A.    Introduction

Comme il en a été abondamment question dans le chapitre précédent, selon le droit ontarien actuel, lorsqu’il est déterminé qu’une personne n’a pas la capacité juridique de prendre un type particulier de décision, mais qu’une décision doit néanmoins être prise, un mandataire spécial sera nommé pour prendre la décision en son nom. Le tuteur et curateur public (TCP) et les sociétés de fiducie peuvent exercer la fonction de mandataire spécial dans certaines circonstances, mais dans la grande majorité des cas, les mandataires spéciaux sont des membres de la famille ou des amis proches de la personne qui a besoin d’aide. Le présent chapitre portera sur le droit actuel en ce qui concerne les mandataires spéciaux en Ontario et examinera quelques options pour que d’autres personnes ou entités puissent remplir cette fonction dans ces circonstances, et fera ressortir la nécessité de fournir de meilleures mesures de soutien aux membres de la famille et aux amis qui exercent ces fonctions. Certains des aspects explorés ci-dessous peuvent également s’appliquer aux personnes ou entités qui peuvent être des accompagnateurs ou des codécideurs, si les lois ontariennes devaient être modifiées pour officialiser ces fonctions.

La fonction de mandataire spécial est exigeante et ne doit pas être prise à la légère. La loi le dit clairement. Selon la Loi de 1992 sur la prise de décisions au nom d’autrui (LPDNA), les tuteurs et les personnes agissant en vertu d’une procuration sont tenus de se conformer à une norme élevée. Un tuteur, tout comme une personne agissant en vertu d’une procuration aux biens, est un « fiduciaire qui exerce ses pouvoirs et s’acquitte de ses obligations avec diligence, avec honnêteté et intégrité et de bonne foi, dans l’intérêt de l’incapable[414] », tandis que les tuteurs et les personnes agissant en vertu d’une procuration au nom d’une personne doivent exercer leurs fonctions « avec diligence et de bonne foi[415] ». La Loi de 1996 sur le consentement aux soins de santé (LCSS) et la LPDNA prévoient des exigences détaillées et assez complexes pour guider la prise de décision au nom d’autrui[416]. Les tuteurs et les personnes agissant en vertu d’une procuration ont un certain nombre de fonctions procédurales, par exemple expliquer à l’incapable en quoi consistent ses pouvoirs et ses obligations; encourager l’incapable à participer à la prise de décision; favoriser les contacts personnels réguliers entre l’incapable, d’une part, et les membres de sa famille et ses amis qui le soutiennent, d’autre part; et consulter de temps à autre les membres de la famille et les amis[417]. Les tuteurs et les personnes agissant en vertu d’une procuration doivent tenir des dossiers détaillés de leurs activités[418]. Selon la LPDNA, les mandataires spéciaux peuvent être tenus responsables, dans certaines circonstances, des dommages découlant d’un manquement à ses obligations[419].

Au-delà des responsabilités juridiques, les mandataires spéciaux font souvent face à de nombreuses difficultés d’ordre pratique, émotionnel et éthique. Dans certains contextes, par exemple les traitements, les décisions peuvent comporter des enjeux importants, nécessiter de l’information complexe et exiger une réponse rapide. Les décisions portant sur la gestion des biens peuvent avoir des conséquences à long terme pour le bien-être de la personne en cause, tandis que les décisions concernant les soins de la personne peuvent influencer des aspects les plus intimes de sa vie. Les décisions sur l’admission dans un établissement de soins de longue durée sont rarement prises dans des circonstances joyeuses et même si l’admission peut être nécessaire, la décision devra souvent être prise en dépit des objections de la personne pour qui elle s’impose. La plupart du temps, malgré l’orientation de la loi, il sera loin d’être évident ce que sera la « bonne » chose à faire dans une circonstance donnée. Il n’en reste pas moins aussi qu’il y a assez peu de soutiens pratiques pour les personnes qui acceptent la fonction de mandataire spécial.

Il n’est pas étonnant, dans ce contexte, que les membres de la famille et les amis proches soient ceux qu’on considère comme les personnes les plus aptes à résoudre ces difficultés : ils peuvent souvent être profondément soucieux du bien-être de la personne pour laquelle, un aspect essentiel pour bien remplir cette fonction, et une connaissance personnelle intime de la personne qui peut guider la prise de décision et aider à résoudre les aspects pratiques et émotionnels de la tâche.

Il est vrai aussi que tout le monde n’a pas de famille ou d’amis capables et prêts à exercer cette fonction selon la norme exigée. Toutes les familles n’ont pas les compétences pratiques, éthiques et émotionnelles pour exercer cette fonction, encore moins le degré d’intimité et d’engagement souhaité. D’autres familles peuvent être prêtes à assumer cette fonction, mais peuvent déjà être surchargées d’autres problèmes et ne pas être en mesure d’accepter une autre responsabilité importante. De plus, comme il est dit brièvement au chapitre II, par suite des changements démographiques, un nombre grandissant de personnes n’auront pas d’amis proches ou de membres de la famille prêts à agir en leur nom ou capables de le faire. Ce peut être parce qu’une personne a perdu tous les membres de sa famille ou ses amis proches, parce que la mobilité géographique a étiolé les relations ou parce que les préjugés et l’isolement social liés à certains types de déficiences ont affaibli les réseaux de soutien. Dans tous ces cas, il faut trouver des solutions de rechange autres que les membres de la famille et les amis.  

Actuellement, le tuteur et curateur public (TCP) de l’Ontario joue un rôle important en tant que mandataire de dernier recours. En vertu de la LCSS et de la LPDNA, lorsque personne ne peut assumer cette fonction et n’est disposé à le faire, et que des décisions s’imposent, le TCP peut être nommé pour exercer la fonction. Même si cette fonction est vitale, le TCP ne peut pas, évidemment, reproduire le type de liens personnels intimes qu’on croit souvent le fondement idéal de la prise de décision au nom d’autrui et certaines personnes handicapées peuvent ne pas aimer l’idée que des décisions soient prises en leur nom par « les pouvoirs publics », estimant que cette fonction est porte atteinte à leur vie privée. De même, les changements démographiques dont il a été question précédemment feront probablement augmenter la demande de prises de décision de dernier recours.

Les défenseurs de la prise de décision accompagnée, une formule nouvelle en matière de prise de décision exposée au chapitre précédent, ont reconnu la difficulté de mettre en œuvre cet arrangement lorsque des personnes n’ont pas de liens de confiance et d’intimité. Même si la prise de décision au nom d’autrui est souvent le mieux mise en œuvre lorsqu’il existe des liens personnels intimes, la prise de décision accompagnée repose fondamentalement sur la présence d’un ou de plusieurs accompagnateurs qui connaissent très bien la personne qui a besoin d’aide et qui ont profondément à cœur son bien-être. De par sa nature même, la prise de décision accompagnée exige l’existence de liens personnels étroits. Dans certains cas, ces liens n’existent pas. Comme le disent Michael Bach et Lana Kerzner dans leur document présenté en 2010 à la CDO :

[traduction] De nombreuses personnes ayant des déficiences intellectuelles, cognitives et psychosociales graves n’ont tout simplement personne d’autre dans leur vie avec lesquelles elles ont des liens de confiance basés sur une expérience de vie partagée et une connaissance l’un de l’autre. Une vie de discrimination et d’exclusion les a laissées sans ces liens. Cela ne signifie pas que ces liens ne peuvent pas se développer. Il existe un vaste ensemble de bonnes méthodes et d’outils pour aider les personnes ayant des déficiences plus graves à développer des liens personnels avec autrui. Il faut cependant du temps pour cela, établir intentionnellement des relations et des soutiens communautaires pour faciliter ce processus, déterminer les personnes qui peuvent jouer ce rôle et lui fournir un réseau de soutien.

Les personnes ayant des déficiences graves qui réussissent à bâtir ces relations peuvent ainsi développer des liens et des réseaux de soutiens qui peuvent les représenter à un moment ou à un autre dans le futur. Dans leur cas, l’accès à ces représentants maximise l’exercice de leur capacité juridique[420]. 

Les principes du Cadre selon lesquels il faut promouvoir la participation et l’inclusion soulignent l’importance de concevoir une société dans laquelle les personnes âgées et les personnes handicapées entretiennent des liens réels avec leur collectivité et sont bien intégrées à la société. Le nombre grandissant de personnes qui n’ont aucun de ces liens, qui sont marginalisées et isolées, sans amis ni famille pour les aider à prendre des décisions, met en évidence les grandes lacunes de la société à promouvoir la participation et l’inclusion. Ces obstacles sociaux, économiques et liés aux attitudes vont au-delà de la portée du présent projet, mais elles font partie du contexte qu’il faut comprendre pour évaluer les lois sur la capacité juridique et la prise de décision et déterminer des options pour la réforme.

À n’en pas douter, le droit doit respecter et reconnaître les mécanismes mis en place pour favoriser la participation et l’inclusion et ne pas dresser d’obstacles à la création et au maintien des liens essentiels à la prise de décision pour les personnes visées par ce domaine du droit. Les difficultés qu’éprouvent les personnes qui n’ont ni famille ni amis pour les aider à prendre des décisions font ressortir le lien étroit entre les principes – dans ce cas, entre l’inclusion et la participation à la société des personnes handicapées et des personnes âgées – et la capacité de ces personnes de développer et d’exercer leur autonomie et leur indépendance. Par exemple, une personne qui, en raison des préjugés et de la discrimination liés à sa déficience, a eu peu d’occasions de se scolariser, d’occuper un emploi ou de participer à des activités sociales et n’a, par conséquent, qu’un réseau social limité, sera moins susceptible d’entretenir les liens étroits et de confiance les plus propices à un soutien fructueux de la prise de décision, que cette dernière se fasse dans un contexte d’accompagnement, de codécision ou de prise de décision au nom d’autrui qui tous préconisent la participation et l’attention soigneuse aux valeurs et aux désirs de la personne au nom de qui les décisions sont prises. De même, le principe de la reconnaissance que nous vivons tous en société fait ressortir l’importance d’être attentif aux besoins et aux situations de ceux et celles qui entretiennent des liens avec des personnes visées par ce domaine du droit et qui assument en ce moment, ou qui pourraient être appelés à le faire, une fonction officielle de mandataire spécial, de procureur ou de tuteur. Comme on l’a expliqué au chapitre précédent, les membres de la famille et les amis qui aident à la prise de décision doivent assumer des responsabilités qui peuvent être lourdes et qui ont d’importantes répercussions sur leur propre vie. Même s’ils peuvent avoir à cœur leurs fonctions, la façon dont celles-ci sont structurées et les soutiens dont elles bénéficient dans l’exercice de ces fonctions auront des effets importants sur leur propre bien-être et leur capacité de participer à la société dans son ensemble.

 

B.    La LPDNA et la LCSS : Qui peut assumer les fonctions de mandataire spécial

La présente section traite des exigences législatives actuelles concernant les personnes qui peuvent assumer la fonction de mandataire spécial. Un examen des dispositions actuelles fait ressortir : 

  • une préférence manifeste pour des liens étroits de confiance qui servent de fondement à tout arrangement de prise de décision au nom d’autrui, les dispositions de la loi étant conçues pour faciliter l’acceptation de la fonction par les membres de la famille, s’ils le souhaitent;
  • un effort pour restreindre le rôle du TCP aux situations où des mesures immédiates peuvent s’imposer pour éviter des conséquences néfastes à long terme ou dans les cas où il n’y a pas de personnes entretenant des liens étroits avec l’intéressé qui conviennent et qui sont prêtes à exercer la fonction;
  • un effort pour tenir compte, quand cela est possible, des préférences et des désirs exprimés par la personne au nom de laquelle des décisions devront être prises;
  • l’attention portée aux éventuels problèmes de conflits d’intérêts.

 

1.     Les nominations de mandataires spéciaux individuels

Comme on l’a dit ci-dessus, la plupart des mandataires spéciaux sont des particuliers, des membres de la famille et des amis. La présente section traite brièvement des mécanismes au moyen desquels des particuliers peuvent être nommés mandataires spéciaux, que ce soit en vertu de la LPDNA ou de la LCSS.

La Loi de 1992 sur la prise de décisions au nom d’autrui

Comme on l’explique plus abondamment dans le chapitre III de la partie Trois, selon la LPDNA, lorsqu’une personne a besoin d’aide pour prendre des décisions, des mandataires spéciaux peuvent être nommés de deux manières : les nominations personnelles au moyen d’une procuration et les nominations publiques qui entraînent la tutelle. Les nominations menant à la tutelle sont des nominations légales ou des nominations par ordonnance du tribunal. Dans des situations assez rares, le TCP peut être nommé par le tribunal comme tuteur temporaire, à la suite d’une enquête sur des « conséquences préjudiciables graves ». 

Les procurations. Elles sont des nominations personnelles et, à ce titre, donnent à la fois le choix et la responsabilité au mandant d’examiner qui pourrait remplir la fonction de mandataire spécial et de choisir la ou les personnes qui, à son avis, conviennent le mieux. La LPDNA n’impose aucune restriction quant aux personnes qui peuvent être nommées pour agir en vertu d’une procuration, à part les des conditions suivantes :

  • le procureur doit satisfaire à une exigence d’âge minimum (18 ans en ce qui concerne les biens et 16 ans en ce qui concerne le soin de la personne[421]);
  • le procureur doit lui-même (ou elle-même) être capable en ce qui concerne les biens ou le soin de la personne (selon le type de procuration en question[422]);
  • le TCP peut seulement être nommé procureur qu’avec son consentement écrit[423];
  • lorsque les procurations concernent le soin de la personne, le procureur ne peut pas être une personne qui fournit au mandant des services en établissement, des services sociaux, des services de formation ou des services de soutien contre rémunération, à moins que le fournisseur de services ne soit le conjoint, le partenaire ou un parent du mandant[424].

La requête de tutelle légale et demande de remplacement. Comme il est exposé en détail au chapitre III de la partie Trois, la tutelle légale aux biens peut résulter soit d’une évaluation de la capacité selon la partie III de la Loi sur la santé mentale (LSM), soit d’une évaluation de la capacité par un appréciateur de la capacité désigné en vertu de la LPDNA. Lorsqu’une personne n’a pas la capacité de gérer ses biens selon l’une ou l’autre de ces procédures et en l’absence d’une procuration perpétuelle relative aux biens ou de tutelle, le TCP deviendra le tuteur légal aux biens jusqu’à la réception du certificat d’incapacité. Les personnes suivantes peuvent demander au TCP à le remplacer en qualité de tuteur légal aux biens :

  • le conjoint ou le partenaire de l’incapable;
  • un parent de l’incapable;
  • le procureur constitué en vertu d’une procuration perpétuelle de l’incapable, si la procuration a été donnée avant la délivrance du certificat d’incapacité et ne confère pas au procureur de pouvoir sur tous les biens de l’incapable;
  • une société de fiducie, si l’incapable a un conjoint ou un partenaire qui consent par écrit à la demande[425].

Le TPC étudie la demande et, s’il est convaincu que le plan de gestion soumis par l’auteur de la demande est pertinent et que ce dernier est apte à gérer les biens, il nomme l’auteur de la demande tuteur légal aux biens pour le remplacer. La LPDNA ordonne au TCP de tenir compte, dans l’évaluation de la demande, des désirs courants de l’incapable, s’ils peuvent être établis, et du caractère étroit des rapports entre l’incapable et l’auteur de la demande[426].

Les tuteurs nommés par le tribunal. La tutelle de la personne ou de ses biens peut également être obtenue par une requête à la Cour supérieure de justice. Un tuteur peut être nommé par un tribunal à la suite de la requête de quiconque[427]. En faisant d’une personne un tuteur nommé par le tribunal, ce dernier doit respecter les instructions législatives suivantes.

  • Le tribunal ne doit pas nommer une personne qui fournit des soins de santé, des services sociaux, des services en établissement, des services de formation ou des services de soutien à un incapable contre rémunération, sauf dans quelques cas limités, par exemple si la personne qui fournit les services est le conjoint ou le partenaire de l’incapable ou le procureur constitué en vertu d’une procuration;
  • Le tribunal ne doit pas nommer le TCP à moins que la demande ne propose ce dernier comme tuteur, qu’il consente et qu’il n’y a aucune autre personne apte qui soit disponible et disposée à être nommée.
  • Le tribunal doit examiner si le tuteur proposé est ou non constitué en vertu d’une procuration relative à la personne, les désirs courants de l’incapable, s’ils peuvent être établis, et le caractère étroit des rapports entre le tuteur proposé et l’incapable[428].
  • Un tuteur aux biens doit habiter en Ontario, à moins que la personne qui ne réside pas dans la province ne fournisse un cautionnement, d’une manière que le tribunal approuve, pour la valeur des biens[429].

 

La Loi de 1996 sur le consentement aux soins de santé

Comme une décision relative à des soins de santé peut être, par définition, urgente, la LCSS crée un système simple pour déterminer l’identité du mandataire spécial, lorsqu’il en faut un. La loi présente, par ordre descendant de préférence, les personnes qui peuvent exercer la fonction de mandataire spécial lorsqu’une personne est incapable de prendre une décision nécessaire particulière :

  1. le tuteur à la personne de l’incapable, s’il a le pouvoir de donner ou de refuser son consentement au traitement;
  2. le procureur au soin de la personne de l’incapable, si la procuration confère le pouvoir de donner ou de refuser le consentement au traitement;
  3. le représentant de l’incapable, nommé par la Commission du consentement et de la capacité (CCC), s’il a le pouvoir de donner ou de refuser son consentement au traitement;
  4. le conjoint ou le partenaire de l’incapable;
  5. un enfant ou le père ou la mère de l’incapable, ou une société d’aide à l’enfance ou une autre personne qui a légitimement le droit de donner ou de refuser son consentement au traitement à la place du père ou de la mère;
  6. le père ou la mère de l’incapable qui n’a qu’un droit de visite;
  7. un frère ou une sœur de l’incapable;
  8. tout autre parent de l’incapable (y compris ceux qui sont liés par le sang, le mariage ou l’adoption[430]).

Un mandataire spécial nommé dans le contexte de cette liste hiérarchique doit :

  1. être capable à l’égard du traitement;
  2. être âgé d’au moins 16 ans, sauf si elle est le père ou la mère de l’incapable;
  3. une ordonnance du tribunal ou un accord de séparation ne lui interdit pas de visiter l’incapable ou de donner ou de refuser son consentement au nom de celui-ci;
  4. être disponible;
  5. être disposé à assumer la responsabilité de donner ou de refuser son consentement[431].

Si aucune personne nommée dans la liste ne satisfait aux exigences, le TCP prendra la décision[432].

 

2.     Le tuteur et curateur public comme mandataire spécial

La LPDNA et la LCSS donnent au TCP le pouvoir d’agir en qualité de mandataire spécial, soit comme tuteur en vertu de la LPDNA ou aux fins de décisions précises en vertu de la LCSS, dans un nombre limité de circonstances.

Le TCP peut devenir tuteur d’une personne incapable de trois manières :

  1. Les tutelles légales des biens. Comme il est dit ci-dessus, lorsqu’une tutelle légale découle d’une constatation d’incapacité juridique à gérer des biens en vertu de la Partie III de la LSM ou selon un appréciateur de la capacité en vertu de l’article 16 de la LPDNA, le TCP deviendra automatiquement tuteur aux biens, à moins qu’un mandataire spécial ne soit déjà nommé en vertu d’une procuration ou une tutelle valide. Le TCP continuera d’exercer la fonction de tuteur aussi longtemps que nécessaire, à moins qu’une personne approuvée ne le remplace, comme il a été dit ci-dessus.
  2. Les nominations de « dernier recours » par le tribunal. Le TCP peut devenir le tuteur aux biens ou au soin de la personne s’il est nommé par le tribunal, dans les circonstances limitées exposées précédemment.
  3. L’enquête sur des conséquences préjudiciables graves. Le présent document de travail traite en profondeur ailleurs des pouvoirs du TCP de mener des enquêtes lorsqu’on craint qu’une personne soit incapable et que des conséquences préjudiciables graves risquent de se produire ou se produisent effectivement pour cette raison. En l’espèce, il est important de retenir que si, à la suite d’une enquête, le TCP a des motifs raisonnables de croire qu’une personne est incapable en ce qui concerne ses biens ou le soin à sa personne et que la nomination rapide d’un tuteur temporaire s’impose pour prévenir des conséquences préjudiciables, le TCP doit demander une ordonnance au tribunal pour le nommer tuteur temporaire.

Le TPC sera également mandataire de dernier recours en vertu de la LCSS, comme il est exposé ci-dessus, et il peut consentir (en de rares circonstances) à une nomination en vertu d’une procuration.

Il est important de retenir de ce qui précède que le TCP agit comme mandataire dans deux grandes circonstances : lorsqu’il n’y a personne d’autre qui convienne, qui est disponible et disposé à remplir cette fonction et lorsqu’il semble, comme dans le cas des tutelles légales et des tutelles découlant d’enquêtes, y avoir un besoin qu’une entité intervienne rapidement pour éviter la dilapidation des biens (comme dans le cas des tutelles légales) ou ne mette fin à des mauvais traitements, à de la négligence ou à de l’exploitation.

En 2013-2014, le tuteur public agissait en qualité de mandataire pour 21 clients sous tutelle personnelle (trois pour une période temporaire[433]). Le TPC signale que le tribunal le nommera pour prendre des décisions relatives au soin de la personne « très occasionnellement » seulement et dans la plupart des cas, pour « éloigner la personne des situations dangereuses ou empêcher son accès par des tiers qui la maltraitent[434] ». 

Il est plus courant pour le TCP soit tuteur aux biens, le plus souvent en vertu d’une tutelle légale. En 2013–2014, le TPC a été nommé tuteur aux biens par le tribunal auprès de 318 personnes. Il a été le tuteur légal aux biens de 4 881 personnes qui avaient reçu des certificats en vertu de la LSM et de 5 567 personnes qui avaient reçu un certificat d’incapacité à la suite d’une évaluation de la capacité dans la collectivité. Il a en outre rempli cette fonction pour un petit nombre de personnes (310 lorsqu’un tuteur légal de remplacement était décédé, avait démissionné ou était devenu juridiquement incapable relativement à la gestion des biens[435]. En 2013-2014, le TCP a ouvert 1 888 nouveaux dossiers de tutelle aux biens, 841 à la suite de certificats de capacité établis en vertu de la LSM et 1 032 à la suite d’évaluations de la capacité[436]. 

En sa qualité de tuteur aux biens, le TCP versera le revenu du client dans un compte spécial dont il se servira pour examiner et régler les factures, verser des fonds pour les besoins quotidiens et voir au paiement des biens et services demandés par le client, de prix abordable et de bonne valeur. Le TCP placera les sommes qui ne sont pas nécessaires aux dépenses courantes et peut vendre des articles devenus inutiles[437]. 

Le TCP possède une procédure interne de règlement des plaintes au moyen de laquelle les clients peuvent faire part de leurs préoccupations et il est soumis au contrôle des tribunaux, comme le sont les autres tuteurs. De plus, comme le TCP est un service public, les plaintes concernant ses activités peuvent être faites à l’Ombudsman de l’Ontario. Le TCP a adopté d’importants contrôles financiers et systèmes d’information internes. Des vérifications internes sont menées pour évaluer les méthodes de gestion et le Bureau du vérificateur général examine les états financiers du TCP. 

 

C.    Augmentation du nombre d’options relatives à l’exercice de la fonction de mandataire spécial

La présente section examine quatre options qui permettraient d’élargir le bassin des mandataires spéciaux possibles : créer une catégorie de fiduciaires professionnels spécialisés et réglementés; faire participer le grand public par le truchement de programmes de bénévolat ou autre; créer une fonction pour les organismes communautaires et reconnaître les réseaux de soutien personnels. 


1.     Les fiduciaires professionnels

Un rapport de fiduciaire est un rapport dans lequel « la manière dont le fiduciaire se sert du pouvoir discrétionnaire qui lui a été délégué peut avoir des répercussions sur les droits du commettant qui sont donc subordonnés à l’utilisation qui est faite dudit pouvoir. L’obligation de fiduciaire est le moyen brutal employé en droit pour contrôler ce pouvoir discrétionnaire[438] ». Comme il a été dit ci-dessus, en vertu de la LPDNA, les mandataires spéciaux aux biens ont une obligation fiduciaire envers la personne qu’ils représentent. Un fiduciaire professionnel est une personne qui assure des services fiduciaires à titre professionnel plutôt que personnel. Il peut ou non demander des honoraires pour ses services : des particuliers, des sociétés à but lucratif et des organismes sans but lucratif peuvent tous remplir la fonction de fiduciaire professionnel.

Les fiduciaires professionnels peuvent constituer une option attrayante pour la prise de décision au nom d’autrui dans deux circonstances. Lorsque des mandants n’ont pas de lien de confiance avec une personne qui est prête et disposée à les représenter, les fiduciaires professionnels peuvent être une solution de rechange au TCP. De plus, certains peuvent trouver l’idée d’un fiduciaire professionnel intéressante en raison de leur spécialisation qui leur donne l’occasion d’acquérir de l’expérience et de l’expertise dans l’exercice de leurs fonctions. 

Les fiduciaires professionnels diffèrent des fiduciaires personnels à deux égards importants : ils ne sont pas animés par la même motivation pour exercer cette fonction et il est probable qu’ils représenteront plus d’une personne à la fois. Ces différences peuvent avoir des répercussions sur le type de responsabilité qu’ils peuvent le mieux assumer, la nature et le degré de contrôle nécessaires de leurs activités.

En vertu du droit ontarien actuel, les sociétés de fiducie peuvent être des tuteurs, des curateurs et des procureurs en vertu d’une procuration. Selon la LPDNA, les dispositions sur le remplacement des tuteurs légaux autorisent explicitement que le TCP nomme des sociétés de fiducie pour le remplacer dans certaines circonstances. Les sociétés de fiducie sont déjà amplement réglementées, ce qui donne quelque assurance et garantie au public qui leur confie leurs biens ou leur prise de décision. Sans une réglementation aussi approfondie, il peut y avoir un risque considérable à laisser des professionnels accéder à des fonds ou à des personnes qui peuvent être très vulnérables en raison, à la fois, de leur déficience et de leur isolement social.

Il faut se demander s’il serait bénéfique de permettre à d’autres types de professionnels de proposer des services professionnels de fiducie. Par exemple, les travailleurs sociaux ou des membres d’une profession d’aide semblable pourraient bien remplir ce rôle et assurer certains types de prise de décision au nom d’autrui pour certains groupes.

La création de partenariats entre des sociétés de fiducie et des organismes sans but lucratif qui visent à proposer des services fiduciaires de coût plus abordable est un phénomène qu’il serait intéressant d’étudier. La collaboration entre l’organisme sans but lucratif, Support & Trustee Advisory Services (STAS), et Trust Royal en est un exemple[439]. Cette collaboration vise à fournir aux familles d’enfants handicapés un accès abordable à des services de fiducie[440]. La fiducie réelle est Trust Royal, qui gère les fonds en fiducie mis de côté pour le bénéficiaire. Les parents concluent une « entente de participation » avec le STAS, qui a un accord permanent avec le Trust Royal. En vertu de cet accord, les parents qui disposent de sommes relativement peu considérables (au moins 10 000 $) peuvent avoir accès à des services professionnels de fiducie. En tant que « conseiller », qui est partie à la convention de fiducie, le STAS assure la liaison avec le bénéficiaire de la fiducie, sa famille et son cercle de soutien, et conseille et informe Trust Royal, compte tenu de sa connaissance des besoins financiers du bénéficiaire [441].

L’État de la Californie donne un exemple d’un régime fiduciaire professionnel entièrement réglementé. Selon la Professional Fiduciaries Act de la Californie, les fiduciaires professionnels doivent obtenir une licence avant de pouvoir exercer leurs fonctions[442]. Pour obtenir cette licence, les demandeurs doivent effectuer 30 heures de formation préalable dans des cours approuvés[443]. Pour renouveler une licence, les demandeurs doivent effectuer 15 heures de formation continue[444]. Un cours de formation approuvé doit être [traduction] « pertinent par rapport aux responsabilités fiduciaires de la personne ou à la gestion patrimoniale pour les curateurs, les tuteurs, les fiduciaires ou les agents nommés en vertu d’une procuration perpétuelle, ou encore au système judiciaire ou à l’éthique des fiduciaires[445] ».

La loi porte aussi création du Professional Fiduciaries Bureau (PFB) qui octroie les licences et voit au contrôle et à la réglementation des fiduciaires professionnels[446]. Le rôle du PFB consiste à octroyer les licences aux fiduciaires professionnels, à approuver les classes et les cours qui leur permettent de s’acquitter des exigences préalables à l’octroi des licences et de formation continue, fait passer les examens liés à l’octroi des licences et élabore un code d’éthique pour les fiduciaires professionnels[447]. Le PFB ne doit pas délivrer de licence aux personnes reconnues coupables d’un crime [traduction] « lié de manière importante aux compétences, aux fonctions ou aux tâches d’un fiduciaire », qui [traduction] « se sont livrées à des activités malhonnêtes, frauduleuses ou de grossière négligence dans l’exercice de leurs fonctions ou tâches de fiduciaire », qui ont été radiées comme fiduciaires par un tribunal en raison d’un manquement à la confiance commis intentionnellement, associé à de la grossière négligence, à la mauvaise foi ou dans une indifférence délibérée ou qui ont [traduction] « fait preuve à répétition d’une conduite négligente[448] ».

Le PFB doit également enquêter sur les plaintes et, s’il y a lieu, renvoyer ces dernières aux organismes d’exécution de la loi[449]. Il a le pouvoir de révoquer une licence si des plaintes ont été faites et de prendre des mesures si des fonctions de fiduciaires sont exercées sans licence[450]. Le PFB tient une liste, publiée dans son site Web[451], des fiduciaires professionnels privés qualifiés, titulaires d’une licence. Il doit également fournir de l’information sur toute sanction imposée à des titulaires de licence, y compris, mais sans s’y limiter, de l’information sur les concernant les citations, les amendes, les suspensions et les révocations de licence ou autres mesures d’application de la loi connexes prises par le PFB à l’égard du titulaire de la licence[452].

Les titulaires de licence doivent tenir des dossiers complets et exacts des comptes des clients et mettre ces dossiers à la disposition du PFB aux fins de vérification[453]. Ils doivent également déposer des états financiers au PFB. Ces états doivent notamment fournir au PFB les renseignements suivants :

  • si le titulaire de licence a cessé, pour un motif valable, d’exercer ses fonctions de curateur, de tuteur, de fiduciaire ou de représentant personnel;
  • les noms des affaires, les lieux des tribunaux et les numéros attribués à toutes les affaires pour lesquelles le titulaire de licence a été nommé par le tribunal;
  • si le titulaire de licence a, selon un tribunal, manqué à un devoir fiduciaire;
  • si le titulaire de la licence a démissionné ou réglé une question dans laquelle une plainte a été déposée, ainsi que le numéro de cette affaire et une description des questions en litige et des faits concernant les allégations;
  • toute licence ou certificat professionnel détenu par le titulaire de licence;
  • toute propriété ou participation aux bénéfices dans toute entreprise ou société détenue par le titulaire de licence ou par un membre de la famille qui reçoit ou qui a reçu des paiements d’un client du titulaire de licence;
  • si le titulaire de licence a été condamné pour un crime[454].

Comme on le constate, le régime réglementaire de la Californie est assez précis en ce qui concerne les exigences d’obtention d’une licence pour exercer la profession de fiduciaire professionnel et les exigences pour garder cette licence. Toutefois, contrairement à l’Ontario et à la Saskatchewan où les sociétés de fiducie sont assujetties à des exigences liées au capital, ni la loi ni le règlement ne prescrivent des exigences semblables pour les fiduciaires professionnels de la Californie. On ne semble pas non plus exiger d’eux qu’ils fournissent un cautionnement ou se procurent une assurance.

 

  • QUESTION À ABORDER : l’Ontario devrait-il élargir la fonction que des professionnels spécialisés peuvent exercer pour qu’ils puissent représenter les personnes reconnues incapables de prendre un type particulier de décision? Si oui :
    a)   Pour quels types de décision ces professionnels devraient-ils être autorisés à agir?
    b)  Quels types de formation, de licence ou d’études devrait-on exiger de ces professionnels?
    c)   Quels types de contrôle et de surveillance faudrait-il mettre en place pour ces professionnels? Qui devrait effectuer ce contrôle et cette surveillance?
    d)  Quelles devraient être les responsabilités et les obligations de ces professionnels?
    e)   Quelles autres mesures faudrait-il mettre en place pour empêcher la négligence, le mésusage ou les abus de la part de ces professionnels, reconnaître ces inconduites et les corriger?

 

2.     La participation du public

Divers pays ont mis en place des programmes de bénévolat dans le cadre desquels des membres du public peuvent représenter des personnes socialement isolées, qui n’ont pas d’amis ni de famille pour les aider. Dans certains cas, l’État crée et supervise directement ces programmes de bénévolat, tandis que dans d’autres, ce rôle est confié à des organismes communautaires. L’État peut aussi financer directement des personnes pour qu’elles assurent les services nécessaires.

 

Des bénévoles nommés et supervisés par l’administration

Le « programme communautaire de tutelle » créé dans l’État australien du Victoria est un exemple d’un programme de tutelle dirigé par les pouvoirs publics. Il s’agit d’un petit programme – au cours de l’exercice 2012–2013, 62 tuteurs communautaires ont apporté des services de soutien à 75 personnes –, mais il est très bien articulé[455]. Au Victoria, le Bureau du défenseur des personnes handicapées est le tuteur de dernier recours. Lorsque le tribunal civil et administratif du Victoria (VCAT) nomme tuteur le défenseur des personnes handicapées, ce dernier peut déléguer son pouvoir à un tuteur communautaire bénévole. Un tuteur bénévole [traduction] « aide une personne handicapée à prendre des décisions raisonnables concernant certains aspects de son mode de vie[456] ». Les décisions que peut prendre un tuteur communautaire ont trait au lieu de résidence de la personne, à son accès aux services, à qui peut avoir accès à la personne, à ses soins de santé et à son emploi. Le tuteur communautaire doit également défendre les droits individuels de la personne lorsqu’ils sont menacés ou que la personne est victime de mauvais traitements et de la négligence; le tuteur communautaire doit fournir des rapports verbaux ou écrits au VCAT, au besoin. Il travaille généralement auprès d’une personne à la fois[457].

Les tuteurs communautaires doivent travailler en étroite collaboration avec les proches et autres personnes qui s’occupent de la personne, entre autres les membres de la famille, les travailleurs sociaux, des fournisseurs de soins et des professionnels en lien avec la personne[458].

Les tuteurs communautaires doivent avoir plus de 18 ans et répondre à d’autres normes définies par le défenseur des personnes handicapées. En tant que délégués de ce dernier, les tuteurs communautaires sont liés par les mêmes responsabilités, obligations et garanties juridiques que cet organisme[459]. Ils peuvent être rétribués et ils peuvent demander le remboursement de dépenses[460].

Un coordonnateur de programme assure la formation et le soutien, et donne des conseils à ceux et celles qui souhaitent devenir tuteurs communautaires. Ces derniers doivent suivre la formation avant d’entrer en fonction et doivent suivre au moins deux séances de formation en cours d’emploi par année, et se prévaloir d’autres possibilités de formation. Les coordonnateurs de programme fournissent des ressources et sont à la disposition des tuteurs communautaires pour les conseiller; ils participent à des rencontres sur des cas et à des évaluations; ils aident à obtenir de l’information et ils accompagnent les tuteurs dans des visites[461]. Le défenseur des personnes handicapées a établi une série de normes minimales que doivent respecter les tuteurs, notamment l’ampleur des contacts personnels avec la personne, la collaboration avec les membres de la famille et d’autres personnes importantes, la prise en compte des opinions de la personne et la tenue à jour des dossiers[462]. Pendant les cinq premières années, les tuteurs reçoivent une évaluation annuelle de leur rendement; après cette période, ces évaluations se font au moins une année sur deux.

Le projet de loi de l’Irlande concernant la réforme de ses lois sur la capacité et la prise de décision semble envisager des mesures semblables : le tuteur public doit créer un comité de « personnes capables d’agir en qualité de représentants pour la prise de décision » pour les personnes qui ont besoin de quelqu’un pour exercer cette fonction, mais qui n’ont personne d’autre pour le faire. Le tuteur public proposera la candidature de personnes au tribunal pour remplir cette fonction de représentant pour la prise de décision et le tribunal choisira parmi ces candidatures[463].

L’article 87 de la LPDNA autorise le TCP à nommer des bénévoles pour qu’ils donnent « des conseils et de l’aide aux termes de la présente loi ». Le TCP n’administre pas actuellement de programme de bénévolat en vertu de cet article et il ne l’a pas fait par le passé non plus.

 

Les organismes communautaires et les programmes de bénévolat

Dans certains pays, les organismes communautaires ont pour tâche de recruter, de former et de superviser des bénévoles qui représentent des personnes qui n’ont aucun parent ou ami proche pour le faire. Le système allemand du betreuer ou accompagnateur en est un exemple. En Allemagne, la tutelle et la curatelle ont été remplacées par une mesure souple, à savoir le « betreuung » ou un encadrement qui peut être fait par diverses personnes de la sphère publique ou privée[464]. En choisissant un betreuer, le tribunal de tutelle doit accepter toute préférence exprimée par la personne que le betreuer accompagne[465]. Si la personne n’a pas de préférence, les tribunaux suivent une liste hiérarchique de candidats, depuis les parents ou autres personnes qui entretiennent des liens étroits avec la personne, suivis des tuteurs professionnels et finalement des tuteurs publics de la « Betreuung-Authority » locale[466]. Selon ce régime, des organismes privés sans but lucratif de défense des droits (appelés Betreuungsverein) sont créés dans chaque ville et comté. Ils ont pour mandat premier de recruter, d’orienter, de former et de conseiller les betreuers bénévoles[467]. Ces organisations peuvent également accepter des nominations en qualité de betreuers lorsqu’aucun betreuer bénévole n’est libre[468]. De même, le Betreuungsverein doit recruter, former et proposer des mesures de soutien aux betreuers[469]. Le tribunal supervise le betreuer, avec l’aide de la Betreuung-Authority locale[470], et le betreuer doit fournir un rapport annuel[471]. 

Dans un document inédit préparé pour la CDO, Michael Bach et Lana Kerzner ont de même recommandé la participation d’organismes communautaires à la prestation de services de soutien à la prise de décision pour les personnes isolées socialement.

[traduction] Le présent rapport recommande une formule en grande partie communautaire pour s’assurer de l’existence de mesures proactives favorisant l’adoption de solutions de remplacement. Leur mise en œuvre pourrait être confiée à des organismes actuels de paiement de transfert déjà mandatés par le ministère des Services sociaux et communautaires ou le ministère de la Santé et des Soins de longue durée, et à des structures connexes telles que les centres d’accès aux soins communautaires. En même temps, il devrait être possible de soumettre directement une requête au ministre responsable ou aux agents de ce dernier lorsque les ressources communautaires en place ne suffisent pas[472].

Dans la vision des auteurs, ces organismes communautaires assureraient des services aux personnes qui ont besoin de soutien à la prise de décision et aux accompagnateurs, de même qu’aux tiers dans des relations juridiques avec des personnes qui peuvent avoir besoin de ce soutien pour s’assurer qu’il existe des solutions efficaces de remplacement à la nomination de mandataires spéciaux et de tuteurs.


Des « mentors » financés à même les fonds publics

Le système suédois des « mentors » a été exposé au chapitre 1 de la partie Trois. Qu’il suffise d’ajouter ici que les mentors agissent en qualité de « conseiller » auprès de ceux et celles qui ont besoin d’eux, selon une formule de consentement ou par une nomination du tribunal. Même si les parents sont le plus souvent nommés comme mentors, des professionnels comme les avocats, les comptables et les travailleurs sociaux peuvent assumer cette fonction, et ce, pour de multiples personnes[473]. Fait intéressant à noter, si la personne pour qui un mentor est nommé n’a pas les moyens de le payer, l’État paiera et cela même si les mentors sont parents avec la personne auprès de qui ils sont nommés[474]. Il a été dit, toutefois, que le recrutement de bons candidats pour assumer cette fonction de mentor est un problème[475]. Une autre lacune observée dans le modèle suédois est l’absence de formation des mentors, de même qu’un manque d’attention aux aspects personnels et non financiers des fonctions que les mentors doivent remplir[476]. 

 

  • QUESTION À ABORDER : l’Ontario devrait-il étendre la fonction que des bénévoles ou d’autres membres de la collectivité peuvent exercer pour qu’ils puissent représenter les personnes reconnues incapables de prendre un type particulier de décision? Si oui :
    a)     Pour quels types de décisions et dans quels types de circonstances ces personnes devraient-elles être autorisées à remplir ces fonctions?
    b)     Qui devrait avoir la responsabilité de recruter, de choisir et de superviser ces personnes?
    c)      Quels types de formation ou de soutien faudrait-il fournir à ces personnes?
    d)     Quels types de contrôle et de surveillance faudrait-il mettre en place? Qui devrait effectuer ce contrôle et cette surveillance?
    e)     Quelles devraient être les responsabilités et les obligations de ces personnes?
    f)      Quelles autres mesures faudrait-il mettre en place pour empêcher la négligence, le mésusage ou les abus de la part de ces personnes, reconnaître ces inconduites et les corriger?


3.     La création d’une fonction pour les organismes communautaires

Une autre façon de multiplier les options concernant les personnes susceptibles d’assumer une fonction dans la prise de décision consiste à autoriser les organismes communautaires ou à des organismes de défense des droits sans but lucratif à le faire. Le système allemand de betreur brièvement exposé ci-dessus autorise les Betreuungsverein à représenter directement les personnes qui ont besoin d’aide pour prendre une décision lorsqu’on ne parvient pas, par exemple, à trouver un bénévole.

En Saskatchewan, la Powers of Attorney Act autorise la nomination de sociétés autres que les sociétés de fiducie comme procureur constitué en vertu d’une procuration[477]. Cette disposition a été adoptée en 2002, après que la Commission de réforme du droit de la Saskatchewan ait recommandé que la nomination d’avocats d’entreprise soit autorisée en vertu de la loi, pour que des « groupes de défense des droits et des organismes sans but lucratif voués à l’aide des adultes vulnérables » puissent agir en qualité de procureurs[478]. De plus, l’Adult Guardianship and Co-decision-making Act autorise le ministre à désigner une société, des organismes ou des catégories de ces dernières comme candidats admissibles à la fonction de mandataire spécial ou de codécideur et, occasionnellement, des organisations non gouvernementales telles que la Saskatchewan Association for Community Living, qui a parfois été nommée par ce moyen[479].

L’Ontario a quelque expérience du recours aux organismes communautaires pour prendre des décisions au nom d’autrui, car les organismes communautaires peuvent déjà assumer la fonction de fiduciaire officieux pour les bénéficiaires de prestations du Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées (POSPH), ce qu’ils font d’ailleurs. L’article 12 de la Loi de 1997 sur le Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées autorise le directeur à « nommer une personne pour agir au nom d’un bénéficiaire » si :

  • ce dernier n’a pas de tuteur aux biens ni de fiduciaire;
  • le directeur est « convaincu que le bénéficiaire n’utilise pas ou n’utilisera vraisemblablement pas le soutien du revenu qu’il reçoit à l’avantage d’un membre du groupe de prestataires[480] ».

Le même article prévoit que le directeur peut fournir le soutien du revenu au profit d’un bénéficiaire au tuteur aux biens ou au fiduciaire du bénéficiaire ou à la personne qu’il a nommée pour agir en son nom[481]. Dans un certain sens, la fonction de ces fiduciaires officieux est analogue à celle que peut exercer un tuteur aux biens ou un procureur constitué en vertu d’une procuration concernant les biens, même s’il faut préciser que ces fiduciaires ne s’occupent que d’une source de revenus assez limitée et que la nature du Programme propose certaines possibilités de surveillance et de mesures correctives prises assez rapidement, si le fiduciaire officieux devait utiliser les fonds à mauvais escient. Des préoccupations ont bien été exprimées concernant divers aspects du Programme et ses dispositions sur les fiducies non officielles, dont un manque de contrôle et de recours efficaces si des personnes veulent contester une nomination, et la CDO a entendu que certains organismes communautaires sont capables de dispenser de très bons services officieux de fiducie dans le cadre d’un ensemble général de services assurés à leurs clients qu’ils connaissent bien et avec lesquels ils ont régulièrement des rapports. Il est vrai aussi, toutefois, que les organismes communautaires peuvent hésiter à jouer ce rôle en raison des pressions exercées sur les budgets ou le personnel.

L’expérience du recours aux organismes communautaires indique par ailleurs la nécessité d’adopter des mesures pour sélectionner soigneusement les organismes, éviter les conflits d’intérêts et assurer la reddition de comptes. Dans le vaste programme américain des représentants des bénéficiaires, qui autorise les organismes à administrer les paiements au nom des bénéficiaires d’aide sociale, des conflits d’intérêts ont été observés lorsque les organismes qui reçoivent les prestations ont comme membres des employeurs et des exploitants de foyers de groupe et des foyers de soins qui proposent nourriture, abri et services, tout en gérant les prestations[482]. Les dispositions sur la sélection et l’obligation de rendre compte, prévues dans les directives du POSPH donnent un exemple des moyens à prendre pour répondre à ces préoccupations.

 

  • QUESTION À ABORDER : quelles fonctions les organismes communautaires pourraient-ils exercer au nom des personnes reconnues incapables de prendre un type particulier de décision? Si les organismes communautaires devaient remplir la fonction de mandataire spécial, quelles leçons pourrait-on tirer des expériences des fiduciaires officieux ou du recours aux organismes communautaires dans cette fonction dans d’autres provinces ou pays?

 

4.     La reconnaissance des réseaux de soutien personnels

Les réseaux de soutien personnels sont une autre forme de soutien à la prise de décision. Ils existent déjà évidemment officieusement et de manière souple. La prise de décision accompagnée, exposée abondamment dans le chapitre précédent, est fondée sur l’expérience des personnes handicapées qui ont reçu le soutien que peuvent apporter ces réseaux. Bach et Kerzner parlent du rôle important que les réseaux de soutien personnels ont joué pour les personnes handicapées en les aidant à faire des choix, à acquérir de l’autonomie, à s’intégrer à la collectivité et à prévenir la violence et les mauvais traitements :

[traduction] Selon la recherche, la formation intentionnelle de réseaux personnels constitués de membres de la famille et d’amis pour faciliter la planification individuelle courante, nouer des liens avec la collectivité dans son ensemble et proposer des possibilités de relations interpersonnelles et de soins contribue favorablement à la santé et au bien-être individuels. Selon la recherche toujours, les réseaux de soutien brisent l’isolement social des gens, le principal facteur à rendre les personnes ayant des déficiences sur le plan du développement vulnérables à la violence et aux mauvais traitements, tant dans les établissements que dans la collectivité[483].

Les « microboards » ou microconseils constitués en Colombie-Britannique sont un exemple de ces réseaux de soutien personnels officialisés. Un microconseil est un petit groupe de personnes dévouées qui s’allient à une personne handicapée pour créer une société sans but lucratif[484]. Les microconseils peuvent assurer divers services de soutien personnel aux personnes handicapées, notamment la gestion du financement direct individualisé de la personne handicapée. Les principaux éléments d’un microconseil sont exposés de la manière suivante :

[traduction] une attention libre de contraintes à l’identité, aux besoins et aux souhaits exprimés par la personne accompagnée;

l’élaboration et le maintien d’un cercle d’entraide actif, diversifié et pleinement engagé de citoyens;

le maintien de tous les éléments possibles de contrôle, qui englobe en particulier le rôle d’employeur officiel[485].

La participation aux microconseils est basée sur des liens de confiance intimes et personnels, sur la conviction que nous avons tous la faculté de décider par nous-mêmes et sur l’engagement à respecter celle-ci. Les membres ont pour rôle d’appuyer la participation de la personne à la collectivité[486]. Les microconseils peuvent être plus ou moins officiels, selon les exigences de l’endroit où ils existent et les besoins qu’ils visent à combler. Une orientation de la Colombie-Britannique a explicitement reconnu que les microconseils pouvaient recevoir du financement pour assurer des services individualisés directs financés.

Le Bureau du défenseur des personnes handicapées de l’État australien du Victoria a donné à penser qu’une version des réseaux de soutien personnels officialisés pourrait être un mécanisme de la prise de décision accompagnée reconnue : [traduction] « une autre forme de prise de décision accompagnée consiste à faire du réseau de soutien une association constituée en personne morale. Dans ce contexte, tous les membres du réseau sont responsables » des décisions qui ont des conséquences juridiques[487].

 

  • QUESTION À ABORDER : quel rôle les réseaux de soutien personnels pourraient-ils jouer dans un régime ontarien renouvelé en matière de capacité, de prise de décision et de tutelle? Comment cette fonction pourrait-elle être officialisée en droit?

 

D.   L’amélioration des services de soutien pour les membres de la famille et les amis

Bien que la portée et la nature des responsabilités d’un mandataire spécial varient d’une situation à une autre, il peut devoir, pour exercer la fonction prévue dans les lois : 

  • comprendre suffisamment le régime juridique complexe de l’Ontario et ses régimes connexes (par exemple, l’évaluation de la capacité) pour pouvoir s’y retrouver, tant pour lui-même que pour la personne qu’il représente;
  • comprendre son rôle, ses responsabilités et obligations de rendre compte en vertu de la loi;
  • comprendre, à une échelle quotidienne et pratique, la notion de capacité et le principe de l’autonomie et de l’indépendance;
  • posséder les compétences et les ressources émotionnelles, pour bien communiquer avec la personne qu’il représente, l’appuyer dans sa participation au processus décisionnel et respecter, dans la plus grande mesure possible, son autonomie et sa capacité, et travailler de manière positive et concertée avec les autres personnes proches de la personne représentée;
  • posséder les compétences pour chercher des solutions parfois liées à des questions financières ou personnelles très complexes, trouver des ressources et se reconnaître dans des régimes juridiques ou sociaux complexes au nom de la personne, souvent dans un contexte de ressources limitées ou rationnées;
  • entretenir des liens personnels de confiance avec la personne de façon à comprendre sa situation, ses besoins, ses valeurs et ses préférences et à en tenir compte dans l’exécution de sa fonction;
  • avoir le temps et la capacité de mettre en œuvre les décisions prises – par exemple, superviser l’achat ou la vente d’un bien; trouver une résidence appropriée et y obtenir l’admission; recruter et superviser les services de soutien ou le personnel professionnel nécessaires et remplir d’autres tâches semblables;
  • disposer des ressources psychologiques et émotionnelles pour gérer la responsabilité de devoir prendre parfois des décisions très difficiles et exigeantes sur le plan éthique.

Comme il a été dit au début du présent chapitre, le rôle de la famille et des amis en leur qualité de mandataires spéciaux est souvent extrêmement exigeant. Il nécessite un dévouement et des compétences considérables et l’investissement de ressources émotionnelles et concrètes importantes. Devant l’envergure de la fonction et la vulnérabilité des personnes que les mandataires spéciaux représentent, la loi prévoit des exigences et des normes strictes régissant les activités de ces mandataires.

Dans de nombreux cas, toutes ces tâches se font dans un contexte de ressources limitées des personnes handicapées et des personnes âgées, ce qui les rend encore plus difficiles.

De nombreux organismes et professionnels font de gros efforts pour fournir de l’information et des soutiens aux mandataires spéciaux ou à des aidants naturels qui jouent souvent le rôle de mandataires spéciaux, notamment les cliniques d’aide juridique, des organismes de défense des droits, des organismes publics et des ministères, par exemple le TCP et le Secrétariat aux affaires des personnes âgées, pour ne nommer que ceux-là. Ces services de soutien sont cependant fragmentés et comptent le plus souvent sur les mandataires spéciaux pour les approcher. Les options qui permettraient un meilleur accès à l’information et à l’éducation, à des services d’aide pour se retrouver dans les dédales de l’administration et à des services de défense des droits sont exposées dans d’autres chapitres du présent document de travail : il est important d’examiner comment les réformes de ces aspects et d’autres du droit ontarien en matière de capacité juridique et de tutelle peuvent renforcer la capacité des familles et des amis pour que la vision qui sous-tend les lois se concrétise utilement. 

 

  • QUESTION À ABORDER : lorsque des membres de la famille ou des amis représentent une personne reconnue incapable de prendre un type particulier de décision, y a-t-il des services de soutien qui leur permettraient de s’acquitter plus efficacement de leur fonction?

 

E.    Le rôle du tuteur et curateur public

Le TCP s’acquitte d’un certain nombre de fonctions essentielles dans le régime ontarien de la capacité juridique, de la prise de décision et de la tutelle, son rôle en tant que mandataire spécial étant parmi ses plus importants. La section suivante aborde brièvement certaines suggestions de réforme de cette fonction du TCP.

Le mandataire spécial de dernier recours. On reconnaît généralement qu’un mandataire de dernier recours est nécessaire dans tout régime concernant la capacité juridique, la prise de décision et la tutelle : actuellement, le TCP remplit ce rôle essentiel. Pour s’assurer que cette fonction soit véritablement assumée en dernier recours et en prévision des pressions grandissantes que les changements sociaux et démographiques exerceront sur elle, il est important d’examiner si d’autres peuvent remplir la fonction de mandataire spécial, de manière appropriée et efficace pour répondre en partie au besoin. Il est réaliste de dire qu’il faudra probablement que les pouvoirs publics continuent de dispenser une forme ou autre de services de dernier recours, mais les suggestions concernant les fiduciaires professionnels, les bénévoles et les organismes communautaires donnent à penser qu’il est possible de multiplier les options dont disposent les personnes qui ont besoin d’aide pour prendre des décisions. De plus, les autres formes de prise de décision dont il est question au chapitre I de la partie Trois et les formes restreintes de tutelle examinée au chapitre III de cette même partie contribuent également à ce que le TCP n’exerce ces fonctions que lorsqu’il est véritablement nécessaire qu’il le fasse.

La tutelle légale. La fonction du TCP en qualité de tuteur légal est quelque plus controversée que sa fonction de dernier recours. La nomination automatique du TCP comme tuteur aux biens dans ces circonstances (nomination qui peut ensuite faire l’objet de demandes de remplacement) sert à garantir qu’un mandataire peut immédiatement, dès la déclaration d’incapacité, résoudre les questions urgentes liées aux biens et veiller à ce que la personne ne vive pas d’inconvénients ou de difficultés graves en raison d’une période « de vide » lorsque personne n’est autorisé à prendre des décisions. Le processus de remplacement se veut relativement simple et peu coûteux et signifie que des membres de la famille peuvent reprendre cette responsabilité, s’ils le souhaitent, dans un délai raisonnable. Néanmoins, il est vrai que cette fonction du TCP correspond difficilement à la conviction souvent exprimée que la tutelle de l’État doit être un « dernier recours », la prise de décision au nom d’autrui exercée par des proches étant l’arrangement dans toutes les autres circonstances. 

La tutelle légale se comprend le mieux dans le contexte général des enjeux entourant les procédures de nomination, examinées en profondeur au chapitre suivant. Les audiences du tribunal peuvent assurer la transparence et l’examen attentif et objectif des nominations, des valeurs importantes lorsque des droits sont en jeu. Toutefois, ces recours aux tribunaux sont souvent perçus comme assez peu accessibles en raison des coûts et de la complexité : les régimes les plus modernes ne recourent pas entièrement aux audiences du tribunal pour les nominations concernant les tutelles. Les tutelles légales constituent une autre voie que les nominations par les tribunaux, mais il existe également d’autres moyens de répondre à ce besoin : tous les pays n’ont pas un processus analogue à la tutelle légale. Les processus administratifs, par exemple les « demandes administratives » de l’Alberta, décrites au chapitre suivant, sont l’une des solutions. Les systèmes des tribunaux pour les nominations, par exemple celui que la CCC propose actuellement pour les représentants prévus par la LCSS et qui sont courants en Australie, constituent une autre possibilité de procédure assez rapide et peu coûteuse de nomination.

Le contrôle de la fonction du TCP en qualité de mandataire spécial. Comme il a brièvement été dit ci-dessus, le travail du TCP est assujetti à divers mécanismes de contrôle, dont une procédure interne de plaintes, le contrôle ordinaire des tribunaux en ce qui concerne les tuteurs, les plaintes à l’Ombudsman et divers processus de vérification. L’ARCH Disability Law Centre, dans son document intitulé Decisions, Decisions, Promoting and Protecting the Rights of Persons with Disabilities Who are Subject to Guardianship, propose que même si le TCP a un système interne de règlement des plaintes pour répondre aux préoccupations soulevées sur sa façon d’exercer sa fonction de mandataire, un « bureau de surveillance et de défense des droits » indépendant qui pourrait recevoir et régler les plaintes au sujet des activités des mandataires spéciaux, dont le TCP, répondrait mieux aux besoins des personnes handicapées, en corrigeant, notamment, le déséquilibre inévitable du pouvoir entre le TCP et ses clients[488].

 

  • QUESTION À ABORDER : des réformes sont-elles nécessaires pour renforcer le contrôle et la surveillance de la fonction du tuteur et curateur public en tant que mandataire spécial? Si oui, quelles réformes seraient les plus pertinentes et les plus efficaces?


F.     Questions à aborder

  1. L’Ontario devrait-il étendre la fonction que des professionnels spécialisés peuvent exercer pour qu’ils puissent représenter les personnes reconnues incapables de prendre un type particulier de décision? Si oui :
    a)   Pour quels types de décision ces professionnels devraient-ils être autorisés à agir?
    b)  Quels types de formation, de licence ou d’études devrait-on exiger de ces professionnels?
    c)   Quels types de contrôle et de surveillance faudrait-il mettre en place pour ces professionnels? Qui devrait effectuer ce contrôle et cette surveillance?
    d)  Quelles devraient être les responsabilités et les obligations de ces professionnels?
    e)   Quelles autres mesures faudrait-il mettre en place pour empêcher la négligence, le mésusage ou les abus de la part de ces professionnels, reconnaître ces inconduites et les corriger?
  2. L’Ontario devrait-il étendre la fonction que des bénévoles ou d’autres membres de la collectivité peuvent exercer pour qu’ils puissent représenter les personnes reconnues incapables de prendre un type particulier de décision? Si oui :
    a)   Pour quels types de décisions et dans quels types de circonstances ces personnes devraient-elles être autorisées à remplir ces fonctions?
    b)  Qui devrait avoir la responsabilité de recruter, de choisir et de superviser ces personnes?
    c)   Quels types de formation ou de soutiens faudrait-il fournir à ces personnes?
    d)  Quels types de contrôle et de surveillance faudrait-il mettre en place? Qui devrait effectuer ce contrôle et cette surveillance?
    e)   Quelles devraient être les responsabilités et les obligations de ces personnes?
    f)    Quelles autres mesures faudrait-il mettre en place pour empêcher la négligence, le mésusage ou les abus de la part de ces personnes, reconnaître ces inconduites et les corriger?
  3. Quelles fonctions les organismes communautaires pourraient-ils exercer au nom des personnes reconnues incapables de prendre un type particulier de décision? Si les organismes communautaires devaient remplir la fonction de mandataires spéciaux, quelles leçons pourrait-on tirer des expériences des fiduciaires officieux ou du recours aux organismes communautaires dans cette fonction dans d’autres provinces ou pays?
  4. Quel rôle les réseaux de soutien personnels pourraient-ils jouer dans un régime ontarien renouvelé en matière de capacité, de prise de décision et de tutelle? Comment cette fonction pourrait-elle être officialisée en droit?
  5. Lorsque des membres de la famille ou des amis représentent une personne reconnue incapable de prendre un type particulier de décision, y a-t-il des services de soutien qui leur permettraient de s’acquitter plus efficacement de leur fonction?
  6. Des réformes sont-elles nécessaires pour renforcer le contrôle et la surveillance de la fonction du tuteur et curateur public en tant que mandataire spécial? Si oui, quelles réformes seraient les plus pertinentes et les plus efficaces?

 

 

 

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