Bien que les personnes âgées constituent une proportion importante et croissante de la population canadienne, on s’est relativement peu penché sur leurs rapports avec le droit. En dépit du travail de défrichage fait, par exemple, par l’Advocacy Centre for the Elderly et un certain nombre de spécialistes en droit des aînés, notre société ne s’est guère souciée des besoins juridiques des personnes âgées. Peu d’études ont été menées sur les obstacles que ces personnes rencontrent au Canada lorsqu’elles veulent avoir accès au droit et à la justice, et sur les meilleurs moyens de leur faciliter cet accès.

L’examen des rapports entre le droit et les personnes âgées se limite souvent aux questions qui, a priori, touchent principalement les personnes âgées, comme, par exemple, la succession, la santé et la mort. On s’est beaucoup moins intéressé aux textes qui, tout en ayant une portée générale, ont une incidence particulière sur les personnes âgées et qui gagneraient en équité et en efficacité s’ils tenaient compte d’aspects liés à l’âge.

Par ailleurs, le droit des aînés est souvent considéré comme un ensemble de questions disparates. Il semble que cette branche du droit gagnerait à être abordée d’une façon plus holistique et davantage fondée sur les principes.

Le vieillissement de la population canadienne et les progrès accomplis par les organismes de défense des droits des aînés ont réussi à porter les questions touchant à cette branche du droit sur le devant de la scène. L’abrogation récente de la législation ontarienne sur la retraite obligatoire est le fruit des représentations concertées de nombreux organismes et particuliers, et un signe de la reconnaissance de l’importance de la prise en compte, en droit, des besoins, des droits et du vécu des personnes âgées.

Le projet que la Commission a entrepris dans ce domaine résulte, en partie, d’une proposition de Monsieur David Freedman, professeur de droit des aînés à la faculté de droit de l’Université Queen’s.

Le projet vise à élaborer un cadre global des rapports entre le droit et les personnes âgées. Sans se refuser d’examiner certaines questions à titre d’exemple, il ne s’attardera pas sur la réforme de tel ou tel aspect. Il cherchera plutôt à proposer une démarche cohérente à l’égard de cette branche du droit dans l’espoir qu’elle serve de modèle ou de ligne directrice dans l’élaboration des propositions de réforme du droit dans ses rapports avec les personnes âgées et dans la prise en compte par les nouveaux textes des besoins et du vécu de ce groupe. Son but principal n’est donc pas de proposer des recommandations particulières sur tel ou tel aspect du droit dans la mesure de ses rapports avec les personnes âgées; il vise plutôt à énoncer les principes qui guideront l’examen de n’importe quelle branche du droit d’un point de vue non âgiste.

Conformément à la démarche holistique adoptée par la Commission du droit de l’Ontario en matière de réforme du droit, le projet examinera les textes dans leur contexte en tenant compte de la manière dont ils sont appliqués et mis en œuvre, et de la mesure dans laquelle ceux qui touchent les personnes âgées atteignent leurs buts ou, au contraire, ont des effets imprévus sur ces personnes.

Compte tenu de l’envergure du projet, il ne peut s’agir que d’une initiative comportant plusieurs étapes et s’étendant sur plusieurs années. Il a donc débuté par des consultations préliminaires, qui visaient à en cerner l’étendue et à préciser les thèmes, les principes et les questions clés à examiner.

En mai 2008, la Commission a lancé ses consultations préliminaires en publiant un document de consultation sur la préparation du projet. Ce document fut publié sur son site Web et remis à un grand éventail de chercheurs et d’universitaires, de cliniques juridiques, d’organismes communautaires et de services publics. Il donnait un bref aperçu des thèmes et des questions cernés au cours des recherches préliminaires et sondait les intervenants sur l’envergure et la structure du projet, notamment sur les questions et les principes qu’il devait aborder en priorité. La Commission a reçu des mémoires de 21 organismes et a rencontré six organismes et particuliers. Elle souhaite remercier vivement de leur apport précieux tous ceux qui ont participé à ces consultations. En particulier, elle tient à exprimer sa gratitude au Secrétariat aux affaires des personnes âgées de l’Ontario, qui lui a donné l’occasion de collaborer avec son Comité de liaison. La liste complète des participants à ces consultations se trouve à la fin du rapport.

Le présent rapport marque la fin de la première étape du projet. Compte tenu du nombre de mémoires reçus et de la myriade de points évoqués, il ne tente pas de faire état de toutes les questions soulevées, ni de les examiner. Il cherche plutôt à exposer les résultats de l’étude préliminaire et à cerner les prochaines étapes du projet, notamment les thèmes, questions et principes clés, ainsi que les priorités de la Commission sur le plan de la recherche.

Grâce à ce processus, la Commission a précisé cinq principes préliminaires susceptibles de guider les rapports entre le droit et les personnes âgées : l’indépendance (l’autonomie), la participation, la sécurité, la dignité et le respect de la diversité des personnes âgées. Le défi que le projet doit maintenant relever est d’étudier, par des recherches et des analyses, la portée et la signification de ces cinq principes, ainsi que leur interaction, et d’évaluer la façon dont ils peuvent concrètement s’appliquer aux questions d’actualité pressantes qui se posent à propos des rapports entre le droit et les personnes âgées.

La Commission étudiera ces principes dans ses recherches et ses analyses en tentant de répondre aux cinq questions suivantes :

  • À quoi ressemblerait une démarche anti-âgiste dans le domaine du droit ?
  • Quand convient-il ou est-il utile de se servir de l’âge comme critère juridique ?
  • Qu’est-ce qui sert le mieux l’accès des personnes âgées à la justice sur le plan des principes et des démarches ?
  • De quelle manière le droit peut-il correctement tenir compte des rapports sociaux des personnes âgées et les soutenir ?
  • Comment un cadre juridique adéquatement axé sur les personnes âgées peut-il leur garantir un milieu de vie sûr et digne ?

    La suite du présent rapport approfondira ces questions et ces principes préliminaires.

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