I.                    INTRODUCTION 

Le présent rapport préliminaire offre un cadre analytique visant à moderniser et réformer la Loi sur les infractions provinciales (ci-après la Loi). Adoptée il y a plus de 30 ans, la Loi a établi une procédure pour la poursuite des infractions créées par les lois, règlements et règlements administratifs municipaux de l’Ontario. Aucun examen approfondi de la Loi n’a été entrepris pour évaluer si elle continue de répondre à ses objectifs initiaux et si ces derniers restent d’actualité aujourd’hui. On n’a pas non plus étudié les répercussions de certaines évolutions majeures comme la promulgation de la Charte canadienne des droits et libertés, le transfert par la province aux municipalités de la poursuite des infractions et de l’administration des tribunaux pour les affaires fondées sur la Loi, le rehaussement significatif des plafonds des sanctions imposées pour un grand nombre d’infractions et le recours accru aux sanctions administratives pécuniaires pour assurer l’application des normes réglementaires.

 

Le Conseil des gouverneurs de la Commission du droit de l’Ontario (CDO) a approuvé le présent projet le 2 avril 2009. Nous avons examiné les enjeux particuliers en matière de procédure, et nous avons proposé des améliorations structurelles ainsi qu’un mécanisme facilitant à l’avenir les améliorations apportées à la procédure.

 

Le droit réglementaire régit la façon dont nous conduisons nos véhicules, la sécurité de nos lieux de travail, les aliments et boissons que nous consommons et la façon dont nous traitons nos animaux domestiques, pour ne citer que quelques exemples. La Loi impose une procédure afin de prendre en charge le traitement des millions d’accusations portées chaque année à la suite d’infractions aux normes de réglementation. La grande majorité concerne des infractions de « moindre gravité » pour lesquelles il est fort probable que les défendeurs ne seront pas représentés. Il importe que la procédure régissant ces infractions soit équitable, efficace, accessible et proportionnée aux intérêts en jeu.

 

II.         LES INFRACTIONS PROVINCIALES ET LA LOI SUR LES INFRACTIONS PROVINCIALES

 

Avant l’entrée en vigueur de la Loi, la procédure d’exécution et de poursuite des infractions réglementaires était régie par la Summary Convictions Act, laquelle avait repris en grande partie les dispositions du Code criminel relatives à la poursuite des infractions par procédure de déclaration sommaire de culpabilité. La nouvelle Loi devait permettre la mise en place d’une méthode accélérée, efficace, simple et adaptée aux fins de traitement en majorité des infractions mineures par les tribunaux d’infractions provinciales, objectif qui reste vrai de nos jours.

 

La Loi définit trois volets distincts pour introduire une instance devant un juge provincial ou un juge de paix de la Cour de justice de l’Ontario. Elle comporte dix parties décrites de façon détaillée dans le rapport préliminaire. En voici un rapide aperçu :

 

·         Les instances fondées sur la partie I sont introduites au moyen du dépôt d’un procès-verbal d’infraction, en général l’amende fixée à l’égard de l’infraction. L’amende maximale est de 1 000 $ et l’emprisonnement n’est pas une sanction autorisée. Le défendeur peut payer l’amende, contester l’accusation ou demander un procès.

 

·         La partie II s’applique exclusivement aux infractions de stationnement. La procédure est très similaire à la procédure indiquée dans la partie I. La personne qui reçoit un procès-verbal d’infraction peut payer l’amende fixée ou demander un procès.

 

·         Les instances de la partie III doivent être introduites devant le tribunal aux fins de résolution. En règle générale, la loi créant l’infraction prescrit la peine maximale (ou minimale) pour l’infraction, qui peut inclure l’emprisonnement. La nature et les circonstances de l’infraction et la question de savoir si l’atteinte à l’intérêt public exige une sanction plus sévère détermineront si les accusations doivent être fondées sur la partie I ou la partie III. 

 

·         La partie IV prévoit une procédure unique qui s’applique à tous les procès, que l’instance ait été introduite en vertu de la partie I, II ou III. Les dispositions relatives à la détermination de la peine sont d’ordre général, mais certaines distinctions sont faites entre les infractions de la partie I et celles de la partie III (p. ex. la probation n’est disponible que pour les infractions faisant l’objet d’instances introduites en vertu de la partie III).

 

·       La partie V comprend des dispositions générales en ce qui concerne les parties à une infraction, l’utilisation du téléphone et des vidéoconférences pour une audience, les moyens de défense en common law et l’infraction d’outrage à la cour.

 

·       La partie VI prévoit une procédure particulière pour les adolescents, définis comme étant âgés de 12 à 16 ans, poursuivis pour des infractions provinciales.

 

·       La partie VII régit les appels et les révisions menés par la Cour de justice de l’Ontario ou par la Cour supérieure de justice.

 

·       La partie VIII porte sur les pouvoirs d’arrestation, sur le pouvoir d’accorder une mise en liberté sous caution et les circonstances le permettant, ainsi que sur le pouvoir d’un juge de délivrer un mandat de perquisition.

 

·      La partie IX établit que la Loi s’applique si une autre loi autorise la délivrance d’une ordonnance, mais ne prévoit pas de procédure.

 

·      La partie X permet au ministère du Procureur général et à une municipalité de conclure une entente selon laquelle la municipalité (et non le gouvernement provincial) assurera l’administration des tribunaux et les fonctions de poursuite et d’exécution. Toutes les municipalités de l’Ontario ont conclu une entente de ce type.

 

Sept règlements s’appliquent aux instances fondées sur la Loi. Ils régissent les questions relatives, entre autres, aux dépens, aux frais pour retard de paiement des amendes, aux formules et avis pour divers types d’instances et aux suramendes. Par ailleurs, quatre ensembles de règles procédurales dictent le déroulement et la procédure des instances et appels fondés sur la Loi.

 

En règle générale, 2,1 millions d’accusations sont portées chaque année en application des parties I et III.  En 2009, rien qu’à Toronto, 2,8 millions de procès-verbaux d’infractions de stationnement, infractions régies par la partie II, ont été délivrés. La grande majorité (80 %) des infractions de la partie I sont des infractions au Code de la route ou à ses règlements.

 

Afin de fournir des éclaircissements sur les types d’infractions provinciales régies par la Loi, nous décrivons les domaines clés du droit réglementaire en Ontario. Il s’agit notamment des règlements relatifs aux véhicules automobiles, des lois sur la santé et la sécurité au travail, de la protection de l’environnement, de la règlementation sur les substances contrôlées, à savoir l’alcool et le tabac, et des règlements généraux sur la sécurité et l’ordre public, par exemple sur l’entrée sans autorisation et sur la prévention des incendies.

 

Ce qui justifie l’existence d’une loi distincte traitant des questions procédurales vient du fait qu’il existe une distinction nette entre les infractions réglementaires et les vrais crimes. Le Code criminel définit un comportement criminel comme une conduite qui, en soi, est contraire aux valeurs fondamentales humaines et est par conséquent complètement interdite par la législation pénale. La condamnation pour un crime est généralement associée à une stigmatisation. À l’inverse, les infractions réglementaires mettent en jeu une conduite qui est interdite, non parce qu’elle est en soi répréhensible, mais parce que l’absence de réglementation créerait des conditions dangereuses pour les membres de la société. Une déclaration de culpabilité concernant une infraction provinciale n’entraîne qu’une stigmatisation limitée, voire inexistante. Contrairement aux activités criminelles, on s’attend à ce que les gens reprennent l’activité réglementée après une poursuite, mais dans le respect de la loi. Il n’est pas toujours facile de faire la distinction, en particulier dans le cas des infractions provinciales punissables de sanctions sévères, notamment de peines d’emprisonnement. Néanmoins, la grande majorité des mises en accusation en application de la Loi portent sur des affaires qui sont clairement réglementaires et de nature mineure, ce qui justifie un traitement distinct, notamment à l’égard de la détermination de la peine.

 

 

III.        CADRE DE RÉFORME DE LA LOI SUR LES INFRACTIONS PROVINCIALES

 

Voici un certain nombre de principes qui devraient guider la réforme de la procédure prévue par la Loi aujourd’hui et à l’avenir :

1.      Proportionnalité. La procédure régissant la poursuite d’une infraction doit être proportionnée aux intérêts en jeu.

2.      Efficacité et bonne administration de la justice. Tout système procédural doit être efficace pour gérer les millions de mises en accusation mineures ainsi que les affaires moins courantes, mais de plus en plus complexes, qui sont poursuivies en application de la partie III.

3.      Équité. L’équité doit demeurer un facteur essentiel à prendre en considération dans le cadre de la réforme de la Loi. Cependant, la portée de l’équité procédurale ne doit pas être aussi étendue que dans le contexte criminel. 

4.      Accès à la justice. Étant donné le volume des infractions provinciales mineures, le système de la Loi est le « visage du système judiciaire » pour la plupart des Ontariennes et des Ontariens. On estime que la plupart des défendeurs ne sont pas représentés. La Loi doit par conséquent prévoir des procédures simples, facilement compréhensibles et accessibles pour les infractions les plus courantes.

 

Nous avons également appliqué le concept de réglementation souple à la réforme de la Loi et abordons à cet égard la question de la « pyramide réglementaire ». Même si le concept de réglementation souple concerne davantage la façon d’appliquer au mieux les normes de réglementation, il est également pertinent dans le domaine de la détermination de la peine pour les infractions réglementaires.

 

Dans le cadre d’une pyramide réglementaire, les organismes de réglementation mettent en place des stratégies modérées pour encourager les parties à respecter les normes de réglementation, avant d’avoir recours, en cas d’échec, à des mécanismes plus punitifs comme solution de rechange aux poursuites réglementaires et aux amendes. Nous abordons les autres outils de détermination de la peine dans le chapitre VI.

 

IV.  L’objet de la loi sur les infractions provinciales et la nouvelle structure proposée

 

L’article 2 de la Loi établit que son objet est de « remplacer la procédure de déclaration de culpabilité par procédure sommaire dans les poursuites à l’égard d’infractions provinciales, […] par une procédure qui reflète la distinction existant entre les infractions provinciales et les infractions criminelles ». Les objectifs sous-jacents de la Loi étaient d’établir une méthode équitable et efficace pour résoudre les infractions provinciales de façon proportionnée à la complexité ou à la gravité de l’infraction, mais différente de la procédure régissant les affaires criminelles. Compte tenu de la part de plaideurs non représentés aujourd’hui, l’accessibilité est un objectif de plus en plus important. Il importe également que la Loi, en tant que code de procédure, cherche à promouvoir les objectifs de la loi qui crée l’infraction à laquelle elle s’applique.   

 

De ce fait, nous recommandons que l’article sur l’objet soit modifié pour intégrer ces concepts afin de guider les parties et le tribunal en ce qui concerne l’interprétation des articles de la Loi, mais aussi éclairer l’élaboration de règles, de formules et de textes d’autorité subordonnée.

 

Nous estimons que la Loi, ses quatre ensembles de règles et ses sept règlements doivent être simplifiés. La Loi contient 10 parties et 176 articles avec plusieurs exceptions inscrites au sein de la Loi et des renvois fréquents à d’autres articles, règlements ou formules. Les dispositions sur les procès s’appliquent à toutes les infractions, graves et moins graves, sans distinction.

 

Nous recommandons que la Loi soit restructurée et débarrassée de son code de procédure détaillé, pour ne conserver que les affaires appropriées pour une loi. Elle devrait continuer de prescrire les différents volets pour les affaires graves et moins graves, mais le gros du code de procédure devrait être inscrit dans un seul règlement, ensemble de règles ou autre texte d’autorité subordonnée, avec des procédures simplifiées pour les infractions de moindre gravité et des procédures plus détaillées pour des cas plus complexes, conformément au principe de proportionnalité. Des guides simples et rédigés en langage courant à l’intention des défendeurs rendraient la Loi plus accessible. Nous recommandons que le procureur général et le juge en chef (Cour de justice de l’Ontario), en concertation avec d’autres intervenants, déterminent quelle est l’entité la plus à même d’élaborer le nouveau code de procédure.

 

V.         SANCTIONS ADMINISTRATIVES PÉCUNIAIRES – SOLUTION DE RECHANGE PAR RAPPORT AUX PROCÉDURES JUDICIAIRES

 

Les juges de paix président pratiquement tous les procès d’infractions provinciales; ils consacrent près de 60 % de leur temps à présider des procès intentés en application de la partie I et de la partie II. Étant donné la nature relativement mineure de nombre de ces infractions, nous nous demandons si les dispositions pertinentes de la Loi devraient être remplacées par un système de sanctions administratives pécuniaires, moins onéreux et plus efficace.  

 

Une sanction administrative pécuniaire (SAP) est une sanction imposée exigible dès repérage de l’infraction, à la différence d’une amende, qui n’est imposée que lorsqu’une partie a plaidé coupable concernant une infraction ou lorsque le tribunal a déclaré le défendeur coupable. Les systèmes de SAP existent déjà en Ontario pour certaines infractions réglementaires. Il s’agit apparemment d’un outil efficace pour garantir l’observation des normes de réglementation, tout en assurant le respect des principes d’équité, dans la mesure où il est généralement possible de contester une SAP devant un décideur administratif indépendant (plutôt que devant le tribunal).

 

La Loi de 2001 sur les municipalités autorise les municipalités à établir des systèmes de pénalités administratives pour les infractions de stationnement, qui ne sont alors plus assujetties à la Loi; mais jusqu’à présent, seule la ville de Vaughan en a mis un en place. (Cependant, il convient de noter que la ville d’Oshawa a approuvé l’adoption d’un tel régime le 31 janvier 2011.) D’après l’expérience de la ville de Vaughan, les affaires sont réglées beaucoup plus rapidement; les défendeurs reçoivent une date d’audience fixe et le public gaspille moins de temps; des économies de coûts sont réalisées au moyen des agents enquêteurs administratifs; les audiences sont simplifiées sans nécessiter un poursuivant et les tribunaux judiciaires disposent de plus de temps pour juger des affaires plus graves.

 

Même si l’argument financier est favorable à une transition vers un système de SAP, il n’est pas déterminant. En Ontario, des arbitres non judiciaires traitent d’affaires qui sont d’une importance fondamentale pour nous, telles que les violations des droits de la personne, nos droits en tant que locataires, notre droit à une aide sociale et notre capacité à travailler et à détenir un permis pour une profession choisie. Pourtant, en vertu du système actuel régi par la Loi, il est possible qu’un procès devant un juge soit tenu afin de juger une affaire de procès-verbal d’infraction de stationnement contesté d’une valeur de 30 $. Il nous semble que la règle de droit et l’administration de la justice s’en trouveraient davantage respectées si l’on réservait les ressources judiciaires à des affaires plus graves.

 

Compte tenu des défis soulevés pour chaque municipalité, nous recommandons d’attendre deux ans avant d’adopter une quelconque législation provinciale imposant que toutes les infractions de stationnement soient régies par un système de SAP.

 

Nous nous livrons à une analyse constitutionnelle en application des articles 7 et 11 de la Charte canadienne des droits et libertés, à l’égard du système de SAP fondé sur la Loi de 2001 sur les municipalités, en nous appuyant sur la jurisprudence de la Cour suprême du Canada et sur les affaires qui ont évalué des systèmes de SAP dans d’autres contextes. Nous en concluons qu’étant donné la sanction maximum autorisée et la nature non punitive des sanctions, le système que nous appuyons est constitutionnel. Nous concluons en outre que des pénalités plus élevées pour le stationnement indu sur des places réservées aux personnes handicapées pourraient également faire partie d’un régime de SAP. Nous recommandons donc que le règlement sur les SAP pris en application de la Loi de 2001 sur les municipalités soit modifié pour inclure le stationnement indu sur les places réservées aux personnes handicapées dans un système de SAP. 

 

La grande majorité (80 %) des infractions de la partie I concernent le Code de la route et sont jugées par des juges de paix. Nous nous sommes demandé si elles devraient de la même façon être incluses dans un système de SAP. Nous concluons, cependant, que la nature de ces infractions pose des problèmes plus délicats que ne le font les infractions de stationnement et par conséquent nous recommandons que le gouvernement de l’Ontario étudie les infractions de la partie I pour déterminer quelles infractions, le cas échéant, seraient mieux traitées dans le cadre d’un système de SAP. 

 

En application de la Loi sur les Indiens à l’échelle fédérale, les communautés des Premières nations ont le pouvoir d’établir des règlements administratifs dans de nombreux domaines, notamment la réglementation de la circulation. Cependant, elles ne sont pas considérées comme « municipalité » selon la définition fournie par la Loi de 2001 sur les municipalités. Par conséquent, elles ne peuvent ni mettre en place un système de SAP, ni assurer l’exécution des sanctions pouvant être imposées. Nous recommandons que le gouvernement de l’Ontario examine également cette question, en concertation avec les communautés des Premières nations.

 

 

VI.        RÉFORME DE LA DÉTERMINATION DE LA PEINE

 

L’amende maximum pour une infraction de la partie I est de 1 000 $. Pour les infractions de la partie III, l’amende maximum est de 5 000 $ à moins de disposition contraire contenue dans une loi, et une peine d’emprisonnement est possible lorsque la loi créant l’infraction l’autorise. Certains autres outils de détermination de la peine tels que la probation sont disponibles mais uniquement pour les infractions de la partie III et leur utilisation est limitée.  

 

La Loi ne comporte pas d’énoncé d’objectif ou de principes en matière de détermination de la peine et les cours d’appel ont rendu peu de décisions de nature à guider les tribunaux inférieurs en matière de détermination de la peine. L’une des jurisprudences fondamentales remonte à un quart de siècle. C’est la raison pour laquelle on observe d’importantes disparités dans les décisions et la nécessité de principes uniformes en matière de détermination de la peine est criante. Les principes adoptés en la matière dans le Code criminel pourraient servir de modèle même si ces principes ont été critiqués en raison du fait qu’ils ne guideraient pas suffisamment le tribunal s’agissant de leur application ou de leur interdépendance.  

 

Pour que le processus de détermination de la peine soit légitime, il doit se baser sur une approche cohérente, reposant sur des principes, qui rende ce volet du processus réglementaire conforme aux objectifs sous-jacents de la réglementation. Par conséquent nous recommandons l’adoption dans le cadre de la Loi d’une hiérarchie de principes en matière de détermination de la peine, principes d’application générale sous réserve de principes différents ou supplémentaires prescrits par la loi créant l’infraction. 

 

Le processus de détermination de la peine devrait fonctionner de la façon suivante : 

·         réparer dans la mesure du possible tout préjudice causé par le manquement à la réglementation (p. ex., restitution);

·         réduire le risque de nouvelle infraction, en d’autres termes, prononcer une peine de nature à favoriser la réadaptation;

·         choisir une sanction susceptible de prévenir des manquements futurs grâce aux amendes et à d’autres ordonnances, mais seulement lorsque ce type de sanction serait de nature à favoriser l’atteinte des objectifs sous-jacents de la réglementation et lorsque des sanctions axées sur la réparation ou la réadaptation seraient insuffisantes ou inefficaces compte tenu des circonstances de l’affaire;

·         lorsque les circonstances de l’affaire impliquent des facteurs aggravants, choisir une sanction axée sur la dénonciation ou la punition.

 

Pour nombre d’infractions, les principes en matière de détermination de la peine ont peu de répercussions, voire aucune répercussion. Pour certaines infractions à la réglementation, les amendes pourraient bien rester le moyen le plus efficace de favoriser la conformité aux normes de réglementation. Cependant, lorsque des amendes seront prononcées, le tribunal se sera au préalable demandé si des peines axées sur la réparation et la réadaptation permettraient davantage d’atteindre les objectifs visés par la réglementation.  

 

Cette hiérarchie de principes en matière de détermination de la peine représente une prise de distance par rapport au paradigme traditionnel dissuasion-amende qui sera surtout utile et adaptée pour les infractions de la partie III. Compte tenu du principe de proportionnalité et de la nécessité de maintenir des procédures simples pour les infractions de la partie I, la CDO n’est pas convaincue que les nouveaux principes de détermination de la peine doivent s’appliquer dans le cadre des infractions de la partie I. Néanmoins, lorsque c’est nécessaire compte tenu des circonstances particulières d’une affaire et des intérêts de la justice, nous recommandons que le tribunal tienne compte des principes en matière de détermination de la peine pour les infractions de la partie I et soit autorisé à prononcer une peine axée sur la réparation, la réadaptation ou la dénonciation lorsque c’est la peine la plus adaptée. 

 

Il nous semble impossible d’appliquer les principes en matière de détermination de la peine à l’aide des sanctions actuellement disponibles. C’est pourquoi nous recommandons que la Loi soit modifiée pour donner au tribunal le pouvoir a) de prononcer des ordonnances de probation pour l’ensemble des infractions provinciales afin d’appliquer les principes liés à la réparation et à la réadaptation, notamment un pouvoir étendu pour assortir la probation de conditions; b) de prononcer des ordonnances visant la restitution ou la compensation expresses et distinctes des conditions probatoires, qui seraient exécutoires devant les tribunaux civils; c) d’utiliser les déclarations de la victime; et d) d’imposer la présence d’un vérificateur intégré chargé de veiller au respect des normes de réglementation. Nous laissons le soin au ministère du Procureur général de décider si des programmes de mesures de rechange devraient également être disponibles pour les infractions moins graves, après d’autres consultations auprès des municipalités.

 

Lorsque des entreprises ou des organisations commerciales violent des normes de réglementation, cela peut avoir des effets néfastes importants sur les collectivités et éventuellement des milliers de consommateurs. Les amendes ne sont pas nécessairement l’outil de détermination de la peine le plus efficace car elles peuvent souvent être répercutées sur les consommateurs.

 

Nous recommandons par conséquent que la Loi soit modifiée pour contenir une disposition similaire à celle du Code criminel et donner au tribunal le pouvoir d’assortir une ordonnance de probation prononcée contre une entreprise ou une organisation commerciale, qu’elle soit dotée ou non de la personnalité morale,  de conditions axées sur la réparation et la réadaptation, et permettre expressément au tribunal d’infliger une sanction axée sur la punition ou la dénonciation lorsqu’il le juge approprié. Nous recommandons en outre que le ministère du Procureur général, en concertation avec d’autres intervenants, établisse, aux fins d’inclusion dans les dispositions de la Loi relatives à la détermination de la peine, une liste non exhaustive des facteurs aggravants susceptibles de justifier une sanction de ce type.

 

VII.       RÉFORME DE LA MISE EN LIBERTÉ SOUS CAUTION

 

Même si très peu de personnes sont arrêtées pour avoir commis une infraction provinciale, et que les personnes détenues ou mises en liberté sous caution sont encore moins nombreuses (0,002 % de l’ensemble des accusations au titre des parties I et III), les principes de justice fondamentale commandent qu’un mécanisme équitable et efficace soit en place pour la libération préalable au procès.

 

Le principe prévu dans la Loi est qu’un défendeur qui est arrêté doit être mis en liberté en attendant la décision relative à l’accusation, sauf si la détention est nécessaire pour garantir la comparution du défendeur au tribunal. Il ne semble pas y avoir de pouvoir du juge de refuser la mise en liberté sous caution pour des motifs liés à la protection et à la sécurité du public. Ceci n’est pas très cohérent : en effet, un agent de police peut ordonner la détention d’un défendeur pour prévenir la poursuite ou la répétition de l’infraction ou la perpétration d’une autre infraction mais un juge n’est pas autorisé à refuser la mise en liberté sous caution lorsqu’il existe des preuves d’une réelle menace pour la sécurité du public, notamment une victime ou un témoin.    

 

Nous recommandons par conséquent que les dispositions de la Loi sur la mise en liberté sous caution soient modifiées pour ajouter la protection et la sécurité du public comme motif de refus de la mise en liberté sous caution, mais uniquement lorsqu’il existe un risque réel et substantiel que le défendeur commette une infraction grave qui entraînera un préjudice pour le public.

 

Il nous a été suggéré que la mise en liberté sous caution soit refusée afin de « maintenir la confiance à l’égard de l’administration de la justice ». Même si ce motif se justifie dans le contexte criminel, nous ne sommes pas convaincus qu’il faille l’étendre au contexte de la Loi.

 

De façon générale, la seule justification d’éventuelles conditions à la mise en liberté sous caution tient à la nécessité de garantir la comparution du défendeur au tribunal. Il existe peut-être d’autres conditions valables dans les limites imposées par la Charte et la jurisprudence. Cependant, étant donné la nature de la plupart des infractions provinciales, nous craignons d’assister à une utilisation excessive ou inutile des conditions assortissant la mise en liberté sous caution. Par conséquent nous recommandons que le ministère du Procureur général, en concertation avec le pouvoir judiciaire, les poursuivants municipaux, les avocats de la défense et les parajuristes, étudie d’autres conditions de mise en liberté sous caution à ajouter à la Loi.

 

VII.       AUTRES RÉFORMES DE LA PROCÉDURE

 

Le présent rapport est axé principalement sur les réformes structurelles et les réformes de grandes règles de procédure, mais plusieurs autres enjeux d’ordre procédural ont été soulevés durant nos consultations et nous formulons des recommandations pour plusieurs d’entre eux. 

 

La Loi autorise la délivrance de mandats de perquisition pour la recherche de « choses » particulières, mais elle ne traite pas des perquisitions de données électroniques dans des systèmes ou équipements informatiques. Même si nous estimons qu’il serait opportun de modifier la Loi à cet effet, nous n’ignorons pas que les perquisitions d’ordinateurs personnels et d’autres sources de renseignements électroniques portent gravement atteinte à la vie privée. De même, la légalité de l’article 160 de la Loi, qui cherche à protéger les perquisitions qui révèlent des documents assujettis au privilège du secret professionnel avocat-client, pourrait être contestée car la disposition n’exige pas que le client, bénéficiaire du privilège, soit informé de la saisie du document.

 

Par conséquent nous recommandons que le ministère du Procureur général ou l’entité en charge de l’élaboration du nouveau code procédural se penche sur ces enjeux liés aux mandats de perquisition pour que les modifications appropriées soient apportées.

 

Depuis l’attribution de licence aux parajuristes en Ontario, davantage de juristes traitent des affaires fondées sur la Loi, ce qui pose la question de la pertinence du secret professionnel parajuriste-client. Par conséquent, nous recommandons que cet enjeu soit approfondi par le ministère du Procureur général, en concertation avec le Barreau du Haut-Canada, les parajuristes et d’autres intervenants.

 

Au moins un organisme de réglementation de l’Ontario dépend des dispositions de la Loi sur le mandat de perquisition pour obtenir des registres bancaires afin d’enquêter sur certaines infractions et de les poursuivre, même si l’on ne sait pas avec certitude si les banques sont habilitées à divulguer des registres bancaires en réponse à un mandat de perquisition sans en aviser au préalable le titulaire du compte. Il semble que ce que l’on recherche réellement, c’est une ordonnance de production par un tiers (une banque par exemple), plutôt qu’un mandat de perquisition. Pour l’instant, nous ne préconisons pas que les ordonnances de production soient autorisées en vertu de la Loi car il est nécessaire d’abord de se pencher sur des enjeux non réglés d’ordre politique et opérationnel. Par conséquent nous recommandons que le ministère du Procureur général ou l’entité responsable de l’élaboration d’un nouveau code de procédure dans le cadre de la Loi approfondisse cette question. 

 

La Loi prévoit que les moyens de défense de common law sont applicables aux instances fondées sur la Loi. Il a été proposé de codifier les moyens de défense de common law au sein de la Loi; cependant, nous ne recommandons pas la mise en œuvre de cette proposition étant donné la difficulté inhérente à la codification des moyens de défense de common law et le risque de les figer dans le cadre de la Loi alors que la common law continuerait d’évoluer dans le contexte criminel. 

 

L’article 109 de la Loi sur les tribunaux judiciaires, exigeant qu’un avis de question constitutionnelle soit signifié aux procureurs généraux fédéral et provincial dans certaines circonstances, a été rédigé avant que la responsabilité des poursuites d’infractions et d’administration des tribunaux ne soit transférée aux municipalités. Par conséquent, nous recommandons que la Loi sur les tribunaux judiciaires soit modifiée pour :

·         exiger la signification d’un avis de question constitutionnelle aux poursuivants dans toutes les poursuites fondées sur la Loi;

·         exiger la signification d’un avis de question constitutionnelle à un poursuivant municipal lorsqu’une partie demande réparation sur la base d’un acte ou d’une omission d’une municipalité;

·         supprimer l’exigence de signification d’un avis de question constitutionnelle aux procureurs généraux fédéral et provincial lorsqu’un plaideur demande réparation pour des faits spécifiques au cas d’espèce (plutôt que pour contester une loi ou un règlement).

 

La Loi prévoit qu’une déclaration de culpabilité au titre d’une infraction de la partie I ou II puisse être rouverte si le défendeur a été déclaré coupable sans audience, et qu’il demande la réouverture dans les 15 jours après avoir pris connaissance de la déclaration de culpabilité. Certains ont souhaité que la règle de la réouverture soit restreinte pour prévenir les abus. Par conséquent nous recommandons que le ministère du Procureur général ou l’entité responsable de l’élaboration d’un nouveau code de procédure dans le cadre de la Loi approfondisse cette question.

 

L’article 124 de la Loi énonce les circonstances dans lesquelles un appel interjeté dans une instance fondée sur la partie III ne devrait pas être autorisé, mais il renvoie à un « procès-verbal » qui suggère une instance introduite en application des parties I ou II. Par conséquent, nous recommandons que le ministère du Procureur général ou l’entité responsable de l’élaboration d’un nouveau code de procédure dans le cadre de la Loi approfondisse cette question.

 

D’après des articles parus dans les médias, le montant des amendes en souffrance dépasse le milliard de dollars en Ontario. De nouveaux outils d’exécution ont récemment été introduits mais ils ne seront pas nécessairement d’une grande utilité. D’autres provinces ont conclu des ententes avec l’Agence du revenu du Canada dans le cadre desquelles le montant des amendes impayées est déduit des remboursements d’impôt sur le revenu et des remboursements de TPS. Cependant, pour certains Ontariens au revenu faible, les remboursements d’impôt sur le revenu et de TPS constituent une source de revenu importante dont ils ont besoin pour assumer leurs besoins élémentaires. Par conséquent, nous recommandons que le ministère du Procureur général, en concertation avec les municipalités et d’autres intervenants, évaluent si le recours à un programme de réaffectation fiscale pourrait constituer une méthode d’exécution des amendes efficace et juste, en tenant compte des éventuelles répercussions sur les Ontariens à faible revenu.

 

La Loi contient diverses dispositions visant à permettre que certaines audiences puissent être présidées par téléphone ou vidéoconférence, même si certaines de ces dispositions n’ont pas encore été proclamées. Nous recommandons que le ministère du Procureur général ou l’entité responsable de l’élaboration d’un nouveau code de procédure examine l’efficacité de ces dispositions (une fois proclamées) et formule les recommandations appropriées.

 

La Loi permet à la Cour supérieure de justice de réviser les décisions fondées sur la Loi mais la Cour supérieure de justice n’a pas compétence pour réviser les décisions relatives aux dépens pour lesquelles il est nécessaire d’interjeter appel, ce qui donne lieu à des procédures fragmentées. Par conséquent, nous recommandons que la Loi soit modifiée pour que la Cour supérieure de justice soit compétente pour réviser une décision d’adjudication de dépens lorsqu’une action en révision a été portée devant cette juridiction.

 

Le groupe d’examen de la simplification de la Loi du ministère du Procureur général, créé en août 2006, a rédigé une liste de propositions en vue d’une réforme de la Loi, mais seules certaines d’entre elles ont été mises en œuvre. Nous recommandons que l’entité responsable de l’élaboration du nouveau code de procédure dans le cadre de la Loi examine les recommandations du groupe de travail afin d’évaluer si les recommandations qui n’ont pas encore été mises en œuvre devraient être adoptées au moyen d’une modification d’une règle, d’un règlement ou d’une loi.

 

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