A.              Introduction

Au chapitre précédent, nous avons fait référence aux changements dans l’accès au système de justice familiale qui, selon nous, aideraient ceux qui ne peuvent se payer les services d’un avocat, qui ne sont pas prêts pour une raison ou une autre à accéder au système judiciaire et qui ont besoin d’aide pour utiliser les outils d’autoassistance. Ces changements sont centrés sur le rôle des intermédiaires de confiance établis dans la collectivité qui aident les utilisateurs du système juridique familial qui pourraient avoir besoin d’aide pour des raisons de littératie, de langue, de culture ou d’absence de ressources économiques, sur un accès amélioré aux outils d’autoassistance, sur une représentation adéquatement réglementée par des avocats formés pour livrer des services moindres que les services complets, et sur des services fournis par des personnes autres que des avocats ayant reçu une formation juridique. Dans le présent chapitre, nous suggérons que bien que ces changements en tant que tels puissent améliorer l’accès au système de justice familiale, les fournir de manière intégrée, en lien avec des services plus poussés, pourrait aider les personnes aux prises avec des difficultés familiales à parvenir plus efficacement à un règlement de leurs problèmes, à l’avantage à la fois des utilisateurs et du système.

Les personnes qui vivent une rupture font face à un certain nombre de défis, dont certains sont des problèmes juridiques, mais en majorité n’en sont pas. Bien qu’un certain nombre d’intervenants dans le système de justice familiale reconnaissent que l’éclatement de la famille entraîne des problèmes économiques et sociaux ainsi que des problèmes juridiques, les efforts pour fournir des services intégrés ont été à ce jour limités. Pour de nombreuses personnes, cela signifie qu’elles doivent consacrer beaucoup de temps et d’énergie, à un moment de crise personnelle, à naviguer dans un réseau complexe de services.

Par certains aspects, ce problème est analogue aux difficultés associées au système de soins de santé. À propos de ce dernier, un observateur a émis le commentaire suivant : [traduction] « sans point d’entrée clairement établi, il est beaucoup plus difficile de coordonner les efforts »[406] et souligne qu’ « il n’y a pas d’endroit dans le système de soins de santé où les patients peuvent normalement aller pour accéder aux soins dont ils ont besoin, rapidement et efficacement, et assurer le suivi dans leur périple ». Les urgences, plutôt qu’un fournisseur de soins ordinaire (médecin de famille) deviennent le point d’entrée de facto. Il n’y a pas vraiment de contrôleur d’accès pour les services coûteux et il y a peu de continuité dans les soins. Il fait également remarquer que les équipes interdisciplinaires, qui comprennent les infirmières, les pharmaciens et d’autres professionnels de la santé (mais pas nécessairement des médecins) pourraient assurer une continuité [407]. Nous discutons ci-dessous de l’approche interdisciplinaire qui se développe dans le domaine des soins de santé.

Nous croyons qu’une approche interdisciplinaire serait tout aussi bénéfique dans le traitement des problèmes de justice familiale. Des points d’entrée complets ou intégrés, les « centres multidisciplinaires et multifonctionnels », offriraient des renseignements, des conseils et des services tels que des avis et de l’assistance juridique qui pourraient permettre à une personne de parvenir en douceur au règlement de ses problèmes en passant par une autre solution de règlement (qui pourrait être offerte sur place) ou, au besoin, par l’entremise des tribunaux. L’objectif principal des centres serait d’améliorer l’accès pour les personnes qui ne peuvent pas se payer les services d’un avocat. Cependant, leur mise en œuvre pourrait être liée à une prestation privée pour que les services soient offerts sur la base de leur coût, car des professionnels en pratique privée pourraient maintenant aiguiller leurs clients vers d’autres services.

Comme nous en discutons ci-dessous, il n’est pas nécessaire que ces centres multidisciplinaires et multifonctionnels prennent une forme particulière pour offrir les services requis afin de créer des points d’entrée efficaces. L’adhésion à une forme particulière peut ne pas être pratique pour des raisons économiques et pour d’autres ressources et ne pas être optimale dans toutes les parties de la province. Nous discutons de plusieurs modèles ci-dessous. Ce que ces points d’entrée ou d’accès unique doivent avoir en commun, cependant, c’est de fournir des services juridiques et non juridiques (ou un accès facile à ces derniers) et un cheminement homogène qui répond aux besoins des utilisateurs et permet de la souplesse à mesure que ces derniers progressent dans le système.

Bien qu’elle soit essentielle étant donné que la prestation des services est répartie parmi de nombreux intervenants, la collaboration peut prendre diverses formes :

[traduction]
Dans la documentation sur les entreprises axées sur les services aux particuliers et les relations interorganisationnelles, elle [signifie]… la fusion officielle des structures et des processus entre les organisations. Elle fait partie d’un spectre allant de l’informel à l’officiel, commençant avec la coopération (comme un échange d’information dénué de tout caractère officiel), jusqu’à la coordination (comme l’élaboration de protocoles officiels) et en fin de compte, l’intégration, qui met en jeu la formation de nouvelles structures organisationnelles[408]…

L’éclatement de la famille est un problème complexe, dont la résolution peut comporter plusieurs volets et la participation de plusieurs organismes et fournisseurs de services. Tous les principaux intervenants dans le système de justice familiale conviennent qu’une intervention rapide et un règlement à point nommé des conflits sont préférables pour les familles. Généralement, et lorsque c’est approprié, un règlement négocié est plus susceptible de durer longtemps et de donner satisfaction qu’un règlement imposé, parfois à une partie qui se sent lésé par le résultat. Un règlement négocié peut ne pas être approprié dans certains cas et le système le reconnaît dès le début, comme nous en discutons dans la première partie. Nous croyons, cependant, qu’un accès intégré au système peut contribuer à un règlement plus efficace à des stades ultérieurs. À l’heure actuelle, il n’existe pas de point d’entrée clair dans le système de justice familiale qui fournisse une réponse intégrée. Nous sommes persuadés que, à long terme, les investissements dans un point d’accès intégré peuvent améliorer la réponse et l’efficacité du système de justice familiale en réduisant les pressions sur les personnes aux prises avec un différend familial ainsi que sur le système de justice familiale. Nous croyons que des approches globales fournissent des résultats plus durables qui réduisent la pression sur le système exercée par les familles qui continuent à fréquenter les tribunaux alors que leurs besoins et leurs situations changent. Comme l’a fait remarquer Julie MacFarlane :

[traduction]
Dans le domaine de la famille, les clients peuvent profiter de l’expertise combinée des avocats, des thérapeutes, des conseillers familiaux et des intervenants auprès des enfants, des spécialistes de l’aide à l’enfance et des planificateurs financiers. Dans chaque cas, la valeur ajoutée pour les clients qui peuvent se payer une gamme de services intégrés est qu’ils peuvent bâtir des solutions complètes à long terme en tenant compte des incertitudes, des crises ou des conflits au lieu d’acheter des conseils hétéroclites, qui peuvent laisser passer des occasions de solutions créatives ou qui peuvent ultimement entrer en conflit avec les conseils d’autres consultants professionnels[409].

Nous sommes conscients que tout le monde n’est pas d’accord avec notre recommandation de point d’accès intégré, en partie parce qu’on assume que cela coûtera cher, mais aussi, de façon plus concrète, on croit que les objectifs du point d’accès intégré sont déjà atteints. Par exemple, en réponse à notre rapport préliminaire, l’Advocates’ Society a laissé entendre ce qui suit :

[traduction]
Nombre des objectifs du centre « multidisciplinaire et multifonctionnel » proposé sont déjà mis en œuvre par l’intermédiaire du modèle CIDF/CSIO/PIO. L’expansion du soutien et du financement pour l’infrastructure existante est une stratégie plus efficiente et plus rationnelle que la création d’un nouveau modèle de prestation de services.

Bien que nous convenions que les services offerts dans les tribunaux auxquels fait référence l’Advocates’ Society sont bénéfiques, ils ne traitent pas des enjeux cernés dans ce rapport, à savoir qu’il n’y a pas d’approche systémique pour aborder la diversité, que la combinaison existante de CIDF, avec des coordonnateurs à l’information et à l’aiguillage et des avocats-conseils, et du PIO ne fournit pas suffisamment de services juridiques abordables et que, même si les CSIO reçoivent la tâche d’aiguiller les clients, ils ne sont pas en mesure de fournir une réponse globale à tous les problèmes issus de l’éclatement de la famille. De plus, bien que ces services ne dépendent pas du fait que l’individu ait décidé de présenter sa demande au tribunal, ils sont liés de façon importante aux tribunaux. C’est l’un de leurs avantages, mais cela signifie également que les personnes qui en sont aux premiers stades de réflexion au sujet de leur différend ou qui, pour une raison quelconque, hésitent à recourir au système judiciaire sont moins susceptibles de recevoir de l’aide.

L’Ontario Collaborative Law Federation, dans le cadre de la présentation que nous avons reçue de sa part, appuyait le concept de fournir des ressources interdisciplinaires en dehors du système judiciaire :

[traduction]
Nous convenons que les ressources pour les familles (points d’entrée) ne devraient pas être liées au système judiciaire et, en particulier, que les parties ne devraient pas avoir à intenter un procès pour se prévaloir de ces ressources. Il est intéressant de noter que votre rapport préliminaire appuie le besoin des familles d’avoir accès à des professionnels (de la famille) en santé mentale et des professionnels en finances neutres ainsi qu’à des avocats. L’approche de l’équipe interdisciplinaire est unique au processus collaboratif.
[…]
Un professionnel en santé mentale ou « de la famille » (agissant à titre de coach ayant reçu une formation sur la collaboration), ou un facilitateur ou un expert de l’enfance peut aider les avocats à dépister tout déséquilibre de pouvoir, problème de personnalité ou important défi en matière de communication. Ces spécialistes travaillent souvent avec les clients en dehors des réunions pour aider à régler des problèmes non juridiques et élaborer des plans parentaux. Les collaborateurs professionnels travaillent ensemble, et non en désaccord, et se tiennent mutuellement informés… Les clients en droit de la famille ont souvent besoin d’aide pour régler des problèmes émotionnels ou financiers. Fournir aux clients l’expertise particulière dont ils ont besoin contribue à accélérer le règlement de leurs problèmes juridiques.

 

B.              Leçons tirées du secteur des soins de la santé

Notre système de santé est aux prises avec des problèmes liés aux manques de coordination dans la prestation des services depuis un certain nombre d’années et a déterminé les « soins interprofessionnels » comme étant un modèle pour prodiguer des soins de santé efficaces centrés sur le patient.

[traduction]
Le système imaginé serait représentatif des personnes et des collectivités desservies et nécessiterait leur participation. Il intégrerait le continuum des services englobant la promotion de la santé, la prévention des maladies et le maintien du bien-être et de la santé dans les formes de soins communautaires, en établissement et en établissement de soins spécialisés.
[…]
Cela favoriserait la collaboration entre les professionnels et les collectivités, ainsi qu’entre le secteur de la santé et les autres secteurs[410].

Comme dans le cas du droit de la famille, où un grand nombre de personnes ne bénéficient pas de l’aide d’un avocat, en ce qui concerne les soins de santé, un nombre croissant de personnes n’avaient pas accès à un médecin de soins primaires. En 2005, 1,2 million d’Ontariens n’avaient pas de médecin de famille[411]. Dix ans plus tôt, les discussions sur les systèmes médicaux intégrés les ont dépeints comme étant la façon de répondre à [traduction] « la prise de décision fragmentée, avec ses inefficacités inhérentes dans la réponse aux besoins des patients, la gestion et l’élaboration des politiques » qui découle de l’organisation du système de soins de santé[412]. Les modèles intégrés peuvent ne pas toucher différentes spécialités, néanmoins, les auteurs laissent entendre ce qui suit :

[traduction]
Des systèmes « intégrés verticalement » semblent offrir un plus grand potentiel de succès. Ces systèmes fournissent une vaste gamme de services et les clients peuvent progresser rapidement dans le continuum des soins. Les systèmes les plus performants sont ceux qui sont intégrés dans une collectivité locale pour fournir des services à une population précise[413].

Tout comme la profession juridique, la profession médicale telle qu’elle existait n’appuyait pas largement les collaborations interprofessionnelles au départ. Brenda Jacobs et Lesley Jacobs notent que l’Ontario Medical Association s’est au départ opposée aux centres de santé communautaire [traduction] « parce qu’ils supposaient une pratique de la médecine qui menaçait la relation entre le médecin et son patient à la fois sur le plan de la confidentialité des renseignements du patient et du paiement des services »[414]. Par ailleurs, l’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario a déclaré il y a dix ans que [traduction] « afin de mieux répondre aux besoins des patients, les soins de santé ont évolué de sorte que la prestation des soins ne se fait plus dans le cadre de domaines exclusifs de pratique, mais par des équipes multidisciplinaires »[415]. D’autres médecins praticiens, comme l’Ordre des sages-femmes, sont aussi en faveur des soins interprofessionnels[416].

Les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont déterminé la création de soins interprofessionnels comme étant une priorité pour le renouvellement des soins de santé dans les accords de 2003 et 2004[417]. Il s’est tenu en 2006 un sommet visant à établir les priorités pour faire progresser les soins interprofessionnels en Ontario[418]. Le ministère de la Santé et des Soins de longue durée et le ministère de la Formation et des Collèges et Universités ont formé un Comité directeur de la collaboration interprofessionnelle en soins de santé qui regroupe des experts dans les domaines des politiques, de l’éducation, de l’exercice professionnel, de la réglementation et de la structure organisationnelle qui ont joué un rôle important à ce jour dans l’élaboration de la formation et la création de soins de santé interprofessionnels. Le Comité avait pour mandat d’élaborer un plan directeur pour la collaboration interprofessionnelle en soins de santé et il a formulé les quatre recommandations suivantes afin de fournir un cadre de travail efficace pour mettre en œuvre la collaboration interprofessionnelle en soins de santé :

  • Construire l’assise : Ce processus de construction commence par le système d’éducation, qui doit préparer les soignants actuels et futurs à travailler au sein de modèles de collaboration interprofessionnelle en soins de santé. Il doit inclure l’élaboration des programmes d’enseignement et des programmes de formation et de développement professionnel.
  • Partager la responsabilité : Cela suppose de réévaluer les normes de pratique en vue d’y intégrer des démarches axées sur la collaboration interprofessionnelle et le travail d’équipe en matière de soins.
  • Mettre en place des instruments d’habilitation systémiques : Les lois et l’assurance responsabilité de tous les fournisseurs de soins de santé doivent être revues et une attention particulière doit être portée à la signification de la responsabilité professionnelle au sein de structures axées sur le travail d’équipe.
  • Opérer un changement de culture durable : Cela exige que les responsables des politiques cherchent des façons d’intégrer la collaboration interprofessionnelle en soins de santé aux stratégies actuelles et des mesures incitatives à l’adoption de la collaboration interprofessionnelle en soins de santé[419].

Le plan directeur recommande des actions concrètes pour la mise en œuvre de ce cadre de travail. Il est intéressant de noter que le plan directeur ne fait pas la promotion d’un modèle précis de collaboration interprofessionnelle en soins de santé. On y présente plutôt la collaboration interprofessionnelle en soins de santé comme une approche pour la prestation de services. Les recommandations contenues dans le plan directeur représentent des changements systémiques à apporter au secteur de la santé. Il a été conçu pour servir de tremplin à une vaste gamme d’intervenants, incluant des organismes individuels, des travailleurs de la santé, des éducateurs, des patients et leurs familles, pour intégrer les soins interprofessionnels et les efforts de formation dans leur milieu de travail et les établissements d’enseignement.

À la suite de la parution du plan directeur, le ministre de la Santé et des Soins de longue durée a approché le Conseil consultatif sur la réglementation des professions de la santé (le Conseil), un organisme indépendant qui donne des conseils au sujet de questions réglementaires relatives aux professions de la santé en Ontario, afin de recommander des mécanismes pour faciliter et appuyer la collaboration interprofessionnelle. Cela a entraîné des modifications à la Loi sur les professions de la santé réglementées, notamment :

  • élargir les champs d’exercice à 12 professions;
  • exiger que les ordres travaillent ensemble à l’établissement de normes communes pour les connaissances, les compétences et le discernement dont doivent faire preuve les professionnels qui fournissent des services identiques ou similaires;
  • faire des soins d’équipe une composante clé des programmes d’assurance de la qualité des ordres de réglementation afin d’assurer la permanence des compétences que doivent posséder les professionnels de la santé autorisés[420].

À la suite de consultations approfondies menées sur une période de deux ans auprès des intervenants, le Comité de mise en œuvre stratégique de la collaboration interprofessionnelle en soins de santé a produit un rapport qui « décrit les modèles, les concepts et les ressources liés à la formation interprofessionnelle [afin] de guider la mise en œuvre des SI dans divers milieux »[421]. Le Comité de mise en œuvre a créé le groupe de travail sur les programmes d’études pour la formation interprofessionnelle en soins de santé qui a préparé un guide pour l’enseignement des compétences interprofessionnelles dans les collèges et les universités. Le ministère de la Formation et des Collèges et Universités et le ministère de la Santé et des Soins de longue durée ont soutenu financièrement six centres universitaires des sciences de la santé en Ontario pour aider au développement de la formation interprofessionnelle[422]. Le Comité de mise en œuvre a créé un groupe de travail sur les compétences fondamentales pour énoncer les compétences et valeurs que tous les soignants doivent posséder pour enseigner et pratiquer la collaboration interprofessionnelle en soins de santé. Le groupe de travail a énoncé ces compétences après une consultation approfondie des intervenants. Il a aussi élaboré une charte qui vise l’appui d’« une stratégie à plusieurs niveaux au profit du leadership concerté, amorce le dialogue et facilite l’autonomisation et la responsabilité au sein et à l’échelle du système de santé… »[423]

Afin de rendre la collaboration en soins de santé réalisable et durable, le Comité de mise en œuvre a mis au point une stratégie de diffusion pour faire progresser la formation interprofessionnelle et encourager les gens à utiliser les documents et appuyer l’application des outils. Il a également recommandé de tirer parti de la structure des réseaux locaux d’intégration des services de santé de l’Ontario (RLISS) comme tremplin pour lancer les soins interprofessionnels[424].

Nous notons que l’approche de la collaboration interprofessionnelle en soins de santé est liée (au moins essentiellement) aux fournisseurs de soins de santé, mais inclut également les professions comme les travailleurs sociaux et les diététistes. Parmi les autres développements issus de cette initiative, citons la Loi de 2009 modifiant des lois en ce qui concerne les professions de la santé réglementées, qui a élargi le champ de pratiques de certaines professions, comme celle de pharmacien[425]. Les activités connexes comprenaient un sommet auquel ont participé [traduction] « 80 chefs de file et décideurs dans les secteurs de l’éducation et de la pratique collaborative des ressources humaines dans le domaine de la santé en Ontario » avec les objectifs suivants :

[traduction]
S’appuyer sur les pratiques exemplaires actuelles et utiliser les expériences et l’expertise des chefs de file et des décideurs en formation interprofessionnelle au sein des secteurs de la santé, de la formation et de l’éducation, ainsi que le gouvernement dans tout l’Ontario, pour cerner les priorités clés dans les changements à apporter au système de santé et d’éducation en vue de favoriser et d’appuyer davantage les initiatives en formation interprofessionnelle[426].

Nous reconnaissons que l’analogie entre le système de justice familiale et le système de soins de santé n’est pas parfaite. Les soins de santé sont considérés, ce qu’ils sont effectivement pour la plupart, comme étant un système financé à même les fonds publics, bien que les patients puissent avoir à payer certains services et doivent en payer d’autres eux-mêmes ou par le truchement de régimes de santé additionnels. Certains services de santé (comme les soins dentaires) sont fournis par le secteur privé. Néanmoins, la plupart des services requis par la plupart des gens sont financés par les fonds publics et il y a un lien plus étroit entre les fournisseurs de services et le gouvernement, ainsi qu’un besoin accru de collaboration avec le gouvernement pour fournir des solutions. Le fait que les soins de santé soient financés et gérés par l’État facilite également la logistique de la mise en œuvre. Comme cela a été signalé ci-dessus, les RLISS offrent une plateforme pour la mise au point de modèles de soins interprofessionnels.

Par comparaison, la prestation de services juridiques reste en majeure partie une entreprise privée et la capacité d’influer sur les décisions de politiques entourant la pratique est plus limitée. Pourtant, la plus grande partie du système de justice familiale est aussi financée par les fonds publics : la prestation d’information, les tribunaux, certains services de médiation et la prestation de services juridiques dans certaines circonstances.

De plus, l’engagement du public envers les soins de santé est plus grand, car les soins de santé sont considérés comme un service essentiel et le lien entre le fournisseur de services primaires et le patient est prévu pour être de longue durée. Le besoin de services de justice familiale, bien qu’élevé, n’est nullement universel et il ne dure généralement pas la vie entière.

Le projet de soins de santé interprofessionnels vise le système des soins de santé dans son ensemble, tandis que dans le projet présent, nous nous sommes concentrés uniquement sur le système de droit de la famille, et même sur une partie seulement de celui-ci, à savoir les points d’accès ou d’entrée. Le projet relatif aux soins de santé est aussi plus ambitieux que notre proposition, étant donné qu’il comprend la formation, ce qui repose sur l’hypothèse que pour fonctionner différemment, les professionnels doivent être formés différemment. Nous ne suggérons pas que notre approche globale comprenne une formation en collaboration. Cependant, il pourrait bien y avoir des leçons apprises des soins de santé à cet égard qui pourraient être explorées si l’occasion se présentait dans le futur. Des changements dans la pratique de la formation juridique pourraient représenter une contribution excitante et révolutionnaire vers une nouvelle façon d’offrir des services juridiques.

Nous voulons aussi préciser que notre proposition d’approche intégrée relativement à l’accès à la justice familiale comprend d’autres professions dont le travail n’est pas nécessairement lié au système de justice, ainsi qu’une gamme d’acteurs du monde juridique. En fait, c’est l’une des principales raisons d’être de notre proposition. C’est moins le cas avec le projet relatif aux soins de santé, bien qu’il comprenne une grande variété de professionnels directement responsables des soins de santé.

La différence peut-être la plus critique, cependant, est que les principaux joueurs dans le système juridique sont largement indépendants les uns des autres, ce qui complique l’élaboration et la mise en œuvre de ces centres. Bien qu’il y ait de la confidentialité dans la relation médecin-patient, le secret professionnel entre l’avocat et son client a peu d’exceptions. Plus important encore, il a été dit que le principe constitutionnel d’indépendance et l’« autonomie professionnelle » des avocats et l’indépendance du [traduction] « Barreau du Haut-Canada, des facultés de droit, des cliniques juridiques communautaires et d’[Aide juridique Ontario] elle-même…ainsi que des gouvernements fédéral et provinciaux » « permet à chacun d’eux, dans une mesure plus ou moins grande, d’éviter d’endosser la responsabilité de la réforme du système »[427]. Le changement nécessite, comme dans le secteur des soins de santé, que toutes les entités soient prêtes à travailler ensemble, ce que chacune d’elles a admis à différents moments.

Les partenariats ou la collaboration entre les professions juridiques et les professions de la santé sont intéressants. En Colombie-Britannique, par exemple, l’hypothèse qui sous-tend un programme planifié, RICHER, est en complète opposition à l’hypothèse qui sous-tend notre proposition de centres intégrés, selon laquelle les problèmes juridiques peuvent également refléter d’autres sortes de problèmes. RICHER reconnaît que les problèmes de santé peuvent avoir une composante ou des conséquences juridiques[428]. Pro Bono Law Ontario gère deux programmes (à SickKids à Toronto et au Children’s Hospital du London Health Sciences Centre) qui aident les familles à faible revenu à régler les problèmes juridiques qui pourraient nuire aux soins à leurs enfants[429].

Nonobstant les différences entre les soins de santé et la justice familiale, le processus par lequel le concept de soins interprofessionnels est passé d’une idée universitaire à un impératif politique pour le gouvernement provincial et, finalement, à sa mise en œuvre dans toute la province est un exemple utile de la façon dont les intervenants qui appuient l’idée de centres multidisciplinaires pour les clients en justice familiale peuvent aborder leur mise en place. De plus, nombre des services que l’on trouverait dans un centre multidisciplinaire sont déjà offerts par une variété de fournisseurs de services dans toute la province. Certains de ces services sont financés et gérés par l’État et certains sont dispensés par des organismes sans but lucratif, comme nous l’expliquons ci-dessous.

 

C.              Exemples de services multidisciplinaires et multifonctionnels dans le système de justice

Il y a un certain nombre d’organismes qui pourraient être mis à contribution de différentes façons afin de créer un modèle de prestation de services logique pour le lieu géographique et la collectivité qu’il est censé desservir. Même si, dans certains cas, cela signifiait, lorsque les ressources sont disponibles, un établissement entièrement exploité et financé par l’État, dans d’autres cas, on pourrait s’appuyer sur les ressources déjà fournies par une variété d’organismes pour créer un point d’entrée cohésif. Nous répétons que des services multidisciplinaires et multifonctionnels complets, bien qu’ils soient censés fournir des services intégrés similaires[430], n’ont pas besoin de prendre la même forme dans chaque cas.

Des services complets peuvent être fournis dans un endroit physique, virtuellement ou sous une forme combinée. Différentes parties de la province peuvent bénéficier de différents arrangements. Ce que ces points d’entrée ou d’accès unique doivent avoir en commun, cependant, c’est de fournir des services juridiques et non juridiques (ou un accès facile à ces derniers) et un cheminement homogène qui répond aux besoins des utilisateurs et permet de la souplesse à mesure que ces derniers progressent dans le système.

Nous examinons ci-après différents modèles pour fournir des services multiples aux clients. Ceux-ci vont d’un consortium de fournisseurs de services qui travaillent ensemble pour un but commun à un modèle d’intégration ou un lieu commun regroupant différents intervenants à un centre financé et géré par le gouvernement. Certains fournissent des services en droit de la famille et d’autres visent différents secteurs du droit. Tous envisagent la mise en place de partenariats et la collaboration entre fournisseurs de services à différents degrés. Nous croyons que tous ces modèles pourraient être utilisés dans le domaine du droit de la famille, selon le cas, compte tenu du financement disponible, du lieu géographique et d’autres facteurs. Pour être efficaces, ils doivent aussi être mis en place de manière systématique plutôt qu’ad hoc et liés à d’autres parties du système.

 

1.               Un consortium de fournisseurs de services

Un modèle de consortium envisage un groupe d’organismes locaux juridiques et non juridiques et des organismes provinciaux qui travaillent ensemble à la mise sur pied d’un système de prestation de services cohérent pour les clients. Ce modèle ne suppose pas un lieu commun réel pour la prestation des services; ces derniers sont plutôt coordonnés à un point central d’information pour les renseignements d’évaluation et les activités d’aiguillage. La région d’Ottawa pilote actuellement ce modèle[431], avec l’aide financière de la Fondation du droit de l’Ontario. Plus de 30 organismes travaillent ensemble, avec Services juridiques communautaires du Sud d’Ottawa comme chef de file. Le but de ce consortium est de fournir des services juridiques et non juridiques intégrés aux minorités linguistiques d’Ottawa. Les objectifs comprennent ce qui suit :

[traduction]
Bâtir au sein du secteur des services sociaux et de la santé communautaire la capacité de cerner les problèmes juridiques, de fournir l’information juridique de base et d’orienter promptement les personnes qui ne parlent ni anglais ni français ainsi que celles qui ont des difficultés importantes à communiquer en raison d’une déficience sensorielle ou d’un trouble de la parole ou du langage

et [traduction] « promouvoir la collaboration parmi les services juridiques et les organismes de services sociaux et de santé communautaire »[432].

Un modèle de consortium est fondé sur la présence de plusieurs organismes dans la collectivité qui ont la capacité de fournir une variété de services. C’est le moins coûteux des modèles. Le budget soumis pour le projet d’Ottawa se situait autour de 280 000 $ par année[433].


2.               Différents fournisseurs de services sous un seul toit : centres de justice familiale

Les centres de justice familiale sont nés à San Diego, en Californie, en 2002, en réponse aux besoins des victimes de violence familiale. Même s’il y avait déjà de nombreux organismes et services qui répondaient aux cas de violence familiale à San Diego, il était dans les faits extrêmement difficile pour les victimes traumatisées de naviguer dans ses services[434]. Des défenseurs de l’intérêt communautaire et des fournisseurs de services ont eu l’idée de regrouper les services de justice criminelle ou civile et les fournisseurs de services sociaux dans un centre à guichet unique où les victimes de violence familiale pourraient être « entourées » de services[435]. Le San Diego Family Justice Center a ouvert en octobre 2002 et abrite l’unité contre la violence familiale du service de police, celle du procureur de la ville et du personnel provenant d’environ 20 autres organismes communautaires sans but lucratif[436]. Aujourd’hui, ces services comprennent entre autres des conseils juridiques, des services-conseils, de la nourriture, des vêtements, du soutien spirituel et de l’aide médicale[437].

Il existe à l’heure actuelle trois centres de justice familiale au Canada, tous en Ontario : à Kitchener (Family Violence Project of Waterloo Region),[438] à Oshawa (Durham Region’s Intimate-Relationship Violence Empowerment Network – D.R.I.V.E.N.)[439] et à Brampton (Safe Centre of Peel: Collaborative Assistance for Victims of Abuse and Violence)[440]. Ces centres peuvent offrir différents services, ainsi que des services en commun. Par exemple, le centre de Kitchener offre de l’aide médicale aux victimes d’agression sexuelle et de violence familiale. Il y a plusieurs organismes sur place à D.R.I.V.E.N., dont la Société d’aide à l’enfance de Durham. Le centre de Peel offre des services d’immigration et de transport.

Les centres de justice familiale individuels ont différentes structures de gouvernance : il y a le modèle du centre dont la planification et la mise en œuvre des services est dirigée par un organisme gouvernemental, le centre qui devient un service de la ville financé directement par le gouvernement et l’organisme sans but lucratif géré par un conseil d’administration indépendant, qui est le modèle le plus couramment choisi[441]. Certains centres de justice familiale tentent d’offrir des services complets dans un lieu physique tandis que d’autres fonctionnent sous forme de « service général », effectuant une fonction de triage et orientant les clients vers des services distincts situés sur place ou ailleurs.

Un exemple de ce type de centre, le Peel Family Justice Centre, a ouvert en octobre 2011 après une campagne de financement menée par Catholic Family Services Peel-Dufferin (CFSPD). CFSPD s’intéressait au modèle de centre de justice familiale et a commencé à solliciter des fonds pour construire un bâtiment qui abriterait à la fois son siège social et un centre de justice familiale. Au printemps 2010, le gouvernement fédéral s’est engagé à verser 2,2 millions de dollars provenant du Fonds de stimulation de l’infrastructure pour financer le projet de construction. Le projet a également reçu l’appui financier du gouvernement de l’Ontario (1 000 000 $), de la Municipalité régionale de Peel (prêt sans intérêts de 500 000 $) et d’une campagne de financement privé (1 000 000 $)[442].

Shelina Jeshani, l’ancienne directrice de programmes responsable du soutien à la planification et à la construction pour le centre de justice familiale, a dirigé un comité de planification regroupant CFSPD et 15 autres fournisseurs de services[443]. Elle a précisé à la CDO que le centre de justice familiale à Peel ne constituait pas simplement un regroupement de fournisseurs de services, mais un modèle de services intégrés. Cela signifie qu’il y a des politiques et des protocoles communs auxquels adhère chaque fournisseur de service. Tous les fournisseurs de services emploient un outil d’admission et de triage commun et utilisent le même outil d’évaluation des risques.

Dans le modèle de centre de justice familiale, chaque fournisseur fournit des services dans le cadre de ses propres budgets. Le centre offre un lieu de prestation des services. De plus, la vision et la planification stratégique ont permis une plus grande intégration de ces services et l’utilisation d’outils et de processus communs.

 

3.               Centres financés par le gouvernement

Un réseau de centre de relations familiales a été lancé par le gouvernement australien en 2005 comme élément central d’un ensemble de réformes en droit de la famille élaborées en réponse au rapport du comité permanent de la Chambre des représentants intitulé Every Picture Tells a Story[444]. Les réformes du droit de la famille visaient à amener un « changement culturel » dans la gestion de la séparation parentale [traduction] « en s’éloignant du litige pour aller vers la collaboration en matière de rôle parental »[445].

Les centres de relations familiales fournissent un point d’entrée unique dans le système de droit de la famille à l’extérieur des tribunaux et visent à donner du soutien aux personnes qui vivent des relations difficiles ou en évolution, ainsi qu’aux parents qui se séparent. Ils offrent de l’information, une évaluation de cas, un triage, une orientation, des conseils pratiques et une aide aux parents qui se séparent et préparent une entente parentale. Les services de règlement des différends sont disponibles sur place, ainsi que des services d’orientation vers d’autres services de médiation, services-conseils ou services spécialisés. Ces services peuvent être offerts sous trois formes : dans un centre de relations familiales (il y en a 65 dans tout le pays), au téléphone ou par le truchement d’une base documentaire en ligne offrant renseignements et soutien à ceux qui ne peuvent avoir accès à un centre de relations familiales[446].

Dans son budget 2005-2006, le gouvernement australien a alloué 188,5 millions $ A sur quatre ans à l’établissement des centres de relations familiales[447]. Le ministère de la Famille, du Logement, des Services communautaires et des Affaires autochtones, responsable de l’administration du programme, impartit la gestion des centres de relations familiales à des fournisseurs de services sans but lucratif de la communauté, comme le fait le gouvernement de l’Ontario pour le Programme des agents de soutien dans le contexte de la cour de la famille et d’autres programmes en droit de la famille. Les centres de relations familiales emploient une variété de modèles de prestation de services selon leur gestionnaire et leur situation géographique. Par exemple, certains centres de relations familiales ont été fondés pour fournir des services de proximité aux Autochtones. Ces centres engagent des conseillers pour les aider dans la prestation de services. Cependant, cela peut apparemment être un défi de trouver le personnel ayant les bonnes qualifications[448].

Une des principales fonctions des centres de relations familiales est d’aider les parents qui se séparent à conclure une entente parentale par l’entremise d’un processus de règlement des différends familiaux[449]. D’après la loi australienne, les parties doivent régler leur différend avant de pouvoir demander au tribunal une ordonnance parentale. Avant d’entreprendre le processus de règlement des différends, les parents doivent passer par un processus d’admission et d’évaluation.

Les centres de relations familiales offrent également de l’information, des programmes de formation, des conseils et des services d’orientation[450]. Ils visent à conclure des accords de collaboration avec des fournisseurs de services, y compris des fournisseurs de services juridiques ainsi que des organismes communautaires. Les centres de relations familiales partagent souvent leurs locaux avec d’autres services comme le programme Post Separation Cooperative Parenting (PSCP) établi en octobre 2008[451]. Il est prévu que les centres de relations familiales reçoivent des cas qui lui sont envoyés par la Child Support Agency et qu’il y aura des liens avec des spécialistes du soutien du revenu pour déterminer comment les ententes parentales influeront sur les droits à Centrelink. En conséquence de cet accent sur la collaboration et l’orientation, les centres de relations familiales ont été comparés à des [traduction] « centres de contrôle de la circulation aérienne »[452].

À l’origine, les centres de relations familiales ne fournissaient pas de services juridiques directement parce qu’ils visaient à mettre l’accent sur le rôle parental après la séparation comme étant une relation plutôt qu’un problème juridique. Ils incitaient plutôt leurs clients à rechercher des conseils juridiques et les aiguillaient au besoin. C’est encore largement le cas. Les centres de relations familiales sont encouragés à forger des liens avec les fournisseurs de services juridiques. Cependant, l’évaluation du programme de centres de relations familiales effectuée en 2009 par l’Australian Institute of Family Studies (AIFS) a mis au jour un important chevauchement entre l’utilisation des services de règlement des différends familiaux et des services juridiques[453]. Elle indiquait également que, au moins selon les avocats en droit de la famille, les centres de relations familiales n’étaient pas bien intégrés au système de droit de la famille. En juin 2009, le ministère du Procureur général a modifié sa politique et lancé le FRC Legal Assistance Partnerships Program pour permettre la prestation de services juridiques dans le cadre du modèle des centres de relations familiales. Le protocole élaboré laisse les centres de relations familiales décider individuellement du rôle que les services juridiques joueront. Cependant, selon un bulletin de l’AIFS, les services peuvent comprendre des séances d’information juridique pour les parents, des conseils juridiques, de l’aide à la préparation d’ententes parentales et d’ordonnances sur consentement, des règlements de différends familiaux avec l’aide d’un avocat, de la formation et du mentorat[454].


4.               Centres financés et gérés par le gouvernement : centres d’accès à la justice en Colombie-Britannique

En 2005, le Groupe de travail sur la réforme du droit de la famille de la Colombie-Britannique a publié un rapport recommandant la création de points centraux d’information sur le droit de la famille pour les gens qui entrent dans le système de droit de la famille[455]. Ces points centraux s’appuieraient sur le modèle de centre de justice familiale qui existe depuis 1992. Ils serviraient de point d’entrée clair dans le système et fourniraient information, évaluation et aiguillage. De plus, ils seraient situés à différents endroits, notamment, mais pas exclusivement, dans les palais de justice; et les services seraient aussi disponibles par téléphone et par Internet.

L’accent a été mis sur des services juridiques et non juridiques intégrés. Les points centraux d’information en justice familiale aiguilleraient les clients vers d’autres fournisseurs de services communautaires comme les employés des maisons de transition et des services d’aide aux victimes[456]. Les ressources devaient passer du litige et des tribunaux aux étapes initiales du processus où un règlement consensuel des différends serait la norme (le litige restant une option au besoin). La gouvernance serait locale[457].

On a accordé une attention particulière aux besoins des collectivités autochtones, à la fois en assurant un accès aux services aux communautés dans les réserves éloignées et en faisant preuve de respect envers les normes culturelles comme le rôle de la famille élargie lorsque des parents se séparent[458]. On a aussi déterminé que les immigrantes avaient besoin de services adaptés aux particularités culturelles[459].

Selon le New Justice System Report, en avril 2007, le ministère du Procureur général et la Legal Services Society (LSS) ont créé en partenariat un nouveau centre de services de justice familiale à Nanaimo, en Colombie-Britannique, et le financent. Le nouveau centre était situé dans le centre de justice familial existant, mais le ministère du Procureur général et la LSS y offrait des services élargis[460]. Le ministère du Procureur général a mis au point un service étendu d’évaluation et d’aiguillage comprenant un processus d’évaluation des besoins couvrant cinq domaines clés (la violence familiale, la santé mentale et l’abus de substances, les dettes ou les questions financières et la protection de l’enfance). La LSS a mis en place une salle de ressources avec du personnel et a élargi ses services de conseils juridiques existants. Les relations communautaires avec des organismes comme le Nanaimo Violence against Women in Relationships Committee ont été renforcées. En 2007, le centre de services de justice familiale de Nanaimo offrait une vaste gamme de services de justice familiale comprenant le triage et l’évaluation, des conseils et des cours d’évaluation, le règlement des différends, l’admission à l’Aide juridique, des conseils juridiques, de l’aide relativement aux pensions alimentaires pour enfants et de l’information juridique et des ressources[461]. Selon une évaluation effectuée en 2008, le centre de services de justice familiale de Nanaimo était un succès[462].

En juin 2007, Legal Services Society de la Colombie-Britannique a produit un document de planification détaillée qui a établi une vision des services et une conception des programmes en vue d’un modèle civil de point central, couvrant à la fois des problèmes en droit de la famille et d’autres types de problèmes[463]. En octobre 2008, le centre de services de justice familiale de Nanaimo a été rétabli en tant que Centre d’accès à la justice de Nanaimo. Un autre centre d’accès à la justice a ouvert ses portes en juillet 2010 dans les locaux du palais de justice de Vancouver, et il a été annoncé en septembre 2012 qu’un troisième centre ouvrirait à Victoria à la mi-2013[464].

Dans son étude sur les parties non représentées mentionnée précédemment, Julie Macfarlane a inclus des parties non représentées en Colombie-Britannique qui avaient utilisé les centres de services de justice familiale et qui les ont décrits comme étant [traduction] « essentiellement des centres sans rendez-vous pour des personnes sans avocats. Le personnel circule et les guide pendant qu’ils travaillent sur leur affaire à l’ordinateur »[465]. Julie Macfarlane est citée pour avoir dit [traduction] « Cela semble peu, mais cela fait en réalité une grande différence…C’est le genre de soutien dont les gens ont besoin. »

Nous suggérons que même si certains des exemples ci-dessus de points d’accès complets ou multidisciplinaires sont plus limités dans leur couverture (aux femmes victimes de violence familiale ou pour ce qui est des questions parentales, par exemple) que ce que comprend notre vision pour l’Ontario ou, à l’heure actuelle du moins, n’est pas réaliste sur le plan financier, ils illustrent la gamme de formes que peuvent prendre des services multidisciplinaires et multifonctionnels.

 

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