A. Introduction
Au chapitre précédent, nous avons fait référence aux changements dans l’accès au système de justice familiale qui, selon nous, aideraient ceux qui ne peuvent se payer les services d’un avocat, qui ne sont pas prêts pour une raison ou une autre à accéder au système judiciaire et qui ont besoin d’aide pour utiliser les outils d’autoassistance. Ces changements sont centrés sur le rôle des intermédiaires de confiance établis dans la collectivité qui aident les utilisateurs du système juridique familial qui pourraient avoir besoin d’aide pour des raisons de littératie, de langue, de culture ou d’absence de ressources économiques, sur un accès amélioré aux outils d’autoassistance, sur une représentation adéquatement réglementée par des avocats formés pour livrer des services moindres que les services complets, et sur des services fournis par des personnes autres que des avocats ayant reçu une formation juridique. Dans le présent chapitre, nous suggérons que bien que ces changements en tant que tels puissent améliorer l’accès au système de justice familiale, les fournir de manière intégrée, en lien avec des services plus poussés, pourrait aider les personnes aux prises avec des difficultés familiales à parvenir plus efficacement à un règlement de leurs problèmes, à l’avantage à la fois des utilisateurs et du système.
Les personnes qui vivent une rupture font face à un certain nombre de défis, dont certains sont des problèmes juridiques, mais en majorité n’en sont pas. Bien qu’un certain nombre d’intervenants dans le système de justice familiale reconnaissent que l’éclatement de la famille entraîne des problèmes économiques et sociaux ainsi que des problèmes juridiques, les efforts pour fournir des services intégrés ont été à ce jour limités. Pour de nombreuses personnes, cela signifie qu’elles doivent consacrer beaucoup de temps et d’énergie, à un moment de crise personnelle, à naviguer dans un réseau complexe de services.
Par certains aspects, ce problème est analogue aux difficultés associées au système de soins de santé. À propos de ce dernier, un observateur a émis le commentaire suivant : [traduction] « sans point d’entrée clairement établi, il est beaucoup plus difficile de coordonner les efforts »[406] et souligne qu’ « il n’y a pas d’endroit dans le système de soins de santé où les patients peuvent normalement aller pour accéder aux soins dont ils ont besoin, rapidement et efficacement, et assurer le suivi dans leur périple ». Les urgences, plutôt qu’un fournisseur de soins ordinaire (médecin de famille) deviennent le point d’entrée de facto. Il n’y a pas vraiment de contrôleur d’accès pour les services coûteux et il y a peu de continuité dans les soins. Il fait également remarquer que les équipes interdisciplinaires, qui comprennent les infirmières, les pharmaciens et d’autres professionnels de la santé (mais pas nécessairement des médecins) pourraient assurer une continuité [407]. Nous discutons ci-dessous de l’approche interdisciplinaire qui se développe dans le domaine des soins de santé.
Nous croyons qu’une approche interdisciplinaire serait tout aussi bénéfique dans le traitement des problèmes de justice familiale. Des points d’entrée complets ou intégrés, les « centres multidisciplinaires et multifonctionnels », offriraient des renseignements, des conseils et des services tels que des avis et de l’assistance juridique qui pourraient permettre à une personne de parvenir en douceur au règlement de ses problèmes en passant par une autre solution de règlement (qui pourrait être offerte sur place) ou, au besoin, par l’entremise des tribunaux. L’objectif principal des centres serait d’améliorer l’accès pour les personnes qui ne peuvent pas se payer les services d’un avocat. Cependant, leur mise en œuvre pourrait être liée à une prestation privée pour que les services soient offerts sur la base de leur coût, car des professionnels en pratique privée pourraient maintenant aiguiller leurs clients vers d’autres services.
Comme nous en discutons ci-dessous, il n’est pas nécessaire que ces centres multidisciplinaires et multifonctionnels prennent une forme particulière pour offrir les services requis afin de créer des points d’entrée efficaces. L’adhésion à une forme particulière peut ne pas être pratique pour des raisons économiques et pour d’autres ressources et ne pas être optimale dans toutes les parties de la province. Nous discutons de plusieurs modèles ci-dessous. Ce que ces points d’entrée ou d’accès unique doivent avoir en commun, cependant, c’est de fournir des services juridiques et non juridiques (ou un accès facile à ces derniers) et un cheminement homogène qui répond aux besoins des utilisateurs et permet de la souplesse à mesure que ces derniers progressent dans le système.
Bien qu’elle soit essentielle étant donné que la prestation des services est répartie parmi de nombreux intervenants, la collaboration peut prendre diverses formes :
[traduction]
Dans la documentation sur les entreprises axées sur les services aux particuliers et les relations interorganisationnelles, elle [signifie]… la fusion officielle des structures et des processus entre les organisations. Elle fait partie d’un spectre allant de l’informel à l’officiel, commençant avec la coopération (comme un échange d’information dénué de tout caractère officiel), jusqu’à la coordination (comme l’élaboration de protocoles officiels) et en fin de compte, l’intégration, qui met en jeu la formation de nouvelles structures organisationnelles[408]…
L’éclatement de la famille est un problème complexe, dont la résolution peut comporter plusieurs volets et la participation de plusieurs organismes et fournisseurs de services. Tous les principaux intervenants dans le système de justice familiale conviennent qu’une intervention rapide et un règlement à point nommé des conflits sont préférables pour les familles. Généralement, et lorsque c’est approprié, un règlement négocié est plus susceptible de durer longtemps et de donner satisfaction qu’un règlement imposé, parfois à une partie qui se sent lésé par le résultat. Un règlement négocié peut ne pas être approprié dans certains cas et le système le reconnaît dès le début, comme nous en discutons dans la première partie. Nous croyons, cependant, qu’un accès intégré au système peut contribuer à un règlement plus efficace à des stades ultérieurs. À l’heure actuelle, il n’existe pas de point d’entrée clair dans le système de justice familiale qui fournisse une réponse intégrée. Nous sommes persuadés que, à long terme, les investissements dans un point d’accès intégré peuvent améliorer la réponse et l’efficacité du système de justice familiale en réduisant les pressions sur les personnes aux prises avec un différend familial ainsi que sur le système de justice familiale. Nous croyons que des approches globales fournissent des résultats plus durables qui réduisent la pression sur le système exercée par les familles qui continuent à fréquenter les tribunaux alors que leurs besoins et leurs situations changent. Comme l’a fait remarquer Julie MacFarlane :
[traduction]
Dans le domaine de