Si l’on applique une approche multidimensionnelle à l’emploi précaire, on devra non seulement tenir compte du genre de travail, mais également de son impact sur celui qui l’effectue. Comme nous l’avons mentionné précédemment, l’emploi précaire est l’apanage des personnes racialisées (surtout les femmes), des nouveaux arrivants, des travailleurs migrants temporaires et des travailleurs sans statut. Les personnes racialisées, et donc les femmes racialisées, ont plus souvent tendance à occuper un emploi précaire ou à être sans emploi. Les femmes racialisées doivent souvent supporter le fardeau du travail domestique de façon disproportionnée chez elles alors qu’elles sont déjà plus susceptibles d’être reléguées dans des emplois précaires rémunérés se rapportant à du travail domestique. Il est plus probable qu’une femme occupe un emploi précaire sans détenir d’emploi permanent à temps plein, et aussi qu’elle détienne la forme la plus précaire d’emploi, l’emploi temporaire rémunéré à temps partiel. La « structure des emplois selon le sexe et la race » constitue donc un aspect important du marché du travail.[175]

 

Les jeunes travailleurs, hommes autant que femmes intègrent le marché du travail par le biais d’emplois précaires. Les travailleurs âgés trouvent souvent de l’emploi grâce aux agences de placement temporaire.[176] Les personnes handicapées, et surtout celles socialement touchées de diverses façons, sont moins susceptibles d’être employées et donc, sont vulnérables au travail précaire.[177] RHDCC rapporte cependant que le taux d’emploi des personnes handicapées a augmenté de plus de 46 % en 2001 à plus de 53 % en 2006.[178]

 

Plus de 60 % de la croissance de la population canadienne vient de l’immigration.[179] En effet, la croissance de la population et de l’économie canadiennes dépend maintenant plus sur l’immigration qu’au cours de la majeure partie du siècle dernier.[180] Alors qu’aujourd’hui un résident sur cinq est né à l’extérieur du pays, il faut remonter au début des années 1930 pour qu’une si grande partie de la population totale soit constituée de nouveaux arrivants. Un nombre croissant d’immigrants provient de l’Asie, y compris du Moyen-Orient (où se trouvent les pays d’origine du plus grand pourcentage d’immigrants) et les pourcentages d’immigrants provenant d’Amérique du Sud, d’Amérique centrale, des Caraïbes et de l’Afrique ont légèrement augmenté entre 2001 et 2006. Plus de la moitié des immigrants s’installent en Ontario.[181] Compte tenu de la baisse du taux de natalité et du vieillissement de la population, le Canada compte donc sur l’immigration permanente et temporaire, y compris sur les travailleurs sans statut, pour faire face aux pénuries de travailleurs.[182] De plus en plus, au Canada, ce sont les immigrants, qui proviennent souvent de pays en particulier, qui détiennent les emplois précaires.

 

L’étude récente de Statistiques Canada s’intéressant à 280 000 immigrants canadiens révélait que les taux de pauvreté étaient trois fois plus élevés chez les nouveaux immigrants que chez les citoyens canadiens.[183]  Pendant pratiquement toutes les années 1990, presque un immigrant sur cinq était cantonné dans la catégorie des personnes à faible revenu chronique, ce qui entraînerait des pertes annuelles de cinq milliards de dollars pour l’économie nationale.[184] Il arrive souvent que les immigrants trouvent des emplois à court terme peu rémunérateurs à leur arrivée au Canada, mais qu’ils réussissent à migrer vers des emplois plus stables et mieux rémunérés assortis d’avantages sociaux après cinq ans, ou même avant. À l’échelle macro, ce modèle a changé. Dans une étude, Statistiques Canada conclut que « plus de la moitié (54 %) des 5,0 millions de personnes qui occupaient un emploi atypique en 1999 sont restés dans ce genre d’emploi pendant les deux années suivantes ».[185]

 

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