des réponses à ses demandes de renseignements supplémentaires concernant ces questions[257].
Dans les cas où l’incapacité d’un patient a été constatée et qu’une décision doit être prise, le mandataire spécial sera autorisé à décider à la place de celui-ci.
ii. Prise de décision au nom d’autrui
L’expression générique « mandataire spécial » désigne la personne autorisée à décider au nom d’autrui. Dans le contexte du projet de la CDO, il s’agit de la personne autorisée à consentir ou à refuser de consentir au traitement, au nom d’une autre personne dont l’incapacité de prendre ces décisions a été constatée.
Étant donné le caractère urgent des décisions à prendre en matière de soins de santé, la LCSS prévoit un système simple pour désigner le mandataire spécial par priorité de rang, dans les cas où cela s’avère nécessaire, à partir de la liste ci-après, des personnes pouvant exercer les fonctions de mandataire spécial.
- Le tuteur à la personne de l’incapable, s’il a le pouvoir de donner ou de refuser son consentement au traitement.
- Le procureur au soin de la personne de l’incapable, si la procuration confère le pouvoir de donner ou de refuser le consentement au traitement.
- Le représentant de l’incapable, nommé par la Commission en vertu de l’article 33, s’il a le pouvoir de donner ou de refuser son consentement au traitement.
- Le conjoint ou le partenaire de l’incapable.
- Un enfant ou le père ou la mère de l’incapable, ou une société d’aide à l’enfance ou une autre personne qui a légitimement le droit de donner ou de refuser son consentement au traitement à la place du père ou de la mère.
- Le père ou la mère de l’incapable qui n’a qu’un droit de visite.
- Un frère ou une sœur de l’incapable.
- Tout autre parent de l’incapable (dont ceux liés par les liens du sang, du mariage ou de l’adoption)[258].
Quelques termes de la liste méritent d’être expliqués – « tuteur à la personne », « procureur au soin de la personne » par exemple. Le tuteur à la personne peut être nommé sur requête à la Cour supérieure de justice. La procédure de cette requête est prévue à la LPDNA[259]. Le procureur est nommé par procuration; celle-ci est un document juridique dont on peut se servir pour autoriser un tiers à prendre des décisions en son nom, aux termes de la LPDNA[260]. En anglais, « attorney » employé dans ce contexte ne doit pas être confondu avec « lawyer ».
Le mandataire spécial doit satisfaire à certaines exigences, qu’il soit autorisé à décider à titre de tuteur, de conjoint ou à tout autre titre que prévoit la liste. Il doit être notamment capable à l’égard du traitement, disponible et disposé à assumer la responsabilité[261]. Si personne dans la liste ne satisfait à toutes les exigences que prévoit la LCSS, il incombe au tuteur et curateur public de décider[262].
Le mandataire spécial qui a été autorisé à prendre une décision à l’égard du traitement doit suivre les principes que prévoit la LCSS pour guider la décision. Il lui faut d’abord respecter les désirs exprimés antérieurement à l’incapacité, pour autant que ceux-ci soient applicables à la situation et possibles[263]. En l’absence de désir exprimé antérieurement, il lui faut alors décider dans l’intérêt véritable de la personne, en tenant compte des facteurs suivants :
- les valeurs et les croyances de la personne lorsqu’elle était capable;
- les autres désirs qu’elle a exprimés depuis qu’elle est incapable;
- s’il est vraisemblable ou non que le traitement, selon le cas :
- améliorera l’état ou le bien-être de l’incapable,
- empêchera la détérioration de l’état ou du bien-être de l’incapable,
- diminuera l’ampleur selon laquelle ou le rythme auquel l’état ou le bien-être de l’incapable se détériorera vraisemblablement;
- s’il est vraisemblable ou non que l’état ou le bien-être de l’incapable s’améliorera, restera le même ou se détériorera sans le traitement;
- si l’effet bénéfique prévu du traitement l’emporte ou non sur le risque d’effets néfastes pour l’incapable;
- si un traitement moins contraignant ou moins perturbateur aurait ou non un effet aussi bénéfique que celui qui est proposé[264].
Afin de donner ou de refuser son consentement éclairé selon la procédure ci-dessus, le mandataire spécial a le droit de recevoir tous les renseignements nécessaires que le patient recevrait[265]. Par ailleurs, les prestataires de soins sont tenus avant d’administrer le traitement de s’assurer que le mandataire spécial a donné son consentement conformément à la LCSS, y compris conformément à la procédure de prise de décision[266].
En tenant compte des divers souhaits, valeurs et croyances possibles des personnes, et des diverses maladies qu’elles peuvent avoir, les mandataires spéciaux peuvent donner ou refuser le consentement à des traitements qui produisent des résultats très différents et peuvent convenir en l’espèce, notamment l’administration, le refus ou le retrait de traitement de maintien de la vie.
iii. Planification préalable des soins
Il s’agit de la procédure par laquelle le patient désigne son futur mandataire spécial, et indique des désirs, des valeurs et des croyances que celui-ci devra interpréter quand il prendra des décisions en son nom.
La CDO a adapté de la manière suivante la définition de « planification préalable des soins » qu’utilise HPCO dans Health Care Consent Advance Care Planning Community of Practice.
Planification préalable des soins |
La Loi de 1992 sur la prise de décisions au nom d’autrui et la Loi de 1996 sur le consentement aux soins de santé encadrent la planification préalable des soins en Ontario. Il s’agit de la procédure par laquelle les patients ayant leurs capacités mentales :
1. DÉSIGNENT leur futur mandataire spécial, a. en confirmant qu’ils ou elles sont satisfaits de l’option par défaut sur la liste et selon la priorité de rang que prévoit la LCSS (voir ci-dessus); OU b. en choisissant une autre personne, et en préparant une procuration relative au soin de la personne (document écrit officiel discuté ci-dessus); 2. ET FONT PART DE LEURS DÉSIRS, VALEURS ET CROYANCES au mandataire spécial notamment, dans des conversations qui précisent ceux-ci, ainsi que de façon plus générale, la façon dont ils souhaitent être traités en cas d’incapacité de donner ou de refuser leur consentement (par exemple : quelle est leur qualité de vie? qu’est-ce qui leur tient à cœur en matière de santé?). Planifier des soins au préalable ne signifie pas consentir au traitement. Sauf en cas d’urgence, les prestataires de soins doivent toujours, avant d’administrer le traitement, obtenir le consentement du mandataire spécial ou de la personne, même si celle-ci a préalablement planifié ses soins. Processus permanent, l’obtention du consentement doit précéder chaque traitement. Quand le consentement doit être donné par le mandataire spécial, les désirs, les valeurs et les croyances servent à le guider dans sa prise de décision. Étant donné qu’ils sont susceptibles d’évolution, les désirs que la personne a exprimés le plus récemment quand elle était mentalement capable prévalent sur les précédents. La planification préalable des soins peut débuter et être révisée à tout moment, pas seulement en fin de vie[1]. |
Même si les expressions « déclaration anticipée », « testament de vie », « plan préalable de soins » sont peut-être d’usage courant, elles ne sont pas définies dans la législation ontarienne[268], et sont empruntées d’autres régimes de prise de décision, notamment au Canada et à l’étranger[269].
Dans ces provinces ou dans ces pays, ces expressions peuvent désigner des documents pouvant être utilisés, dans les cas où le patient devient incapable, pour instruire les prestataires de soins d’administrer des traitements directement, sans obtenir le consentement préalable du mandataire spécial. La législation ontarienne exige en revanche qu’ils obtiennent toujours le consentement – même dans le cas où le patient a préalablement planifié ses soins ou exprimé ses volontés[270].
Dans son projet sur la capacité et la prise de décision, la CDO a étudié les exigences que la LCSS prévoit actuellement pour le consentement au traitement et constaté ce qui suit :
- [l]a LCSS établit un fragile équilibre à ce propos. […] L’attention particulière portée au rôle du mandataire spécial pour transmettre et interpréter les désirs exprimés avant l’incapacité ainsi que pour donner son consentement à mesure que des problèmes surgissent diffère de beaucoup de la situation dans d’autres ressorts, où des « déclarations anticipées » peuvent s’adresser directement aux praticiens traitants et les contraindre[271].
La CDO ne recommande pas dans ce projet de modifier la législation ontarienne relative à l’obtention du consentement et à la planification préalable des soins. Elle souscrit à la déclaration du groupement de praticiens de HPCO que l’emploi d’expressions telles que « déclaration anticipée » [traduction] « peut présenter de façon embrouillée et inexacte le [consentement à des soins de santé] ou la planification préalable. Afin d’éviter toute confusion, on propose de ne pas les employer quand on parle de « planification préalable des soins »[272]. (D’autres considérations touchant la planification préalable des soins sont discutées en 4.B).
iv. Plan de traitement
Selon la LCSS, le terme « traitement » s’entend notamment du plan de traitement. Celui-ci désigne le plan élaboré par un ou plusieurs praticiens de santé pour des problèmes de santé que la personne présente ou présentera vraisemblablement, étant donné son état de santé actuel[273]. Il prévoit l’administration de divers traitements ou séries de traitements, y compris le retrait ou le refus de ceux-ci, étant donné l’état de santé actuel [274].
Le consentement éclairé est indispensable pour le plan de traitement, puisqu’il s’agit d’une décision de traitement. Comme pour tout consentement au traitement, les patients doivent donc pouvoir accéder aux renseignements nécessaires pour décider, dans le contexte de leur état actuel. Le plan de traitement reflète le fait que [traduction] « la LCSS limite le consentement au traitement à des décisions contextualisées dont la durée est limitée, et qui se fondent sur l’état de santé actuel »[275].
Le plan de traitement ne doit pas se confondre avec la planification préalable des soins. Comme il exige le consentement éclairé, les patients tout autant que les mandataires spéciaux peuvent y consentir, alors que seuls les patients peuvent planifier préalablement leurs soins[276]. (Le retrait du traitement et son refus sont détaillés en 6.C.3).
2. Questions à aborder dans le projet
Dans son examen complet de la LPDNA et de la LCSS pour son projet sur la capacité juridique, la prise de décision et la tutelle, la CDO a abordé des questions majeures de ce domaine, qu’elle peut à présent appliquer au projet, sans les réexaminer toutefois. Les recommandations suivantes sont au nombre de celles qu’elle y a formulées :
- établir des lignes directrices officielles pour l’évaluation de la capacité sur le fondement de la LCSS;
- renforcer la fonction de formation et de vulgarisation des établissements de formation professionnelle et celui des ordres de réglementation des professions de la santé, dans le cadre de leurs actions d’assurance de la qualité;
- modifier la LCSS de façon qu’une ou des personnes en particulier puissent être interdites de nomination en vertu de la liste prévue dans cette loi;
- établir un bureau central d’informations, à l’intention des mandataires spéciaux et des personnes directement touchées par la législation;
- garantir qu’en vertu de la LCSS, les patients et les mandataires spéciaux soient davantage renseignés[277].
Des intervenants ont porté deux grandes questions à l’attention de la CDO pour le projet. Il s’agit tout d’abord de savoir si un « dossier » de renseignements et d’outils professionnels, qui soit utile et conforme à la législation, peut être conçu afin de favoriser la prise de décision sur les traitements courants en fin de vie (6.D). La question a été brièvement présentée ci-dessus, en 2.B.
Il s’agit ensuite de savoir qui peut légalement décider si la personne reçoit des traitements salvateurs ou bien de survie, ou s’ils lui sont proposés. On débat actuellement pour savoir qui, du mandataire spécial ou du prestataire de soins, devrait prendre ces décisions en cas d’incapacité du patient, dans les cas où, selon les prestataires de soins, le traitement de maintien de la vie serait peu utile ou sans effet « bénéfique ». Ce débat soulève des questions très sensibles sur la qualité de la vie, le droit à l’autonomie dans la prise de décision et sur la sécurité des patients qui ne peuvent plus prendre eux-mêmes des décisions relatives à la fin de leur vie. La CDO les examine en 6.B.
- La CDO a commandé à des spécialistes deux rapports de recherche sur ces sujets pour le projet, et un rapport de recherche pour le projet sur la capacité et la prise de décision. Leurs conclusions sont intégrées au chapitre 6 du présent document de travail. On peut aussi les consulter en ligne à http://www.lco-cdo.org/fr/last-stages-of-life.
E. L’aide médicale à mourir
1. État de la législation au Canada
La Cour suprême du Canada a conclu dans son arrêt Carter de 2015 que les sanctions pénales infligées en vertu du Code criminel en cas d’aide médicale à mourir portent dans certaines circonstances atteinte à la Charte. Elle a également conclu que l’aide d’un médecin pour mourir est accessible aux personnes adultes capables qui consentent à mettre fin à leur vie, et qui ont des problèmes de santé graves et irrémédiables leur causant des souffrances persistantes et intolérables[278].
La Cour a suspendu pendant 12 mois la prise d’effet de sa déclaration d’invalidité des dispositions du Code criminel[279]. Après les élections fédérales, le nouveau gouvernement libéral a obtenu que soit prolongée cette suspension, laquelle a expiré le 6 juin 2016[280].
Le 6 juin 2016, l’aide médicale à mourir est devenue légale au Canada.
i. La situation au fédéral
Avant la prise d’effet de la déclaration de la Cour suprême du Canada, le gouvernement du Canada a déposé un projet de loi visant à encadrer « l’aide médicale à mourir »[281]. Cette expression marque que dans la pratique, cette aide est dispensée par des équipes de prestataires de soins, pas seulement par des médecins, et est à présent préférée dans la politique canadienne.
Le projet de loi C-14, Loi modifiant le Code criminel et apportant des modifications connexes à d’autres lois (l’aide médicale à mourir) a été adopté le 17 juin 2016. Il y a donc eu un trimestre d’adaptation et d’expérimentation vis-à-vis de l’aide médicale à mourir avant l’adoption de cette loi fédérale. Les incidences de cette période d’adaptation sont discutées ci-après.
Selon le Code criminel, le médecin ou l’infirmier praticien peut dispenser de deux façons l’aide médicale à mourir :
- administrer à une personne, à la demande de celle-ci, une substance qui cause sa mort;
- prescrire une substance à une personne, à la demande de celle-ci, afin qu’elle se l’administre.
Le Code criminel exempte de responsabilité criminelle les personnes qui participent à la procédure – médecin, infirmier praticien et quiconque fait quelque chose en vue de les aider[282], de même que les personnes qui font quelque chose, à la demande d’une autre personne, en vue d’aider celle-ci à s’administrer la substance prescrite[283], ainsi que le pharmacien qui délivre celle-ci sur ordonnance valide[284].
Le Code criminel prévoit désormais des critères d’admissibilité, des procédures à respecter et des mesures de sauvegarde contre les abus. Pour être admissible à recevoir l’aide médicale à mourir, il faut avoir droit à l’assurance-maladie au Canada, avoir au moins dix-huit ans et est capable de prendre des décisions en ce qui concerne sa santé, avoir fait une demande d’aide médicale à mourir de manière volontaire, avoir consenti de manière éclairée à recevoir celle-ci et être affecté de problèmes de santé graves et irrémédiables. Ceux-ci sont définis de façon à réserver l’admissibilité aux mourants – c’est-à-dire aux personnes dont la mort naturelle est « raisonnable prévisible ». Ce critère exclut les personnes qui ne sont pas mourantes, mais qui peuvent souffrir de maladies physiques ou mentales. Voici la définition du Code criminel :
Problèmes de santé graves et irrémédiables
Une personne est affectée de problèmes de santé graves et irrémédiables lorsque, à la fois :
a) elle est atteinte d’une maladie, d’une affection ou d’un handicap graves et incurables;
b) sa situation médicale se caractérise par un déclin avancé et irréversible de ses capacités;
c) sa maladie, son affection, son handicap ou le déclin avancé et irréversible de ses capacités lui cause des souffrances physiques ou psychologiques persistantes qui lui sont intolérables et qui ne peuvent être apaisées dans des conditions qu’elle juge acceptables;
d) sa mort naturelle est devenue raisonnablement prévisible compte tenu de l’ensemble de sa situation médicale, sans pour autant qu’un pronostic ait été établi quant à son espérance de vie.
Les autres critères susmentionnés (consentement éclairé et âge) signifient que ne peuvent recevoir l’aide médicale à mourir ni les enfants de moins de 18 ans ni les personnes légalement incapables de prendre des décisions touchant les soins. Le texte ne prévoit pas la prise de décision au nom d’autrui pour l’aide médicale à mourir. Une exigence relative au consentement immédiatement avant de recevoir l’aide limite la possibilité de faire la demande à l’avance dans un document de planification préalable des soins qui prendrait effet si la personne devient incapable[285].
Au regard de ces considérations particulières, le gouvernement du Canada concrétise ses engagements que le ministre fédéral de la Justice et celui de la Santé lancent un examen indépendant « des questions […] faites par les mineurs matures, des demandes anticipées et des demandes où la maladie mentale est la seule condition médicale invoquée. »[286]. Il a annoncé le 13 décembre 2016 qu’il a retenu le Conseil des académies canadiennes « pour effectuer des examens indépendants relativement à ces types précis de demandes d’aide médicale à mourir. Dans le cadre de ces examens, le Conseil tiendra compte des données de spécialistes nationaux et internationaux, d’autres paliers d’administration, des prestataires de soins de santé et des intervenants concernés par les enjeux à l’étude. Les examens seront achevés en deux ans et rendus publics, aux parlementaires notamment, d’ici décembre 2018[287].
Le Code criminel prévoit désormais plusieurs dispositions interreliées à propos des questions de procédure et des mesures de sauvegarde. La personne doit notamment :
- avant de consentir, être informée des moyens disponibles pour soulager ses souffrances, notamment les soins palliatifs;
- faire la demande par écrit, devant deux témoins indépendants;
- obtenir l’avis d’un autre médecin ou infirmier praticien indépendant, confirmant le respect de tous les critères prévus;
- attendre 10 jours avant de recevoir l’aide médicale à mourir (sauf imminence de la mort ou de la perte de capacité);
- immédiatement avant de recevoir l’aide, recevoir la possibilité de retirer sa demande, et réitérer son consentement[288].
Enfin, le ministre de la Santé prend des règlements pour régir, aux fins de surveillance de l’aide médicale à mourir, la collecte de renseignements relatifs aux demandes d’aide[289]. Cinq ans après la date de sa sanction, la loi sera examinée par un comité parlementaire qui doit également rendre compte de l’état des soins palliatifs au Canada[290].
ii. La situation en Ontario
L’action fédérale à propos de l’aide médicale à mourir est un cadre sommaire qui sert à créer une exemption au Code criminel – elle n’aborde pas clairement le parcours que les personnes et les prestataires doivent suivre pour accéder concrètement à des services provinciaux de santé. Les provinces ont donc complété la loi fédérale par des mesures destinées à mettre en place l’aide médicale à mourir en tant que service financé par l’État.
En Ontario, le MPG et le MSSLD ont travaillé de concert à préciser que les patients doivent consulter directement leurs prestataires de soins à propos de l’aide médicale à mourir, et que ceux-ci doivent ensuite consulter leurs ordres de réglementation sur les règles, lignes directrices ou directives pratiques[291]. Chaque ordre de réglementation des professions de la santé directement concerné (médecins, infirmiers, pharmaciens) a diffusé des orientations connexes pour guider ses membres[292]. Le MSSLD met de plus à disposition divers services d’information et des modèles de formulaire par souci de commodité[293]. D’autres groupes aident à l’élaboration de documents. Le Joint Centre for Bioethics de l’Université de Toronto par exemple a créé un modèle devant servir pour l’aide médicale à mourir à aider les institutions sanitaires provinciales pour la planification locale et pour la mise en œuvre des principes éthiques que sont la responsabilité, la collaboration, la dignité, le respect, la transparence, la fidélité et la compassion[294]
À propos des objections de conscience, l’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario a affirmé que les médecins ne doivent pas abandonner les patients qui ont demandé à mourir avec une aide médicale : une orientation réelle doit se faire dans un délai raisonnable. L’Ordre des infirmières et infirmiers de l’Ontario a quant à lui déclaré que les infirmiers qui s’opposent en conscience doivent transférer les patients ayant demandé à mourir avec une aide médicale à des collègues ou à d’autres prestataires de soins, qui s’en occuperont. Le MSSLD a mis en place un service téléphonique de référence pour soutenir les médecins et les infirmiers qui s’opposent en conscience à s’acquitter de cette obligation[295]. Il s’est récemment engagé à établir un « service de coordination des soins » afin d’aider les patients et les aidants naturels à accéder à plus de renseignements et de services pour l’aide médicale à mourir et des choix de fin de vie autres; des renseignements supplémentaires doivent être communiqués début 2017[296]. Il a demandé aux institutions qui s’opposent en conscience de rendre publique leur position. Au moment de la rédaction du présent document, il cherchait toujours comment l’objection de conscience pourrait fonctionner pour les foyers de soins de longue durée, qui sont légalement tenus de fournir des soins de fin de vie.
Outre ces mesures non législatives, l’Ontario a déposé le 7 décembre 2016 le projet de loi 84, Loi modifiant des lois en ce qui concerne l’aide médicale à mourir[297]. Le texte est conforme à la législation fédérale sur l’aide médicale à mourir (Loi modifiant le Code criminel et apportant des modifications connexes à d’autres lois (aide médicale à mourir)), et s’il est adopté, viseraient les domaines relatifs à l’aide médicale à mourir qui relèvent de la province. Il propose notamment des modifications de six lois en vigueur afin d’y apporter des précisions sur cette aide en Ontario :
- la Loi sur les coroners et la Loi sur les statistiques de l’état civil sont modifiées pour prévoir que les médecins ou les infirmiers ayant aidé une personne à mourir en avisent le coroner et que celui-ci n’est pas tenu de signer le certificat médical sauf s’il effectue une investigation;
- la Loi de 2010 sur l’excellence des soins pour tous est modifiée pour prévoir que le fait qu’une personne a reçu l’aide médicale à mourir ne peut être invoqué pour refuser des prestations, d’assurance notamment, et pour protéger les médecins, les infirmiers praticiens, et les personnes qui les aident à dispenser légalement une aide médicale à mourir, contre toute poursuite (sauf en cas d’allégation de négligence);
- la Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée et la Loi sur l’accès à l’information municipale et la protection de la vie privée sont modifiées pour que l’identité des cliniciens et des institutions qui aident des personnes à mourir ne soit pas divulguée consécutivement à une demande d’accès à l’information;
- La Loi de 1997 sur la sécurité professionnelle et l’assurance contre les accidents du travail est modifiée pour que dans les demandes présentées en vertu de cette loi, les travailleurs ayant reçu une aide médicale pour mourir soient réputés être décédés uniquement par suite de la blessure ou de la maladie pour laquelle il a été reconnu admissible à recevoir cette aide.
La façon dont le processus de consultation tiendra compte de l’évolution rapide de la réglementation ontarienne de l’aide médicale à mourir est exposée ci-après, en 3. Questions à aborder dans le projet.
2. Les domaines qui continuent de faire débat
La CDO sait que plusieurs points de discorde sur l’état du droit continuent de faire débat, dont les plus visibles sont notamment les suivants :
- la demande anticipée sera-t-elle autorisée?
- Les personnes malades (les personnes handicapées et atteintes de maladie mentale, mais qui ne sont pas mourantes) seront-elles admissibles si leur décès n’est pas raisonnablement prévisible?
- Quelle devrait être la procédure d’orientation pour les personnes et les prestataires institutionnels qui s’opposent en conscience?
- Des mesures de sauvegarde seront-elles mises en place pour protéger les personnes qui peut-être sont incapables, pensent à se suicider ou sont susceptibles d’être victimes de captation?
Plusieurs sources de renseignements placent ces questions dans leur contexte.
Tout d’abord, après l’arrêt Carter, mais avant l’adoption de la loi fédérale, plusieurs rapports d’experts ont été commandés et remis au niveau tant fédéral que provincial en 2015 et en 2016[298]. Ces rapports ont présenté des conclusions – qui parfois concordent, parfois non – sur l’encadrement de l’aide médicale à mourir. Ils ont porté notamment sur la demande anticipée, l’objection de conscience et les critères d’admissibilité. Le débat sur l’objection de conscience se poursuit dans les publications universitaires spécialisées. Des juristes réfléchissent activement aux ramifications constitutionnelles du juste équilibre à établir entre liberté de religion et de conscience et accès équitable aux soins[299].
Le débat se poursuit aussi au Parlement lui-même. Pendant l’examen du projet de loi C-14, le Sénat a effectué ou proposé des modifications de celui-ci qui élargiraient les critères d’admissibilité ainsi que la demande anticipée. Le débat législatif a été source de nombreuses dissensions, que la presse a rendues publiques[300].
Un petit corpus de jurisprudence renseigne également sur ces questions. Pendant la période entre l’arrêt Carter et l’adoption de la loi fédérale, des personnes ont été autorisées à présenter une requête en cour supérieure en vue d’exercer leurs droits constitutionnels et de recevoir l’aide médicale à mourir[301]. Cette procédure a été utilisée dans au moins 7 affaires en Ontario, et les résultats ne correspondent pas entièrement aux cadres juridiques établis depuis. Se fondant sur l’arrêt Carter, la Cour supérieure de justice de l’Ontario a conclu par exemple qu’il n’est pas nécessaire d’être atteint d’une maladie mortelle ou en phase terminale[302].
La CDO sait enfin que les groupes de personnes handicapées militent activement pour faire changer les normes relatives au consentement par la mise en place d’« évaluations de la vulnérabilité » dans le parcours des services. En particulier, l’Association canadienne pour l’intégration communautaire a publié un rapport dans lequel elle allègue que certains groupes sont susceptibles de présenter des demandes « mal raisonnées » en raison de facteurs de risque – stigmatisation, incitation et coercition, isolement social, maladie mentale chronique, idées suicidaires[303]. Des militants, comme l’Association, souhaitent l’amélioration de diverses mesures de soutien autre, de façon à atténuer la volonté de se prévaloir de l’aide médicale à mourir – soins palliatifs, mesures de soutien en cas de maladie mentale, logement sûr.
Des tensions fondamentales entre d’une part le droit à l’accès équitable pour toutes les personnes dont les souffrances sont intolérables, et d’autre part le souci de protéger des personnes qui peuvent être susceptibles de présenter une demande forcée sont au cœur de la plupart des domaines susmentionnés où il y a controverse. Le souci des mesures de sauvegarde concerne tout autant les personnes capables, mais vulnérables en raison de leur situation sociale que celles qui, s’étant liées antérieurement dans une demande anticipée, deviennent incapables. Certains prétendent que la demande anticipée devrait être accessible en cas de capacité, tandis que d’autres estiment que l’on ne saurait prédire ses volontés futures avec suffisamment d’exactitude pour se lier dans une décision fatale.
La CDO est au courant que plusieurs contestations fondées sur la Charte sont en cours ou envisagées vis-à-vis de la nouvelle loi et de lignes directrices d’ordres de réglementation portant sur la procédure d’orientation pour les cliniciens qui s’opposent en conscience.
3. Questions à aborder dans le projet
La CDO a expliqué au chapitre 1 du présent document de travail qu’elle s’efforce dans le projet d’éviter de reprendre des travaux que mènent actuellement les pouvoirs publics sur l’aide médicale à mourir (voir 1.B.2 Coordination avec des actions récentes des pouvoirs publics).
Les mesures prises et les actions proposées par les autorités fédérales et provinciales en décembre 2016, exposées précédemment, sont révélatrices du type et de la portée des questions qui seront visées en 2017 et probablement même en 2018 par la réglementation, la législation et par le gouvernement. Ceci précise beaucoup les questions que la CDO devrait traiter dans son projet, en complément de ces mesures publiques ou au-delà de leur portée. Au-delà de la portée de la législation proposée, on a fait part à la CDO de plusieurs autres questions concernant l’aide médicale à mourir, notamment les suivantes :
- les transitions entre les établissements de soins afin de bénéficier d’une aide médicale pour mourir;
- l’opposition en conscience à la prestation d’aide médicale à mourir dans les soins de longue durée;
- les appels de décisions touchant la capacité des personnes qui demandent à bénéficier d’une aide médicale pour mourir;
- les orientations et les méthodes qui pourraient être mises en place pour prévenir ou régler les différends découlant des questions précédentes.
F. Régler les différends portant sur les soins de santé
La mort, l’agonie, le deuil sont des moments extrêmement importants, chargés d’émotion pour toutes les personnes concernées – la personne en cause, la famille, les amis, les prestataires de soins. Il ne faut pas se surprendre que des différends surgissent à propos de ces moments et qu’ils aient des conséquences graves pour le bien-être de tous.
L’Ontario dispose de plusieurs moyens de régler les différends. On résume ci-après les procédures de droit administratif mises en place de leur traitement rationnel dans le système de santé.
La CDO explique ci-après qu’elle se demande dans son projet si l’on pourrait mettre en place des orientations et des méthodes supplémentaires pour prévenir les différends, ou les régler avant d’enclencher ces procédures en vigueur.
1. Les différends concernant la prise de décision
Établie en tant que tribunal administratif indépendant et spécialisé, ayant compétence sur les questions visées dans la LCSS (et dans d’autres lois dont la LPDNA et la Loi sur la santé mentale)[304], la Commission du consentement et de la capacité peut entendre les requêtes, pertinentes au projet, visant à :
- réviser la constatation d’un prestataire de soins selon laquelle un patient est incapable de décider à l’égard du traitement[305];
- nommer un représentant pour prendre des décisions sur les traitements[306];
- permettre au mandataire spécial de s’écarter des désirs exprimés par l’incapable quand il était capable[307];
- déterminer si dans ses décisions le mandataire spécial se conforme à la LCSS[308];
- obtenir des directives qui précisent l’application de la LCSS aux décisions[309].
Dans la pratique, la Commission traite surtout des contestations de déterminations de la capacité menées en vertu de la LCSS pour un traitement, et des conclusions que la personne devrait, sans son consentement, être admise ou demeurer en établissement psychiatrique sur le fondement de la Loi sur la santé mentale[310]. D’après les décisions publiées de la Commission, elle entend aussi des requêtes touchant des décisions de traitement de fin de vie.
Une étude des décisions de la Commission à propos de la détermination de l’intérêt véritable de patients en fin de vie a relevé plusieurs thèmes marqués[311]. Les prestataires de soins proposent souvent le retrait des traitements de maintien de la vie, alors que le mandataire spécial des patients le refuse[312]. L’étude souligne notamment que [traduction] « celui-ci s’appuie souvent sur ses propres valeurs et croyances religieuses pour interpréter l’intérêt véritable, alors que les premiers s’attachent avant tout à l’état clinique du patient »[313].
La CDO est d’avis que le fond des décisions de la Commission permet de comprendre de façon fiable les types de conflit en Ontario, et y revient à plusieurs reprises dans le présent document.
Selon le type de requête, des personnes différentes peuvent lancier la procédure de révision de la Commission. Des prestataires de soins peuvent par exemple lui demander qu’elle détermine si le mandataire spécial se conforme aux règles de prise de décision de la LCSS, s’ils doutent que ce soit le cas[314]. Prestataires de soins et mandataires spéciaux peuvent aussi lui demander des directives sur des décisions de traitement à l’égard d’un incapable[315].
Selon la requête, la Commission dispose de larges pouvoirs de réparation : confirmer la décision du mandataire spécial, nommer un représentant pour décider sur le fondement de la LCSS ou substituer une autre décision sur le traitement d’un incapable[316]. À propos de décisions sur des traitements dispensés en fin de vie, la Commission a rendu diverses conclusions sur ce que serait la décision dans l’intérêt véritable du mourant, en tenant compte des faits de l’espèce et de ce que prévoit la LCSS pour la prise des décisions prises au nom d’un incapable[317]. (La prise de décision à propos des traitements essentiels au maintien de la vie est discutée plus avant en 6.C)
La Commission privilégie la rapidité du règlement : l’audience doit débuter à sept jours au plus de la requête, et la décision doit être rendue dans la journée suivant la fin de l’audience[318]. Ses décisions peuvent être portées en appel devant la Cour supérieure de justice[319].
2. Les différends concernant la qualité des services et des mesures de soutien
Les différends à propos de la qualité des soins prodigués pendant les derniers moments de la vie surgissent systématiquement dans deux cas. Il se peut d’abord que les patients ou les personnes qui les accompagnent allèguent que les services reçus étaient de qualité inférieure (c’est-à-dire traitements inadaptés, manque de communication). Il se peut ensuite que des personnes ayant demandé des services financés par l’État et dispensés à domicile ou dans la collectivité par l’intermédiaire des CASC en appellent du refus de leur fournir le niveau ou le type de service qu’elles ont demandé.
Deux tribunaux administratifs, la Commission d’appel et de révision des professions de la santé (CARPS) et la Commission d’appel et de révision des services de santé (CARSS), constituaient jusqu’à récemment les deux seules voies de recours. Or, l’Ontario vient tout juste d’établir le Bureau de l’ombudsman des patients, qui « aidera à satisfaire les besoins des patients dont les problèmes n’ont pas été résolus par le biais des mécanismes de présentation de plaintes existants. »[320]. Les trois organismes sont successivement présentés ci-après.
i. Plaintes auprès des ordres de réglementation, et commissions d’appel et de révision
La LPSR prévoit que les ordres de réglementation sont tenus de prévoir des procédures en cas de plainte de la part de personnes alléguant avoir reçu des soins de qualité inférieure aux normes[321]. L’Ordre des infirmières et infirmiers de l’Ontario explique par exemple que sa procédure pour les plaintes vise à traiter les préoccupations touchant notamment la prestation inadéquate des soins, la tenue de dossiers insuffisante, l’administration non sécuritaire de médicaments[322].
Pour les plaintes adressées à des ordres réglementés, qui sont étudiées par des comités spécialisés, une combinaison de modes substitutifs de règlement, d’enquêtes et d’audiences peut intervenir[323]. Si la plainte aboutit, ces procédures peuvent donner lieu à diverses réparations – avertissement, mesure disciplinaire, ordonnance enjoignant de prendre des mesures.
Les plaignants ou les prestataires de soins qui souhaitent contester l’issue de la plainte peuvent s’adresser à la CARPS. Celle-ci peut réviser les décisions des comités des ordres des professions de la santé pour un certain nombre de motifs. Elle peut confirmer la décision, la renvoyer pour nouvelle audience, faire des recommandations ou ordonner au comité d’agir selon ses compétences, comme par exemple enjoindre à des prestataires de soins de prendre des mesures de réparation[324]. On peut interjeter appel des décisions de la CARPS auprès de la Cour supérieure de justice[325].
La fonction de la CARSS est similaire à celle des tribunaux administratifs; son mandat consiste à revoir les décisions d’organismes exerçant sur le fondement de 12 lois différentes (elles ne s’appliquent pas aux ordres réglementés des professions de la santé)[326]. D’une pertinence particulière pour le projet c’est que la CARSS révise les décisions d’organismes autorisés aux termes de la Loi de 1994 sur les services de soins à domicile et les services communautaires concernant l’admissibilité aux services communautaires et le volume de ceux-ci (comme les CASC). Elle tranche les appels de décisions de l’Assurance-santé de l’Ontario touchant l’admissibilité à des services et le paiement de ceux-ci aux termes de la Loi sur l’assurance-santé[327]. Le pouvoir de la CARSS est fonction de la loi qui la régit.
La CARPS et la CARSS sont toutes deux visées par la Loi de 1998 sur les commissions d’appel et de révision du ministère de la Santé et des Soins de longue durée, ainsi que par leurs propres règles de pratique et de procédure et directives de pratique[328].
À l’instar de la Commission du consentement et de la capacité, les deux commissions d’appel et de révision renseignent sur les types de différends qui surviennent au courant des derniers moments de la vie. La CARPS en particulier a entendu un nombre conséquent d’affaires touchant les soins palliatifs et les soins de fin de vie[329]. Les plaintes dans ces affaires portent sur le retard de la prestation de soins palliatifs, le défaut de consultation de la famille sur le transfert du patient en service palliatif et le défaut de communiquer les risques de préjudice liés aux traitements[330].
Dans les cas d’allégation que des prestataires de soins auraient rendu des ordonnances de « non-réanimation » sans avoir obtenu le consentement éclairé du mourant ou du mandataire spécial, se présente alors une situation fortement conflictuelle[331]. Puisque cette situation pourrait être traitée comme un point du droit concernant la capacité et la prise de décision, il existe, semble-t-il, des chevauchements dans les affaires soumises à la CCC et à l’une ou l’autre des deux commissions d’appel et de révision (en vertu des procédures de plainte des ordres de réglementation).
Par rapport aux délais de la CCC, les actions dans ces deux commissions peuvent durer plus longtemps. La CARSS doit tenir une audience sur les services communautaires et à domicile dans les 30 jours après le début de la procédure d’appel, et rendre sa décision dans les 3 jours suivant l’audience[332]. Les deux commissions résolvent en général 80 % des affaires en moins d’une année[333]. Pendant son projet sur la capacité et la prise de décision, la CDO a écouté des intervenants lui signaler pourtant que les procédures de plainte des ordres de réglementation peuvent être longues et qu’elles doivent aboutir avant qu’il y ait révision par la CARPS[334].
Pour ces trois commissions, CCC, CARPS, CARSS, la CDO a été informée que les appels en Cour supérieure de justice peuvent être coûteux, longs et difficiles à comprendre. On ne peut donc prévoir la durée d’une action en cas de différend, entre son dépôt et sa résolution finale.
ii. Bureau de l’ombudsman des patients
Le Bureau de l’ombudsman des patients faisant depuis peu partie du système de santé ontarien, on dispose pour l’instant de peu de renseignements pour en saisir les fonctions et l’efficacité. Officiellement constitué par un projet de loi de 2014 qui a modifié la Loi de 2010 sur l’excellence des soins pour tous[335], le poste a été pourvu, puis annoncé publiquement en décembre 2015[336].
Le plan d’action ontarien pour la santé, Priorité aux patients : Plan d’action en matière de soins de santé, explique de façon générale que le Bureau de l’ombudsman des patients aidera « les gens ayant une plainte non résolue concernant les soins qui leur ont été prodigués dans un hôpital, un foyer de soins de longue durée ou un centre d’accès aux soins communautaires »[337]. Selon la Loi de 2010 sur l’excellence des soins pour tous, « patient » s’entend notamment des patients des hôpitaux, des résidents en foyer de soins de longue durée, des clients des CASC ainsi que des mandataires spéciaux des personnes incapables à l’égard d’un traitement ou d’une autre question[338].
Les fonctions de l’ombudsman des patients sont notamment les suivantes :
- répondre aux plaintes déposées par des patients et des aidants à propos de ce que les premiers ont vécu dans un organisme du secteur de la santé – hôpitaux, foyer de soins de longue durée, CASC;
- pour répondre aux plaintes ou de sa propre initiative, enquêter sur les organismes du secteur de la santé;
- faire des recommandations à l’organisme du secteur de la santé ayant fait l’objet d’enquête;
- rendre compte au MSSLD de ses activités, lui présenter des recommandations annuelles, et remettre au besoin des rapports aux RLISS[339].
Cette loi prévoit qu’en cas de plainte, l’ombudsman des patients travaille avec l’auteur de celle-ci, l’organisme du secteur de la santé et peut-être avec les RLISS à faciliter le règlement. Il peut ensuite enquêter sur la plainte, ce qui peut aboutir à des recommandations à l’organisme du secteur de la santé[340].
L’ombudsman peut toutefois ne pas répondre à toutes les plaintes. Dans les cas où il conclut que la plainte relève de la compétence d’un autre organisme, il peut la lui renvoyer[341]. Quand l’Ontario a rendu publique la nomination de la première ombudsman des patients, il a insisté sur sa fonction de réponse aux plaintes « non résolues »[342]. Il n’est pas clair pour l’instant quels recours – officiels ou non — patients et aidants devront avoir épuisés avant de s’adresser à l’ombudsman des patients, CCC, ordres de réglementation et commissions d’appel et de révision notamment.
3. Questions à aborder dans le projet
Des préoccupations sur les recours en cas de différend à propos des soins de fin de vie, celle dont la CDO a le plus entendu parler pendant ses consultations est le besoin d’avoir accès à des modes substitutifs de règlement des différends avant de s’engager dans des recours administratifs.
La rapidité et la facilité d’emploi sont indispensables pour les mécanismes de règlement des différends dans ce domaine du droit, surtout quand il s’agit de décisions et de services touchant les derniers moments de la vie.
Des intervenants ont indiqué à la CDO que les différends sont en majorité réglés dans l’établissement de soins, grâce à une bonne communication entre prestataires de soins, patients et mandataires spéciaux. Il se peut que des établissements de soins comme les hôpitaux aient des orientations et des procédures internes afin de régler l’escalade dans le conflit et de faire intervenir des tiers – éthiciens, aumôniers, avocats. Ces procédures peuvent permettre de régler les problèmes de façon économique et non contradictoire.
La CDO est au courant des diverses critiques à l’égard de ces procédures en vigueur, et a été invitée à réfléchir à d’autres modes substitutifs possibles de règlement des différends afin de normaliser, de simplifier et d’accroître l’accès à la gestion des différends (7.B).
Il se peut que l’ombudsman des patients puisse permettre de combler la lacune entre les plaintes non officielles à des établissements de soins et les recours administratifs. La CDO se tiendra au courant de l’évolution du mandat de l’ombudsman des patients et de ses activités, et abordera les questions connexes au projet.
Outre que la CDO examine dans le présent document de travail les modes substitutifs de règlement des différends, elle y étudie aussi des sujets qui pourraient minimiser les désaccords en allant à leur source, par exemple en éclaircissant la législation se rapportant au retrait ou au refus du traitement (6.B), ainsi qu’aux mesures de conciliation et de soutien à l’intention des groupes confessionnels et culturels (6.G).
- La CDO a également proposé des recommandations sur la CCC et le recours accru à la médiation dans son projet sur la capacité et la prise de décision, et les travaux qu’elle mène à son égard vont lui être utiles ici.
G. Lois concernant précisément les soins durant les derniers moments de la vie
La CDO examine dans son projet les lois, les orientations et les programmes ontariens précis qui recoupent le cadre réglementaire de la santé, mais qui en sont distincts. Quelques exemples sont fournis ci-après, puis ils sont détaillés dans les chapitres qui suivent.
La Loi de 2000 sur les normes d’emploi est un exemple de texte que la CDO examine dans son projet et qui concerne les soins de fin de vie. On a déjà indiqué que les aidants ont droit dans le système de santé à des services et à des mesures de soutien par l’intermédiaire des CASC, ainsi qu’à des services de soutien communautaire — services de relève, counselling. Cette loi prévoit également des périodes de congé pour les aidants et les membres de la famille[343], et que l’on a droit à des congés pour s’occuper des autres sans perdre son emploi. La CDO se demande si les droits que cette loi confère, associés à d’autres avantages, sont suffisants pour procurer aux aidants et aux membres de la famille le soutien dont ils ont besoin (5.D.1).
La Loi sur la santé et la sécurité au travail protège les prestataires de soins vis-à-vis de ce qui touche leur profession[344]. Ces protections portent uniquement pour l’instant des types particuliers de risques professionnels – environnement physique non sécuritaire, harcèlement[345]. Mais on se préoccupe de la santé mentale des travailleurs[346]. L’Ontario étudie des protections vis-à-vis des effets sur la santé mentale des emplois à risque élevé[347]. La CDO se demande si les prestataires de soins qui travaillent régulièrement avec des patients et avec les personnes qui les accompagnent pourraient bénéficier d’un élargissement semblable des mesures législatives sur la santé et la sécurité au travail afin que soient prises en compte les répercussions émotionnelles de leur situation professionnelle (6.F).
La Loi sur les statistiques de l’état civil[348] est elle aussi un exemple de texte distinct qu’examine la CDO. De nombreux facteurs influent sur le lieu du décès. Un facteur possible, de nature juridique, est l’efficacité des procédures visant à certifier que le décès, dû à des causes prévisibles, a eu lieu au domicile. Avant d’accepter de transporter le corps d’une personne qui n’est pas décédée à son domicile, des services funéraires exigent régulièrement le reçu du certificat de décès par le médecin. Des complications et des retards administratifs surgissent alors souvent, dont les familles en deuil peuvent souffrir. C’est pourquoi on a signalé à la CDO qu’il pourrait s’avérer nécessaire d’affiner la Loi sur les statistiques de l’état civil, qui encadre des questions connexes (6.E).
- L’Ontario a proposé des modifications de six lois, dont la Loi sur les statistiques de l’état civil, afin d’y apporter des précisions à propos notamment de l’aide médicale à mourir. Voir la discussion ci-dessus en E.1.
Il faut souligner enfin que le présent document examine des textes qui transcendent les domaines – la Charte, le Code des droits de la personne, la Loi de 1991 sur les professions de la santé réglementées (présentés ci-dessus au chapitre 3).
H. Liste de la législation examinée dans le projet de la CDO
Les chapitres suivants analysent les questions à aborder dans le projet. La liste complète de celles-ci figure à la table des matières.
Les textes que la CDO examine, plus ou moins en fonction des questions traitées, sont énumérés ci-dessous.
- Loi de 2005 sur l’accessibilité pour les personnes handicapées de l’Ontario
- Charte canadienne des droits et libertés
- Loi sur le cancer
- Loi constitutionnelle de 1867
- Loi constitutionnelle de 1982
- Loi sur les coroners
- Loi de 2000 sur les normes d’emploi
- Loi de 2010 sur l’excellence des soins pour tous
- Loi de 1994 sur les services de soins à domicile et les services communautaires
- Loi de 1996 sur le consentement aux soins de santé
- Code des droits de la personne
- Loi sur le Barreau
- Loi de 2006 sur l’intégration du système de santé local
- Loi de 2007 sur les foyers de soins de longue durée
- Loi sur la santé et la sécurité au travail
- Loi de 1991 sur les professions de la santé réglementées
- Loi de 2010 sur les maisons de retraite
- Loi de 1992 sur la prise de décisions au nom d’autrui
- Loi sur les statistiques de l’état civil
I. Questions à discuter
4. La législation relative notamment aux soins de santé, au logement, à l’emploi, et aux professions touche les derniers moments de la vie – existe-t-il des failles qui gagneraient à être cernées?
5. Faudrait-il intégrer au cadre réglementaire ontarien l’optique de santé publique vis-à-vis des soins palliatifs? Quelles en seraient les modalités concrètes?
6. La CDO a défini plusieurs domaines dans lesquels l’aide médicale à mourir pourrait être précisée – adaptation des soins, objections de conscience, appels de décisions sur la capacité notamment. Existe-t-il d’autres questions à examiner?