A. Le cadre législatif applicable

Le régime règlementaire que l’Ontario a établi pour la santé et la sécurité est principalement régi par deux lois : la Loi de 1997 sur la sécurité professionnelle et l’assurance contre les accidents du travail (LSPAAT) ainsi que la Loi sur la santé et la sécurité au travail (LSST)559. La LSPAAT est appliquée par l’intermédiaire de la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail (CSPAAT). Le régime de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail procure à un employeur un régime d’assurance d’indemnisation et de retour au travail rapide  et sécuritaire financé pour les accidents ou les maladies de nature professionnelle.

Le mécanisme législatif par lequel la santé et la sécurité des travailleurs sont protégées est régi par la Loi sur la santé et la sécurité au travail (LSST) ainsi que ses règlements. La LSST est fondée sur le principe du système de responsabilité interne dans le cadre duquel les parties au travail assument conjointement la responsabilité de la santé et de la sécurité au travail. Les employeurs sont tenus d’établir une politique de santé et de sécurité et de disposer d’un comité mixte sur la santé et la sécurité (et, pour les petits employeurs, d’avoir des délégués à la santé et à la sécurité). La LSST définit les quatre droits fondamentaux des travailleurs : a) le droit de participer à l’identification des préoccupations relatives à la santé et à la sécurité au travail et à la recherche de solutions; b) le droit d’être informés de toute condition susceptible de présenter un danger et d’avoir une formation à cet égard; c) le droit de refuser d’exécuter une tâche qui est dangereuse ou qui expose le travailleur à la violence dans le milieu de travail; et d) le droit des membres agréés des comités mixtes sur la santé et la sécurité d’arrêter de travailler dans des situations dangereuses. La LSST énonce les obligations de ceux qui exercent un contrôle sur les travailleurs, le lieu de travail, les matériaux ou le matériel. Elle impose aux employeurs l’obligation générale de prendre toutes les mesures de précaution raisonnables pour protéger la santé et la sécurité des travailleurs, et elle définit expressément quelles sont les responsabilités des employeurs. Les travailleurs sont tenus de travailler en toute sécurité et de se conformer à la Loi et à ses règlements. Si le système de responsabilité interne fait défaut, le ministère du Travail est habilité à faire respecter la LSST et il le fait au moyen d’inspections, tant proactives que réactives, d’ordonnances de conformité et d’accusations. Le projet de loi 168, Loi de 2009 modifiant la Loi sur la santé et la sécurité au travail (violence et harcèlement au travail), a renforcé la protection des travailleurs contre le harcèlement et la violence au travail en obligeant les employeurs à élaborer et à mettre en oeuvre des politiques et procédures de prévention et d’intervention.560 Le rapport Dean ainsi que Vosko et ses collaborateurs décrivent de manière plus détaillée l’évolution historique du système ontarien de santé et de sécurité.561

Des modifications apportées à la LLST en 2011 définissent de manière explicite les pouvoirs et les obligations du ministre; ceux-ci comprennent la promotion de la santé et de la sécurité et la prévention des accidents, la sensibilisation du public, l’instruction et la reconnaissance par les employeurs et les travailleurs, de l’importance de la santé et de la sécurité au travail562.

1. Les représailles et les modifications de 2011

L’article 50 de la LSST interdit d’user de représailles contre les travailleurs qui agissent conformément à la Loi ou aux règlements ou qui cherchent à les faire respecter. Le travailleur qui croit avoir été pénalisé parce qu’il a exercé les droits et les responsabilités que lui confère la Loi peut déposer une plainte auprès de la Commission des relations de travail de l’Ontario (CRTO), ou il incombe à l’employeur de faire la preuve qu’il n’y a pas eu de représailles563. En réponse au rapport Dean, en vertu des modifications de 2011 à la LSST qui sont entrées en vigueur le 1er avril 2012, les inspecteurs du ministère du Travail, avec l’assentiment du travailleur concerné, peuvent soumettre la plainte de représailles de ce dernier à la CRTO564. De plus, depuis le 1er avril 2012, un nouveau règlement pris en vertu de la LSST prescrit les fonctions que remplissent le Bureau des conseillers des travailleurs (BCT) et le Bureau des conseillers des employeurs (BCE) à l’égard des plaintes de représailles. Il est question plus en détail de ces deux entités dans l’analyse faite à la section sur les représailles qui précède la recommandation no 35.

2. Les comités mixtes sur la santé et la sécurité (CMSS)

Des comités mixtes sur la santé et la sécurité ainsi que des représentants connexes offrent un moyen de relever et de régler les problèmes de santé et de sécurité au travail. Ce mécanisme, qui permet aux travailleurs de s’exprimer et de participer au processus, agit comme un partenariat entre la direction et les travailleurs et joue un rôle consultatif sur le plan de la sécurité au travail565. Dans la plupart des lieux de travail comptant au moins vingt employés, ces comités doivent être établis. Dans les lieux de travail de plus petite taille, des représentants distincts sont désignés par les travailleurs ou, le cas échéant, le syndicat. Ces représentants ont essentiellement les mêmes pouvoirs que le comité mixte. Dans les lieux de travail de grande envergure, au moins un travailleur et un représentant de la direction qui siègent au comité doivent être « agréés ». En date du 1er avril 2012, le ministère du Travail, par l’entremise du directeur général de la prévention, a pour mandat de fixer des normes concernant l’agrément et la formation des comités mixtes sur la santé et la sécurité, ainsi que d’agréer les membres qui répondent aux normes en vigueur. Les comités relèvent les dangers en procédant à des inspections des lieux de travail et en s’informant auprès des employeurs566. Les comités peuvent formuler des recommandations écrites, auxquelles l’employeur est tenu de répondre, quant aux améliorations à apporter sur le plan de la santé et de la sécurité567. Tous les refus de travail et accidents graves peuvent faire l’objet d’une enquête de la part du comité. Quelques membres du Groupe consultatif du projet ont laissé entendre que certains employeurs n’établissaient pas de comités mixtes sur la santé et la sécurité ou de représentants opérationnels ou alors, dans d’autres cas, ils étaient en place uniquement pour la forme. Dans sa réponse au rapport préliminaire, le gouvernement a expliqué que « dans le cadre d’une inspection ou d’une enquête, il est normal que les inspecteurs examinent le fonctionnement du système de responsabilité interne d’un milieu de travail, et l’un des principaux moyens mis à leur disposition est de vérifier s’il y a un comité mixte sur la santé et la sécurité qui marche bien (ou des délégués à la santé et à la sécurité) »568. Il s’agit donc là d’un secteur qui tirerait profit d’une intensification des mesures d’exécution proactives.

La Commission du droit de l’Ontario recommande :

32. Que les activités d’exécution de la LSST comportent des inspections proactives afin de s’assurer que des comités mixtes sur la santé et la sécurité sont établis et que des représentants sont désignés, au besoin, et bel et bien opérationnels.

Dans le cadre du système de la LSST, les objectifs d’observation et d’exécution sont atteints grâce à l’effet combiné d’un système de responsabilité interne qui est fondé sur le partenariat formé par les travailleurs et l’employeur et d’un système de responsabilité externe qui est fondé sur des stratégies d’exécution officielles, au moyen d’inspections, proactives et réactives, à la suite de plaintes, d’accidents graves, de décès et de refus569. Les violations confirmées peuvent donner lieu à la délivrance d’ordonnances de conformité et/ou d’ordonnances d’arrêt de travail ou des poursuites en vertu de la partie I (procès-verbaux) ou dans les cas plus graves, de la partie III de la Loi sur les infractions provinciales570. Dans de très rares cas, lors d’instances distinctes de la LSST, à la suite d’une enquête policière et du dépôt d’accusations criminelles, les contrevenants sont poursuivis en vertu du Code criminel571.

La LSST s’applique à la plupart des lieux de travail, mais il existe un certain nombre d’exemptions et de limites. Par exemple, elle ne s’applique pas au « travail que le propriétaire ou l’occupant d’une résidence privée ou leur employé exécute à l’intérieur ou à l’extérieur de la résidence »572. Sont notamment exclus les aides familiaux résidants. Au départ, les activités agricoles étaient exemptées, mais, en 2006, elles ont été intégrées à la LSST, avec certaines limites. Les employeurs agricoles sont obligés, à l’instar des employeurs d’autres secteurs, de prendre toutes les précautions raisonnables dans les circonstances pour protéger leurs travailleurs573. Les superviseurs et les travailleurs agricoles sont eux aussi soumis à la même obligation que ceux qui travaillent dans d’autres secteurs, c’est-à-dire, prendre des mesures appropriées pour relever et régler tous les dangers qui peuvent se présenter dans leur lieu de travail. Le régime d’inspection et d’exécution s’applique lui aussi. La LSST exige qu’un comité mixte sur la santé et la sécurité soit établi dans les lieux de travail comptant 20 travailleurs employés régulièrement ou plus, mais l’application de cette exigence se limite aux entreprises de production de champignons, aux serres, aux entreprises laitières, ainsi qu’aux entreprises de production de porc, de bétail et de volaille. Pour d’autres types d’exploitation et les exploitations de petite taille (c.-à-d., de 6 à 19 travailleurs employés régulièrement), ce sont des représentants de la santé et de la sécurité qui doivent être désignés. Certains représentants sont d’avis qu