A.    Introduction

Les nouveaux arrangements en matière de prise de décision, soit la prise de décision accompagnée et la codécision, ont fait partie des questions les plus importantes soulevées au cours des consultations préliminaires de la Commission du droit de l’Ontario (CDO) dans le cadre de ce projet. Ces arrangements représentent un changement d’orientation fondamental dans les façons de considérer le droit et ont d’importantes répercussions sur presque tous les aspects de ce domaine du droit. Leurs défenseurs souhaiteraient que l’un ou l’autre de ces arrangements – ou les deux – figurent dans les lois ontariennes, soit comme options parmi d’autres, soit comme options privilégiées ou options qui remplacent carrément la prise de décision au nom d’autrui.

Le présent chapitre portera sur les éléments fondamentaux des modalités que sont la prise de décision accompagnée et la codécision et les comparera à la prise de décision au nom d’autrui; des modèles précis de ces formes de prise de décision, certaines des répercussions et des difficultés de mise en œuvre qui s’y rattachent y seront également exposées. 

Les divers arrangements en matière de prise de décision sont fondés sur différentes hypothèses et expériences de la nature de la prise de décision, du rôle du droit, des caractéristiques des relations intimes et de la nature de l’invalidité et du vieillissement. Les personnes qui consacrent beaucoup de temps aux questions liées à l’invalidité, au vieillissement et à la capacité juridique ont tendance à toutes accorder beaucoup d’importance aux principes de la dignité, de l’autonomie, de l’inclusion et de la participation, de même qu’au droit de n’être ni exploité ni victime de mauvais traitements. En pratique, toutefois, il peut y avoir de profondes différences dans la façon dont ces principes sont compris et sur les moyens qui conviennent le mieux de prendre pour les respecter.  

Ces conceptions assez récentes de la prise de décision sont étroitement liées aux changements dans les conceptions de la capacité, exposés au chapitre I de la partie Deux, et trouvent leur fondement dans le modèle social de l’invalidité et la critique, du point de vue des droits de la personne, des façons actuelles d’envisager la capacité juridique, la prise de décision et la tutelle. 

Certaines des différences dans la façon de les considérer viennent des divergences dans les expériences et les situations vécues par les personnes visées par le droit en matière de capacité juridique, de prise de décision et de tutelle. Les besoins et les aspirations d’un jeune adulte ayant une déficience intellectuelle à cet égard seront très différents de ceux d’une veuve atteinte de la maladie d’Alzheimer à un stade intermédiaire qui habite dans un foyer de soins de longue durée, tout comme ils seront très différents de ceux d’une personne atteinte, depuis un certain nombre d’années, d’une déficience grave et récurrente en santé mentale qui a considérablement affecté ses ressources sociales et économiques. La nature d’une déficience, l’étape de la vie où elle survient et le moment au cours de la vie où il faut recourir aux lois sur la capacité juridique et la prise de décision auront de très profondes répercussions sur l’ampleur et la nature des relations d’une personne, les ressources financières dont elle dispose (et les tentations d’abus qui en découlent), ainsi que sur la nature et la disponibilité des ressources et des soutiens pertinents. Tous ces aspects auront à leur tour une incidence considérable sur la façon dont ces personnes aborderont les lois dans ce domaine. Il est donc essentiel de porter une attention réfléchie et respectueuse à ces différences de points de vue et d’expériences dans l’étude des modalités en matière de prise de décision et d’envisager la possibilité qu’une formule universelle ne puisse pas, en fait, répondre aux besoins de tous ceux et celles qui sont visés par ces lois.

Il est également très important de tenir compte de l’expérience concrète des personnes qui viennent en aide quotidiennement aux personnes atteintes de déficiences qui les empêchent d’avoir accès à l’information, de la retenir, de l’évaluer et de la communiquer. Les lois jouent un rôle fondamental dans l’expression et la formulation des valeurs et des normes, mais les personnes qui assurent, de diverses manières, un soutien à la prise de décision n’auront probablement pas une connaissance approfondie des lois ou n’y auront pas régulièrement eu recours pour résoudre des difficultés pratiques. Souvent, elles sont guidées par leurs propres valeurs et considérations éthiques, les conditions pratiques de la situation, leurs compétences et la nature de leurs liens. Évidemment, leur propre contexte façonnera la façon dont ils comprendront et s’acquitteront de leurs fonctions : leur culture, leur statut socio-économique, les soutiens familiaux et sociaux dont elles disposent elles-mêmes, les ressources proposées dans les collectivités dans lesquelles elles vivent et de nombreux autres facteurs. Dans les faits, de nombreux membres de la famille et amis nommés en vertu d’une procuration ou désignés tuteurs s’acquitteront de leur fonction d’une manière très semblable à celle que préconisent les défenseurs d’une prise de décision accompagnée; de même, les personnes qui assument les fonctions d’accompagnateurs peuvent parfois être appelées à remplir des fonctions très semblables à celles des mandataires spéciaux sur le plan fonctionnel. Dans l’examen de réformes particulières du droit, il sera important de tenir compte des répercussions pratiques sur la vie des personnes juridiquement incapables et de celles qui les entourent.

En conclusion, le chapitre 1 de la partie Un du présent document de travail comprend une brève description des multiples aspects de la prise de décision. Celle-ci comprend à la fois des procédures et des résultats, d’un point de vue public et privé. En théorie, une formule idéale en la matière maximiserait tous ces aspects. En pratique, ils ne sont pas toujours si faciles à concilier. Diverses modalités en matière de prise de décision chercheront à équilibrer ces aspects de diverses manières et établiront aussi des priorités différentes. 

Ces nouvelles formes de prise de décision continuent d’évoluer. La terminologie varie, parfois considérablement : des expressions multiples sont souvent utilisées pour décrire la même notion et, inversement, les mêmes mots sont souvent utilisés pour parler de modalités aux répercussions pratiques fort différentes. Ce sont des débats conceptuels et philosophiques permanents. La CDO a pour rôle d’élaborer des propositions pratiques, réalisables et tournées vers l’avenir pour que le droit soit réformé dans ce contexte particulier, à la lumière des principes et des considérations contenus dans les cadres. Le présent chapitre n’a pas pour objet d’examiner de manière exhaustive les notions de la prise de décision accompagnée et de la codécision, ni la philosophie qui les sous-tend, mais plutôt d’examiner les répercussions pratiques possibles pour la réforme du droit ontarien, un droit enraciné dans une histoire particulière et qui existe dans le contexte d’un ensemble précis d’institutions, de ressources et de contraintes.

Pour amorcer la discussion sur les modalités de rechange, le présent chapitre examinera les dispositions de la Convention relative aux droits des personnes handicapées (CDPH) par rapport aux modalités en matière de prise de décision, puis décrira brièvement les aspects principaux de la formule actuelle de prise de décision au nom d’autrui en Ontario, avant de passer à des examens plus approfondis de la prise de décision accompagnée et de la codécision.

 

B.    La Convention relative aux droits des personnes handicapées

Cet examen ne saurait se faire sans traiter de la CDPH que le Canada a ratifiée et en particulier de l’article 12 reproduit au chapitre I des parties Un et Deux. L’article 12 prévoit ce qui suit : 

  • Les États Parties réaffirment que les personnes handicapées ont droit à la reconnaissance en tous lieux de leur personnalité juridique.
  • Les États Parties reconnaissent que les personnes handicapées jouissent de la capacité juridique dans tous les domaines, sur la base de l’égalité avec les autres.
  • Les États Parties prennent des mesures appropriées pour donner aux personnes handicapées accès à l’accompagnement dont elles peuvent avoir besoin pour exercer leur capacité juridique.
  • Les États Parties font en sorte que les mesures relatives à l’exercice de la capacité juridique soient assorties de garanties appropriées et effectives pour prévenir les abus, conformément au droit international des droits de l’homme. Ces garanties doivent garantir que les mesures relatives à l’exercice de la capacité juridique respectent les droits, la volonté et les préférences de la personne concernée, soient exemptes de tout conflit d’intérêts et ne donnent lieu à aucun abus d’influence, soient proportionnées et adaptées à la situation de la personne concernée, s’appliquent pendant la période la plus brève possible et soient soumises à un contrôle périodique effectué par un organe compétent, indépendant et impartial ou une instance judiciaire. Ces garanties doivent également être proportionnées au degré auquel les mesures devant faciliter l’exercice de la capacité juridique affectent les droits et intérêts de la personne concernée;
  • Sous réserve des dispositions du présent article, les États Parties prennent toutes mesures appropriées et effectives pour garantir le droit qu’ont les personnes handicapées, sur la base de l’égalité avec les autres, de posséder des biens ou d’en hériter, de contrôler leurs finances et d’avoir accès aux mêmes conditions que les autres personnes aux prêts bancaires, hypothèques et autres formes de crédit financier ; ils veillent à ce que les personnes handicapées ne soient pas arbitrairement privées de leurs biens. 

On a beaucoup parlé des répercussions de l’article 12 sur les modalités en matière de prise de décision. Aux fins du présent chapitre, il s’agit principalement de déterminer s’il faut comprendre que la CDPH reconnaît aux personnes handicapées un droit inaliénable et non dérogeable d’être reconnues comme des personnes juridiquement capables en tout temps ou qu’elle les protège contre les décisions discriminatoires d’incapacité basées sur leur état de personne handicapée. Les conséquences découlant de ces deux interprétations sont très différentes. Si l’on retient la première interprétation, la prise de décision au nom d’autrui n’est plus une modalité valable. Une personne conserverait le pouvoir juridique ultime de prendre des décisions dans toutes les circonstances et elle ne serait soutenue pour ce faire que si elle y consentait[308]. La deuxième interprétation obligerait les pouvoirs publics à concevoir et à appliquer sans discrimination des lois sur la capacité[309]. Les opinions divergent sur ce que suppose exactement cette deuxième interprétation, mais il semblerait à tout le moins qu’il faudrait protéger les droits à l’égalité précisés, l’accès à des soutiens à la prise de décision et la prévision de protections appropriées contre les abus dans l’exercice de cette capacité juridique.

La Déclaration et la Réserve du Canada concernant la CDPH précisent que « le Canada reconnaît que les personnes handicapées sont présumées avoir la capacité juridique dans tous les aspects de leur vie[310] ». Le Canada déclare qu’il comprend que l’article 12 permet des mesures d’accompagnement et de représentation relatives à l’exercice de la capacité juridique « dans des circonstances appropriées et conformément à la loi[311] », et se réserve le droit « de continuer l’utilisation de telles mesures dans des circonstances appropriées et sujettes à ce qu’elles soient assorties de garanties appropriées et effectives[312] ».

 

C.    La prise de décision au nom d’autrui en Ontario

1.     Les formules de prise de décision au nom d’autrui en Ontario

La prise de décision au nom d’autrui demeure la formule la plus courante en matière de prise de décision dans les provinces et les territoires visés par la common law. Elle varie cependant très considérablement d’un endroit à un autre. En raison des efforts de réforme approfondie du droit dans les années 1980 et 1990, la formule de l’Ontario est assez moderne, cohérente et progressiste. Les éléments clés du système ontarien, aux fins du présent chapitre, sont exposés ci-après. Comme ils sont discutés en détail dans d’autres chapitres, ils ne sont présentés ici que sous forme résumée.

Le critère de détermination de la capacité cognitive. Comme il est dit au chapitre 1 de la partie Trois, il est fondé sur l’aptitude de la personne « à comprendre et à évaluer » l’information nécessaire à la prise d’une décision donnée. Même si la capacité juridique peut évoluer ou fluctuer et même si elle concerne certaines décisions ou certains types de décision (c’est-à-dire qu’elle n’est pas « plénière »), elle constitue une qualité absolue. Une personne a soit la capacité juridique de prendre une décision donnée, soit elle ne l’a pas. Lorsqu’elle n’a pas la capacité juridique de prendre une décision ou un type de décision en particulier, un représentant (le « mandataire spécial ») prendra la décision en son nom et assumera aussi les responsabilités qui s’y rattachent.

Les garanties procédurales pour les personnes qui peuvent être juridiquement incapables. Même si les garanties peuvent ne pas être complètes ou idéales, comme il est dit au chapitre II de la partie Trois, l’ensemble des lois ontariennes accordent beaucoup d’attention aux garanties procédurales des personnes qui peuvent être juridiquement incapables, notamment des mécanismes pour renseigner la personne et contester les décisions sur la capacité juridique.

Les possibilités pour les personnes de choisir un mandataire spécial ou de participer à la sélection de ce dernier. On expose, dans le chapitre II de la partie Trois, le mode de sélection d’un mandataire spécial. Les lois ontariennes cherchent à simplifier, par la création d’une procuration, la tâche des personnes juridiquement capables qui choisissent un mandataire spécial pour prendre des décisions à leur place concernant leurs biens, les soins ou les traitements dont elles peuvent avoir besoin. L’Ontario restreint assez peu le contenu des procurations ou les exigences pour en assurer la validité. De plus, lorsque des tuteurs sont précisés, soit par les dispositions du remplacement de la tutelle légale soit par des nominations du tribunal, le TCP et le tribunal doivent respectivement tenir compte des souhaits de la personne placée sous tutelle.

L’importance des liens de confiance, fondement de la prise de décision au nom d’autrui. Comme on le dit dans le chapitre II de la partie Trois, l’ensemble des lois ontariennes prévoit divers mécanismes qui visent à donner la priorité à la sélection de mandataires spéciaux en fonction des liens de confiance et d’intimité existants. Par exemple, la liste hiérarchisée des mandataires spéciaux prévue dans la Loi de 1996 sur le consentement aux soins de santé (LCSS) donne la priorité aux membres de la famille, lorsqu’un mandataire spécial n’a pas déjà été nommé. De même, les dispositions sur le remplacement des tuteurs selon la LPDNA privilégient les membres de la famille.

Les devoirs du mandataire spécial de promouvoir la participation et de tenir compte des souhaits et des préférences. Selon la LPDNA, tant les procureurs en vertu d’une production que les tuteurs doivent promouvoir la participation de la personne à la prise de décision. En ce qui concerne les décisions sur les soins à la personne selon la LPDNA, et toutes les décisions en vertu de la LCSS, les mandataires spéciaux doivent tenir compte des « désirs exprimés lorsque la personne était capable », ses valeurs et ses croyances lorsqu’elle était capable, et ses désirs actuels, lorsqu’ils peuvent être confirmés.


2.     Critiques à l’égard de la prise de décision au nom d’autrui

Il est important, dans l’examen des critiques concernant la prise de décision au nom d’autrui, de se concentrer sur celles qui sont pertinentes par rapport au système en vigueur en Ontario, par conséquent, à ce projet. De plus, la présente section se concentrera sur les critiques de la prise de décision au nom d’autrui en tant modalité et non sur les préoccupations formulées sur la mise en œuvre dans la pratique de la prise de décision au nom d’autrui, car ces préoccupations sont abordées tout au long d’autres chapitres du présent document de travail.

Il est à noter que pour la majeure partie des personnes consultées pendant la consultation préliminaire de la CDO, les sujets de préoccupation ne portaient pas sur la formule de prise de décision au nom d’autrui en soi, mais plutôt sur sa mise en œuvre en pratique. Autrement dit, ces personnes consultées ne se préoccupaient pas de la façon dont les lois ont défini les fonctions des mandataires spéciaux ou détaillé leurs responsabilités. Elles se préoccupaient surtout de savoir si loi, les orientations et les méthodes connexes garantissaient que ces fonctions et ces responsabilités étaient, dans les faits, menées comme elles devaient l’être. De ce point de vue, si les mandataires spéciaux avaient les soutiens dont ils ont besoin pour s’acquitter pleinement de leurs fonctions, telles que exposées dans la LPDNA et la LCSS, et si leur contrôle est pleinement assuré, le système fonctionnerait bien. 

D’autres personnes consultées ont exprimé des préoccupations sur le fond de cet arrangement de la prise de décision au nom d’autrui, soutenant qu’elle va à l’encontre des droits fondamentaux des personnes handicapées. Dans une grande mesure, les critiques de la prise de décision au nom d’autrui recoupent les critiques de la conception cognitive et fonctionnelle en matière d’incapacité, exposée à la section B.4 du chapitre III; en fait, la plupart des critiques ne séparent pas l’un et l’autre. Dans cette perspective, la prise de décision au nom d’autrui est (à des degrés plus ou moins grands, selon la critique et la forme particulière de prise de décision au nom d’autrui examinée) fondamentalement paternaliste et débilitante pour les personnes handicapées, fondée sur des préjugés fondés sur la capacité physique et viole les garanties d’égalité et d’absence de discrimination contenues dans la Charte canadienne des droits et libertés et autres instruments relatifs aux droits de la personne.  

On critique aussi la prise de décision au nom d’autrui d’un point de vue thérapeutique. Ces critiques des systèmes modernes de prise de décision au nom d’autrui se demandent si un système fondé, comme il l’est actuellement, sur le transfert du pouvoir décisionnel d’une personne à une autre, peut parvenir à créer un juste équilibre entre l’autonomie et d’autres aspects du bien-être. La prise de décision au nom d’autrui repose sur l’hypothèse que le mandataire spécial peut prendre de meilleures décisions pour le bien-être d’une personne dont on a déterminé qu’elle était juridiquement incapable qu’elle ne pourrait le faire pour elle-même, et sur la croyance que ce transfert du pouvoir décisionnel en soi ne se fera pas [traduction] « à des coûts excessivement élevés pour le bien-être des pupilles [soit les personnes sous tutelle] simplement parce qu’on aura subrogé leur pouvoir décisionnel[313] ». Toutefois, certains ont soutenu que la prise de décision au nom d’autrui peut avoir des effets néfastes sur le bien-être d’une personne simplement en transférant le « locus de contrôle » à un autre. La perte d’autonomie peut, en soi, avoir des conséquences préjudiciables sur le bien-être, entraînant peut-être des symptômes de dépression, des sentiments d’impuissance et la perpétuation des préjugés au sujet de la personne. Au lieu de renforcer le bien-être, la nomination d’un mandataire spécial peut être « antithérapeutique[314] ».

D’autres préoccupations examinées dans le chapitre I de la partie Trois ont trait au fait que la prise de décision au nom d’autrui, fondée comme elle l’est sur une conception du « tout ou rien » à l’égard de la capacité, est un moyen imparfait de composer avec une qualité aussi changeante et imprécise que la capacité peut l’être, en particulier pour les personnes qui sont aux limites de la capacité, de sorte que de personnes capables selon les exigences de la loi, se retrouvent néanmoins sous le régime de la prise de décision au nom d’autrui.

 

D.    La prise de décision accompagnée

1.     Les notions de la prise de décision accompagnée

La notion de prise de décision accompagnée est fondée sur un modèle social de l’invalidité, soit, comme on le dit dans la CDPH, « [qu’elle] résulte de l’interaction entre des personnes présentant des incapacités et les barrières comportementales et environnementales qui font obstacle à leur pleine et effective participation à la société sur la base de l’égalité avec les autres[315] ». Ce modèle vise à promouvoir la pleine égalité des personnes handicapées, y compris leur dignité, leur autonomie et leur capacité de participer à la société sur la base de l’égalité avec les autres. Du point de vue des défenseurs de la prise de décision accompagnée, la perte de la capacité juridique des personnes ayant un handicap intellectuel, mental, cognitif ou autre est un héritage d’une longue histoire de discrimination, de dévaluation et d’exclusion des personnes handicapées et un symptôme d’une opinion universelle qui confère aux personnes handicapées une capacité morale et juridique moindre.

La prise de décision accompagnée vise à permettre aux personnes dont les handicaps peuvent nuire à leur capacité de recevoir, d’évaluer et de mémoriser de l’information pour avoir la maîtrise des décisions les concernant de pouvoir obtenir l’accompagnement de personnes avec lesquelles elles entretiennent des liens de confiance et d’intimité, sans perdre pour autant leur capacité juridique.

 

Les éléments fondamentaux de la prise de décision accompagnée

Comme la prise de décision accompagnée est une innovation législative assez récente, il n’en existe pas de modèle normalisé et comme nous le décrivons ci-dessous, il existe de nombreuses différences dans les façons de la mettre en œuvre de manière pertinente et efficace. Certains éléments fondamentaux sont communs à toutes les formules de prise de décision accompagnée; comme nous le verrons dans le reste de cette section, leur mise en œuvre proposée et leurs répercussions varient considérablement toutefois, en particulier selon l’ampleur proposée de l’application de cette méthode de prise de décision et le degré d’officialisation et de responsabilité proposée pour les administrations publiques. 

La prise de décision accompagnée n’exige pas une constatation d’incapacité. En fait, on cherche, dans un arrangement de prise de décision accompagnée, à éviter cette constatation ou évaluation. La prise de décision accompagnée n’est pas axée sur la présence ou l’absence de traits mentaux particuliers, mais sur les soutiens et les accommodements qui peuvent aider les personnes à avoir la maîtrise des décisions les concernant.

Dans les arrangements de prise de décision accompagnée, la personne accompagnée conserve la responsabilité juridique de sa décision. Les personnes accompagnées continuent de décider par elles-mêmes et ces décisions sont les leurs, pas celles de leurs accompagnateurs.

Les arrangements de prise de décision accompagnée sont fondés sur le consentement. Un arrangement imposé est contraire à l’éthique intrinsèque de la prise de décision accompagnée : l’arrangement doit être conclu librement pour fonctionner.

La prise de décision accompagnée est fondée sur des liens de confiance et d’intimité. Pour que la prise de décision accompagnée puisse exister, tout accompagnateur doit très bien connaître personnellement la personne, pour l’aider à comprendre et à tenir compte ensuite de ses valeurs et de ses préférences dans sa décision.

 

La prise de décision accompagnée dans la pratique

La prise de décision accompagnée, selon les éléments exposés ci-dessus, existe déjà dans la pratique non officielle. Les amis et les membres de la famille des personnes qui ont besoin d’aide pour prendre des décisions peuvent les accompagner, ce qui évite les décisions relativement à la capacité juridique et le recours aux dispositions de la LPDNA ou de la LCSS. Comme il est dit ultérieurement dans le présent chapitre, toutefois, il peut falloir des démarches plus officielles pour la prise de décision, lorsque des exigences institutionnelles ou juridiques entrent en jeu, par exemple parce qu’il faut répondre à des établissements de santé ou des établissements financiers qui ont besoin de décisions claires, certaines et responsables. L’enjeu, dans ces cas, n’a pas trait tant à l’adoption de méthodes de prise de décision accompagnée, mais au caractère officiel à leur donner et à la façon de le faire.  

On a aussi observé que dans la pratique, les membres de la famille et les amis peuvent exercer leurs fonctions officielles de mandataires spéciaux d’une manière qui reprend un grand nombre des éléments pratiques de la prise de décision accompagnée, par exemple, respecter la personne dans son identité, sa volonté et ses préférences; favoriser l’autonomie et l’acquisition ou le maintien de ses moyens pour prendre des décisions et lui laisser, dans la plus grande mesure possible, la possibilité de prendre elle-même ses décisions. Les lois actuelles n’empêchent pas d’agir ainsi pour la prise de décision, et à certains égards, encouragent cette façon de faire. Toutefois, sur le plan officiel et juridique, les décisions demeurent celles du mandataire spécial et pas celles de la personne en question. 

La prise de décision accompagnée est encore une notion assez nouvelle et il reste des débats entre ses défenseurs quant à son sens précis en pratique et comment le mieux la mettre en œuvre. 

L’élaboration d’une base de données probantes. Il y a pour le moment très peu de consensus sur la façon d’inclure la prise de décision accompagnée dans les cadres juridiques. Plusieurs pays ont inclus des formes limitées de prise de décision accompagnée dans leurs lois sur la capacité et la prise de décision, mais ce sont des innovations récentes et on ne sait pas encore ce qui pourrait constituer des modèles fructueux ou des « pratiques exemplaires » dans ce domaine. Il n’y a pas non plus eu d’études d’évaluation approfondies des méthodes en matière de prise de décision accompagnée, mais des projets pilotes réalisés en Australie ont donné des résultats préliminaires intéressants[316]. Divers experts dans le domaine ont souligné l’importance de poursuivre les recherches pour mieux comprendre si les aspirations exposées pour la prise de décision accompagnée (dans ses différents modèles) sont possibles dans la pratique et comment elles le sont[317]. Comme l’a dit un commentateur :

[traduction] Il n’y a à peu près aucune donnée probante sur la façon dont les décisions sont prises en fait dans les relations de prise de décision accompagnée; l’effet de ces relations sur les personnes qui ont besoin de cet accompagnement; ou la qualité des décisions qui en découlent. Sans plus de renseignements, il est impossible de savoir si la prise de décision accompagnée donne en réalité de l’autonomie aux personnes ayant des déficiences cognitives et intellectuelles[318]. 

De même, il semble y avoir peu de travaux sur les répercussions de la diversité culturelle sur la prise de décision accompagnée, bien qu’il faille souligner que dans certains contextes culturels, la prise de décision au nom d’autrui en soi peut difficilement convenir aussi. Le document du Canadian Centre for Elder Law portant sur la prise de décision accompagnée fait le commentaire suivant : [traduction] « [D]e nombreuses cultures ont l’idée plus répandue que la prise de décision pour autrui et la prise de décision accompagnée peuvent être une bonne option pour les personnes qui ont ces types de normes culturelles[319] »; on note en outre qu’il existe peu de preuves concernant la prise de décision accompagnée et les niveaux de littératie, la culture indigène et la régionalité.

Cet appel à la prudence trouve un écho dans l’expérience courante, à savoir l’écart entre la réalité et les objectifs qui fait que des réformes du droit bien intentionnées ne réussissent pas à produire l’effet positif voulu ou, dans certains cas, ont des effets néfastes imprévus, ce qui renforce l’importance d’une évaluation attentive des initiatives de réforme du droit. 

La prise de décision accompagnée est-elle pour tout le monde? Il existe des modèles multiples de prise de décision accompagnée. L’un des débats fondamentaux irrésolus au sujet de ces modèles porte sur l’universalité ou non de l’application de la prise de décision accompagnée. 

Certains soutiennent que la capacité juridique doit être maintenue en toutes circonstances, même lorsque l’accompagnement doit être total[320]. Cela dit, la prise de décision au nom d’autrui, avec sa perte implicite de capacité juridique à agir, est inacceptable dans toutes les circonstances. Par exemple, Bach et Kerzner ont proposé trois statuts juridiques dans un cadre qui reconnaît et préconisent la prise de décision accompagnée, de même qu’un droit de maintien de la capacité juridique pour tous :

  1. Statut d’indépendance juridique : la personne est capable de comprendre l’information et d’évaluer les conséquences d’une décision, et de communiquer cette compréhension et cette décision à un tiers, avec le soutien ou l’aide d’autres personnes choisies.
  2. Statut de la prise de décision accompagnée : des accompagnateurs sont nommés de quelque manière pour aider la personne à prendre des décisions et à les communiquer à autrui; les accompagnateurs agissent conformément à la volonté ou à l’intention perçue chez la personne, ou les deux. Pour que ce statut s’applique, la personne doit être capable d’agir de telle sorte qu’au moins une autre personne puisse, parce qu’elle la connaît personnellement, déterminer sa volonté ou son intention ou les deux.
  3. Statut d’aide externe : dans les cas où les personnes n’ont pas, pour toutes sortes de raisons, d’autres personnes capables de discerner leur volonté et leur intention, un facilitateur peut être nommé, soit par un document de planification ou un tribunal, pour représenter cette personne, selon la meilleure interprétation de sa volonté et de ses préférences[321].

D’autres voient la prise de décision accompagnée comme un type d’accommodement dans lequel divers types de soutiens sont assurés pour que la personne intéressée puisse dans les faits, prendre la décision elle-même (compte tenu de différents points de vue sur ce que veut dire « prendre la décision » dans ce contexte). Cet arrangement reconnaît que, dans certains cas, des personnes seront incapables de prendre elles-mêmes les décisions les concernant, quelle que soit l’ampleur du soutien, et que dans ces circonstances, sur le plan pratique, une autre personne doit prendre la décision, même si celle-ci doit tenir compte de la dignité fondamentale et de l’identité individuelle de la personne au nom de laquelle elle prend la décision. Autrement dit, dans certains cas, une forme ou une autre d’arrangement qui ressemble à ce que nous appelons actuellement la prise de décision au nom d’autrui est inévitable, même s’il faut insister sur le fait qu’il s’agit là véritablement d’une solution de dernier recours[322].

Dans ce second arrangement, les variations sont très nombreuses : certains croient que pour maintenir la capacité juridique, l’accompagnateur doit pouvoir aider la personne à atteindre un certain degré déterminé de capacité « à comprendre et à évaluer » et d’autres soutiennent qu’une décision peut être fondée sur la « volonté et la préférence » de la personne, même si l’intéressée peut ne pas pleinement comprendre tous les aspects ou toutes les conséquences d’une décision ou de l’absence de décision.

La position adoptée dans ces débats a des répercussions profondes sur la mise en œuvre de la prise de décision accompagnée en pratique, notamment la question de savoir si des arrangements de prise de décision accompagnée peuvent se faire par une procédure de nominations publiques ou s’il faut une forme ou une autre d’organisme public qui peut assurer une certaine modalité de prise de décision accompagnée dans les cas où il n’y a pas de liens personnels de confiance. 

L’attribution de la responsabilité juridique. Une question difficile à résoudre est celle de l’attribution de la responsabilité juridique dans le cas des décisions prises dans un arrangement de prise de décision accompagnée. Les réponses sont dans une certaine mesure liées au modèle de prise de décision accompagnée adopté et à la fonction attendue des accompagnateurs. D’un point de vue, on peut dire que la décision appartient à la personne et que, par conséquent, elle porte l’entière responsabilité de la décision : les critiques soutiennent que ce point de vue peut mener à des résultats moraux troublants lorsque des personnes très vulnérables peuvent être tenues responsables de lourdes conséquences juridiques même si elles n’ont pas compris les risques liés à la décision. D’un autre point de vue, on peut insister sur l’interdépendance des décisions prises dans le cadre d’une prise de décision accompagnée :

[traduction] [S]i la prise de décision est un processus interdépendant et si une personne a un réseau de soutien qui l’aide à prendre des décisions, on peut soutenir que les membres de ce réseau de soutien devraient assumer au moins une certaine responsabilité éthique à l’égard des décisions prises, à moins qu’ils ne prennent officiellement leur distance de cette décision. La question de la responsabilité juridique se pose si les décisions aux conséquences juridiques sont prises, par exemple les décisions qui ont trait à un contrat financier, celles qui exigent un consentement officiel ou les décisions qui peuvent donner lieu à des poursuites civiles[323].

Comme il est dit plus en détail ultérieurement dans la présente section, les questions de responsabilité juridique sont importantes, non seulement pour les personnes qui concluent des accords de prise de décision accompagnée, mais pour les tiers en relation avec ces personnes, de qui on attend qu’elles se fient aux décisions et qu’elles y donnent suite et pour qui les préoccupations de clarté, de certitude et de responsabilité sont prépondérantes.

 

2.     La prise de décision accompagnée au Canada

Certaines provinces et certains territoires canadiens ont, sous une forme ou une autre, reconnu la prise de décision accompagnée. Il existe trois types de reconnaissance : la reconnaissance de la capacité juridique lorsqu’elle est exercée avec des soutiens; les conventions de prise de décision accompagnée et les conventions de représentation. Nous n’avons pas ici tout l’espace pour examiner pleinement tous ces systèmes, mais la présente section en présente brièvement les principales caractéristiques.

La reconnaissance de la capacité lorsqu’elle est exercée avec des soutiens

Dans certains cas, il n’existe pas de mécanisme officiel visant la création, la validation et la surveillance des arrangements de prise de décision accompagnée. La loi reconnaît implicitement plutôt qu’il existe des arrangements officieux de prise de décision accompagnée. Par exemple, la Mental Capacity Act de l’Angleterre et du Pays de Galles intègre l’un de ses principes généraux : [traduction] « Une personne ne doit pas être traitée comme si elle est incapable de prendre une décision à moins que toutes les mesures pratiques pour lui venir en aide n’aient été prises sans succès[324] ». Les Territoires du Nord-Ouest adoptent une démarche semblable : il est dit que lorsqu’on envisage une ordonnance de tutelle ou de curatelle, le Tribunal doit tenir compte de « la capacité de l’adulte, par lui-même ou avec l’aide de quelqu’un, de comprendre les renseignements lui permettant de prendre une décision […] et d’apprécier les conséquences raisonnablement prévisibles d’une décision fondée sur ces renseignements, ou de l’absence d’une telle décision[325] [c’est nous qui soulignons]. Cette façon reconnaît essentiellement ce que Bach et Kerzner ont appelé un « statut d’indépendance juridique ». 

 

Les conventions de prise de décision accompagnée

Le Yukon et l’Alberta permettent à des adultes de procéder à des nominations personnelles pour officialiser le rôle que jouent leurs soutiens officieux dans la prise de décision. Les deux parlent respectivement de conventions ou d’autorisations de prise de décision accompagnée. La Loi sur la prise de décisions, le soutien et la protection des adultes du Yukon[326] explique ainsi la raison d’être des conventions de prise de décision accompagnée : 

a. habiliter les amis et les membres de la famille dignes de confiance à aider les adultes qui n’ont pas besoin d’être sous tutelle et qui sont en grande partie capables de gérer leurs affaires, mais dont la capacité à prendre ou à communiquer des décisions à l’égard d’une partie ou de la totalité de leurs affaires est diminuée;

b. donner aux personnes qui fournissent du soutien à un adulte en vertu de l’alinéa a) le statut juridique leur permettant d’accompagner cet adulte et de participer à des discussions avec d’autres personnes lorsque ce dernier prend des décisions ou tente d’obtenir de l’information[327].

Au Yukon comme en Alberta, un accompagnateur ne peut pas prendre de décisions au nom d’un adulte et une décision prise ou communiquée avec un soutien est considérée comme la décision d’un adulte[328]. La capacité de la prise de décision d’un adulte est explicitement préservée[329]. En Alberta, un adulte doit avoir la capacité de prendre ses propres décisions avant de recevoir de l’aide. Cette formule n’est recommandée que pour [traduction] « les personnes capables qui doivent prendre des décisions complexes, les personnes dont la langue maternelle n’est pas l’anglais et les personnes atteintes de déficiences légères[330] ». Au Yukon, « [cette convention] est destinée aux adultes qui ont besoin d’aide pour prendre leurs propres décisions[331] ».

Pour conclure une convention ou une autorisation de prise de décision accompagnée, la personne doit [traduction] « comprendre la nature et l’effet d’une autorisation de prise de décision accompagnée [332] ».

Au Yukon, les conventions de prise de décision accompagnée sont possibles pour les questions de soins personnels et les questions financières, dont les opérations bancaires, le budget mensuel, les dépenses alimentaires et d’autres questions financières. En Alberta, ces ententes sont proposées pour les soins personnels, mais pas les affaires financières[333].

La prise de décision accompagnée peut accorder aux accompagnateurs un certain nombre de pouvoirs et de responsabilités, dont les suivants :

  • accéder à de l’information ou en obtenir, ou aider la personne à ce faire[334];
  • aider la personne dans le processus décisionnel[335];
  • communiquer la décision à d’autres personnes ou aider la personne à le faire[336];
  • s’assurer que la décision est mise en œuvre[337];
  • informer la personne en lui fournissant des explications et des renseignements pertinents[338];
  • confirmer les souhaits de la personne[339].

Le Yukon précise que l’accompagnateur ne peut exercer une influence indue et lorsque les lois liées à la fraude, à l’information trompeuse et à l’influence indue sont enfreintes, la décision ne sera pas reconnue comme une décision appartenant à cette personne[340]. En Alberta, s’il y a des motifs raisonnables de croire qu’une décision communiquée par un accompagnateur ou prise avec l’aide d’un accompagnateur résulte d’une influence indue, ou qu’il y a eu fraude ou information trompeuse, une personne peut refuser de reconnaître cette décision[341].

Selon les deux lois, les accompagnateurs sont protégés contre les actes ou les omissions de bonne foi[342]. Le Yukon précise en outre que l’accompagnateur n’engage pas sa responsabilité à l’égard d’une décision prise par la personne s’il n’était pas d’accord avec cette décision et a conseillé à la personne de ne pas la prendre[343] et, surtout, une convention intervenue avec un tiers peut être déclarée nulle si la personne a conclu la convention avec ce tiers sans consulter l’accompagnateur au préalable pour une question qui relève de la convention de prise de décision accompagnée[344].

Les représentants du Yukon et de l’Alberta ont indiqué que la création de ces types de nomination répondait principalement à des préoccupations idéologiques liées aux définitions de la capacité exprimées parmi les personnes handicapées[345]. En Alberta, la loi a également répondu à un besoin pragmatique d’officialiser des liens de confiance dans le contexte des soins de santé afin d’accorder aux accompagnateurs l’accès à des renseignements confidentiels[346]. Étant donné que les conventions ne sont pas enregistrées ni dans la province ni dans le territoire, on ne sait pas si elles sont utilisées. L’Office of the Public Guardian de l’Alberta a déclaré qu’elles ont été très populaires[347]. Par contraste, au Yukon, on croit qu’elles ont été peu utilisées en raison, notamment, de l’absence d’accompagnateurs de confiance ou disponibles[348].

 

Les conventions de représentation

Les conventions de représentation sont, au Yukon et en Colombie-Britannique, une autre forme de nominations personnelles, mais une forme qui permet à un « représentant » de prendre des décisions ayant force exécutoire au nom d’un adulte dans la gestion courante de ses affaires financières. On dit souvent dans la littérature que les conventions de représentation facilitent la prise de décision accompagnée[349] ou qu’elles sont des lignes de conduite moins contraignantes que les procurations et la tutelle[350]. 

Les conventions de représentation au Yukon se situent à mi-chemin entre les conventions de prise de décision accompagnée et les procurations. Elles donnent un pouvoir de représentation pour la prise de décisions concernant des questions financières prescrites, dont la signature d’instruments négociables, des mesures pour obtenir des prestations, l’investissement et le retrait de fonds, la réception et le dépôt de la pension et d’autres sommes, et l’achat de biens et services pour la vie courante[351]. Ces conventions diffèrent des procurations parce qu’elles ne donnent pas de pouvoirs pléniers sur la gestion financière[352] et elles expirent au bout de trois ans ou lorsque la capacité de l’adulte diminue, selon la première éventualité à survenir. Par conséquent, ce type de convention « n’est pas destinée aux adultes souffrant d’une maladie dégénérative telle que la maladie d’Alzheimer » ou aux personnes dont les capacités de prise de décision varient[353].

Le critère établi pour déterminer la capacité d’exécuter ces conventions de représentation exige que l’adulte comprenne la nature et l’effet de la convention. Comme ces dernières visent des opérations plus complexes, il est, dans les faits, supérieur à celui des conventions de prise de décision accompagnée. Selon les pouvoirs conférés au représentant, le critère peut être inférieur ou le même que celui prévu pour une procuration. Comme ces dernières sont plus facilement reconnues par les banques et d’un pouvoir public à un autre, lorsque la raison d’être d’une convention de représentation est la même que celle d’une procuration, l’Unité des services aux personnes âgées et à la protection des adultes du Yukon préconise les procurations perpétuelles[354]. Étant donné qu’au Yukon, l’avocat d’un adulte doit préparer une procuration[355], les conventions de représentation représentent une option plus accessible.

Même si sa population dépasse à peine 35 000 personnes, le Yukon compte environ 30 conventions de représentation[356]. Ces conventions ont été utilisées pour demander et gérer des fonds au nom d’adultes admissibles aux paiements d’expérience commune (PEC) prévus dans la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens[357]. Dans ce contexte, les conventions de représentation visaient à protéger des adultes qui pouvaient être vulnérables à l’exploitation financière parce qu’on saurait dans la collectivité qu’ils allaient recevoir ces sommes[358].

La Representation Agreement Act de la Colombie-Britannique est entrée en vigueur en 2001, après des années de [traduction] « collaboration générale sans précédent de la collectivité et de l’État[359] » et elle a des antécédents législatifs complexes. Les conventions de représentation avaient été initialement prévues pour remplacer les procurations, mais après un examen des deux régimes, commandé par le Procureur général, les deux régimes continuent de coexister[360].

Alors que la Representation Agreement Act permettait initialement à un adulte d’autoriser son représentant ou sa représentante à [traduction] « faire, au nom de l’adulte, tout ce que peut faire un fondé de pouvoir agissant en vertu d’une procuration […][361], en vertu des modifications adoptées en 2007, les pouvoirs d’un représentant ont pris de l’ampleur et comprennent maintenant des aspects comme le paiement de factures, la réception et le dépôt de pensions de retraite, les placements, les soins de santé, l’obtention des services juridiques, les soins à la personne et l’entrée dans un foyer de soins[362].

Les conventions de représentation en Colombie-Britannique recoupent la prise de décision accompagnée et la prise de décision au nom d’autrui : [traduction] « un adulte peut autoriser son représentant à l’aider à prendre des décisions ou à prendre des décisions en son nom […][363] ». Même si certains interprètent cette formulation au sens d’un adulte qui peut choisir soit de demander de l’aide, soit de faire prendre les décisions en son nom, d’autres disent que cette disposition doit être interprétée comme un arrangement global qui tient compte de la dynamique du processus de prise de décision : un adulte peut avoir besoin de plus ou moins d’aide, selon ses capacités pour la décision à prendre[364]. Une convention de représentation en Colombie-Britannique peut durer pendant toute la durée de l’incapacité de l’adulte[365].

Le processus de prise de décision prévu par la Representation Agreement Act est donc à l’intention des adultes qui peuvent avoir une capacité variable, qui diminue et qui est liée à un aspect en particulier. La définition de la capacité pour la conclusion d’une convention de représentation diffère considérablement du critère du fonctionnement cognitif pour la capacité utilisée dans toutes les lois ontariennes, ce qui reflète une façon de faire très différente selon qu’il s’agit de capacité et de prise de décision, telle qu’exposée dans le chapitre I de la partie Trois du présent document de travail[366]. Les facteurs sont les suivants :

[traduction]
a)        si l’adulte communique un souhait qu’un représentant prenne, aide à prendre ou arrête de prendre des décisions;

b)        si l’adulte montre des choix et des préférences et peut exprimer des sentiments d’approbation ou de désapprobation d’autrui;

c)        si l’adulte sait qu’en concluant la convention de représentation, en la modifiant ou en révoquant l’une ou l’autre des dispositions, il signifie que le représentant peut prendre, ou arrêter de prendre, des décisions ou de faire, ou arrêter de faire, des choix qui se répercuteront sur l’adulte;

d)        si l’adulte entretient avec le représentant une relation basée sur la confiance[367]. 

Une étude menée par le Nidus Personal Planning Resource Centre and Registry, un service d’aide bénévole d’enregistrement et de défense des droits, a observé que 989 conventions de représentation avaient été conclues et enregistrées entre 2006 et 2009, dont 70 p. 100 accordaient des pouvoirs en matière financière. La majorité des adultes qui exécutent des conventions de représentation avaient entre 19 et 29 ans, suivis des personnes âgées de 80 à 89 ans, mais des personnes de tous âges ont eu recours à ces conventions[368]. La CDO a également entendu, pendant ses consultations préliminaires, que les conventions de représentation ont été recommandées comme outil pour aider des adultes à gérer les soutiens publics au revenu et les prestations sociales dans les situations de déficience sur le plan du développement[369].

Des avocats ont toutefois hésité à adopter les conventions de représentation. Il fallait à l’origine un avocat pour valider ces conventions et l’écart entre le critère légal de la détermination de la capacité et celle-ci au sens de la common law de mandater un avocat a été une source de malaise. Malgré l’élimination de la participation d’un avocat au processus de validation d’une convention de représentation, cette tension n’a pas été résolue pour les adultes qui souhaitent demander l’avis d’un conseiller juridique[370].

 

3.     Autres formules de prise de décision accompagnée

Comme le montre ce bref examen de la prise de décision accompagnée au Canada, l’adoption de cet arrangement s’est fondée sur les nominations personnelles et a souvent imposé des restrictions aux types de décisions qui peuvent être prises dans le cadre de ces arrangements. À l’exception du régime des conventions de représentation de la Colombie-Britannique, ces arrangements sont demeurés fondés sur une version ou une autre du critère de détermination de la capacité cognitive. Il existe d’autres conceptions de la prise de décision accompagnée qui portent la notion dans une voie légèrement différente et deux d’entre elles sont exposées brièvement ci-dessous.

Le système suédois de mentorat

Le système du « god man » (homme bon) ou du mentor en Suède donne un exemple de système de prise de décision accompagnée selon une procédure de nominations publiques. Cette procédure doit explicitement être un premier choix, avant l’option de dernier recours d’un forvaltare (administrateur) qui ressemble davantage au modèle de la prise de décision au nom d’autrui. La nomination de mentor n’a pas de répercussions sur la capacité juridique ou les droits civils de la personne au nom de laquelle est faite la nomination[371]. Le mentor doit agir en consultant la personne pour laquelle il a été nommé[372] et avec son consentement, et agir auprès d’elle comme un « conseiller », l’informant des décisions et des opérations et en en discutant avec elle. 

Lorsqu’il s’agit de personnes handicapées, la plupart des nominations se font par consentement; toutefois, un mentor peut également être nommé pour une personne incapable de donner un consentement[373]. Seuls dans les cas où une personne s’oppose à la nomination d’un mentor ou aux décisions de ce dernier, et dans les cas où la propriété ou les intérêts personnels de la personne sont gravement menacés qu’un administrateur (mandataire spécial) sera nommé. La procédure de nomination d’un mentor n’est pas officielle, se fait rapidement et gratuitement, et elle est prévue dans le Code of Parenthood and Guardianship[374]. Selon ce code : 

[traduction] si, en raison de maladie, de l’arrêt du développement mental, d’un état de santé affaibli ou autre, une personne a besoin d’aide pour garantir ses droits, administrer ses biens ou pourvoir à ses besoins, le Tribunal doit, au besoin, nommer un tuteur ou un « homme bon » pour cette personne[375].

Une requête visant la nomination d’un mentor peut être faite au tribunal par la personne pour qui un mentor sera nommé, un parent proche de cette personne ou un curateur public[376]. Comme le signale Herr, [traduction] « étant donné que la plupart des cas sont fondés sur un consentement direct et un examen des documents par le Tribunal, aucune comparution ou audience personnelle n’est nécessaire. Dans les cas courants, la procédure de nomination ne prend que deux ou trois semaines, le juge rendant son ordonnance dans environ 10 minutes[377] ». Une requête doit être accompagnée d’un rapport des services sociaux dans lequel il est expliqué pourquoi cette requête est soumise[378]. Si celle-ci n’a pas été déposée par la personne pour qui un mentor est nommé ou avec son consentement, elle doit être accompagnée d’un certificat du médecin qui déclare que la personne est incapable de donner son consentement[379].

Les nominations sont faites par un tribunal de district et peuvent être adaptées aux besoins particuliers de la personne[380]. Les fonctions d’un mentor peuvent être limitées à la représentation des droits de cette personne, par exemple faire une demande de services spéciaux; superviser ses affaires financières ou voir à d’autres besoins de soutien et lui donner des conseils[381].

Même si des parents sont les plus souvent nommés comme mentors, des professionnels tels que des avocats, des comptables et des travailleurs sociaux peuvent être mentors pour de multiples clients[382]. Si la personne pour qui un mentor est nommé n’a pas les moyens de payer ses services, l’État paiera alors le mentor, même si ce dernier est un parent de la personne pour qui il est nommé[383].

 

Les propositions de réforme du droit de Michael Bach et de Lana Kerzner

En 2010, Michael Bach et Lana Kerzner ont préparé un document, commandé par la CDO, dans lequel ils ont établi un cadre très exhaustif pour une loi en matière de capacité juridique et de prise de décision axée sur la notion de la prise de décision accompagnée[384]. L’application de ce cadre dans le contexte ontarien, et en particulier de la procédure de nomination des tuteurs et des mandataires spéciaux en vertu de la LCSS a fait l’objet d’un rapport en 2014[385]. Même si les propositions ne peuvent être reprises au complet dans le présent contexte limité, les composantes essentielles sont exposées ci-après. Certaines propositions sont traitées plus en détail dans les paragraphes pertinents du présent document de travail. 

La notion de la capacité de prendre des décisions basées sur la « volonté et l’intention ». Comme on l’a exposé au chapitre I de la partie Trois, Bach et Kerzner proposent un critère minimal de détermination de la capacité de décider, à savoir la faculté [traduction] « d’agir de telle sorte qu’au moins une autre personne qui connaît personnellement l’intéressé peut raisonnablement confirmer ses actions : son intention ou sa volonté; sa mémoire; la cohérence de sa mémoire dans le temps; et ses capacités à s’exprimer à cet égard ».

Le droit aux soutiens à la prise de décision. Les personnes ont le droit d’avoir accès à une gamme de soutiens à la prise de décision, assortis d’un devoir pour les parties au processus de prise de décision de répondre au besoin concernant ces soutiens.

La ligne de conduite la moins contraignante. Comme il a été dit brièvement ci-dessus, Bach et Kerzner définissent trois statuts relativement à la prise de décision : l’indépendance juridique, l’accompagnement et l’aide. La capacité juridique ne peut être retirée, mais le statut selon lequel s’exerce la prise de décision peut changer. Dans chaque cas, le statut attribué à chaque personne doit être le statut le moins contraignant. Dans leur document inédit, Bach et Kerzner proposent une nouvelle catégorie d’« appréciateur de la ligne de conduite » pour s’assurer que les lignes de conduite les moins contraignantes sont envisagées à chaque étape des procédures qui peuvent actuellement mener à la nomination de mandataires spéciaux dans le cadre de tutelles ou en vertu de la LCSS.

La reconnaissance officialisée de la prise de décision accompagnée. Cette proposition recommande la reconnaissance et l’officialisation juridiques du statut de la prise de la décision accompagnée, qui peut être obtenu soit par des documents de planification personnelle, soit par une procédure de requête officielle des éventuels accompagnateurs.

L’assurance de la défense des droits individuels. Pour s’assurer qu’il n’y a pas imposition inutile de restrictions à la prise de décision, il faut que le droit à la défense des droits soit intégré à la loi et soit complètement indépendant, un droit pour quiconque voit son autre droit à la capacité juridique sur le point d’être retreint, et non pas une question de programmes d’aide sociale discrétionnaire ou de charité.

Des garanties contre les mauvais traitements. Pour prévenir les mauvais traitements, des personnes qui n’ont pas de fonction d’accompagnateur et qui ne sont pas en conflit d’intérêts pourraient être nommées pour superviser un arrangement de prise de décision accompagnée. Dans la plupart des cas, ces superviseurs seraient des personnes non rémunérées, connues de la personne ou des accompagnateurs dans la prise de décision ou des deux, mais un registre de superviseurs rémunérés pourrait aussi être constitué par un organisme public.

L’offre de ressources et de soutiens par les pouvoirs publics. Bach et Kerzner recommandent que ceux-ci soient légalement et clairement responsables que les personnes aient accès aux soutiens et aux accommodements dont elles ont besoin pour exercer leur capacité juridique. Il pourrait s’agir d’une formule communautaire. Dans leur document de 2010, les auteurs recommandent la création d’un bureau de ressources communautaires pour venir en aide à la fois aux personnes et à leurs accompagnateurs. Ils recommandent également que le Ministère ait la responsabilité d’une formation publique sur la prise de décision accompagnée auprès des professionnels, des particuliers et les organismes communautaires et qu’un « Bureau du protecteur provincial du droit à la capacité juridique » soit créé pour centraliser la défense des droits à la fois individuels et systémiques.

Un tribunal pour la résolution des différends. Bach et Kerzner recommandent en dernier lieu que le mandat de la Commission du consentement et de la capacité (CCC) soit élargi pour y traiter des questions de résolution des différends et d’exécution des droits en matière de prise de décision accompagnée.

 

4.     Critiques et sujets de préoccupation

Les arrangements de prise de décision accompagnée ont soulevé des préoccupations et des critiques, exposées brièvement ci-dessous. Plusieurs se recoupent.

La clarté et la certitude pour les tiers. Comme nous l’avons noté précédemment dans le présent document de travail, la prise de décision est à la fois un acte personnel et un acte public. Lorsqu’on demande à d’autres de se fonder sur nos décisions ou de les mettre en œuvre, il est important pour eux de bien comprendre la décision qui a été prise, de pouvoir se fier à la finalité de cette décision et de s’assurer que toutes les parties puissent être tenues responsables de la partie de la décision qui leur revient. Dans cette sphère publique, la loi joue un rôle important, par exemple pour déterminer quand un accord est valide et si l’on peut s’y fier, et quand une partie est responsable de l’avoir enfreint. Certains ont dit craindre que la prise de décision accompagnée, parce qu’elle s’appuie sur plusieurs personnes, ne soit pas assez claire pour les tiers qui doivent pouvoir facilement déterminer quelles personnes sont autorisées à conclure des opérations exécutoires.

La reconnaissance et résolution des problèmes de mauvais traitements. Les préoccupations au sujet des mauvais traitements sont un aspect important des critiques de la prise de décision accompagnée. Les personnes dont la capacité de recevoir, de conserver et d’évaluer l’information est affaiblie courront un risque plus grand de mauvais traitements ou d’exploitation, quel que soit le cadre juridique adopté : les problèmes liés aux mauvais traitements ont toujours occupé une grande place dans ce domaine du droit et il en est question ailleurs dans le présent document de travail, car ce sujet préoccupe beaucoup dans le cadre juridique de l’Ontario pour les tuteurs et les procurations. Le chapitre I de la partie Quatre traitera en profondeur du problème des mauvais traitements et des solutions de la réforme. Il est important de noter toutefois que les cadres légaux novateurs associés à une forme ou une autre de prise de décision accompagnée soulèvent des questions particulières en la matière.

Il peut être plus difficile de tenir les accompagnateurs responsables de l’utilisation de leurs fonctions à mauvais escient. Dans le système de la prise de décision au nom d’autrui, ce sont les mandataires spéciaux qui ont au bout du compte la responsabilité des décisions finales et, dans la plupart des systèmes modernes, la loi prévoit des paramètres clairs relativement aux décisions acceptables pour lesquelles ils peuvent être tenus responsables. Dans les cas où, par exemple, une personne exerçant une procuration au soin de la personne prend une décision au sujet de l’hébergement ou de la sécurité qui a, de toute évidence, des répercussions préjudiciables importantes sur le bien-être de la personne, le procureur peut être tenu de démontrer que sa décision a été prise conformément aux désirs de la personne lorsqu’elle était capable ou, si elle ne les a pas exprimés, à des facteurs tels que ses valeurs et ses convictions lorsqu’elle était capable, ses désirs courants et sa qualité de vie[386]. De même, la LPDNA présente un ensemble clair de priorités en ce qui concerne la prise de décision de nature financière, ainsi que les restrictions imposées aux prêts ou aux cadeaux et des instructions à d’autres sujets. Dans les arrangements de prise de décision accompagnée, toutefois, la décision demeure à la personne intéressée. Les lois concernant la prise de décision accompagnée ne fixent pas de normes ou de sujets dont il faut tenir compte dans les décisions prises dans le contexte d’un tel arrangement; les personnes appelées à prendre des décisions avec des accompagnateurs ont le droit, comme quiconque d’entre nous, de prendre des décisions qui ne sont pas judicieuses, risquées ou qui pourraient avoir des conséquences préjudiciables. Comme les accompagnateurs doivent jouer une fonction moins grande dans les décisions, leur responsabilité est également moindre quant aux résultats de la prise de décision et en l’absence d’un critère objectif, il est encore plus difficile de les tenir responsables lorsque leur influence sur la personne qu’ils accompagnent a mené à des résultats peu appropriés.

Les accompagnateurs ont la responsabilité de leur propre comportement dans le processus de prise de décision : en Alberta et au Yukon, les lois concernant les arrangements de prise de décision accompagnée traitent explicitement des problèmes questions de la fausse représentation, de l’influence indue ou de la fraude de la part des accompagnateurs. Dans les deux cas, des décisions peuvent ne pas être reconnues comme des décisions de la personne, lorsque ces situations préjudiciables se sont produites. Il peut cependant être difficile d’obtenir la preuve d’une fausse représentation ou de l’influence indue de la part d’un accompagnateur. Le processus de prise de décision privée se fait un peu « à l’aveugle », qu’il s’agisse d’un régime d’accompagnement ou de décision au nom d’autrui. Il s’agit essentiellement d’un processus privé et non officiel, qui n’est pas assujetti à la soumission de documents justificatifs. Lorsque des liens personnels étroits sont en jeu, ce sont probablement des réseaux complexes de pouvoir et d’interdépendance : il peut être très difficile, à la fois sur le plan pratique et psychologique, de démêler les intérêts et les motifs des « accompagnateurs » de ceux de la personne qu’ils doivent aider. Certaines personnes qui n’ont pas la capacité juridique peuvent avoir beaucoup de difficultés à reconnaître les motifs de leurs accompagnateurs, à exprimer ce que le processus décisionnel a été de leur point de vue ou à se souvenir avec quelque sûreté de ce qu’a été ce processus. Dans ces circonstances, il peut être très difficile de démontrer qu’il y a eu fausse représentation ou influence indue, sauf dans les cas les plus effroyables. 

L’Advocacy Centre for the Elderly (ACE), dans un mémoire présenté pour le projet connexe de la CDO sur La capacité des adultes handicapés mentaux et le REEI fédéral fait le commentaire suivant :

[traduction] Cet arrangement [de la prise de décision accompagnée] est difficile parce qu’il crée un risque d’influence indue de la part de l’accompagnateur désigné légalement. Même s’il existe aussi un risque dans les arrangements plus traditionnels des procureurs et des tuteurs aux biens, nous craignons que les mauvais traitements réels d’un accompagnateur soient plus difficiles à déceler, car l’identité véritable du décideur et les facteurs qui influencent chacune des décisions peuvent devenir opaques[387].

L’officialisation d’un processus intrinsèquement officieux. La prise de décision accompagnée trouve ses racines dans les réseaux officieux de soutien que la famille et les amis créent autour des personnes handicapées et elle est fondée sur ces liens de confiance et leur manifestation au quotidien. L’ARCH Disability Law Centre note que la souplesse intrinsèque des arrangements officieux de prise de décision peut promouvoir le respect pour la dignité, l’autonomie et l’indépendance[388]. Lorsque ces réseaux souhaitent agir dans des sphères où il faut de plus en plus d’officialisation, par exemple les soins de santé, les grandes décisions financières et les questions juridiques, les attentes deviennent fort différentes. Cette discordance sous-tend certaines des difficultés entourant la mise en œuvre juridique de la prise de décision accompagnée. Comme l’a dit le Canadian Centre for Elder Law dans un document commandé par la CDO :

[traduction] Une prise de décision accompagnée est intrinsèquement un processus officieux. Les lois régissant la prise de décision accompagnée transforment souvent des liens souples et basés sur la confiance en des liens officiels et d’une certaine manière exécutoires. Ce n’est pas toujours chose facile à concilier[389].

On peut se demander dans quelle mesure cette officialisation est souhaitable ou si :

[traduction] [l]a conséquence inattendue peut ne pas être tant une conséquence voulue du détournement des cas aux échelons inférieurs de la hiérarchie, mais plutôt un “élargissement net” dans le cadre duquel les cas déjà résolus par des moyens moins officiels (en fait, peut-être entièrement “officieux”) sont inutilement portés à un ou deux niveaux supérieurs[390]. 

Dans son document de travail et de référence sur la prise de décision accompagnée, le Bureau du défenseur des personnes handicapées du Victoria signale que certains ont dit craindre que la légalisation des soutiens officiels mine le respect envers les soutiens officieux, mais ajoute que « ce n’est pas une conséquence inévitable[391] ». L’ARCH Disability Law Centre fait le commentaire suivant :

[traduction] Il sera important de veiller à ce que toute modification de la législation tienne compte de la prévalence et des expériences des personnes accompagnées de mandataires spéciaux non officiels. La conception d’un nouveau régime de la capacité juridique est une occasion d’officialiser certains de ces arrangements de façon à garantir une meilleure protection aux personnes “incapables”. Toutefois, les avantages de la souplesse et des pouvoirs limités de la prise de décision, des éléments intrinsèques des arrangements officieux de prise de décision au nom d’autrui qui fonctionnent bien ne doivent pas disparaître. De plus, la prise de décision au nom d’autrui officieuse est attrayante pour certains parce qu’elle ne coûte pas cher et ne donne pas lieu à des procédures juridiques ou bureaucratiques. Il faut prendre bien soin de mettre en place des arrangements pour la prise de décision qui conviendront aux personnes actuellement assujetties à une prise de décision au nom d’autrui officieuse[392]. 

Tenir dûment compte de la diversité des expériences des personnes assujetties aux lois en matière de capacité et de prise de décision. Comme il y est fait allusion au début du présent chapitre, les différents groupes visés par le droit sur la capacité juridique, la prise de décision et la tutelle le seront par suite de toutes sortes de situations, de perspectives, d’aspirations et d’expériences. La notion de la prise de décision accompagnée est principalement enracinée parmi les personnes ayant une déficience intellectuelle, et c’est chez elles que la prise de décision accompagnée est la plus courante. Un grand nombre des personnes qui travaillent dans ce domaine voient en la prise de décision accompagnée une solution plus difficile lorsque les personnes ont des déficiences liées à la santé mentale ou lorsqu’il s’agit de personnes âgées dont les déficiences sont liées à l’âge, par exemple la démence : indéniablement, lorsque des formes de prise de décision accompagnée ont été mises en œuvre au Canada, il semble qu’elles aient suscité moins d’intérêt ou qu’elles aient été moins adoptées dans ces groupes[393]. Comme la prise de décision accompagnée est une formule encore très nouvelle, on ne sait pas clairement si ces difficultés reflètent des aspects intrinsèques de sa nature, si son attrait augmentera au fil du temps ou si de nouvelles solutions de rechange naîtront pour refléter des compréhensions en évolution des droits de la personne. Toutefois, ces difficultés ont des répercussions sur le fait de savoir si, en ce moment, les arrangements de prise de décision accompagnée, s’ils sont adoptés dans le droit ontarien, doivent être considérés comme la seule formule admissible pour la prise de décision, comme certains l’ont fait valoir; comme une formule privilégiée ou par défaut, comme d’autres le préfèrent; ou comme l’une des formules parmi une gamme d’options, comme c’est actuellement le cas dans les autres provinces ou territoires où ces arrangements sont possibles. 

La compréhension et l’étude des méthodes relatives à la prise de décision « sur le terrain ». La reconnaissance de la prise de décision accompagnée dans le droit ontarien, sous une forme ou une autre, aurait un certain nombre d’effets manifestes. Elle marquerait (à un degré plus ou moins grand selon la forme de reconnaissance) un changement symbolique dans la compréhension de la capacité juridique et de la prise de décision. Pour les personnes qui ont eu recours à la prise de décision accompagnée, elle marquerait également un changement dans le statut légal officiel accordé à leurs décisions. On sait moins la mesure dans laquelle cette reconnaissance, à elle seule, modifierait les méthodes « sur le terrain ». Comme de nombreuses personnes l’ont fait observer à la CDO, la plupart, sinon tous les membres des familles et des amis qui exercent la fonction de mandataire spécial en vertu de la LPDNA et de la LCSS n’ont qu’une compréhension très générale de la législation, de leurs fonctions et de la notion de prise de décision au nom d’autrui[394]. En pratique, un grand nombre des mandataires spéciaux, selon le cadre législatif actuel, sont plus des accompagnateurs que des mandataires spéciaux. Inversement, on craint un « glissement » dans les arrangements de prise de décision accompagnée et on s’inquiète qu’en fait, les personnes désignées pour en accompagner une autre deviennent des mandataires[395]. Sans modifications profondes des attitudes sociales et des ressources disponibles, des mesures législatives sur la prise de décision accompagnée peuvent-elles atteindre les objectifs souhaités?

[traduction] Nous leurrons-nous, toutefois, en modifiant la nomenclature sans modifier la substance sociale sous-jacente? La fonction de courtier d’un soutien moderne à la décision, selon le modèle de la prise de décision accompagnée, n’est-elle pas en réalité seulement l’équivalent fonctionnel d’un tuteur ou d’un administrateur traditionnel qui s’acquitte de son devoir légal d’agir d’abord en tant que défenseur (autrement dit « les yeux, les oreilles et la voix) de la personne qu’il représente[396]? 

Les préoccupations relatives aux effets des ressources limitées sur la mise en œuvre utile de la prise de décision accompagnée trouvent écho dans le climat actuel en Ontario. Non seulement les ressources à tous les niveaux de l’administration et des services publics sont-elles limitées, mais les organismes communautaires et les familles elles-mêmes vivent sous pression. Même si la prise de décision accompagnée peut bien fonctionner pour les personnes qui disposent des ressources familiales, sociales et méthodes nécessaires, son application peut être difficile pour les personnes qui sont isolées et marginalisées, préoccupation mise en lumière dans le chapitre II de la partie Quatre, « À qui appartient-il de décider? »

 

  • QUESTION À ABORDER : quels sont les avantages et les risques de l’officialisation de la prise de décision accompagnée dans le droit ontarien?

 

  • QUESTION À ABORDER : si la prise de décision accompagnée est intégrée au droit ontarien :
    a)     À qui devrait-elle s’appliquer?
    b)    Quel devrait être le critère de détermination de la capacité de conclure un tel arrangement et de celle d’y mettre fin?
    c)     Ce type de prise de décision devrait-il être possible pour tous les types de décision ou certains seulement?
    d)    Devrait-on présumer que ces arrangements sont des arrangements par défaut, par opposition aux arrangements de prise de décision au nom d’autrui? Si oui, dans quelles circonstances?
    e)     Les nominations et les annulations de ces arrangements devraient-elles être personnelles (comme la procuration) ou publiques (comme la nomination d’un tuteur)? Quelles devraient être les exigences des procédures de nomination et d’annulation?
    f)      Qui devrait pouvoir assumer la fonction d’accompagnateur?
    g)     Quelles devraient être les responsabilités des accompagnateurs?
    h)    Quel type de mécanisme de surveillance et de contrôle faudrait-il adopter pour ces arrangements pour la prise de décision?
    i)      Quels autres mécanismes faudrait-il intégrer pour prévenir les abus survenant du fait de ces arrangements pour la prise de décision?
    j)      Quelles devraient être les obligations des tiers en ce qui concerne ces arrangements? Quelles devraient être les garanties juridiques pour les tiers qui traitent avec les parties à ces arrangements?

 

E.     La codécision

1.     La notion de codécision

La codécision, parfois appelée prise de décision conjointe ou partagée, est une autre solution à de recherche à la prise de décision au nom d’autrui. La codécision est exposée comme [traduction] « une nouvelle notion juridique selon laquelle une prise de décision conjointe entre un adulte et un codécideur nommé est rendue exécutoire. Le processus comme tel de prise de décision n’est plus un exercice fait par une seule personne[397] ». La Commission du droit du Victoria a exposé ainsi la codécision :

[traduction] Tout comme la nomination d’un « accompagnateur », la nomination d’un codécideur reconnaît que même si une personne peut éprouver de la difficulté à prendre seule des décisions, elle peut être en mesure de le faire avec de l’aide d’un membre de la famille ou un ami de confiance. Toutefois, la nomination d’un codécideur est plus contraignante que celle d’un accompagnateur. Dans un arrangement de codécision, la personne perd un peu d’autonomie parce qu’elle doit prendre des décisions au sujet de questions particulières en concertation avec un codécideur. Dans ce contexte, ne décision prise par la personne seule ne serait pas juridiquement valable[398].

Il semble qu’en vertu de ce modèle, la personne n’exerce sa capacité que lorsque le codécideur lui apporte son aide. Lorsqu’elle agit seule, la personne n’a pas la capacité de prendre des décisions[399]. De cette manière, le modèle de codécision se démarque considérablement des modèles de la prise de décision au nom d’autrui et de la prise de décision accompagnée qui dans les deux cas, considèrent que la capacité de prendre une décision appartient au bout du compte à une seule personne – soit le mandataire spécial lorsque la personne n’a pas la capacité (selon le modèle de la prise de décision au nom d’autrui), soit par la personne elle-même (selon le modèle de la prise de décision accompagnée) – même si le processus décisionnel peut comprendre des consultations ou de l’aide.

 

2.     La codécision au Canada

L’Alberta et la Saskatchewan ont intégré la codécision à leur régime législatif. Ces arrangements valent pour des adultes qui peuvent prendre des décisions par eux-mêmes, avec de l’aide[400].

Dans les deux cas, la codécision n’est possible que par une nomination judiciaire, par opposition à un processus privé. En Saskatchewan, un juge peut nommer un codécideur pour des conditions moins contraignantes qu’une tutelle, lorsque la capacité [traduction] « est affaiblie au point que l’adulte a besoin d’aide pour prendre des décisions raisonnables [. . .] et a besoin d’un codécideur aux biens[401] ». L’Alberta précise qu’une ordonnance de codécision ne peut être rendue que si le tribunal conclut que la capacité décisionnelle de la personne, en ce qui a trait aux décisions personnelles visées par l’ordonnance proposée, est considérablement diminuée; que la personne aurait la capacité de prendre des décisions aux égards dont il est fait mention dans l’ordonnance si elle bénéficiait de conseils et de soutien pertinents; que des mesures moins interventionnistes ont été envisagées ou mises en œuvre et qu’elles ne répondraient pas au besoin déterminé, à la fois le consentement individuel et celui du codécideur proposé, et le tribunal est convaincu que cette mesure respecterait les intérêts supérieurs de cette personne[402].

La Commission de réforme du droit du Victoria a recommandé d’inclure dans les lois de l’État les arrangements de codécision parmi les options en matière de prise de décision, indiquant que [traduction] « bien que la codécision restreindrait l’autonomie décisionnelle d’une personne dont la capacité est diminuée à cet égard, la nomination accroîtrait ses possibilités de participation parce que l’intéressée pourrait demeurer partie prenante du processus décisionnel[403] ». La Commission a recommandé un processus de nominations publiques pour ces arrangements. À son avis, la codécision est le mécanisme qui convient le mieux pour répondre à des besoins actuels en matière de prise de décision plutôt qu’outil de planification future[404], car la personne qui a besoin d’un codécideur aura une capacité diminuée de prendre elle-même les décisions la concernant, sa capacité à « faire un bon choix de conclure un arrangement de codécision et de nommer une personne responsable » sera mise en doute et une nomination personnelle imposerait trop de responsabilités au codécideur potentiel d’évaluer à la fois le niveau de capacité et la pertinence de l’arrangement[405]. 

En Saskatchewan, la codécision est possible pour les soins à la personne et les questions financières, tandis qu’en Alberta, elle est possible pour les soins à la personne, mais pas pour les affaires financières.

Alors que les codécideurs partagent le pouvoir juridique de prendre des décisions avec l’adulte, ils doivent [traduction] « acquiescer à une décision prise par l’adulte et ne doivent pas refuser de signer un document [. . .] si une personne raisonnable avait pu prendre la décision en question et qu’il n’en résultera vraisemblablement aucune perte du patrimoine de l’adulte[406] ». Le pouvoir d’un codécideur peut donc se limiter simplement à conseiller l’adulte et à donner suite à sa décision. Un codécideur peut signer un contrat dans un contexte bancaire et un contrat signé par l’une ou l’autre des personnes seules peut être annulé[407].

 

3.     Critiques et sujets de préoccupation

La codécision a assez peu retenu l’attention comparativement à la prise de décision accompagnée ou à la prise de décision au nom d’autrui.

Fait intéressant à signaler, la Commission de réforme du droit du Victoria a noté que dans les consultations publiques concernant les réformes proposées aux lois sur la tutelle, la création d’une solution de prise de décision accompagnée pour remplacer la prise de décision au nom d’autrui ralliait davantage les points de vue qu’un régime de codécision[408]. Les intervenants craignaient surtout que la codécision ne crée un partenariat inévitablement inégal, étant donné que le codécideur nommé peut fortement influencer la décision de la personne. Pour cette raison, les arrangements de codécision pourraient ne pas être très différents de la prise de décision au nom d’autrui[409]. Ce type de partenariat inégal fait également craindre que ces dispositions ne puissent être vulnérables aux abus. La Commission a répondu qu’en raison de la nécessité de la codécision d’une entente entre les deux codécideurs, elle oblige essentiellement l’inclusion et la participation à la prise de décision de l’intéressé, ce qui est un avantage potentiel important[410].

La complexité possible liée à ce type nouveau d’arrangement suscite aussi des inquiétudes :

[traduction] L’une des principales préoccupations est la complexité ajoutée, et la confusion possible, que ces nouvelles nominations juridiques pourraient créer. On a exprimé la même préoccupation à l’égard de la proposition de la Commission d’adopter la nomination d’« accompagnateurs » au chapitre 8. Cette préoccupation est plus grande pour les codécideurs parce que le lien en lui-même est plus complexe. La définition du sens de l’expression « décision conjointe », la précision des utilisateurs possibles de ces arrangements et la description des responsabilités des tiers qui font des affaires avec les codécideurs sont toutes d’importantes difficultés à résoudre[411].

Dans leur examen des autres arrangements en matière de prise de décision au Canada et à l’étranger, Terry Carney et Fleur Beaupert font la remarque suivante :

[traduction] Non sans rappeler les distinctions subtiles entre les droits de propriété en vertu de tenances à bail conjointes et les tenances à bail communes (selon que les copropriétaires font l’acquisition ou non d’une « part ») ces options font partie des plus difficiles sur le plan de la compréhension publique de leur fonction sociale et juridique : elles risquent d’échouer au critère de « la compréhension du commerçant du coin[412] ».

Le potentiel de confusion et d’incertitude a été cité comme raison pour laquelle, en Alberta, la codécision ne peut pas s’appliquer à la gestion des affaires financières[413].

 

  • QUESTION À ABORDER : quels sont les avantages et les risques de l’officialisation de la codécision dans le droit ontarien?

 

  • QUESTION À ABORDER : si la codécision est intégrée au droit ontarien :
    a)    À qui devrait-elle s’appliquer?
    b)    Quel devrait être le critère de détermination de la capacité de conclure un tel arrangement ou d’y mettre fin?
    c)     Ce type de prise de décision devrait-il être possible pour tous les types de décision ou pour certains seulement?
    d)    Devrait-on présumer que ces arrangements sont des arrangements par défaut, par opposition aux arrangements de prise de décision au nom d’autrui? Si oui, dans quelles circonstances?
    e)    Les nominations et les annulations de ces arrangements devraient-elles être personnelles (comme la procuration) ou publiques (comme la nomination d’un tuteur)? Quelles devraient être les exigences des procédures de nomination et d’annulation?
    f)      Qui devrait pouvoir assumer la fonction de codécideur?
    g)     Quelles devraient être les responsabilités des codécideurs?
    h)    Quel type de mécanisme de surveillance et de contrôle faudrait-il adopter pour ces arrangements de prise de décision?
    i)      Quels autres mécanismes faudrait-il intégrer pour prévenir les abus survenant du fait de ces arrangements pour la prise de décision?
    j)      Quelles devraient être les obligations des tiers à l’égard de ces dispositions? Quelles protections juridiques faudrait-il adopter pour les tiers qui traitent avec les parties à ces dispositions?

 

F.    Questions à aborder

  1. Quels sont les avantages et les risques de l’officialisation de la prise de décision accompagnée dans le droit ontarien?
  2. Si la prise de décision accompagnée est intégrée au droit ontarien :
    a)     À qui devrait-elle s’appliquer?
    b)     Quel devrait être le critère de détermination de la capacité de conclure un tel arrangement et de celle d’y mettre fin?
    c)     Ce type de prise de décision devrait-il être possible pour tous les types de décision ou certains seulement?
    d)     Devrait-on présumer que ces arrangements sont des arrangements par défaut, par opposition aux arrangements de prise de décision au nom d’autrui? Si oui, dans quelles circonstances?
    e)     Les nominations et les annulations de ces arrangements devraient-elles être personnelles (comme la procuration) ou publiques (comme la nomination d’un tuteur)? Quelles devraient être les exigences des procédures de nomination et d’annulation?
    f)      Qui devrait pouvoir assumer la fonction d’accompagnateur?
    g)     Quelles devraient être les responsabilités des accompagnateurs?
    h)     Quel type de mécanisme de surveillance et de contrôle faudrait-il adopter pour ces arrangements pour la prise de décision?
    i)       Quels autres mécanismes faudrait-il intégrer pour prévenir les abus survenant du fait de ces arrangements pour la prise de décision?
    j)      Quelles devraient être les obligations des tiers en ce qui concerne ces arrangements? Quelles devraient être les garanties juridiques pour les tiers qui traitent avec les parties à ces arrangements?
  3. Quels sont les avantages et les risques de l’officialisation de la codécision dans le droit ontarien? 
  4. Si la codécision est intégrée au droit ontarien :
    a)       À qui devrait-elle s’appliquer?
    b)       Quel devrait être le critère de détermination de la capacité de conclure un tel arrangement ou d’y mettre fin?
    c)       Ce type de prise de décision devrait-il être possible pour tous les types de décision ou pour certains seulement?
    d)       Devrait-on présumer que ces arrangements sont des arrangements par défaut, par opposition aux arrangements de prise de décision au nom d’autrui? Si oui, dans quelles circonstances?
    e)       Les nominations et les annulations de ces arrangements devraient-elles être personnelles (comme la procuration) ou publiques (comme la nomination d’un tuteur)? Quelles devraient être les exigences des procédures de nomination et d’annulation?
    f)        Qui devrait pouvoir assumer la fonction de codécideur?
    g)       Quelles devraient être les responsabilités des codécideurs?
    h)       Quel type de mécanisme de surveillance et de contrôle faudrait-il adopter pour ces arrangements de prise de décision?
    i)         Quels autres mécanismes faudrait-il intégrer pour prévenir les abus survenant du fait de ces arrangements pour la prise de décision?
    j)        Quelles devraient être les obligations des tiers à l’égard de ces dispositions? Quelles protections juridiques faudrait-il adopter pour les tiers qui traitent avec les parties à ces dispositions?

 

 

 

Précédent Suivant
D’abord Bout
Table des matières