A.    Introduction

La prise de décision fait partie de notre quotidien. Qu’elles soient petites ou grandes, simples ou compliquées, ordinaires ou qu’elles bouleversent notre vie, les décisions que nous prenons sont importantes en ce qu’elles sont des expressions de nos valeurs et de notre identité, des occasions d’apprendre de nos réussites et de nos échecs, ainsi que le moyen fondamental par lequel nous façonnons nos vies. La prise de décision est donc un acte extrêmement personnel, et la capacité de contrôler nos choix est largement reconnue comme un droit fondamental. De façon générale, celles de nos décisions qui portent sur notre vie privée ne sont contrôlées par la loi que si nous nous inquiétons de notre sécurité par exemple, mais sinon, « elles nous appartiennent », même si les autres pensent peut-être qu’elles sont insensées.

Parallèlement, la prise de décision revêt souvent un aspect public. La clarté, la certitude et la responsabilité deviennent des considérations importantes dans nos rapports avec les autres ou avec des organisations. Il est important pour des tiers à qui l’on demande de se fier à nos décisions ou de les appliquer de s’assurer qu’ils comprennent la décision prise, qu’ils peuvent s’en remettre à sa finalité et que toutes les parties peuvent être tenues responsables de leur part de la décision. Dans ce domaine de la sphère publique, le rôle du droit est primordial, pour déterminer par exemple quand un accord est valide, quand nous pouvons nous y fier et quand une violation de l’accord engage la responsabilité d’une partie.

Le droit intervient toutefois dans les cas où l’on s’interroge sur la capacité juridique d’une personne de prendre des décisions, que celles-ci soient prises dans la sphère publique ou strictement dans la vie privée. La législation concernant la capacité juridique, la prise de décision et la tutelle doit prendre en compte les aspects personnels et publics de la prise de décision, et donc soulever d’importantes et difficiles questions éthiques et pratiques. Notre appréciation – et le point de vue du droit à cet égard – du point de savoir si on devrait être seul maître de ses décisions quelle que soit la « sagesse » de celles-ci devient alors beaucoup plus ambiguë.

Cette législation touche une partie importante de la population ontarienne, notamment les personnes ayant des maladies aiguës ou chroniques graves, des incapacités liées au vieillissement comme la démence, des troubles mentaux, des lésions cérébrales acquises ou des déficiences intellectuelles. La législation a bien sûr une incidence majeure sur les familles et sur les aidants ainsi que sur toute une variété de spécialistes et de prestataires de services. La plupart des Ontariens feront connaissance avec ces lois, à un moment ou à un autre de leur vie personnelle ou professionnelle.

Le présent projet découle du Cadre du droit de la CDO qui touche les personnes âgées et de celui qui touche les personnes handicapées[1]. Concernant la capacité juridique et la prise de décision, l’Ontario dispose d’un régime législatif complet, relativement coordonné, consécutif à la réforme du droit complète et réfléchie qui a eu lieu à la fin des années 1980 et au début des années 1990[2]. Lors de la production de ces deux Cadres, une grande variété de personnes et d’intervenants avaient exprimé des inquiétudes sur les lois ontariennes dans ces domaines, et avaient pressé la CDO de mener un examen complet. Le présent projet applique les Cadres à ce domaine du droit.

L’examen par la CDO du régime législatif ontarien concernant la capacité juridique, la prise de décision et la tutelle a soulevé de nombreuses questions difficiles auxquelles il n’existe pas de solution simple. Il nous appartient de faire tout notre possible pour garantir que la législation soit efficace et équitable et qu’elle respecte et favorise l’égalité réelle des personnes âgées et des personnes handicapées. 

Le présent Rapport préliminaire expose l’analyse du régime législatif ontarien concernant la capacité juridique, la prise de décision par la CDO ainsi que les recommandations de réforme qu’elle propose pour ce régime. Il fait suite à la publication en juin 2014 du Document de travail[3] complet, du Sommaire des questions pour les consultations[4] et des consultations publiques subséquentes. La CDO sollicite des commentaires sur le présent rapport, puis publiera le rapport final en 2017.

 

B.    Le déroulement du projet

Les travaux intensifs sur ce projet ont débuté au tout début de 2013, par des consultations et des recherches préliminaires. La CDO a parlé à environ 70 personnes et organisations en vue de comprendre le fonctionnement actuel du droit, les priorités de réforme et les autres projets en cours susceptibles d’influer sur le projet. La CDO a ainsi élaboré la portée de celui-ci et créé un Groupe consultatif, lequel a apporté l’expertise voulue sur le sujet du projet et une aide considérable pour les stratégies visant la sensibilisation et les consultations publiques, et pour mener celles-ci à bien. Le travail du Groupe consultatif a été très précieux, et la CDO est très reconnaissante du temps et de la réflexion considérables qu’il a consacrés au projet. La liste des membres du groupe consultatif figure au tout début du présent rapport.

En 2013, la CDO a mené des recherches approfondies et commandé plusieurs documents de spécialistes sur divers sujets dont la liste figure à l’annexe C. À partir de ces recherches et des consultations préliminaires, et avec les commentaires du Groupe consultatif, la CDO a élaboré un document de travail exhaustif qui a été publié fin juin 2014. Il a été accompagné du sommaire des questions pour les consultations, beaucoup plus court et simplifié. On peut consulter ces documents à http://www.lco-cdo.org/fr/capacity-guardianship . 

La CDO a mené à la fin de l’été et pendant l’automne 2014 des consultations publiques approfondies sur les questions soulevées dans le Document de travail et dans le sommaire. 

Observations écrites : la CDO a reçu 16 observations écrites officielles, dont la plupart sont longues et détaillent des options de réforme spécifiques. Elle a également reçu un nombre important de communications écrites de la part de personnes ayant une expérience personnelle, parce qu’elles sont directement touchées ou parce qu’elles sont des membres de la famille qui utilisent la législation.

Questionnaires de consultation : la CDO en a élaboré deux, afin de proposer des possibilités supplémentaires de faire part de ses expériences et de ses souhaits de changement. Il faut souligner que ces questionnaires étaient destinés non à la recherche en sciences sociales, mais à permettre aux personnes visées par les lois pertinentes de s’exprimer. Le premier questionnaire était destiné aux personnes dont les prises de décision sont accompagnées, et le second, aux membres de la famille, aux amis et à celles et ceux qui aident à la prise de décision. Des exemplaires des questionnaires figurent à l’annexe D. Ils ont été accessibles sur le site de la CDO et dans de multiples formats, et la CDO a travaillé avec des partenaires communautaires très divers à les distribuer dans les collectivités intéressées.

La CDO a reçu 109 réponses aux questionnaires, de la part de personnes qui sont aidées d’une façon ou d’une autre pour prendre leurs décisions. La plupart d’entre elles sont âgées : 36 pour cent ont 85 ans ou plus, 45 pour cent ont entre 65 et 84 ans, 19 pour cent ont moins de 65 ans, et 67 pour cent sont des femmes. La CDO a ainsi eu connaissance d’une variété d’arrangements mis en place légalement ou de façon non officielle, notamment de tutelles légales ou de nominations de tuteur par le tribunal, mais la situation de loin la plus courante est l’assistance par procuration, et dans la plupart des cas, la, le ou les procureurs ont des pouvoirs absolus (relativement à la prise de décision). Il est difficile de savoir si les larges pouvoirs exercés ont été légalement autorisés, du fait de la confusion évidente que présentent les réponses à propos des documents juridiques. Seulement 30 pour cent des personnes ayant répondu se souviennent qu’il y a eu évaluation officielle de leur capacité juridique.

La CDO a reçu 103 réponses aux questionnaires, de la part de personnes qui aident à la prise de décision. La majorité d’entre elles, 55 pour cent, ne possède pas de document juridique ou, si elle en a un, ne sait pas dire en quoi il consiste. Presque la moitié, 48 pour cent, des personnes  possédant un document juridique et sachant en quoi il consiste ont une procuration. La grande majorité des réponses – 78 pour cent – ont été adressées par des femmes, et une légère majorité d’entre elles, 54 pour cent, vivent avec la personne qu’elles aident à prendre des décisions. La plupart d’entre elles, 62 pour cent, agissent au nom d’un enfant adulte. C’est-à-dire que le sondage adressé aux personnes qui aident à la prise de décision reflète surtout l’expérience, vis-à-vis du régime législatif ontarien concernant la capacité juridique et la prise de décision, de celles d’entre elles qui aident des personnes handicapées depuis leur naissance ou à un très jeune âge, alors que le sondage adressé aux personnes accompagnées reflète l’expérience des personnes qui éprouvent des incapacités en vieillissant.

Groupes de discussion : trente groupes de discussion ont été tenus dans plusieurs lieux en Ontario. La plupart des groupes ont été constitués grâce à des partenariats avec des institutions et des organisations professionnelles et communautaires très variées. Les groupes ont rassemblé de petits nombres de personnes (15 participants par séance), avec une communauté d’expériences ou de connaissances, pour qu’elles débattent en profondeur de leurs expériences du droit et des options de réforme. Dans ces groupes, la CDO a entendu des points de vue et des expériences distincts et divergents, notamment de la part de personnes directement concernées par le droit, de familles, de spécialistes, d’experts, de prestataires de services – éthiciens, personnel des centres d’accès aux soins communautaires, fonctionnaires, magistrats, organismes communautaires et de défense des droits, cliniciens, avocats, prestataires de services sociaux notamment. La liste complète des groupes de discussion figure à l’annexe E. 

Entretiens de consultation : pendant la fin de l’automne 2014 et le début de l’hiver 2015, la CDO a effectué une série de 24 entretiens approfondis avec notamment du personnel des foyers de soins de longue durée, des prestataires de services, des francophones, des habitants du Nord, des spécialistes.

Forum de consultation : la CDO a tenu un forum d’une journée entière, le 31 octobre 2014, qui a réuni des personnes ayant des expériences et des connaissances diverses pour qu’elles travaillent en petit groupe à définir les principes, les objets et les priorités d’une réforme, et pour qu’elles réfléchissent à la façon dont la réforme du droit dans ce  domaine peut tenir compte de la grande divergence des expériences et des besoins.

Au total, la CDO a entendu près de 600 personnes et organisations. La liste des spécialistes et des organisations consultés figure à l’annexe C. 

Sans qu’il soit possible dans le cadre du présent rapport de rendre compte explicitement de tout ce qui a été exprimé pendant ce long processus, nous avons fourni des exemples de ce que nous avons entendu. Nous avons étudié avec attention tous les points de vue exprimés : notre analyse et nos projets de recommandation ont été fondamentalement façonnés par ce processus. La CDO remercie toutes celles et tous ceux qui ont généreusement donné de leur temps pour l’aider à comprendre le fonctionnement du droit, les difficultés que présentent les lois et leur mise en application, les priorités et les principes de changement, et les options de réforme. Ce sont là des questions difficiles, et souvent douloureuses, en ce qu’elles influent profondément sur les vies qu’elles touchent. La CDO est reconnaissante envers les nombreuses personnes qui ont bien voulu lui faire part de leur combat. Nous savons fort bien que ce domaine du droit touche souvent des personnes qui doivent déjà affronter de nombreuses épreuves.
 

C.    La portée et les thèmes du projet

Ce sont les recherches et les consultations préliminaires de la CDO qui ont déterminé la portée du projet. L’accent est mis sur celles des dispositions de la Loi de 1996 sur le consentement aux soins de santé (LCSS)[5], de la Loi de 1992 sur la prise de décisions au nom d’autrui (LPDNA)[6] et de la partie III de la Loi sur la santé mentale (LSM)[7] qui portent sur l’examen de la capacité à gérer ses biens en cas d’admission en établissement psychiatrique. La CDO ne présentera pas de recommandation sur la capacité et le consentement en common law[8], ni sur la capacité de consentir en droit de la protection de la vie privée[9], ni sur le consentement à la recherche, ni non plus sur des aspects plus généraux de la LSM comme les ordonnances de traitement en milieu communautaire.

Même dans la législation ontarienne concernant le consentement et la capacité, il y a de nombreux points dont la CDO ne traitera pas dans le projet, notamment la reconnaissance extrajudiciaire des procurations et la possibilité pour les procureurs de désigner des bénéficiaires en vertu de leur procuration.

Ceci ne constitue pas une réflexion sur l’importance des points qui ne seront pas traités : pour de nombreux Ontariens, elle est majeure et d’ordre pratique. Du fait de l’ampleur des questions, la CDO s’est concentrée sur celles qui ont de vastes conséquences générales pour le régime législatif dans son ensemble, et que les intervenants ont relevées de manière pressante. Parfois, comme pour les questions relatives à la reconnaissance extrajudiciaire[10], d’autres entités mènent des travaux importants; il convient donc que la CDO se consacre à d’autres projets, en conformité avec ses critères sur le choix de ses projets.

Comme l’expose le Document de travail, la portée du projet a été définie de façon à inclure ce qui suit :

1.     la norme concernant la capacité juridique, dont les critères de détermination de la capacité et les divers moyens et mécanismes que prévoient à cette fin la LPDNA, la LCSS et la LSM;

2.     les modèles décisionnels, y compris examiner si d’autres modes décisionnels pouvant remplacer la prise de décision au nom d’autrui, notamment la prise de décision assistée et la codécision, sont souhaitables et quelles seraient leurs répercussions pratiques;

3.     les procédures de nomination (celle du mandataire spécial par exemple), par la personne ou par procédure publique, en s’attachant à l’utilisation appropriée et à l’amélioration de l’efficacité et de l’accessibilité;

4.     les attributions des tuteurs et autres mandataires spéciaux, dont des possibilités de formes de tutelle plus limitées et étude des options pour les personnes n’ayant pas de famille ou d’amis pour les aider;

5.     la surveillance, la responsabilité et la prévention des abus vis-à-vis des mandataires spéciaux ou des accompagnateurs, quel que soit le mode de leur nomination, ainsi que des abus par des prestataires de services tiers, y compris les mécanismes pour accroître la transparence, repérer les possibilités d’abus et garantir le respect des exigences de la loi;

6.     le règlement des différends, y compris les réformes afin d’accroître l’accessibilité et l’efficacité des mécanismes en vigueur.

Comme on l’a brièvement rappelé ci-dessus, le projet est issu des deux cadres de la CDO, le cadre du droit touchant les personnes âgées et celui touchant les personnes handicapées, tous deux achevés en 2012[11]; il les applique aux questions et aux thèmes définis ci-dessous. L’adoption des Cadres en tant que point de départ et fondement analytique du projet a fortement façonné la démarche et les résultats de celui-ci. Le chapitre III discute les conséquences des Cadres pour le projet et pour ce domaine du droit.

Dans le cadre des grandes lignes de la portée du projet, les consultations publiques de la CDO ainsi que les recherches internes et commandées ont permis d’établir les grands thèmes et les priorités de réforme.

Selon les recherches et les consultations de la CDO, les valeurs et les priorités à l’origine des travaux de réforme du droit des années 1990 qui ont abouti à la législation en vigueur conservent tout leur attrait et leur soutien. Les inquiétudes qui ont été exprimées à la CDO visent surtout la façon dont le régime législatif en vigueur est loin de ses objectifs initiaux et donc ne favorise pas les valeurs qui le sous-tendent, ainsi que le point de savoir si au regard de la meilleure compréhension des questions, les valeurs d’autonomie et d’autodétermination devraient revêtir des formes et des protections nouvelles. Trois grands thèmes se sont dégagés, chacun donnant lieu à plusieurs priorités de réforme.

1.     Réduire les interventions inutiles et impropres : à partir des recommandations marquantes du rapport Fram[12] que l’on discute brièvement au chapitre II, la législation en vigueur conserve de nombreuses dispositions visant précisément à faire progresser l’autonomie et l’autodétermination des personnes visées, en particulier : présomptions précises de capacité, accent mis sur des conceptions de la capacité fondées sur la décision, garanties procédurales accordées aux personnes visées – avis sur les droits, renseignements, droit de refuser l’évaluation aux termes de la LPDNA, inclusion de l’obligation d’envisager la solution la moins contraignante pour remplacer les tuteurs nommés par le tribunal.

On s’est inquiété toutefois de ce que pour diverses raisons, des personnes continuent d’être soumises à des restrictions inutiles de leur autonomie. Au nombre des problèmes, citons le fait que les personnes, les familles et les prestataires ne comprennent pas la législation, l’inflexibilité des procédures de tutelle, les difficultés de mise en place des garanties en vigueur contre l’intervention inutile, le manque de moyens accessibles pour affirmer ses droits aux termes de la LPDNA, et une conception parfois trop binaire de la capacité juridique et de la prise de décision.

La CDO a établi plusieurs priorités précises afin de réduire les interventions inutiles, dont celles-ci :

·       préciser l’application de l’obligation d’accommodement à la capacité juridique et à la prise de décision;

·       lorsque les circonstances s’y prêtent, proposer des options au-delà de la prise de décision au nom d’autrui;

·       préciser l’obligation du mandataire spécial de tenir compte des valeurs et des objectifs personnels de celles et de ceux pour qui elle ou il prend des décisions, et lui procurer de meilleurs renseignements sur ses responsabilités;

·       accroître les pouvoirs des arbitres pour qu’ils réfléchissent à d’autres solutions moins restrictives et qu’ils adaptent les ordonnances de tutelle aux besoins des personnes concernées;

·       accroître l’accessibilité aux procédures de nomination externe et leur réactivité.

2.     Améliorer l’accès à la loi : on s’est beaucoup inquiété lors des consultations publiques de la CDO de ce que, du fait des insuffisances de l’accès à la loi, de nombreux aspects positifs de la législation en vigueur n’apportent que des avantages limités. Les personnes directement visées par la législation et leur famille peuvent être confrontées à de graves difficultés pour comprendre leurs droits, les exercer et les faire valoir. Le fait que les personnes directement concernées et leur famille connaissent mal la législation, l’absence de mécanismes réels de surveillance et de contrôle et le fait que les processus pour régler les différends et faire respecter les droits sont inaccessibles ou inadaptés sont autant de problèmes.

Au nombre des priorités visant à améliorer l’accès à la loi par les personnes directement concernées et par leur famille, il y a les mesures suivantes :

·       renforcer les dispositions de la LCSS relatives aux renseignements sur les droits afin de mieux garantir que les personnes reconnues incapables en vertu de cette Loi sont informées de leur situation juridique et des recours dont elles disposent;

·       améliorer la surveillance et le contrôle des évaluations de capacité et des processus visant à renseigner aux termes de la LCSS;

·       améliorer l’accès, pour tous les intervenants, à des renseignements sur les droits et les recours qui soient fiables et cohérents;

·       accroître le contrôle des activités de celles ou ceux que la personne a nommés;

·       réformer les mécanismes en place pour faire respecter les droits et régler les différends en vertu de la LPDNA;

·       contrôler l’efficacité des réformes qu’adopte le gouvernement.

3.     Renforcer la clarté et la coordination de la législation : ainsi que l’indique le bref aperçu du chapitre II sur les lois ontariennes concernant la capacité juridique et la prise de décision, celles-ci sont extrêmement complexes, et mises en application par l’intermédiaire d’institutions et de systèmes qui sont différents et nombreux. Du fait par exemple de la multiplicité des mécanismes d’évaluation de la capacité juridique, selon le type de décision et selon le contexte, non seulement les personnes mais aussi les prestataires de services et les spécialistes qui mènent les évaluations peuvent être perplexes sur ce qui constitue la bonne solution dans un contexte donné. Les objectifs et les normes de mise en application de la législation souffrent par ailleurs d’imprécision dans plusieurs domaines, de sorte que les responsables de la mise en application peuvent s’interroger sur leurs attributions et que la mise en application peut varier considérablement selon les contextes ou les prestataires de services. Enfin, la responsabilité de la mise en application de la législation est diluée entre de multiples ministères, institutions et professions, et il n’existe aucune entité, aucun mécanisme qui soit responsable ou capable de coordonner ces diverses activités afin d’en garantir le fonctionnement efficace et conforme à ce qui est prévu. La législation ne charge aucune institution particulière par exemple de l’information et de la vulgarisation juridiques : de nombreuses organisations ont certes beaucoup travaillé à répondre aux besoins, mais il n’existe aucun moyen de suivre ce qui a été accompli, ni de garantir que l’information et la vulgarisation sont exactes et adaptées dans les cas où des besoins subsistent, ni non plus de déceler et de prolonger les programmes et les méthodes qui fonctionnent bien dans ce domaine. Au nombre des priorités visant à renforcer la clarté et l’utilisation, il y a les mesures suivantes :

·       élaborer des normes et des principes fondamentaux précis pour les évaluations de capacité et les renseignements sur les droits

·       renseignements sur les droits en vertu de la LCSS;

·       établir la responsabilité prévue dans la législation pour la production des éléments d’information et de vulgarisation spécifiés dans ce domaine; mettre sur pied des ressources centralisées, accessibles et fiables pour les personnes que concerne ce domaine de la loi;

·       préciser les principes, les objets et la terminologie de ce domaine de la loi.

 

D.   Le projet de la CDO sur la capacité et la représentation aux fins du REEI fédéral

L’Ontario a demandé à la CDO d’examiner de quelle façon les adultes handicapés pourraient mieux participer au Régime fédéral enregistré d’épargne-invalidité (REEI), et le Conseil des gouverneurs de la CDO a approuvé ce projet sur la capacité et la représentation aux fins du REEI fédéral en avril 2013[13].

L’examen du Régime fédéral en 2011 a révélé des inquiétudes sur les processus de désignation du titulaire de régime dans les provinces. L’administration fédérale a répondu par la mise en place d’une mesure provisoire devant se terminer fin 2016. Le projet de la CDO visait à recommander la création d’une procédure ontarienne simplifiée de nomination du représentant légal pour les adultes qui sont admissibles à un REEI mais sont incapables de le mettre en place en raison de soucis à propos de leur capacité juridique.

Ce projet a été lancé dans le contexte de celui, global et pluriannuel, sur la capacité juridique, la prise de décision et la tutelle, sur lesquelles porte le présent Rapport préliminaire. Plus ciblé, il a été entrepris en priorité du fait de la fin imminente de la mesure fédérale provisoire. On lui a attribué une portée étroite afin de traiter un obstacle précis à l’accès au REEI : la nomination d’un « représentant légal REEI » pour les bénéficiaires nécessitant que quelqu’un d’autre prenne les décisions relatives à la REEI en Ontario. La CDO s’y est efforcée de restreindre les recommandations dans les domaines chevauchant le projet plus large, afin d’éviter de limiter les options. Le délai plus serré du projet sur le REEI se prêtait moins à l’examen des questions épineuses ou à celles susceptibles de fortes répercussions sur le régime actuellement en place en vertu de la LPDNA. 

Le rapport final du projet sur le REEI a recommandé que soit instituée une procédure qui permettrait aux adultes de nommer personnellement un représentant légal REEI, lorsqu’ils sont incapables ou que l’on s’interroge sur leur capacité juridique et qu’ils n’ont pas de tuteur ni de procuration, en vue d’ouvrir un REEI et d’en gérer les fonds (mais non de gérer les fonds retirés du régime). Les critères de création de cette nomination seraient fondés sur les critères de la common law pour la capacité d’établir les procurations, et la personne nommée aurait les mêmes obligations que le détenteur d’une procuration relative aux biens en vertu de la LPDNA.

À l’instar du présent projet, celui sur le REEI a fait appel aux principes des Cadres et a considéré qu’il est essentiel de favoriser la participation et l’inclusion véritables des personnes handicapées, de garantir les protections nécessaires, de prendre en compte les besoins des tiers, et de définir des solutions pratiques.

Pour élaborer l’analyse et les projets de recommandation du présent rapport dans le cadre de ce grand projet, la CDO a tenu compte des acquis et des recommandations du projet sur le REEI, surtout la nécessité d’arriver à des solutions souples et le souci d’éviter l’imposition inutile d’une forme générale de prise de décision au nom d’autrui comme solution à des besoins beaucoup plus précis d’aide à la prise de décision, ainsi que les obstacles créés par des mécanismes de nomination coûteux et compliqués. En particulier, les recommandations de permettre les autorisations d’accompagnement et d’explorer la prise de décision en réseau au chapitre VI.F ci-après, celle de prévoir des nominations beaucoup plus restreintes et plus souples au chapitre IX.F.4 ci-après, ainsi que celle d’établir des processus de nomination plus accessibles au chapitre VIII ci-après, devraient largement contribuer à éliminer les obstacles qui sous-tendent la nécessité du projet sur le REEI.

E.     Le présent rapport préliminaire

1.     Son objet

Le Document de travail présente les problèmes majeurs de la législation concernant la capacité juridique, la prise de décision et la tutelle, une analyse générale et des possibilités d’orientation de réforme. Il comporte des questions destinées à orienter le débat. Le présent rapport ne vise pas à répéter ce qu’a exposé le Document de travail. C’est dans ce dernier que figure par exemple un exposé de l’état actuel du droit et de la législation comparable. Le présent rapport expose l’analyse des questions par la CDO, à partir des consultations publiques et des recherches, ainsi que des projets de recommandation visant à modifier les lois, les orientations et les méthodes afin de répondre aux priorités de réforme qui ont été définies. Il a été approuvé par le Conseil des gouverneurs de la CDO le 8 octobre 2015.

La CDO a largement diffusé le présent Rapport préliminaire pour obtenir des commentaires. À partir de ceux-ci et de ses recherches permanentes, elle produira le rapport final avec ses recommandations; celui-ci sera adressé à toutes celles et à tous ceux qui ont participé à la réalisation du projet, à tous les principaux intervenants, puis il sera publié.

Si vous souhaitez vous exprimer sur l’analyse et les recommandations de la CDO, des renseignements utiles, notamment sur les délais, figurent au chapitre XIII. Étapes suivantes.

2.     Sa structure

Celle-ci suit les grandes questions de réforme plutôt que le cadre législatif actuel.

Le chapitre II présente un bref aperçu de la conception ontarienne de la capacité juridique, de la prise de décision et de la tutelle, et souligne les points forts et les insuffisances de la législation ontarienne.

Le chapitre III expose brièvement les Cadres de la CDO et étudie leur application à ce domaine de la législation.

Le chapitre IV examine la conception fonctionnelle et cognitive de la capacité juridique, et en particulier l’autre conception exposée dans l’Observation générale sur l’article 12 de la Convention relative aux droits des personnes handicapées. 

Le chapitre V examine les quatre mécanismes officiels d’évaluation de la capacité juridique en Ontario : évaluation de la capacité de consentir à des traitements, appréciation de la capacité de consentir à l’admission à des soins de longue durée ou à des services d’aide personnelle, examen de la capacité de gérer ses biens en vertu de la LSM, évaluation de la capacité pour la gestion des biens et le soin de la personne en vertu de la LPDNA

Le chapitre VI examine la prise de décision au nom d’autrui et les autres solutions proposées, comme la prise de décision accompagnée et la codécision. 

Le chapitre VII examine les préoccupations relatives au manque de responsabilité et de transparence dans les processus de nomination du procureur, et propose des réformes.

Le chapitre VIII examine les lacunes des mécanismes en vigueur en Ontario pour faire valoir ses droits et régler les différends dans ce domaine du droit.

Le chapitre IX présente des réformes des processus de nomination du tuteur, qui visent à accroître la souplesse des processus et à réduire les interventions inutiles.

Le chapitre X examine les possibilités d’élargir l’accès aux représentants professionnels.

Le chapitre XI souligne l’importance de la vulgarisation et de l’information dans le fonctionnement de la législation ontarienne sur la capacité juridique, la prise de décision et la tutelle, et présente des réformes visant à mieux la faire comprendre et à développer des compétences pour qu’elle soit correctement appliquée.

Le chapitre XII discute brièvement les priorités et les délais de mise en œuvre des projets de recommandation.

Chacun des chapitres III à XI présente un bref aperçu des principaux éléments de l’état actuel du droit, ainsi que les sujets de préoccupation relevés dans les recherches et lors des consultations publiques; il étudie l’application des Cadres à ces préoccupations, souligne la façon dont la CDO envisage la réforme et propose des projets de recommandation à l’égard de celle-ci. Un bref résumé des projets de recommandation figure à la fin de chaque chapitre.

 

Précédent Prochaine
Première page Dernière page
Table des matières