A.    Cadre général et introduction

Le chapitre I de la partie Deux de ce document de travail s’est intéressé aux démarches et aux critères de détermination de la capacité juridique. Le présent chapitre aborde les façons dont la notion de capacité a été opérationnalisée, tout spécialement au moyen de mécanismes d’évaluation de la capacité, c’est‑à‑dire les systèmes et les procédures que nous utilisons pour appliquer les critères de détermination de la capacité juridique prévus par la loi. Cela comprend les qualifications que doivent posséder les personnes chargées d’évaluer la capacité, les normes et les exigences relatives à l’évaluation de la capacité, la surveillance du processus d’évaluation de la capacité, ainsi que les droits des personnes faisant l’objet de l’évaluation et les recours dont elles disposent.

Étant donné que la capacité constitue le critère d’application des lois relatives à la prise de décision et à la tutelle, les mécanismes mis en place pour l’évaluer jouent un rôle essentiel dans leur application juste et efficace. Ceux qui sont complexes, trop coûteux ou qui ne tiennent pas compte des besoins des personnes handicapées et de ceux de leurs familles empêchent que soit prise en compte la nature évolutive et changeante des capacités et donnent lieu à une application erronée de la loi. Par exemple, les mécanismes qui sont utiles et accessibles permettent aux personnes mises sous tutelle ou à celles qui ont établi une procuration de démontrer leurs aptitudes et d’affirmer leur autonomie. Les évaluations peu rigoureuses ou celles qui ne confèrent pas de protection procédurale adéquate peuvent porter atteinte aux droits et à l’autonomie des personnes capables de prendre les décisions les concernant.

Il importe de ne pas oublier qu’une évaluation de la capacité peut être déclenchée pour une foule de raisons qui ne sont pas toutes fondées sur une connaissance approfondie de l’objet de la législation et des possibilités que celle-ci prévoit. Des familles peuvent espérer de façon peu réaliste qu’une évaluation de la capacité règlera d’une manière ou d’une autre des problèmes méthodes et des questions d’éthique difficiles. Certains parents de jeunes adultes ayant une déficience développementale pourraient supposer à tort qu’une tutelle semble nécessaire et inévitable alors que leur enfant arrive à l’âge adulte. Des professionnels peuvent également mal comprendre les résultats auxquels un processus d’évaluation de la capacité peut aboutir. La tâche des personnes chargées d’évaluer la capacité s’avère donc difficile.

Dans de nombreux cas, une évaluation de la capacité est le point d’entrée dans le système prévu par la LPDNA ou la LCSS : les mesures de soutien, les choix possibles et l’aide fournie à cette étape pour s’y retrouver dans les différents processus influenceront grandement l’expérience que feront les personnes concernées et leurs familles de ce domaine du droit.

Le présent chapitre porte essentiellement sur les exigences relatives à l’évaluation des critères de détermination de la capacité prévus par la loi, c’est‑à‑dire les procédures prévues dans la partie III de la LSM ainsi que dans la LPDNA et la LCSS. La capacité juridique est évaluée couramment dans de nombreux autres contextes – par exemple, les avocats doivent évaluer la capacité de leurs clients de leur donner des instructions –, mais ces évaluations dépassent le cadre du présent projet.

Les mécanismes mis en place en Ontario pour évaluer la capacité comprennent l’évaluation de la capacité prévue dans la LCSS, l’évaluation de la capacité de gérer ses biens et de prendre soin de sa personne prévue dans la LPDNA et les examens pour établir la capacité prévus dans la LSM, ainsi que les mécanismes moins officiels pour évaluer la capacité de donner son consentement à un traitement ou d’établir une procuration. Lorsqu’il est question dans le présent chapitre d’évaluation de la capacité ou d’évaluer la capacité, tous les mécanismes prévus en Ontario pour ce faire sont compris, sauf indication contraire. Lorsqu’il est question spécifiquement de l’évaluation de la capacité de gérer ses biens et de prendre soin de sa personne visée par la LPDNA, la Loi est mentionnée spécifiquement.

Comme il a été exposé brièvement au chapitre I de la partie Deux, la capacité juridique est une notion multidimensionnelle : on ne s’étonnera donc pas qu’il soit difficile de mettre en place des systèmes efficaces et utiles pour l’évaluer. Il faut reconnaître d’emblée qu’il n’existe pas de systèmes parfaits d’évaluation de la capacité, bien qu’il y en ait certes des meilleurs et des moins bons.

Les nombreuses conceptions de l’évaluation de la capacité ont été exposées au chapitre précédent. Bien entendu, les procédures d’évaluation sont étroitement liées à la notion sous‑jacente de capacité qu’elles sont censées appliquer. Celles qui sont issues d’un modèle fondé sur l’état (comme celui basé sur un diagnostic médical) sont forcément très différentes de celles issues d’un modèle fonctionnel ou cognitif (comme le critère sur la capacité « à comprendre et à évaluer »), qui elles aussi diffèrent d’un processus axé sur une notion de capacité basée sur un modèle non cognitif comme « la volonté et l’intention ». Le cadre législatif actuel de l’Ontario est basé sur un modèle cognitif. L’adoption d’un modèle non cognitif aurait des conséquences très importantes pour les systèmes d’évaluation de la capacité de la province, en particulier en ce qui a trait à la désignation des personnes en seraient chargées.

Néanmoins, tous les systèmes d’évaluation doivent éclaircir certaines questions fondamentales. La méthode d’évaluation choisie est‑elle appropriée au contexte particulier ou à la fin visée? Quels sont les recours qui devraient s’offrir à une personne qui est en désaccord avec les résultats d’une évaluation de la capacité? Combien de fois la capacité doit‑elle être réévaluée? Quelles sont les compétences et les connaissances que devraient posséder les personnes chargées d’évaluer la capacité? À quel type d’information ou de mesures de soutien doivent s’attendre les personnes faisant l’objet d’une évaluation? Quels sont les obstacles à une évaluation de la capacité? Comment peut‑on équilibrer la protection procédurale et les mesures de soutien indispensables avec la rareté des ressources et les exigences d’efficacité?

En appliquant une démarche fondée sur des principes au droit concernant la capacité juridique, la prise de décision et la tutelle, il faut garder à l’esprit que les principes s’appliquent tant à l’aspect procédural des lois (comme les mécanismes d’évaluation de la capacité) qu’aux dispositions de fond. Par exemple, il est indispensable que des procédures de plainte et des mécanismes de recours efficaces soient mis en place pour assurer le respect de la dignité et de la valeur des personnes touchées par la loi; la conception des procédures doit prendre en compte la diversité des capacités et d’autres caractéristiques; l’autonomie et l’indépendance des personnes touchées doivent être favorisées en leur procurant des renseignements suffisants et des mesures de soutien appropriées pour leur permettre de faire des choix judicieux.

 

B.    Difficultés liées à la création de mécanismes efficaces pour évaluer la capacité

De nombreux thèmes et sujets de préoccupation reviennent de façon récurrente dans les écrits sur les mécanismes d’évaluation de la capacité et il pourrait s’avérer utile de les prendre en compte dans l’examen des mécanismes mis en place en Ontario et dans les propositions de réforme possible. Tout système d’évaluation de la capacité doit tenir compte de ces questions.

1.     Difficultés liées à la concrétisation de la notion de capacité

Comme l’a souligné la Commission de réforme du droit du Victoria dans son Rapport final de 2012 sur la tutelle, l’évaluation de la capacité est, de par sa nature, difficile :

[traduction] Évaluer la capacité n’est pas une mince affaire. Il n’y a pas de critères décisifs et objectifs, et peu de professionnels ont reçu une formation spécialisée en la matière. Des professionnels chevronnés ont laissé entendre à la Commission que l’évaluation de la capacité devient plus difficile au fil du temps à mesure que les praticiens prennent conscience de la complexité et de la dimension individuelle de la capacité et de l’incapacité cognitives[159].

La notion de capacité sera toujours difficile à appliquer en raison de sa nature insaisissable et multidimensionnelle. Effectuée correctement, l’évaluation de la capacité n’est pas une entreprise simple et aisée. Bien qu’il y ait des personnes qui, de toute évidence, ne répondent pas aux critères, il y en aura aussi un grand nombre qui se situeront dans une zone grise ou dont l’évaluation des capacités nécessitera beaucoup de précautions. Lourde de conséquences, la détermination de la capacité exerce donc une pression sur les évaluateurs pour qu’ils « ne se trompent pas ». On demande donc beaucoup aux mécanismes : étant donné les enjeux et la possibilité d’erreur, il importe que le processus soit transparent, équitable – et perçu comme tel – et susceptible de correction. Il importe aussi que le processus se déroule relativement dans les délais, compte tenu des risques d’abus et des autres conséquences néfastes lorsque la personne est incapable et qu’elle a besoin des mesures de soutien prévues dans la loi.

De plus, étant donné le lien étroit entre les évaluations de la capacité et le fonctionnement de systèmes complexes et surchargés comme les hôpitaux, les soins de longue durée et les services sociaux destinés aux personnes vulnérables, des pressions sont également exercées pour faire en sorte que les mécanismes d’évaluation contribuent à une meilleure efficacité et procurent une assurance aux personnes chargées de fournir ces services et de faire fonctionner ces systèmes. Les difficultés liées à la conception de mécanismes d’évaluation qui assurent un bon équilibre entre tous ces facteurs sont majeures.

 

2.  À qui incombe l’évaluation de la capacité?

La nature complexe et multidimensionnelle de l’évaluation de la capacité soulève naturellement la question de savoir quelle catégorie de personnes peut effectuer les évaluations, quelles sont les qualifications et la formation requises et quelles sont les normes à respecter?

Les réponses à ces questions sont intimement liées à la notion de capacité sur laquelle on se fonde. Une notion qui fait référence à la capacité d’une personne de manifester « sa volonté et son intention » renvoie aux personnes qui ont une connaissance intime de la personne concernée – celles qui sont aptes à interpréter ses actions et ses réactions pour sonder ses intentions et connaître ses préférences – plutôt que vers des spécialistes. En revanche, une notion de capacité qui fait référence à la cognition renvoie à des personnes qui possèdent des connaissances spécialisées sur les capacités cognitives et la manière dont elles se manifestent, c’est‑à‑dire des professionnels de la santé. Or, comme la plupart des pays de common law ont adopté une forme de conception fonctionnelle ou cognitive de la capacité, il n’est pas étonnant de constater que la tendance générale veut que l’évaluation de la capacité relève principalement des professionnels de la santé. La capacité est une norme juridique qui prend appui sur des critères juridiques définis, mais les décisions préliminaires sont souvent prises par des professionnels de la santé, et lorsque les décisions concernant la capacité juridique sont soumises à l’examen des tribunaux, la preuve médicale pèse d’un grand poids.

Compte tenu de cette dynamique, il convient de souligner que l’Alberta a prévu explicitement dans la récente réforme de sa loi sur la tutelle la possibilité, dans certaines circonstances, d’une évaluation non professionnelle de la capacité. En vertu de la Personal Directives Act, une personne qui donne une directive personnelle peut désigner la personne ou les personnes qui pourront évaluer son aptitude (à comprendre et à évaluer les renseignements pertinents) en vue de déterminer le moment de l’entrée en vigueur de la directive[160]. Il peut s’agir d’un membre de sa famille ou d’un ami de confiance[161]. Ces personnes doivent consulter un médecin ou un psychologue lorsqu’elles déterminent la capacité et remplir un formulaire détaillé, tout comme le professionnel consulté[162]. Si personne n’est désigné dans la directive personnelle, l’évaluation de la capacité doit être effectuée par deux prestataires de services, dont un médecin ou un psychologue[163].

La conception ontarienne actuelle de la capacité est cognitive et, comme on va le voir plus loin, elle fait grandement appel aux professionnels. Weisstub y fait référence dans son rapport final, affirmant que « presque tous les exposés à ce sujet exprimaient l’avis que les médecins avaient un rôle clé à jouer dans ce processus. Toutefois, la plupart affirmaient que les lignes directrices qui guident actuellement les médecins dans l’exercice de leur discrétion n’étaient pas assez claires »[164].

Comme la conception ontarienne de la capacité est cognitive – la capacité ou l’incapacité d’une personne de prendre des décisions spécifiques à un moment donné – sur le plan théorique du moins, il n’est peut‑être pas nécessaire de faire appel à des spécialistes compétents pour déterminer la capacité juridique d’une personne dans un domaine particulier. En droit ontarien, certaines évaluations de la capacité doivent être effectuées par des professionnels spécialisés, alors que d’autres comme l’évaluation de la capacité d’établir une procuration ne le sont pas. Dans de nombreux cas, ceux et celles qui ont des relations avec des personnes dont la capacité juridique est en doute ne sont pas nécessairement des spécialistes dans ce domaine du droit ou des aspects sociaux et médicaux de la notion de capacité. Toutefois, comme la notion repose sur diverses disciplines médicales, psychologiques et sociales, la tendance veut que l’on fasse appel à des spécialistes compétents pour évaluer la capacité même dans les cas où la loi ne l’exige pas[165].

Le niveau de qualification professionnelle requis pour évaluer la capacité suscite des réactions contradictoires. Pour beaucoup qui ne sont pas des spécialistes du domaine, les conceptions fondées sur l’état ou sur les résultats peuvent sembler « naturelles ». Ainsi, des lacunes majeures dans les connaissances et un sérieux manque de compréhension de la loi peuvent conduire à des résultats qui ne cadrent pas avec la conception ontarienne de la capacité. Dans des contextes moins officiels et réglementés, il peut encore arriver que l’évaluation de la capacité soit basée sur un diagnostic ou des résultats médicaux (un critère de fait de l’intérêt supérieur) ou en soit influencée. Selon une spécialiste de la question,

[traduction] les conclusions relatives à la capacité et au droit de prendre certaines décisions ne sont trop souvent qu’une façon détournée d’évaluer le caractère raisonnable de la décision plutôt que la capacité de la personne de prendre cette décision[166].

Ce genre de commentaire laisse entendre qu’il serait peut‑être préférable d’adopter une conception de la capacité plus professionnalisée. Toutefois, les personnes handicapées ont souvent soulevé des préoccupations à l’égard de la médicalisation de leur situation qui conduit à un contrôle de leur vie par des professionnels de la santé, soutenant qu’une compréhension sociologique de la situation de handicap, axée sur les droits de la personne, est plus appropriée. Des critiques de ce genre peuvent avoir une certaine résonance quant à l’application de la conception ontarienne de la capacité.

L’importance accordée à la capacité décisionnelle, comme c’est le cas en Ontario et dans beaucoup d’autres provinces, suggère peut‑être le recours à des connaissances ou à des compétences différentes pour l’évaluation de la capacité dans différents domaines. Au cours des consultations préliminaires de la CDO, certaines psychiatres ont mentionné que les médecins tentaient souvent d’obtenir leur avis sur la capacité d’une personne de donner son consentement à l’égard d’un traitement donné, comme la chirurgie. Cette pratique est non seulement contraire à l’état du droit qui veut qu’un praticien de la santé proposant un traitement s’assure que la personne a donné son consentement, mais, de l’avis des psychiatres, c’est le praticien de la santé qui est le mieux placé pour déterminer si la personne a compris la nature et les conséquences du traitement particulier proposé.

De la même façon, dans de nombreux cas, l’évaluation de la capacité est effectuée par des professionnels qui fournissent des services, comme un avocat qui détermine si un client a la capacité de lui donner des instructions, de faire son testament ou d’établir une procuration. Des prestataires de services de toutes sortes, y compris de services financiers et sociaux, doivent souvent évaluer, à titre non officiel, la capacité d’une personne de passer un accord ou de donner son consentement.

La Mental Capacity Act 2005 du Royaume‑Uni applique cette démarche dans la plus grande mesure possible : il n’y a pas de système d’évaluateurs désignés de la capacité ni de professionnels qualifiés pour effectuer certaines évaluations; la question est déterminée par les circonstances particulières dictant le besoin d’évaluation :

[traduction] La personne qui évalue la capacité de prendre une décision sera habituellement celle qui interagit directement avec la personne visée au moment de la prise de décision. Cela signifie que différentes personnes participeront à évaluer la capacité de quelqu’un à prendre différentes décisions à des moments différents. Pour la plupart des décisions concernant les affaires courantes, ce sera la personne qui la soigne au moment où la décision doit être prise. Par exemple, un travailleur social évalue si une personne est capable de donner son consentement à un bain, puis une infirmière évalue si elle est capable de donner son consentement à un changement de pansement[167].

Il est intéressant de noter qu’en vertu de la Mental Capacity Act, la plupart des décisions concernant les affaires courantes d’une personne jugée incapable seront prises par la personne soignante la plus directement en contact avec elle à ce moment‑là comme, par exemple, le personnel de santé chargé du traitement ou de l’acte médical en question[168]. Dans la pratique, cela signifie que la personne qui évalue la capacité de quelqu’un est souvent celle qui prendra ensuite une décision en son nom et qui lui fournira des soins ou des services. Pour rétablir le déséquilibre des pouvoirs que cette situation peut entraîner, la Mental Capacity Act crée un système de « défenseurs indépendants de la capacité mentale » qui sont nommés pour « défendre » des personnes qui ne bénéficient pas de mesures de soutien informelles ou d’un représentant ou qui n’ont pas donné une procuration permanente. Leur tâche consiste à obtenir et à évaluer tous les renseignements pertinents relatifs aux désirs et aux sentiments de la personne concernée et d’en rendre compte au décideur; ils ont également le pouvoir de contester une décision concernant la personne à laquelle ils ont été assignés, y compris une décision concernant la capacité[169].

La question des normes et des exigences en matière de formation est liée à celle des qualifications requises pour effectuer une évaluation de la capacité. Dans certains systèmes, une expertise médicale ou une autre expertise en matière de santé est considérée comme suffisante en soi pour évaluer la capacité, sans qu’il soit nécessaire de se conformer à d’autres normes (outre les critères de détermination de la capacité prévus par la loi) ou de suivre d’autres formations. Comme nous le verrons plus loin, les exigences de l’Ontario relatives aux évaluateurs de la capacité en vertu de la LPDNA sont liées à l’évaluation des compétences, à la formation et à une série de lignes directrices obligatoires explicites. Ce sont les exigences les plus complètes et systématisées de tous les pays du monde anglophone. La province de l’Alberta a emboîté le pas dans sa récente réforme en exigeant que les évaluations soient effectuées par des évaluateurs désignés avant que des ordonnances de tutelle, de curatelle ou de prise de décisions en commun soient rendues. Ces évaluateurs désignés doivent répondre à des exigences spécifiques relatives à la scolarité et à la formation et rédiger des rapports d’évaluation de la capacité solidement documentés[170].

En déterminant qui doit évaluer la capacité, il faut aussi prendre en considération la question de l’accessibilité. Des obstacles à l’évaluation pourraient empêcher que des évaluations ou des réévaluations soient effectuées et porter atteinte à l’autonomie et à la sécurité des personnes concernées. Les coûts représentent un élément important de l’accessibilité. Par exemple, comme il a été mentionné plus haut, les évaluations de la capacité en vertu de la LPDNA se distinguent par les normes applicables et la formation requise. Toutefois, comme il s’agit d’un service privé, des coûts y sont associés. Le Bureau de l’évaluation de la capacité de l’Ontario peut couvrir les coûts pour les personnes à faible revenu, mais les ressources allouées à ce programme sont relativement limitées et, pour certains Ontariens, les coûts associés à une ou plusieurs évaluations de la capacité peuvent avoir un effet dissuasif. Des préoccupations ont été soulevées à l’égard de la possibilité que l’examen pour établir la capacité en vertu de la LSM soit utilisé de façon inappropriée ou que des personnes dont la capacité fluctue ou se modifie puissent se trouver classées de façon inappropriée comme jouissant ou ne jouissant pas de capacité juridique.

Liée à la question d’accessibilité soulevée ci‑dessus est celle de la prise en compte de la grande diversité qui caractérise une province aussi grande, multiculturelle et plurilingue que l’Ontario. Étant donné les aspects sociaux et contextuels de la notion de capacité, il importe que les évaluateurs soient sensibilisés à cette réalité et prennent en compte la diversité pour que, par exemple, des comportements propres à une culture ne soient pas interprétés comme un signe d’incapacité juridique. En ce qui concerne la communication et les barrières linguistiques, Carling‑Rowland et Wahl ont fait la remarque suivante :

[traduction] Par nécessité, l’évaluation de la capacité actuelle est fortement tributaire de la compétence linguistique du patient puisque c’est au moyen de la parole et de l’écrit que nous démontrons notre aptitude à comprendre et à évaluer des renseignements et de formuler une réponse. Les personnes qui se heurtent à des barrières linguistiques sont particulièrement sujettes […] à être exclues de la prise de décision parce que leur incapacité à s’exprimer masque leur compétence inhérente[171].

Carling‑Rowland et Wahl ont poursuivi en faisant remarquer que même si les interprètes professionnels sont impartiaux, connaissent les cultures et les coutumes différentes et sont censés respecter les orientations relatives à la confidentialité, on ne peut pas en attendre autant des interprètes ad hoc ou des membres de la famille qui sont utilisés couramment dans le système de soins de santé[172].

 

  • QUESTION À ABORDER : comment l’expérience de l’évaluation de la capacité diffère‑t‑elle en fonction du sexe, de l’orientation sexuelle, de l’appartenance raciale, de la langue, de la culture, du statut socio-économique, du statut d’autochtone, de l’emplacement géographique, de différents types de handicaps et d’autres aspects de la diversité?

 

2.     Protections procédurales pour les personnes évaluées

Pour certains, l’évaluation de la capacité peut être considérée comme une atteinte grave à la vie privée; pour d’autres, comme une expérience très bouleversante. Les tribunaux ont reconnu qu’une évaluation de la capacité peut s’avérer [traduction] « un processus intrusif et dégradant » [173] et une [traduction] « une intrusion importante dans la vie privée de la personne et une atteinte à sa sécurité »[174]. Si une évaluation conclut à l’incapacité juridique, elle peut avoir de lourdes conséquences à long terme sur l’autonomie de la personne concernée. Par conséquent, il importe que des protections procédurales adéquates soient associées à l’évaluation de la capacité : « le bénéficiaire a droit à un certain respect fondamental […] il faut respecter la connaissance qu’il a de son propre corps, son droit de décider de quelle façon il sera traité et son droit d’être informé des traitements subis »[175].

Bien entendu, la notion de « protections procédurales adéquates » variera en fonction du contexte et des conséquences potentielles de l’évaluation en question. Une évaluation qui pourrait donner lieu à une tutelle et qui a donc des conséquences à long terme pour l’autonomie d’une personne pourrait nécessiter des protections procédurales plus efficaces qu’une évaluation qui viserait une décision ponctuelle concernant un traitement par un mandataire spécial; une décision ponctuelle peut avoir des conséquences décisives pour l’avenir comme c’est le cas d’une décision concernant l’admission à un établissement de soins de longue durée. Un examen plus approfondi peut être effectué lorsque la décision n’est pas urgente. Weisstub a soutenu que :

Puisque la durée prévue, l’étendue et les conséquences de l’incapacité peuvent varier d’une personne à l’autre, il est normal que les procédures varient selon le contexte. De ce point de vue, il serait souhaitable de pouvoir disposer de deux procédures pour déterminer la capacité de décider : la procédure « solennelle » et une procédure simplifiée[176].

Toutefois, il a recommandé que la conception de procédures d’évaluation de la capacité prenne en compte, dans tous les cas, des questions fondamentales comme les suivantes :

  • le choix de l’évaluateur;
  • l’avis à transmettre à la personne concernée;
  • le droit à des conseils en matière de droits et à l’assistance d’un avocat;
  • le droit de présenter une requête en révision;
  • l’intervalle entre les révisions.

Dans son rapport final, la Commission de réforme du droit du Victoria a souligné l’importance d’un élément déclencheur valable pour justifier une évaluation de la capacité et de la prise de mesures pour [traduction] « faire participer la personne visée au processus d’évaluation en tentant d’obtenir son accord et en l’informant le plus possible au sujet du processus »[177].

La législation albertaine exige un motif valable de préoccupation pour enclencher une évaluation de la capacité, c’est‑à‑dire un événement mettant en danger la personne concernée ou d’autres personnes et dont la cause semble être l’incapacité de prendre des décisions[178]. Les évaluateurs doivent connaître le motif de la demande d’évaluation de la capacité et prendre connaissance des circonstances ayant conduit à cette demande[179].

La législation albertaine prévoit également de nombreux autres droits originaux qui s’appliquent durant la procédure d’évaluation de la capacité, y compris :

  • le droit à ce qu’une autre personne soit présente durant l’évaluation pour aider la personne concernée à se sentir à l’aise et détendue;
  • le droit à l’assistance d’un interprète ou à l’utilisation d’un appareil pour l’aider à communiquer et à démontrer pleinement sa capacité;
  • le droit de subir l’évaluation à un moment et dans des circonstances où elle sera le plus susceptible de démontrer pleinement sa capacité[180].

 

3.     Réponses graduées adaptées aux fluctuations de la capacité

Il est généralement reconnu que la capacité juridique peut varier dans le temps. Certaines personnes ne connaîtront qu’un seul bref épisode d’absence de capacité juridique. D’autres en connaîtront plusieurs. Des personnes qui n’avaient pas de capacité juridique en développeront et celles qui en jouissaient en seront dépourvues. Puisque la tutelle et d’autres formes de prise de décisions au nom d’autrui sont considérées généralement comme des intrusions importantes dans l’autonomie d’une personne, il est important qu’une personne frappée d’incapacité juridique n’en conserve pas le statut si son état s’améliore. Il est également important que l’incapacité juridique soit détectée au moment opportun en raison des risques importants auxquels certaines personnes peuvent faire face lorsqu’elles prennent des décisions qu’elles ne sont pas aptes à prendre.

Conséquemment, il est indispensable que les procédures juridiques liées à l’évaluation de la capacité conservent leur souplesse pour que les réévaluations puissent être effectuées avec une relative facilité. Weisstub a fait remarquer dans son rapport final que « puisque la capacité peut varier dans le temps, tous sont d’avis qu’un verdict d’incapacité devrait pouvoir être facilement révisé. Un jugement d’incapacité juridique ne devrait pas être irréversible. Ce jugement devrait plutôt demeurer en vigueur tant que la personne souffre effectivement d’une incapacité »[181]. Il est intéressant de noter que l’article 12 de la Convention relative aux droits des personnes handicapées stipule explicitement que les mesures relatives à l’exercice de la capacité juridique doivent s’appliquer « pendant la période la plus brève possible » et être « soumises à un contrôle périodique effectué par un organe compétent, indépendant et impartial ou une instance judiciaire ».

Bien entendu, c’est peut‑être plus facile à dire qu’à faire. L’évaluation de la capacité peut s’avérer un processus exigeant sur le plan des ressources. Il faut trouver le juste milieu entre l’accessibilité à la révision et à la réévaluation et les cycles de réévaluation inutiles et interminables.

Certaines évaluations de la capacité sont, bien entendu, liées à une décision précise. Par exemple, selon la LCSS, la capacité doit être évaluée chaque fois qu’un nouveau traitement est proposé. Dans de telles circonstances, il n’y a pas de préoccupation, en théorie, à l’égard de la révision des évaluations puisqu’une nouvelle évaluation devrait être effectuée pour chaque décision. Toutefois, dans la pratique, on s’inquiète qu’une constatation d’incapacité pourrait avoir pour effet d’influencer les perceptions et de bafouer la présomption de capacité. Ainsi, une constatation d’incapacité liée à une seule décision pourrait se traduire par une prise de décision au nom d’autrui permanente. Des préoccupations à l’égard des réévaluations sont exprimées le plus vivement lorsqu’une évaluation entraîne des conséquences à long terme, par exemple, lorsqu’une déclaration d’incapacité juridique donne lieu à l’exécution d’une procuration subordonnée à une condition suspensive ou entraîne une mise en tutelle. Plus un régime législatif aborde la question de la capacité juridique uniquement dans le contexte de décisions spécifiques au lieu de dispositions à long terme, moins il y aura de préoccupations au sujet des réévaluations. Toutefois, il se peut que ce ne soit pas pratique dans tous les contextes de traiter la capacité juridique totalement en fonction de décisions spécifiques et de réévaluer la capacité pour chaque décision.

La nouvelle loi de l’Alberta relative à la capacité et à la tutelle fournit un exemple intéressant de mesures à prendre pour traiter les cas de capacité retrouvée et mettre fin aux ordonnances attribuant un pouvoir décisionnel et aux accords de prise de décision. L’Adult Guardianship and Trusteeship Act (AGTA) et la Personal Directive Act (PDA) contiennent de nombreuses dispositions qui prévoient la possibilité qu’une personne retrouve la capacité. Ce fut l’un des changements accueillis favorablement dans les débats législatifs comme répondant aux préoccupations des Albertains, en particulier en ce qui concerne les personnes âgées ayant subi un accident vasculaire cérébral[182]. Par exemple, les évaluateurs de la capacité doivent déterminer si l’adulte pourrait éventuellement retrouver la capacité. La cour a le pouvoir et, dans certains cas, le devoir de spécifier une date de réévaluation dans l’ordonnance de tutelle ou de curatelle. L’AGTA a aussi mis en place un système pour les tutelles et les curatelles urgentes de courte durée, ainsi qu’un processus pour annuler une directive personnelle[183]. De plus, la PDA stipule qu’un prestataire de services liés à des questions personnelles comme des soins de santé, l’hébergement et la participation à des activités sociales et éducatives et à des activités liées à l’emploi, ou à d’autres questions semblables, doivent prendre en considération la capacité de la personne concernée même si elle a fait l’objet antérieurement d’une déclaration d’incapacité par rapport à la décision en question. Avant de fournir un service personnel, le prestataire doit [traduction] « faire un effort raisonnable pour déterminer si la personne concernée est toujours incapable de prendre la décision »[184].

Dans l’État du Victoria en Australie, les ordonnances de tutelle à la personne ou de tutelle financière émises par le tribunal civil et administratif du Victoria (VCAT) sont assujetties à des réévaluations périodiques. La loi prévoit qu’une réévaluation doit être effectuée dans les 12 mois suivant l’ordonnance du Tribunal et au moins une fois tous les trois ans par la suite, à moins que le Tribunal en décide autrement. Suivant la réévaluation, le Tribunal peut renouveler, révoquer ou modifier l’ordonnance ou en émettre une nouvelle, selon ce qu’il juge utile[185]. Dans la pratique, le Tribunal ordonne souvent une réévaluation des ordonnances de tutelle à la personne tous les 12 mois, et des tutelles administratives (biens), tous les trois ans. Le Tribunal a également le pouvoir d’émettre une ordonnance automatiquement exécutoire qui expire à la fin d’une période donnée ou à la survenance d’un événement, à moins qu’une demande soit présentée au Tribunal de renouveler l’ordonnance. Une ordonnance automatiquement exécutoire est plus courante dans le cas d’une ordonnance de tutelle à la personne que d’une tutelle administrative[186].

 

C.     Systèmes ontariens d’évaluation de la capacité

1.     Vue d’ensemble

La province de l’Ontario ne s’est pas dotée d’un seul système, mais plutôt d’une série de systèmes d’évaluation de la capacité. Conformément à la démarche générale des réformes ayant abouti à la législation actuelle de l’Ontario, les systèmes d’évaluation de la capacité sont liés à la nature des décisions à prendre. La LPDNA, la LCSS et la LSM instaurent à elles trois cinq systèmes d’évaluation de la capacité :

  1. examen de la capacité de gérer ses biens au moment de l’admission en établissement psychiatrique ou de la mise en congé d’un établissement psychiatrique (LSM);
  2. évaluation de la capacité de prendre des décisions à l’égard d’un traitement (LCSS);
  3. évaluation de la capacité de prendre des décisions à l’égard de l’admission à des soins de longue durée ou à des services d’aide personnelle (LCSS);
  4. évaluation de la capacité de prendre des décisions pour gérer ses biens ou prendre soin de sa personne (LPDNA);
  5. évaluation de la capacité d’établir une procuration (LPDNA).

Ces mécanismes d’évaluation ont des éléments communs, mais ils diffèrent considérablement l’un de l’autre sur le plan de facteurs comme les suivants :

  1. les personnes chargées des évaluations;
  2. la formation et les normes qui leur sont imposées;
  3. l’information et les mesures de soutien à l’intention des personnes dont la capacité est évaluée;
  4. la documentation requise pour la procédure d’évaluation;
  5. les mécanismes et les mesures de soutien pour contester les résultats d’une évaluation de la capacité.

Chaque système comporte son propre système de freins et de contrepoids pour équilibrer les tensions fondamentales entre l’accessibilité et la responsabilité, la préservation de l’autonomie et la protection des personnes vulnérables qui sous‑tendent ce processus. Les principales caractéristiques de chaque système sont résumées brièvement ci‑dessous, l’intention n’étant pas de fournir une description et un examen approfondis de chacun d’eux.

Bien que ces systèmes varient en fonction de la complexité des procédures et des renvois d’un système à l’autre, il est inévitable que l’existence de cinq systèmes séparés complexifie considérablement l’ensemble.

Les différents systèmes touchent des populations différentes, bien qu’il y ait des chevauchements importants, surtout en ce qui concerne les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou de capacité à différents moments au cours de leur vie. En règle générale, les professionnels travaillent principalement dans l’un ou l’autre des systèmes, c’est‑à‑dire que les personnes qui effectuent les évaluations en vertu de la LCSS de la capacité de prendre des décisions à l’égard de l’admission à des soins de longue durée n’effectuent pas ordinairement des évaluations de la capacité en vertu de la LPDNA. Toutefois, comme des professionnels peuvent aussi, à titre non officiel, aider des personnes à naviguer dans les systèmes prenant en charge la capacité juridique, la prise de décision et la tutelle, ceux qui travaillent dans un système d’évaluation donné peuvent être appelés à fournir des renseignements sur les autres systèmes aux personnes ou à leurs familles. Aussi, il peut y avoir confusion quant au système d’évaluation qui s’applique dans une situation particulière. Dans la pratique, une grande confusion existe relativement au chevauchement et à l’interaction des systèmes.

Une description exhaustive de tous les systèmes ontariens d’évaluation de la capacité dépasse le cadre du présent document de travail. Les sections qui suivent présentent un aperçu général des cinq systèmes, portant principalement sur les questions de procédure soulevées ci‑dessus.

 

2.     Examens de la capacité de gérer ses biens à l’admission en établissement psychiatrique

Ces évaluations (désignées comme des « examens » dans la loi) sont régies par la Partie III de la LSM[187]. Elles ont été instaurées pour mettre en place un mécanisme simple et rapide afin que les personnes admises en établissement psychiatrique ne perdent pas, de ce fait, leurs biens en raison d’une incapacité temporaire de les gérer.

Enclencher la procédure d’évaluation. Lorsqu’une personne est admise en établissement psychiatrique, un examen de la capacité de gérer ses biens est obligatoire, à moins qu’ils aient déjà été confiés à la gestion d’une autre personne au moyen d’une tutelle aux biens aux termes de la LPDNA ou d’une procuration perpétuelle relative aux biens[188]. Un réexamen du malade peut avoir lieu en tout temps durant son séjour dans l’établissement[189] et doit avoir lieu avant sa mise en congé, auquel moment le certificat est annulé[190] ou un avis de prorogation est délivré[191].

Qui effectue l’examen? C’est le médecin traitant, habituellement un psychiatre, qui effectue l’examen.

Documentation. Après avoir procédé à l’examen, le médecin inscrit sa conclusion motivée dans le dossier du malade[192]. S’il conclut que le malade n’est pas apte à gérer ses biens, il délivre un certificat d’incapacité en utilisant la formule 21 sur laquelle il inscrit le nom et l’adresse du malade, le nom de l’établissement psychiatrique, la date de l’examen, les faits dénotant l’incapacité qu’il a constatés ainsi que ceux qui ont été portés à son attention[193]. Il doit aussi remplir une formule indiquant l’état des finances du malade (formule 22)[194]. Assez longue, cette formule indique des renseignements concernant les membres de la famille du malade et les personnes à sa charge, ses biens, ses assurances, ses biens personnels, ses valeurs et ses obligations, ses biens immobiliers, ses dettes (hypothèques, billets à ordre et autres), etc., renseignements qui, en pratique, ne sont probablement pas à la disposition du médecin et, par conséquent, sont souvent incomplets ou inexacts. Pour proroger le certificat d’incapacité, il faut remplir la formule 24 qui comprend exactement les mêmes renseignements que la formule 21[195].

Conséquences de l’examen. Si le médecin conclut que le malade n’est pas apte à gérer ses biens, il doit délivrer un certificat d’incapacité qui doit être transmis au TCP[196]. Le TCP devient le tuteur légal aux biens de cette personne[197] à moins qu’elle ait établi une procuration subordonnée à une condition suspensive. Il est également possible pour un membre de la famille ou un conjoint de présenter une demande au TCP afin de devenir le tuteur légal aux biens[198]. Si le médecin ne réexamine pas le malade avant sa mise en congé, la tutelle du TCP ou d’un remplaçant prend fin.

Lignes directrices ou exigences en matière de formation. La LSM ne définit pas explicitement l’incapacité à gérer ses biens, et le règlement ne comporte pas de conseils additionnels à cet égard. C’est donc la définition de la LPDNA[199] qui est citée pour déterminer la capacité de gérer ses biens en vertu de la LSM. Le ministère de la Procureure générale a publié des lignes directrices en matière d’évaluation de la capacité, mais elles visent les évaluations en vertu de la LPDNA. Par ailleurs, les lignes directrices en la matière publiées par les collèges des médecins portent principalement sur la capacité de prendre des décisions à l’égard d’un traitement. Il semble que les examens de la capacité de gérer ses biens qui sont effectués par des médecins dans des établissements psychiatriques sont relativement non réglementés et sous‑analysés. La recherche de la CDO n’a pas permis de découvrir des orientations, des outils ou des manuels de formation adaptés spécifiquement pour ce type d’évaluation, bien qu’il soit possible que de tels documents aient été développés pour utilisation au sein des établissements.

Étant donné le manque de lignes directrices de nature juridique, réglementaire ou professionnelle régissant ces examens, les décisions de la CCC concernant les requêtes en révision de certificats d’incapacité de gestion de biens (formule 21) ou d’avis de prorogation d’un certificat sont utiles pour définir les critères qui sont pris en considération dans ces examens. S’appuyant sur la common law, sur l’Enquête Weisstub et sur les décisions du Conseil de révision des établissements psychiatriques, elles établissent que ces examens doivent 1) être fondés sur la présomption de capacité, 2) s’attache à l’aptitude du patient à comprendre plutôt qu’à sa compréhension réelle, 3) ne pas s’appuyer uniquement sur le diagnostic psychologique du patient, 4) ne pas s’appuyer sur ce qui de l’avis du médecin, constitue de bonnes ou de mauvaises décisions, 5) prendre en compte sa capacité de mettre à profit ses compétences pour surmonter ses déficiences, 6) prendre en compte la valeur et la nature de ses biens personnels[200].

Droits et recours des personnes faisant l’objet d’un examen. La personne admise en établissement psychiatrique n’a pas le droit de refuser un examen visant à déterminer sa capacité de gérer ses biens[201]. Toutefois, elle dispose de droits procéduraux importants, c’est‑à‑dire :

  1. le droit d’être informée qu’un certificat d’incapacité a été délivré;[202]
  2. le droit d’accès en temps utile à un conseiller en matière de droits[203] : le conseiller rencontre promptement la personne malade et lui explique l’importance du certificat et son droit de présenter une requête en révision auprès de la CCC d’une constatation d’incapacité à gérer ses biens. À la demande de la personne malade, le conseiller l’aide à présenter une requête en révision à la CCC et à obtenir de l’aide juridique[204]. La loi établit des normes relatives aux connaissances, aux aptitudes et à la formation des conseillers en matière de droits[205]. La plupart relèvent du Bureau de l’intervention en faveur des patients des établissements psychiatriques (BIPEP) et ils reçoivent tous la formation prévue par la loi par l’intermédiaire du BIPEP[206];
  3. le droit de présenter une requête en révision auprès de la CCC d’une constatation d’incapacité à gérer ses biens[207] : Une requête en révision ne peut pas être présentée plus d’une fois tous les six mois[208]. Si une personne malade introduit une requête, mais qu’elle est mise en congé pendant que la Commission étudie sa requête, la Commission peut rester saisie de la requête selon la LSM[209]. Toutefois, si une personne malade introduit une requête après sa mise en congé, elle n’est plus considérée comme un « malade » en vertu de la Loi (défini comme un malade hospitalisé). Sa requête est donc soumise à la LPDNA et il faudra une nouvelle évaluation de la capacité, aux frais de la personne concernée, pour présenter une requête en révision à la CCC.

On s’est inquiété de ce que, dans la pratique, des malades sont mis en congé sans qu’ils obtiennent des conseils en matière de droits et que les médecins qui ne respectent pas les droits procéduraux des patients ne subissent pas de conséquences importantes.


Critiques et sujets de préoccupation

Les examens prévus par la LSM sont rarement mentionnés dans la documentation. Ce sont les usages abusifs de la loi à des fins non prévues, ainsi que les interactions incertaines entre la LSM et la LPDNA, qui suscitent le plus de préoccupations. 

Il a été souligné que les personnes qui effectuent les examens pourraient être tentées de les utiliser pour alléger les pressions sur les établissements[210]. La décision V (Re) fournit un exemple de cette dynamique. Le médecin de V était d’avis que V pouvait être mis en congé s’il avait accès à des ressources financières pour le soutenir. V ne disposait d’aucun moyen financier et il ne voulait pas présenter une demande au Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées (POSPH), ni d’autres demandes d’aide financière. Son médecin s’était dit que si l’on concluait à l’incapacité de V de gérer ses biens, le TCP pourrait présenter une demande d’aide financière en son nom et V pourrait être mis en congé. Il n’avait pas examiné V à son admission à l’établissement, mais il avait présumé que V était incapable de gérer ses biens à ce moment‑là. La CCC a annulé la décision du médecin voulant que V soit incapable de gérer ses biens et a condamné la tentative d’utiliser le TCP pour obliger V à se conformer au plan de congé[211].

La possibilité que ces examens soient utilisés pour contourner les exigences relatives aux évaluations de la capacité de gérer des biens de la LPDNA soulève également des préoccupations. Jude Bursten, une intervenante en faveur des patients du BIPEP, rapporte que certains médecins ont demandé que leurs patients soient admis à un établissement pour qu’ils puissent les contraindre à subir un examen de leur capacité de gérer leurs biens, et ce, après que ces patients ont exercé leur droit en vertu de la LPDNA de refuser une évaluation[212].

La façon dont cet aspect de la LSM crée un lien avec la LPDNA soulève des questions, surtout en ce qui concerne la transition du « malade » aux termes de la LSM à l’application de la LPDNA. Un malade qui n’a pas présenté de requête en révision de la prorogation du certificat d’incapacité avant sa mise en congé et qui souhaite ultérieurement une révision de la décision doit subir une nouvelle évaluation de sa capacité à ses frais. Selon Bursten, il s’agit d’une atteinte aux droits des patients, surtout dans le cas de ceux qui sont mis en congé dans la collectivité alors qu’ils sont absents de l’établissement avec autorisation. Souvent, rapporte Bursten, ces patients ne reçoivent pas de conseils en matière de droits ni d’avis écrit[213]. Ils ne connaissent pas toujours leur droit de contester l’évaluation et il se peut qu’ils en soient informés seulement à une date ultérieure. L’obligation de subir un nouvel examen de la capacité constitue également un obstacle financier particulièrement préoccupant étant donné le nombre disproportionné de personnes ayant des maladies mentales qui vivent dans la pauvreté ou qui sont touchées par le chômage.

Bursten fait aussi observer que l’interaction entre les deux lois peut s’avérer problématique pour les médecins traitants à l’extérieur des établissements psychiatriques qui n’ont pas l’obligation ni le pouvoir d’évaluer la capacité financière de leurs patients, ni d’annuler un certificat d’incapacité financière délivré antérieurement alors que le patient était en établissement psychiatrique[214].

Il y a également des lacunes législatives sur le plan de la capacité retrouvée. Alors que la LSM prévoit qu’un médecin puisse réexaminer la capacité d’un patient de gérer ses biens et exige un réexamen avant la mise en congé d’un patient, elle n’exige pas qu’un médecin réexamine un patient s’il a raison de croire que sa capacité a changé (bien que cela puisse être le but de permettre un réexamen, cela est laissé à la discrétion du médecin). Un patient n’a pas le droit de demander un réexamen et la loi n’exige pas que le médecin réexamine le patient tous les six mois pour correspondre au nombre de requêtes possibles devant la CCC. Cela signifie qu’un certificat d’incapacité peut demeurer valide alors que la capacité a changé. Si le patient a déjà présenté une requête en révision à la CCC au cours des six mois précédents, il ne dispose pas de moyens praticables pour contester le certificat.

 

3.     Évaluation de la capacité de prendre des décisions à l’égard d’un traitement

La partie II de la LCSS régit l’évaluation de la capacité de prendre des décisions à l’égard d’un traitement. La LCSS stipule qu’un traitement ne doit pas être administré sans le consentement du patient si ce dernier est capable de le donner ou sans l’accord d’un mandataire spécial si le patient a été jugé incapable de prendre la décision[215].

Enclencher la procédure d’évaluation. Si un praticien de la santé propose un traitement et qu’il a des motifs raisonnables de croire que le patient n’a pas la capacité juridique de prendre une décision à l’égard de ce traitement, la capacité juridique du patient doit être évaluée pour obtenir un consentement valide au traitement. Pour les patients qui ont la capacité juridique, le praticien de la santé doit obtenir leur consentement au traitement, à défaut de quoi celui du mandataire spécial. Cela doit se produire chaque fois qu’un traitement médical est proposé; la loi s’applique aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur d’un hôpital, d’un établissement de soins à longue durée ou dans un bureau de médecin.

Le praticien de la santé peut s’appuyer sur la présomption de capacité pour obtenir un consentement à l’égard d’un traitement, sauf s’il a des motifs raisonnables de croire que la personne concernée n’a pas la capacité juridique de prendre cette décision[216]. À la différence de la Loi de 1992 sur le consentement au traitement[217] qui a été abrogée, la LCSS et les lignes directrices connexes ne donnent pas d’indications sur ce qui constitue des motifs raisonnables de croire qu’une personne est incapable. 

L’évaluation visant à déterminer la capacité de prendre des décisions à l’égard d’un traitement est liée à la nature et au moment du traitement. La personne peut être capable à l’égard de certains traitements, mais incapable à l’égard d’autres traitements[218], ou capable à l’égard d’un traitement à un moment donné et incapable à un autre moment[219]. La loi établit un lien direct entre la capacité juridique et le traitement proposé, ce qui signifie qu’une nouvelle évaluation doit être effectuée si un nouveau traitement est proposé. La LCSS définit un « traitement » comme suit : « [s]’entend de tout ce qui est fait dans un but thérapeutique, préventif, palliatif, diagnostique ou esthétique, ou dans un autre but relié au domaine de la santé, y compris une série de traitements, un plan de traitement ou un plan de traitement en milieu communautaire »[220].

À qui incombe l’évaluation de la capacité. Comme les praticiens de la santé sont responsables d’obtenir le consentement à l’égard d’un traitement, ils sont également responsables d’évaluer la capacité de consentir à un traitement, s’il y a lieu. Un praticien de la santé est un membre d’un ordre professionnel en vertu de la Loi de 1991 sur les professions de la santé réglementées[221] ou de la réglementation afférente.

Conséquences de l’évaluation. Si une personne est jugée incapable de prendre une décision en matière de santé, un mandataire spécial est nommé pour prendre la décision en son nom. Pour ce faire, le mandataire spécial doit respecter certaines lignes directrices visant à faire en sorte qu’il prenne en compte les croyances de la personne et les volontés exprimées antérieurement lorsqu’elle était capable et qu’il agisse au mieux de ses intérêts[222].

Lignes directrices ou exigences en matière de formation. La LCSS et la réglementation ne prévoient pas de formation spécifique. Toutefois, chaque ordre professionnel définit les qualifications obligatoires requises pour en faire partie. Bien entendu, ces qualifications varient considérablement d’un ordre à l’autre. Prenons l’exemple de l’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario. Le Règlement de l’Ontario 865/93, pris en application de la Loi de 1991 sur les médecins, définit les exigences relatives à l’obtention d’un diplôme en médecine reconnu par l’Ordre. Aucune exigence spécifique relative à l’éthique, au consentement ou à la capacité n’y est définie[223]. Toutefois, la plupart des ordres de médecins ont adopté des lignes directrices ou préparé des publications qui mettent en lumière l’importance d’obtenir le consentement avant d’administrer un traitement[224].

Il y a aussi des cas où des praticiens de la santé reçoivent une formation de leurs employeurs, qui peut varier considérablement en fonction du milieu de travail et de l’employeur. Mentionnons le CCAC Client Services Manual[225], l’ouvrage du Dr E. Etchells intitulé Aid to Capacity Evaluation (ACE)[226], ainsi que la trousse préparée par le cabinet juridique Borden Ladner Gervais intitulée A Practical Guide to Mental Health and the Law in Ontario[227].

Les praticiens peuvent consulter également plusieurs publications produites par des organismes de défense de droits, dont le remarquable Tool on Capacity & Consent : Ontario Edition[228], un petit guide de l’Initiative nationale pour le soin des personnes âgées portant sur la capacité de consentir à un traitement.

Droits et recours des personnes évaluées. Une conclusion d’incapacité à consentir à un traitement doit être communiquée au patient. Si la personne se trouve en établissement psychiatrique, elle doit recevoir un avis écrit en vertu de la LSM[229]. La loi ne prévoit pas qu’un patient à l’extérieur d’un établissement psychiatrique a le droit à un avis écrit d’une constatation d’incapacité à consentir à un traitement. C’est l’ordre professionnel duquel relève le praticien de la santé qui régit la forme que doit prendre un avis et qui détermine si un patient doit être informé ou non de son droit de présenter une requête en révision à la CCC. En règle générale, les ordres exigent que le praticien de la santé informe la personne jugée incapable du nom de son mandataire spécial et des exigences relatives à la prise de décision au nom d’autrui (si elle est capable de comprendre cette information), ainsi que de son droit de présenter une requête en révision à la CCC.

Toute personne qui fait l’objet d’un traitement peut, par voie de requête, demander à la Commission de réviser la constatation d’un praticien de la santé selon laquelle elle est incapable à l’égard du traitement, sauf si elle a un tuteur à la personne qui a le pouvoir de donner ou de refuser son consentement au traitement, ou si elle a un procureur aux soins de la personne aux termes d’une procuration qui comporte une disposition selon laquelle la personne renonce à son droit de présenter une requête en révision[230]. Elle ne peut pas présenter de requête en révision d’une constatation d’incapacité concernant un traitement plus d’une fois par six mois, à moins de présenter une requête spéciale parce qu’il est survenu un changement important dans les circonstances qui justifie le réexamen de sa capacité[231]. Il y a également des cas où une personne est réputée avoir présenté une requête en révision d’une conclusion d’incapacité, comme une requête en nomination d’un représentant de la personne jugée incapable ou une requête visant l’interprétation des responsabilités décisionnelles d’un mandataire spécial. Une personne a le droit de présenter une requête à la CCC pour chaque évaluation spécifique, ce qui signifie qu’elle a le droit de présenter une requête en ce qui concerne la capacité de consentir à un nouveau traitement même si une requête concernant un autre traitement a été présentée dans les six mois précédents. Hiltz et Szigeti rapportent que, selon les statistiques, moins de 10 p. 100 des demandeurs ont été jugés aptes à consentir à un traitement après avoir présenté une requête en révision à la CCC[232].

La surveillance relève principalement des ordres professionnels qui assurent la surveillance de leurs membres, et le Conseil consultatif sur la réglementation des professions de la santé assure la surveillance des ordres professionnels. Les patients peuvent porter plainte auprès de l’ordre professionnel d’un praticien de la santé s’ils sont d’avis qu’il n’a pas suivi la procédure appropriée ou qu’il a abusé de son autorité.

 

Critiques et sujets de préoccupation

Des spécialistes ont soulevé plusieurs sujets de préoccupation à l’égard de la mise en œuvre de la loi. 

Un grand nombre de préoccupations émergent d’une incompréhension flagrante de la loi. Judith Wahl, du Advocacy Centre for the Elderly, relève plusieurs erreurs d’interprétation que commettent différents intervenants – professionnels de la santé, travailleurs communautaires, personnes âgées et leurs familles – qui présument que la notion de capacité englobe plus d’aspects que la loi n’a prévus. La première veut qu’une seule évaluation de la capacité puisse s’appliquer à de multiples décisions en matière de soins de santé[233]. La deuxième est liée aux praticiens de la santé qui présument qu’une procuration existante les autorise à ne consulter que l’avocat, pas le patient, ou à ne consulter personne et à suivre simplement les indications dans la procuration, renonçant à toute évaluation de la capacité et présumant de l’incapacité du patient à l’égard du traitement proposé. La troisième préoccupation est liée au fait que les « plans de traitement » sont rédigés en des termes très généraux pour obtenir facilement un consentement et renoncer de ce fait aux évaluations requises[234].

Des préoccupations particulières ont été exprimées à propos du fait que la présomption de capacité prévue par la loi n’est pas appliquée correctement. Des idées reçues sur les caractéristiques de certains groupes peuvent entraîner, dans la pratique, une présomption d’incapacité de personnes âgées, de personnes handicapées et de résidents en soins de longue durée[235]. Il peut aussi y avoir une présomption de fait que le consentement à un traitement indique la capacité, alors qu’un refus de traitement indique l’incapacité[236].

Certains spécialistes soutiennent que le processus d’évaluation de la capacité est en soi subjectif. Daniel J. Dochylo et Michel Silberfeld affirment que [traduction] « des évaluateurs qualifiés peuvent rendre des décisions contradictoires à propos de la capacité d’une personne » et que « des évaluateurs peuvent ne pas s’entendre sur la pertinence et l’importance de symptômes psychiatriques spécifiques relativement à des décisions particulières »[237].

Des préoccupations ont été soulevées à l’égard de la fourniture de renseignements adéquats sur les droits, qui touchent également d’autres mécanismes comme l’évaluation de la capacité d’une personne de prendre une décision concernant son admission à un établissement de soins de longue durée. L’Advocacy Centre for the Elderly écrit ceci :

[traduction] Malheureusement, un grand nombre de praticiens de la santé ne respectent pas les exigences minimales relatives à la fourniture de renseignements sur les droits : les résidents [en soins de longue durée] ne sont pas informés d’une conclusion d’incapacité, ni des droits prévus par la loi, ni des procédures mises en place pour les exercer. Les lignes directrices des différents ordres professionnels concernant les renseignements sur les droits posent aussi problème. Les praticiens de la santé pourraient être assujettis à des instances disciplinaires s’ils négligent de fournir ces renseignements. Toutefois, les lignes directrices des ordres professionnels n’assurent pas nécessairement que les patients disposent des renseignements nécessaires pour faire appliquer la loi. Aussi, il est douteux que les ordres fassent respecter cette exigence ou qu’ils imposent une sanction disciplinaire aux praticiens qui ne s’y conforment pas[238].

Il y a également plusieurs préoccupations à l’égard du processus de requête qui seront abordées dans le chapitre II de la partie Quatre qui porte sur les mécanismes de règlement des différends en vertu de la LCSS.

 

4.     Évaluation de la capacité de prendre des décisions à l’égard de l’admission à des soins de longue durée ou à des services d’aide personnelle

La LCSS institue une procédure d’évaluation spécifique pour des décisions concernant l’admission à un foyer de soins de longue durée (selon la définition de la Loi de 2007 sur les foyers de soins de longue durée) (partie III) et le consentement à des services d’aide personnelle (partie IV). La loi définit un « service d’aide personnelle » comme suit : « [s]’entend de l’aide fournie relativement à une activité courante de la vie, notamment les soins d’hygiène ou le fait de se laver, de s’habiller, de faire sa toilette, de manger, de boire, d’éliminer, de se déplacer ou de prendre une position, ou de la surveillance de l’activité. S’entend en outre d’un ensemble de services d’aide personnelle ou d’un programme énonçant les services d’aide personnelle qui doivent être fournis à une personne »[239].

Enclencher la procédure d’évaluation. L’évaluation de la capacité d’une personne de prendre une décision concernant son admission à un établissement de soins de longue durée est enclenchée lorsqu’un membre de sa famille ou un professionnel de la santé est d’avis qu’elle doit être admise en établissement et qu’elle n’a pas la capacité de prendre cette décision. Comme c’est le cas des décisions concernant un traitement, la capacité juridique n’est pas censée être associée au consentement ou au refus de la personne. Toutefois, une personne fait habituellement l’objet d’une évaluation lorsqu’elle n’est pas du même avis que sa famille ou qu’un praticien de la santé. Ces évaluations sont effectuées lorsque la personne vit au sein de la collectivité (chez elle, soit seule ou avec quelqu’un) ou lorsqu’elle se trouve en établissement de soins de courte durée. Souvent, la discussion à propos de soins de longue durée suit un incident comme une chute qui soulève des inquiétudes au sujet de son bien‑être dans son milieu de vie actuel. Dans la pratique, plusieurs processus de détermination de la capacité se déroulent souvent en même temps, comme l’évaluation de la capacité de prendre des décisions à l’égard de son admission et l’évaluation de la capacité de gérer ses biens afin d’assurer le financement des soins de longue durée[240]. En ce qui concerne un malade hospitalisé en établissement psychiatrique, la CCC a statué qu’une évaluation pourrait ne pas être nécessaire si le psychiatre traitant arrive à déterminer la capacité du malade à partir de ses contacts réguliers avec le malade et de son dossier médical[241].

À qui incombe l’évaluation de la capacité. À la différence des évaluations de la capacité concernant un traitement qui peuvent être effectuées par n’importe quel professionnel de la santé, les évaluations de la capacité de prendre des décisions à l’égard de l’admission à des soins sont effectuées par une catégorie spéciale de professionnels de la santé appelés « appréciateurs ». Ces appréciateurs de la capacité doivent être membres de l’un des ordres professionnels suivants : Ordre des audiologistes et des orthophonistes, Ordre des diététistes, Ordre des infirmières et infirmiers, Ordre des ergothérapeutes, Ordre des médecins et chirurgiens, Ordre des physiothérapeutes, Ordre des psychologues[242] et Ordre des travailleurs sociaux[243]. Ils ont été choisis pour effectuer des évaluations de la capacité de prendre des décisions à l’égard d’une admission à un établissement de soins de longue durée parce que ce sont eux qui sont les plus susceptibles de travailler avec une clientèle de personnes âgées, la tranche de la population ayant le plus souvent besoin d’évaluations de la capacité[244]. Jeffrey Cole et Noreen Dawe citent une étude rapportant que la plupart des évaluations étaient effectuées par des travailleurs sociaux qui considèrent que c’est l’aspect le plus difficile de leur travail[245]. De même, Alexandra Carling‑Rowland et Judith Wahl rapportent que la majorité des évaluations sont effectuées par des gestionnaires de cas des Centres d’accès aux soins communautaires (CASC) qui sont généralement des travailleurs sociaux ou des infirmières autorisées[246]. Ils rapportent de plus qu’une enquête auprès d’audiologistes et d’orthophonistes révèle que seulement 19 p. 100 d’entre eux savaient qu’ils étaient qualifiés pour effectuer des évaluations de la capacité de prendre des décisions à l’égard de l’admission, que 11 p. 100 avaient déjà effectué une évaluation de la capacité de concert avec un autre professionnel de la santé et que 6 p. 100 avaient effectué une évaluation tout seuls[247]. On ignore la fréquence des évaluations effectuées par les autres professionnels de la santé désignés comme appréciateurs. En revanche, si les chiffres correspondent à ceux donnés pour les audiologistes et les orthophonistes, il y a raison de s’inquiéter de la méconnaissance et du manque de formation de ces professionnels de la santé en matière d’évaluation de la capacité. Comme il est mentionné ci‑dessous, des efforts considérables ont été consentis dans certains secteurs pour proposer une formation des professionnels et établir des normes qui vont au‑delà des exigences de la loi : l’Ordre des audiologistes et des orthophonistes de l’Ontario a mis au point un module de formation sur le consentement et la capacité, et le Training Manual for Evaluators des CASC cité ci‑dessous en fournit un autre exemple.

Documentation. La LCSS et les règlements connexes ne fournissent aucun conseil sur la manière de procéder aux évaluations de la capacité. Il n’existe pas non plus de lignes directrices, d’orientations officielles, de documents de formation ou de formules obligatoires, ce qui contraste fortement avec les conseils détaillés à l’intention des évaluateurs de la capacité en vertu de la LPDNA, tels que décrits dans la section suivante. Il existe cependant une formule comportant cinq questions, connue comme le questionnaire de l’appréciateur. Son utilisation est si répandue qu’elle est devenue pratique courante[248]. L’appréciateur doit inscrire les réponses données aux questions et cocher la case correspondant à « capable », « incapable » ou « communication impossible », ainsi que les cases indiquant si la personne interrogée a été informée de la constatation d’incapacité, si elle a reçu une fiche d’information sur ses droits et si elle a l’intention ou non de présenter une requête en révision à la CCC. La formule comprend également un guide de deux pages à l’intention de l’appréciateur à qui il est recommandé d’informer le client de l’objet de l’évaluation et des conséquences d’une constatation d’incapacité. Le guide fournit quelques exemples de questions additionnelles à poser et énumère les responsabilités de l’appréciateur à la suite de l’évaluation. La CCC et les tribunaux ont statué à plusieurs reprises que le fait de poser les cinq questions figurant sur la formule et de consigner les réponses ne constitue pas une évaluation correcte de la capacité[249].

Conséquences de l’évaluation. Lorsqu’une personne est jugée incapable de prendre des décisions à l’égard de son admission à des soins de longue durée ou à des services d’aide personnelle, ces décisions sont prises par un mandataire spécial qui suit la même procédure que pour les décisions concernant un traitement.

Lignes directrices et exigences en matière de formation. Les professionnels de la santé énumérés ci‑dessus sont des appréciateurs de l’évaluation de la capacité en vertu du fait qu’ils sont membres d’un ordre professionnel. Ils ne sont pas tenus de suivre une formation spécialisée en évaluation de la capacité, mais dans les faits, il y en a qui le font, même si la loi ne l’exige pas. Judith Wahl fait l’observation suivante :

[traduction] Les appréciateurs ne reçoivent aucune formation spécifique en évaluation de la capacité. Ils ont le pouvoir d’évaluer la capacité d’une personne à l’égard de son admission à des soins de longue durée en vertu du fait qu’ils sont membres d’un des ordres professionnels énumérés dans la définition d’appréciateur de la loi[250].

Cole et Dawe rapportent que les travailleurs sociaux, dont l’étude qu’ils ont citée fait mention, étaient d’avis qu’ils ne disposaient pas de la formation et de la surveillance nécessaires pour effectuer des évaluations de la capacité à prendre des décisions à l’égard de l’admission à des soins[251].

En plus de la formule du ministère, il existe de nombreux guides qui fournissent des conseils à l’intention des personnes qui effectuent des évaluations à cette fin, mais les appréciateurs ne sont pas tenus de les utiliser puisqu’aucun de ces guides n’est mentionné dans la loi. Il n’est pas clair non plus si ces guides recueillent une large adhésion, ni s’ils sont largement distribués. Le guide intitulé Assessing Capacity for Admission to Long‑Term Care Homes: A Training Manual for Evaluators, préparé pour les CASC, est le plus complet[252]. Il y a également des outils spécialisés comme le Practical Guide to Capacity and Consent Law of Ontario for Health Practitioners Working with People with Alzheimer Disease élaboré par le Dementia Network of Ottawa[253] et le Communication Aid to Capacity Evaluation (CACE) développé par Alexandra Carling‑Rowland[254].

Comme c’est le cas des évaluations de la capacité concernant un traitement, la surveillance des appréciateurs est effectuée par les ordres professionnels réglementés de la santé. Les articles  47.1 et 62.1 de la LCSS stipulent que les appréciateurs, tout comme les praticiens de la santé traitants, doivent respecter les lignes directrices adoptées par le corps dirigeant de leur profession concernant les renseignements sur les conséquences d’une constatation d’incapacité qu’ils sont tenus de communiquer aux personnes évaluées.

Droits et recours des personnes évaluées. Une personne qui fait l’objet d’une évaluation de sa capacité à l’égard de son admission à des soins a les mêmes droits que dans le cas d’une évaluation de sa capacité à l’égard d’un traitement. Dans le contexte des décisions à l’égard de l’admission à des soins, la loi ne prévoit pas de droit d’être informé du but de l’évaluation, de refuser l’évaluation ou d’exiger la présence d’un avocat ou d’un ami, ni d’être informé de ces droits avant l’évaluation. Toutefois, la formule d’évaluation standard comprend une fiche de renseignements qu’il faut remettre aux personnes qui sont jugées incapables, ainsi que des cases que doit cocher l’appréciateur pour indiquer que la personne a été informée de la constatation d’incapacité et de son droit de présenter une requête en révision à la CCC[255].

Bien qu’il n’y ait pas de droits clairement définis dans la LCSS, les personnes faisant l’objet d’une évaluation de la capacité pourraient bénéficier de certains droits procéduraux basés sur la notion de justice naturelle de la common law[256]. Par exemple, dans la décision Saunders v. Bridgepoint Hospital, J. Spies a fait la remarque incidente suivante :

[traduction] La LCSS n’a pas de disposition comparable à celle prévue dans l’article 78 de la LPDNA. En ce qui concerne le droit de refuser une évaluation, il me semble qu’il s’agit d’une question qui dépasse la portée des règles de l’équité procédurale et qu’elle n’est susceptible de contrôle judiciaire que dans le cadre d’une contestation constitutionnelle. Je suis d’avis toutefois, par souci d’équité procédurale, qu’un patient doit être informé du fait qu’une évaluation de la capacité à des fins d’admission en établissement de soins sera entreprise, du but de l’évaluation et de l’importance et des conséquences d’une constatation de capacité ou d’incapacité. Étant donné les enjeux pour le patient, il me semble qu’il s’agit d’une exigence minimale d’équité procédurale. De plus, cela fera en sorte que l’information recueillie auprès du patient, sur laquelle repose l’évaluation, soit fiable[257].

Une personne peut présenter une requête en révision d’une constatation d’incapacité à consentir à son admission à des soins de longue durée ou à des services d’aide personnelle, sauf si elle a un tuteur à la personne qui a le pouvoir de donner ou de refuser son consentement ou un procureur au soin de la personne aux termes d’une procuration comportant une disposition selon laquelle la personne renonce à son droit de présenter une requête en révision[258]. Dans le cas d’une personne voulant présenter une requête en révision d’une constatation d’incapacité à l’égard de son admission après l’admission, la CCC n’a pas la compétence d’entendre une requête contestant le respect par le mandataire spécial des exigences de la LPDNA en vertu du paragraphe 54(1). Toutefois, la CCC a décidé qu’elle examinera une telle décision par voie de requête en vue d’obtenir des directives conformément au paragraphe 52(1)[259].

 

Critiques et sujets de préoccupation

Au cours des consultations préliminaires de la CDO, c’est cette forme d’évaluation de la capacité qui a soulevé les préoccupations les plus sérieuses, surtout en ce qui concerne l’admission à des soins de longue durée. Ces évaluations sont réalisées au moment même où les établissements et les systèmes (soins de santé, soins de longue durée, soins à domicile) et les réseaux de soutien informel comme la famille et les amis sont mis à dure épreuve et, souvent, où la personne en question se trouve en situation de vulnérabilité – par exemple, une personne qui se rétablit d’une maladie ayant entraîné une hospitalisation. Les conséquences d’une détermination erronée de la capacité dans ce domaine seront sans doute décisives pour l’avenir et marqueront profondément la personne et sa famille. Bien que l’admission à des soins de longue durée puisse s’avérer nécessaire et contribuer à améliorer la santé et le bien‑être de la personne concernée, la plupart des gens qui se trouvent dans une telle situation préféreraient demeurer au sein de leur collectivité dans la mesure du possible.

L’analyse ci‑dessus met en évidence certaines des questions clés qui se posent. La possibilité que la formule à cinq questions soit utilisée de façon abusive soulève de grandes préoccupations. Au lieu de l’utiliser comme point de départ, les appréciateurs peuvent se limiter aux cinq questions et manquer d’« approfondir et vérifier » ou de prendre en compte des facteurs qui pourraient influer sur l’évaluation (comme le stress, les difficultés à communiquer ou les différences culturelles)[260]. En se penchant sur les préoccupations particulières des personnes ayant des troubles de communication, Carling‑Rowland et Wahl se sont dits inquiets que la probabilité soit plus grande que ces personnes soient jugées incapables, surtout parce que la formule n’a pas été conçue pour prendre en compte les obstacles à la communication. Cette situation est particulièrement inquiétante étant donné la grande diversité de praticiens qui peuvent effectuer des évaluations et l’absence de formation obligatoire[261].

Même si une constatation d’incapacité à prendre des décisions à l’égard de l’admission à des soins ne donne pas lieu à une mise en tutelle ou à une perte semblable d’autonomie décisionnelle, les conséquences peuvent s’avérer décisives pour l’avenir et revêtir un caractère permanent. Malgré cela, l’accès des personnes concernées à des mesures de soutien et à des renseignements relatifs à ce processus demeure relativement limité.

De plus, le fait que les protections actuelles soient mal appliquées soulève également des préoccupations. L’Advocacy Centre for the Elderly a exprimé des préoccupations semblables à celles qu’il avait manifestées à l’égard de la capacité à consentir à un traitement :

[traduction] La Loi de 1996 sur le consentement aux soins de santé […] n’exige pas spécifiquement que des évaluateurs, une catégorie précise de praticiens de la santé, fournissent des renseignements sur les droits aux personnes qui sont jugées incapables de consentir à leur admission à un établissement de santé. Dans la pratique, la plupart des évaluateurs remettent une fiche de renseignements sur les droits aux personnes jugées incapables, même si l’information peut s’avérer floue et trompeuse. Il n’y a aucune garantie que la personne concernée reçoive le soutien de l’évaluateur pour obtenir de l’aide juridique ou communiquer avec la CCC afin de présenter une requête en révision de la constatation d’incapacité.

Selon les statistiques fournies par la CCC, il y a eu seulement 61 audiences en 2007 et 81 en 2008 suivant des requêtes en révision de constatations d’incapacité à l’égard d’une admission à des soins de longue durée. Étant donné qu’il y a environ 76 000 résidents en soins de longue durée dans la province et un si petit nombre de requêtes, nous sommes portés à avancer l’hypothèse que beaucoup de personnes âgées ne sont pas renseignées sur leurs droits[262].

 

5.     Évaluation de la capacité de prendre des décisions pour gérer ses biens ou prendre soin de sa personne

Les examens de la capacité de gérer ses biens à l’admission en établissement psychiatrique en vertu de la LSM ont été analysés ci‑dessus. Toutes les autres évaluations de la capacité juridique de gérer des biens sont régies par la LPDNA, tout comme la capacité de prendre soin de sa personne, incluant des décisions concernant les soins de santé, l’habillement, l’alimentation, le logement, l’hygiène et la sécurité.

Enclencher la procédure d’évaluation. L’évaluation de la capacité de gérer ses biens ou de prendre soin de sa personne peut être enclenchée de différentes manières et pour différentes raisons. L’évaluation peut être effectuée aux fins suivantes :

  1. enclencher un processus de mise en tutelle légale aux biens à la demande de la personne à évaluer ou par une autre personne[263];
  2. permettre l’entrée en vigueur d’une procuration relative aux biens ou au soin de la personne, qui est subordonnée à une constatation d’incapacité;
  3. contester ou faire annuler une constatation d’incapacité (par exemple, lorsqu’une personne estime que sa situation a changé et qu’elle veut contester une tutelle sous régime législatif ou d’origine judiciaire);
  4. fournir des preuves pour une requête en tutelle d’origine judiciaire;
  5. se conformer à une ordonnance du tribunal[264].

À qui incombe l’évaluation de la capacité? Seul un évaluateur de la capacité qualifié peut effectuer des évaluations de la capacité en vertu de la LPDNA[265]. Pour exercer la fonction d’évaluateur, il faut être membre de l’un des ordres professionnels suivants : l’Ordre des médecins et chirurgiens, l’Ordre des psychologues, l’Ordre des ergothérapeutes et l’Ordre des travailleurs sociaux (et être titulaire d’un certificat d’inscription) ou l’Ordre des infirmières et infirmiers (et être titulaire d’un certificat d’inscription)[266]. Les évaluateurs doivent satisfaire aux exigences en matière de formation dont les grandes lignes sont exposées ci‑dessous. Le Bureau de l’évaluation de la capacité du ministère de la Procureure générale tient à jour une liste des évaluateurs de la capacité agréés.

Conséquences de l’évaluation. Les évaluations de la capacité de gérer ses biens ou de prendre soin de sa personne en vertu de la LPDNA peuvent donner lieu à une foule de conséquences pour la personne concernée, allant de l’absence de conséquences juridiques à l’enclenchement d’un processus de mise en tutelle légale qui constitue la forme de prise de décisions au nom d’autrui la plus restrictive de son autonomie.

À la suite d’une constatation d’incapacité d’une personne à gérer ses biens, l’évaluateur doit informer le TCP qui devient immédiatement le tuteur aux biens de cette personne à moins qu’il existe déjà un tuteur légal aux biens ou qu’un avocat détienne une procuration perpétuelle qui lui confère un pouvoir de gestion sur toutes les affaires financières de cette personne. L’une ou l’autre des personnes suivantes peut demander au TCP à le remplacer en qualité de tuteur légal aux biens de l’incapable : le conjoint ou le partenaire de l’incapable, un parent de l’incapable, un avocat en vertu d’une procuration perpétuelle de l’incapable qui ne confère pas au procureur de pouvoir sur tous les biens de l’incapable, ou une société de fiducie si l’incapable a un conjoint ou un partenaire qui consent par écrit à la demande[267]. Une requête visant à devenir tuteur par nomination judiciaire ne comporte pas les mêmes restrictions sur la personne qui peut être nommée. Toutefois, la cour examinera le fait que le tuteur proposé est ou non le procureur constitué en vertu d’une procuration perpétuelle, les volontés de l’incapable si elles peuvent être établies, ainsi que le caractère étroit des rapports entre le requérant et l’incapable[268].

Une évaluation de la capacité de prendre soin de sa personne ne sert qu’à permettre l’entrée en vigueur d’une procuration au soin de la personne ou à fournir des preuves pour une requête en tutelle à la personne d’origine judiciaire[269].

Lignes directrices et exigences en matière de formation. La personne a les qualités requises pour faire des évaluations de la capacité si elle remplit les exigences en matière de formation et si elle demeure qualifiée. Cela comprend la réussite du cours de qualification approuvé par la Procureure générale, qui comprend une formation sur la LPDNA, sur les meilleures méthodes à suivre pour remplir les formules et établir les rapports requis par la loi, sur les normes relatives à l’exécution des évaluations de capacité, et sur les procédures établies pour déterminer si une personne a besoin que quelqu’un prenne des décisions en son nom. Elle doit subir une évaluation pour déterminer si elle maîtrise bien le contenu de la formation qu’elle a reçue[270]. Elle est également tenue de réussir un cours de formation continue tous les deux ans[271].

En plus de réussir un cours de formation continue, l’évaluateur de la capacité doit présenter au Bureau de l’évaluation de la capacité, aux fins d’examen et d’observation, au moins deux Déclarations de l’évaluateur récentes (les renseignements personnels sont supprimés) tous les deux ans[272] et il doit faire au moins cinq évaluations pendant chaque période de deux ans afin de demeurer qualifié pour faire des évaluations de la capacité[273].

L’évaluateur de la capacité est tenu de se conformer aux Lignes directrices en matière d’évaluations de la capacité[274] établies par la Procureure générale[275], qui ont pour but d’établir un protocole d’évaluation standardisé visant à éviter les évaluations incohérentes et partiales. L’inobservation des lignes directrices prescrites peut donner lieu à une plainte portée devant l’ordre professionnel réglementé dont l’évaluateur est membre[276]. Les lignes directrices définissent les principes fondamentaux sur lesquels doivent reposer les évaluations de la capacité, comme le droit de disposer de soi‑même et la présomption de capacité; elles exposent dans les grandes lignes la base conceptuelle des évaluations de la capacité, elles expliquent en détail le critère de détermination de la capacité et elles présentent un processus d’évaluation de la capacité en cinq étapes.

Droits et recours des personnes évaluées. La LPDNA définit les droits procéduraux des personnes faisant l’objet d’une évaluation de la capacité[277] :

  1. le droit de refuser de subir une évaluation sauf si l’évaluation a été ordonnée par le tribunal ou prévue dans une disposition spéciale d’une procuration relative au soin de la personne[278];
  2. le droit d’être informée du but de l’évaluation ainsi que de l’importance et des conséquences d’une constatation de capacité ou d’incapacité[279];
  3. le droit d’être avisée par écrit des constatations de l’évaluateur; dans un cas de tutelle légale aux biens de la personne, la loi exige qu’une copie du certificat d’incapacité soit remise à l’incapable[280];
  4. lorsqu’une demande d’évaluation de la capacité pour déterminer si le TCP devrait devenir tuteur légal aux biens conclut à une incapacité, le TCP, à la réception du certificat d’incapacité, doit informer la personne concernée du fait que le TCP est devenu son tuteur légal aux biens et de son droit de demander, par voie de requête à la CCC, une révision de la constatation de l’évaluateur selon laquelle elle est incapable de gérer ses biens[281];
  5. une personne dont les biens font l’objet d’une tutelle légale peut présenter à la CCC une requête en révision d’une constatation d’incapacité dans les six mois qui suivent la constatation d’incapacité[282].

 

Critiques et sujets de préoccupation

Les évaluations de la capacité de prendre des décisions concernant ses biens ou sa personne qui sont entreprises en vertu de la LPDNA s’appuient sur une documentation importante. La dynamique de ces évaluations est fortement influencée par leur potentiel de déboucher sur des solutions à long terme, comme l’entrée en vigueur de procurations ou la nomination d’un tuteur comportant toutes les deux l’accès aux finances de la personne concernée ou le contrôle de sa vie personnelle.

Puisqu’il y a des coûts associés aux évaluations en vertu de la LPDNA, des problèmes d’accessibilité peuvent se poser. Le Bureau de l’évaluation de la capacité dispose de fonds, quoique limités, pour aider les personnes qui n’ont pas les moyens de payer une évaluation ou une réévaluation de la capacité, mais les coûts peuvent avoir un effet dissuasif. D’autres problèmes d’accessibilité peuvent également se poser, par exemple, dans des collectivités éloignées ou pour des personnes issues de minorités linguistiques ou culturelles. Le Bureau de l’évaluation de la capacité ne vise pas à faire en sorte que des évaluateurs soient disponibles dans toutes les régions de l’Ontario, mais il aide les familles à trouver un évaluateur possédant les compétences linguistiques nécessaires.

Les tentatives d’utiliser une évaluation de la capacité pour exercer un contrôle sur une autre personne ou pour résoudre des conflits familiaux sont un sujet de préoccupation majeure. Une évaluation de la capacité en vertu de la LPDNA peut aboutir au transfert du contrôle à long terme d’une personne ou de ses biens, ouvrant la porte à des abus. Bien que la LPDNA prévoie qu’une personne peut demander l’évaluation de sa propre capacité (ou de celle d’une autre personne), Verma et Silberfeld  rapportent que [traduction] « les gens se soumettent rarement eux‑mêmes à une évaluation »[283]. Le plus souvent, c’est un membre de la famille ou un avocat représentant un membre de la famille qui présente une demande d’évaluation. Bien qu’il soit probable dans la plupart des cas que le membre de la famille soit sincèrement préoccupé du bien‑être de la personne visée par la demande, il est aussi possible qu’il cherche à profiter personnellement d’une constatation d’incapacité juridique ou qu’il cherche à tirer parti de l’évaluation dans le contexte d’une rivalité entre membres d’une même famille[284]. De même, Silberfeld et autres ont décelé des conflits d’intérêts potentiels dans le contexte de demandes de réévaluation visant à redonner la capacité, laissant entendre qu’un tiers qui n’est pas un mandataire spécial de la personne visée pourrait exercer des pressions sur elle pour qu’elle demande une évaluation de manière à ce que le tiers puisse s’emparer à titre officieux du pouvoir décisionnel[285]. La possibilité que de telles situations se produisent est reconnue dans la jurisprudence[286]. C’est à l’évaluateur que revient la charge de discerner les intentions potentiellement contraires et la possibilité de vils intérêts[287].

La possibilité qu’une évaluation de la capacité en vertu de la LPDNA soit enclenchée inutilement est un autre sujet de préoccupation : un membre de la famille d’une personne vulnérable peut enclencher inutilement le processus d’évaluation et de tutelle parce qu’il ne connaît pas d’autres moyens de protéger cette personne d’un préjudice imaginaire ou réel. Il n’est peut‑être pas informé d’autres options non juridiques ou peut‑être que la cohésion familiale n’est pas assez forte pour qu’elles soient envisagées. Les membres de la famille peuvent se sentir désemparés devant l’absence d’information ou d’options disponibles pour faire face à la situation dans laquelle ils se retrouvent, surtout s’ils ne peuvent pas consulter un avocat. La procédure d’évaluation de la capacité en vertu de la LPDNA peut s’avérer relativement facile à enclencher pour les personnes qui en ont les moyens, même s’ils n’en saisissent pas toutes les conséquences.

La procédure d’évaluation de la capacité en vertu de la LPDNA comporte le système de formation et de surveillance le plus approfondi de tous les mécanismes de l’Ontario utilisés à cette fin, ce qui illustre l’importance des conséquences d’une constatation d’incapacité de gérer ses biens ou de prendre soin de sa personne. D’ailleurs, comme nous l’avons mentionné plus haut dans le présent chapitre, les exigences en matière de formation et de surveillance, ainsi que les lignes directrices détaillées à l’intention des évaluateurs, sont remarquables en comparaison de celles de la plupart des autres provinces. Néanmoins, on se dit préoccupé que ces exigences ne soient pas assez contraignantes.

 

6.     Évaluation de la capacité d’établir une procuration

Pour établir une procuration, il faut satisfaire au critère juridique de détermination de la capacité. Comme nous l’avons vu au chapitre I de la partie Deux, la LPDNA définit des critères spécifiques de détermination de la capacité d’établir une procuration relative aux biens ou au soin de la personne, le critère pour la seconde étant plus exigeant que celui pour la première.

Enclencher la procédure d’évaluation. Bien que la LPDNA n’établisse pas de présomption de capacité pour établir une procuration, elle stipule qu’une personne âgée de 18 ans ou plus est présumée capable de conclure un contrat[288] et qu’une personne âgée de 16 ans ou plus est présumée capable de donner ou de refuser son consentement relativement au soin de sa personne[289]. La loi prévoit également qu’une personne (comme un avocat chargé de préparer une procuration) peut se fier à la présomption de capacité d’une autre personne à moins qu’elle n’ait des motifs raisonnables de croire qu’elle est incapable de conclure le contrat ou de donner ou refuser son consentement, selon le cas[290].

La loi n’exige donc pas qu’une personne subisse une évaluation de la capacité pour établir une procuration, à moins qu’elle veuille établir une procuration au soin personnel comportant des clauses de circonstances exceptionnelles[291]. Toutefois, certains avocats exigent que les personnes âgées ou celles qui semblent avoir une déficience mentale subissent une évaluation de la capacité. Au cours des consultations préliminaires de la CDO, de nombreux évaluateurs consultés ont indiqué que ce genre d’évaluation non législative représentait une partie importante de leur travail.

À qui incombe l’évaluation de la capacité. À quelques rares exceptions, une évaluation de la capacité n’est pas requise pour établir une procuration. Si la capacité est mise en cause, c’est un juge qui en est l’ultime arbitre et il admet en preuve les résultats d’évaluations. Donc, les compétences professionnelles ne constituent que l’un des aspects qu’un avocat examinera pour obtenir une évaluation de la capacité d’un client d’établir une procuration. Cohen et Shulman soulignent que la compétence d’un évaluateur influera sur le poids qui sera conféré à son avis dans une bataille juridique éventuelle à une date ultérieure. Un avocat fera donc appel vraisemblablement à clinicien qu’il connaît, qui possède une expérience et des connaissances en la matière, qui est un témoin expert crédible et dont la liste de références est impressionnante[292].

Exigences relatives à l’évaluation de la capacité. Ces évaluations ne sont pas soumises à des exigences législatives spécifiques. Comme beaucoup sont effectuées par des personnes qui sont également des évaluateurs de la capacité de gérer ses biens en vertu de la LPDNA, les Lignes directrices du ministère de la Procureure générale peuvent s’appliquer dans la pratique.

Droits et recours des personnes évaluées. En règle générale, une évaluation de la capacité d’établir une procuration est effectuée à la demande de la personne faisant l’objet de l’évaluation et, habituellement, lorsqu’elle est sûre d’être considérée comme capable. Toutefois, une constatation d’incapacité d’établir une procuration ne peut pas être révisée par la CCC[293]. Comme ces évaluations n’ont pas de portée juridique, sauf l’interprétation probable que pourrait en faire la cour, une personne dans cette situation aurait comme seul recours de contester l’évaluation devant les tribunaux, et ce, uniquement dans le cadre d’une procédure où l’évaluation est citée en preuve, c’est‑à‑dire qu’elle ne pourrait pas tout simplement demander à la cour d’invalider ou de renverser la constatation d’incapacité.

Dans l’affaire Knox c. Burton[294], Mme Knox souhaitait établir une nouvelle procuration aux biens en faveur de son neveu et révoquer la procuration existante en faveur de son fils. Un évaluateur a déterminé qu’elle était incapable d’établir une procuration relative aux biens. Elle a été évaluée par la suite par deux autres évaluateurs qui l’ont tous les deux jugée capable d’établir une procuration relative aux biens. Son fils a contesté la nouvelle procuration et la cour a estimé que les trois évaluations avaient reconnu que la capacité peut fluctuer, et elle a confirmé la validité de la procuration.

 

Critiques et sujets de préoccupation

Des doutes ont été exprimés quant à la nécessité d’une évaluation formelle de la capacité pour établir une procuration. Par exemple, Judith Wahl doute que ces évaluations permettent vraiment de déterminer la capacité et elle laisse entendre que des preuves par affidavit fournies par des personnes qui connaissent la personne et l’ont observée dans son quotidien apporteraient de meilleures preuves de capacité[295]. De même, Spar et Garb soutiennent que les évaluations ponctuelles ne sont pas très utiles à la cour puisqu’elle peut généralement se faire une idée par inférence de la capacité juridique d’une personne en consultant ses dossiers médicaux, ses documents financiers, son dossier professionnel, ses écrits de testateur (comme un journal ou des lettres) au moment de l’établissement de la procuration, ainsi que les renseignements fournis par ses amis, des membres de sa famille, ses associés et des prestataires de services[296]. Tout au plus, une évaluation ponctuelle de la capacité fournit une preuve que la cour peut prendre en considération lors d’une contestation de la validité d’une procuration. Dans ce contexte, une évaluation de la capacité ne peut pas en soi établir la preuve de la capacité. 

Un deuxième sujet de préoccupation, c’est qu’on ne sait pas très bien à qui appartient l’évaluation, ni pour qui elle est effectuée : l’avocat ou la personne qui en fait l’objet? Dans ce contexte, une évaluation doit répondre à des objectifs multiples, à savoir donner une évaluation objective de la capacité de la personne visée d’établir une procuration, créer un document qui servira de preuve utile en cas de contestation de la procuration, et convaincre l’avocat qu’il peut entreprendre la préparation des documents. Olders pose la question suivante : [traduction] « En quoi l’évaluateur est‑il redevable à l’avocat? Ce dernier pourrait exercer des pressions sur l’évaluateur pour qu’il participe à un processus contradictoire, alors que l’évaluateur, sollicité pour son expertise, peut se croire tenu à l’impartialité »[297].

Comme c’est le cas des évaluations de la capacité de gérer ses biens ou de prendre soin de sa personne, les coûts d’une évaluation de la capacité d’établir une procuration peuvent s’avérer prohibitifs pour certaines personnes et constituer un obstacle pour les personnes âgées ou handicapées et leur empêcher l’accès à des outils juridiques importants comme la procuration, surtout si on est attentif au fait que les personnes âgées vivent souvent avec des revenus fixes et qu’un nombre disproportionné de jeunes atteints d’un handicap vivent dans la pauvreté.

 

D.   Thèmes généraux et sujets de préoccupation

La ou les conceptions ontariennes à l’égard de l’évaluation de la capacité sont le fruit d’une réforme en profondeur du droit entreprise à la fin des années 1980 et au début des années 1990. Elles préconisent des solutions relativement avancées pour résoudre les problèmes inhérents à la mise en place de procédures et de normes d’évaluation de la capacité. Près de deux décennies de mise en pratique des mécanismes utilisés actuellement pour évaluer la capacité font apparaître des tensions et des préoccupations à l’égard des démarches employées. Certains de ces problèmes sont symptomatiques des difficultés inhérentes à la conception de procédures d’évaluation de la capacité. Des questions comme les qualités requises et les exigences nécessaires pour effectuer des évaluations de la capacité, les réponses à apporter aux fluctuations de la capacité, et l’importance de trouver un point d’équilibre entre les protections procédurales sont fondamentales et, bien que des améliorations soient possibles, il n’y a probablement pas de solution idéale. D’autres problèmes se posent dans plusieurs domaines du droit comme l’ont démontré les travaux de recherche effectués en vue des deux projets-cadres, et ils sont une préoccupation constante pour ces personnes en matière de droit.

1.     Questions concernant spécifiquement les mécanismes d’évaluation de la capacité

Diversité et harmonisation des multiples conceptions de l’évaluation de la capacité

Bien que les systèmes d’évaluation de la capacité de l’Ontario reposent tous sur les mêmes notions sous‑jacentes de capacité, leur examen à la lumière de la LPDNA, de la LCSS et de la LSM fait ressortir la diversité des procédures d’évaluation de la capacité tant dans le droit ontarien que dans la pratique. Certains systèmes, comme l’évaluation de la capacité à l’égard du traitement, sont quelque peu informels, alors que d’autres, comme la capacité de gérer ses biens en vertu de la LPDNA, sont dotés de mécanismes plutôt formels. Certaines évaluations visent la prise de décisions spécifiques (comme à l’égard d’un traitement), alors que d’autres visent des domaines décisionnels. Certains systèmes comportent des protections procédurales et des mesures de soutien assez complètes, comme des conseillers en matière de droits en vertu de la LSM, alors que d’autres, comme ceux liés à l’évaluation de la capacité de gérer ses biens en vertu de la LPDNA, reposent sur ce que l’on pourrait qualifier de « modèle de consommation » et comportent un droit de refus. Les évaluations de la capacité de gérer ses biens ou de prendre soin de sa personne en vertu de la LPDNA sont assujetties à des normes et à des lignes directrices assez détaillées, alors que d’autres procédures reposent sur des méthodes exemplaires et des normes volontaires ou propres aux établissements; les évaluations de la capacité de gérer ses biens en vertu de la LSM reposent sur le jugement d’un expert.

Ces différences reflètent dans une certaine mesure la diversité des contextes et des conséquences des différents types d’évaluation, ce qu’a recommandé l’Enquête Weisstub[298]. Bien que les systèmes d’évaluation de la capacité de l’Ontario reposent tous sur la même notion sous‑jacente de capacité, ils l’appliquent différemment suivant les circonstances et les décisions à prendre. Il vaut la peine de se demander s’il serait possible de simplifier ou de conjuguer les différents systèmes, tout en demeurant attentif au contexte. Par exemple, serait‑il utile d’harmoniser la formation et les protocoles des différents mécanismes? La Commission de réforme du droit de l’État du Victoria a recommandé que les procédures d’évaluation de la capacité reposent sur des principes clairs « qui doivent guider quiconque est appelé – y compris des cliniciens, des magistrats ou des tuteurs nommés par procuration perpétuelle – à déterminer la capacité d’une personne d’entreprendre une activité donnée » [c’est nous qui soulignons][299]. La Mental Capacity Act 2005 qui s’applique en Angleterre et au Pays de Galles vise à mettre en œuvre une démarche commune de l’évaluation de la capacité. Cette loi régit les procurations, les directives préalables, les évaluations de la capacité de prendre des décisions ponctuelles concernant la santé, le bien‑être personnel, les finances ou les biens, ainsi que les nominations de mandataires pour répondre aux besoins courants touchant la prise de décision, et elle impose un ensemble de méthodes d’usage normal au moyen d’un code de pratique rédigé en langage clair[300].

 

  • QUESTION À ABORDER : l’Ontario pourrait‑il tirer profit d’une harmonisation et d’une simplification plus poussées et d’une coordination accrue de ses différents systèmes d’évaluation de la capacité? Si oui, que pourrait-on proposer précisément pour ce faire?

 

À qui incombe l’évaluation de la capacité?

En comparaison avec d’autres provinces, l’Ontario a opté pour une conception de l’évaluation de la capacité grandement professionnalisée et formalisée. Exception faite des évaluations visant à établir une procuration, celles qui sont prévues par la loi sont effectuées par des personnes exerçant une profession réglementée. Chose intéressante, au cours des consultations préliminaires de la CDO, plusieurs évaluateurs désignés ont affirmé que les évaluations de la capacité d’établir une procuration ou de faire un testament représentaient une partie importante et grandissante de leur charge de travail, ce qui met en évidence une tendance à la professionnalisation même dans les cas où l’évaluation de la capacité n’est pas requise par la loi. 

D’ailleurs, le sujet de préoccupation le plus souvent soulevé dans le cadre des consultations de la CDO sur l’évaluation de la capacité en Ontario a trait à l’insuffisance de spécialisations et de cadres formels. Les préoccupations exprimées ont touché l’absence de programmes de formation spécialisée obligatoire à l’intention des évaluateurs, la méconnaissance de la notion de capacité et des critères de détermination de la capacité dont font preuve les praticiens de la santé chargés de l’évaluation de la capacité de consentir à un traitement, les exigences de formation insuffisantes pour les évaluateurs désignés, ainsi que le besoin de lignes directrices obligatoires spécifiques pour les personnes chargées d’évaluer la capacité et qui ne sont pas assujetties actuellement aux Lignes directrices en matière d’évaluations de la capacité du ministère de la Procureure générale.

Parmi les questions qui devraient être examinées plus à fond, mentionnons les compétences et la formation nécessaires pour les différentes catégories d’évaluateurs de la capacité en matière de diversité, y compris le savoir‑faire culturel et la connaissance de la dynamique liée à l’appartenance raciale, à l’orientation sexuelle et à d’autres aspects de l’identité. Aussi, comme c’est le cas pour d’autres sujets de préoccupation ayant trait à la prestation de services et aux recours juridiques dans une province aussi populeuse que l’Ontario, la question de l’accès en temps opportun à des professionnels et à des services compétents posera un défi plus important dans les régions rurales et éloignées, dimension qu’il faut prendre en compte dans la formulation de recommandations relatives à la réforme du droit.

 

  • QUESTION À ABORDER : qui doit effectuer les différents types d’évaluation de la capacité requis? Quelle formation est nécessaire? Comment doit-elle être dispensée?

 

Souplesse et réévaluation

La question de la réévaluation concerne surtout les dispositions relatives à l’examen pour établir la capacité prévues par la LSM et celles relatives à l’évaluation de la capacité de gérer ses biens ou de prendre soin de sa personne prévues par la LPDNA, puisque, à long terme, elles pourraient conduire à une mise en tutelle ou à l’entrée en vigueur de procurations. En vertu de la LSM, un médecin peut procéder à un nouvel examen n’importe quand et il doit réexaminer un malade avant sa mise en congé. Cependant, pour un malade qui séjourne longuement en établissement psychiatrique, l’intervalle de temps qui sépare les évaluations peut être long et pourrait ne pas refléter l’évolution du malade qui peut présenter une requête en révision à la CCC seulement tous les six mois.

En vertu de l’article 20.1 de la LPDNA, le tuteur légal aux biens doit aider à planifier, au nom de l’incapable, une évaluation de sa capacité s’il s’est écoulé six mois depuis l’ouverture de la tutelle ou la dernière évaluation. Cependant, il faut que l’incapable (ainsi que le tuteur) soit au courant de son droit à un nouvel examen, ce qui le laisse dépendant, pour exercer ses droits, de la personne qui exerce le contrôle qu’il cherche à faire annuler. De même, la loi ne comporte pas de dispositions semblables relatives à un tuteur nommé par le tribunal et à un mandataire agissant en vertu d’une procuration. Dans une étude commandée par la CDO, l’ARCH Disability Law Centre insiste sur le fait que l’absence d’exigences légales contraignant le tuteur nommé par le tribunal à prévoir une nouvelle évaluation de la capacité est une question importante :

[traduction] Le fait que les tuteurs aux biens nommés par les tribunaux ne sont pas tenus de prévoir une nouvelle évaluation de la capacité de l’incapable dans un délai donné reflète l’une des grandes faiblesses du régime actuel de prise de décisions au nom d’autrui. La seule façon de s’assurer qu’une personne mise sous tutelle subit une nouvelle évaluation est de la prévoir dans l’ordonnance de la cour. Autrement, il n’y a pas grand‑chose que l’on peut faire pour obliger un tuteur nommé par le tribunal de prendre des dispositions en vue d’une nouvelle évaluation de la capacité. S’il refuse de le faire ou de payer pour l’évaluation, la personne « incapable » pourrait présenter une requête devant le tribunal à cette fin, mais si le tuteur ne dispose pas des ressources nécessaires, il n’y a aucune garantie que d’autres autorités publiques le feraient[301].

 

  • QUESTION À ABORDER : les systèmes d’évaluation de la capacité de l’Ontario s’adaptent-ils correctement aux fluctuations de la capacité? Si oui, quelles propositions précises pourraient contribuer à les améliorer sur ce plan?

 

Protections procédurales

Tous les mécanismes assurent un certain équilibre des protections procédurales. Par exemple, bien que la LSM ne prévoie pas qu’une personne puisse refuser un examen de la capacité, elle instaure des mesures de soutien assez vigoureuses prenant la forme de conseillers en matière de droits en vue de contester les résultats de l’examen. Les personnes faisant l’objet d’une évaluation de la capacité de gérer leurs biens ou de prendre soin d’elles en vertu de la LPDNA bénéficient de protections procédurales étendues découlant de la loi ou des Lignes directrices obligatoires, y compris le droit de refuser de subir une évaluation, de recevoir des renseignements au sujet de l’évaluation, d’être avisée par écrit de la constatation et, dans certains cas, de présenter une requête en révision à la CCC. Toutefois, elles n’ont pas accès à des mesures de soutien comparables aux conseillers en matière de droits. Il est valable d’examiner si le bon équilibre a été atteint dans chaque cas.

Les préoccupations les plus importantes touchant les protections procédurales ont été soulevées à l’égard des évaluations de la capacité de consentir à l’admission à des soins de longue durée. Une évaluation qui conclut à l’incapacité, bien que ponctuelle, aura des conséquences très importantes, mais les protections juridiques sont minimales. Conjuguée aux exigences relativement faibles en matière de formation, cette situation suscite des inquiétudes sur la protection des droits fondamentaux dans le cadre de ce processus d’évaluation. De même, il existe de nombreuses situations où il n’y a pas de recours simples pour contester une évaluation, sinon payer pour subir une nouvelle évaluation, ce qui pourrait être au‑dessus des moyens de certaines personnes.

Comme il a été mentionné ailleurs, la mise en application de certaines protections procédurales pourrait également s’avérer problématique. Par exemple, l’Advocacy Centre for the Elderly a soulevé des préoccupations à l’égard de la fourniture de renseignements sur les droits aux personnes qui sont jugées incapables de consentir à un traitement ou à leur admission à des soins de longue durée, surtout que les orientations en cette matière relèvent essentiellement des ordres professionnels[302].

 

  • QUESTION À ABORDER : est‑ce que chacun des systèmes d’évaluation de la capacité de l’Ontario trouve le juste milieu entre les formalités, les protections procédurales, l’accessibilité et l’efficacité?

 

2.     Problèmes survenant fréquemment dans le droit touchant les personnes handicapées et les personnes âgées

L’examen des systèmes d’évaluation de la capacité de l’Ontario révèle un ensemble de problèmes qui correspondent aux obstacles décelés par les deux projets-cadres de la CDO. Ce sont des problèmes qui surgissant en général lors de l’élaboration de lois et d’orientations ou la mise en place de méthodes touchant des personnes handicapées ou des personnes âgées, mais, bien entendu, ces problèmes se posent différemment dans le contexte des lois sur la capacité juridique, la prise de décision et la tutelle, et des systèmes d’évaluation de la capacité.

 

Complexité et navigation

La diversité des multiples systèmes d’évaluation de la capacité de l’Ontario a pour but de répondre à des contextes et à des types de décision particuliers, mais elle pose en soi des problèmes. Elle ajoute grandement à la complexité du système, tant pour les personnes à titre individuel que pour leurs familles, ainsi que pour les professionnels. La voie à privilégier n’est pas toujours évidente : par exemple, durant les consultations préliminaires, plusieurs personnes se sont inquiétées de ce que certaines personnes âgées puissent faire l’objet d’un examen de la capacité de gérer leurs biens en vertu de la LSM au lieu d’une évaluation de la capacité en vertu de la LPDNA. De même, une personne pourrait être évaluée à de nombreuses reprises par différents systèmes, surtout celles qui ont des besoins complexes ou multiples.

Aussi, certains systèmes d’évaluation de la capacité sont en soi assez complexes, ce qui est attribuable en partie aux efforts louables visant à prendre en compte la diversité dans des circonstances particulières et à trouver le juste milieu entre les protections procédurales et l’efficacité des opérations.

Le Rapport final : Cadre du droit touchant les personnes handicapées souligne ceci :

Cette complexité constitue un défi en soi, à la fois pour les personnes handicapées, les fournisseurs de services et les défenseurs des droits qui essaient d’aider les gens à naviguer dans le système. Malgré leurs intentions louables, certaines lois ne réussissent pas à atteindre leurs objectifs parce qu’elles ne sont pas facilement accessibles aux personnes handicapées qui ne disposent pas des mesures de soutien et des ressources nécessaires pour les comprendre et les utiliser. Il est possible que les personnes handicapées ne soient pas en mesure de faire des choix éclairés parce qu’elles ne sont pas au fait des options qui s’offrent à elles ou qu’elles considèrent qu’il leur est trop difficile d’exercer ces options[303].

La gestion de la complexité ne passe pas nécessairement par la simplification des systèmes (bien que ce soit manifestement une option). Une autre solution consisterait peut‑être à augmenter officiellement la communication de renseignements, la surveillance et la défense des intérêts des personnes qui sont susceptibles de connaître des difficultés à naviguer dans le système. Des options pour ce faire sont décrites dans la partie Quatre du présent document.

 

  • QUESTION À ABORDER : les normes d’évaluation de la capacité des différents systèmes sont‑elles claires, cohérentes et rigoureuses? Si non, que pourrait-on proposer précisément pour les améliorer?


Plaintes et surveillance

En règle générale, la surveillance des différents systèmes d’évaluation de la capacité s’exerce de deux manières : d’abord, par le truchement des programmes éducatifs, des orientations et des normes des différentes professions de la santé réglementées et des mécanismes de traitement des plaintes des ordres professionnels les régissant, puis, par la présentation de requêtes en révision à la CCC ou au tribunal en vertu du paragraphe 39(1) de la LPDNA pour les personnes ayant établi une procuration perpétuelle relative aux biens et qui ont été jugées incapables. Pour les personnes qui sont examinées par un évaluateur désigné, des garanties additionnelles sont prévues : l’évaluateur doit fournir au Bureau de l’évaluation de la capacité tous les deux ans des copies de deux évaluations récentes à des fins d’examen et d’observation, et il doit effectuer un nombre déterminé d’évaluations pour demeurer qualifié. Pour certains types d’évaluation, de gros employeurs institutionnels auxquels les professionnels chargés de l’évaluation sont associés peuvent assurer dans la pratique un certain niveau de surveillance.

Ainsi, la surveillance s’exerce en grande partie par le truchement des plaintes. Il semble qu’il soit relativement rare que des plaintes relatives aux évaluations soient adressées aux ordres de réglementation des professionnels de la santé. L’Advocacy Centre for the Elderly a fait remarquer que [traduction] « la procédure de traitement des plaintes est très longue et, si l’on fait appel à un avocat, coûteuse. Certains de nos clients choisissent de ne pas porter plainte parce qu’il faudra trop de temps pour aborder un problème nécessitant une solution immédiate »[304]. Bien que le chapitre II de la partie Quatre portant sur les mécanismes de règlement des différends examine les points forts et faibles de la CCC, il convient de mentionner que la Commission représente une instance impartiale et compétente pour la révision des évaluations et, en tant que tribunal administratif, sa procédure est moins lourde et coûteuse qu’une révision judiciaire. Il convient également de noter qu’il est relativement rare qu’une évaluation soit annulée par la CCC. Comme il a été mentionné plus haut, Hiltz et Szigeti ont fait remarquer que, selon les statistiques, moins de 10 p. 100 des requérants ont été jugés capables de consentir à un traitement à la suite d’une requête à la Commission[305].

Bien qu’il soit important de fournir des voies de recours, les deux projets-cadres ont présenté les risques et les inconvénients de systèmes répondant aux besoins de personnes vulnérables qui dépendent entièrement sur les plaintes pour assurer une surveillance. Le Cadre du droit touchant les personnes âgées – Rapport final note ce qui suit :

Les systèmes de présentation des plaintes délèguent aux personnes âgées l’entière responsabilité de signaler un problème, ce qu’on peut voir comme une façon de respecter leur autonomie. Dans certains cas, cependant, ces systèmes peuvent se révéler problématiques, particulièrement lorsqu’une personne âgée est vulnérable ou marginalisée en raison d’une incapacité, d’un faible revenu, d’un statut d’immigration ou d’autres facteurs. […] En outre, les systèmes de présentation des plaintes comportent parfois des coûts, des obstacles administratifs ou des délais que les personnes âgées vulnérables ne sont pas en mesure de gérer. […] Lorsque les services sont destinés aux personnes âgées vulnérables […] les systèmes qui délèguent aux personnes âgées l’entière responsabilité de signaler un problème et d’obtenir réparation peuvent échouer à répondre aux besoins de celles‑ci[306].

Les possibilités de surveillance varient considérablement d’un mécanisme à l’autre. Certaines évaluations se déroulent dans un contexte fortement réglementé comme un hôpital et sont effectuées par des professionnels soumis à des normes et à des codes d’éthique définis. D’autres types d’évaluation ont lieu dans des contextes privés et sont donc moins susceptibles de faire l’objet d’une surveillance.

 

  • QUESTION À ABORDER : le contrôle et la surveillance des différents types d’évaluation de la capacité en Ontario sont‑ils adéquats? Si non, que pourrait-on proposer précisément pour améliorer ceux-ci à cet égard?

 

Accès à l’information, interventions et mesures de soutien

L’accès à l’information sur les lois, les orientations et les programmes, sur leur impact potentiel et sur la façon d’y accéder est essentiel pour assurer l’accès à la justice. Nous sommes peut‑être tous aux prises avec des difficultés pour avoir accès à cette information et la comprendre, mais, comme il a été souligné dans les deux projets-cadres, les personnes qui sont plus âgées ou sont handicapées ou qui font partie des deux catégories doivent surmonter des obstacles additionnels liés aux problèmes d’accessibilité pour les personnes handicapées. Par exemple, il se peut que l’information ne soit pas offerte dans un format accessible ou que les sites Web où elle se trouve n’affichent que des documents en format PDF. Certains segments de la population connaissent moins bien les nouvelles technologies en raison de tendances historiques (par exemple, les attentes et les possibilités en matière d’éducation étaient limitées pour les femmes plus âgées aujourd’hui) ou d’obstacles précis sur le plan de l’éducation (qui ont été abondamment documentés en ce qui concerne les personnes vivant avec certains types de handicap). La tendance à délaisser la transmission de renseignements par l’entremise de personnes (par téléphone ou en personne) au profit de l’information en ligne entraînera des inconvénients pour certaines. De même, la complexité accrue des systèmes téléphoniques automatiques d’information aura aussi pour conséquence d’en décourager certaines, et celles qui vivent dans des foyers de soins de longue durée auront un accès limité à l’information compte tenu du contexte[307]. Le manque de connaissances de leurs droits et des façons d’y accéder a été l’un des thèmes omniprésents des consultations publiques de la CDO qui ont mené à l’élaboration du Cadre du droit touchant les personnes âgées. Un grand nombre de participants aux groupes de discussion ont eu des difficultés à définir les lieux où ils pourraient se renseigner sur leurs droits et les responsabilités connexes. 

Lorsque les lois, les orientations et les méthodes sont complexes ou que les enjeux sont considérables – ou les deux –, l’accès à l’information prend une importance capitale, comme c’est le cas lorsqu’il est question de l’évaluation de la capacité. Il convient donc de noter avec satisfaction que le cadre législatif comporte des dispositions (qui varient selon le mécanisme) visant à aborder cette question comme, par exemple, l’obligation d’informer une personne de la nature d’une évaluation et des conséquences potentielles, l’accès à des conseillers en matière de droits dans certains cas, et l’obligation de fournir des renseignements sur le droit de contester l’évaluation de quelqu’un.

Toutefois, l’accès à l’information pour les personnes évaluées demeure un sujet de préoccupation. Certaines difficultés tiennent à la nature du droit : beaucoup de personnes touchées par une évaluation de la capacité seront dans un état de crise (par exemple, malades et hospitalisées), vulnérables ou marginalisées, ou auront besoin de soutiens informationnels additionnels en raison de la nature de la déficience donnant lieu à l’évaluation. Fournir des renseignements gagne en importance dans ces circonstances et comporte aussi des difficultés additionnelles.

Pour cette raison, fournir des renseignements peut s’avérer en soi insuffisant si des services d’intervention et d’autres soutiens officiels additionnels n’y sont pas associés. Les questions liées aux interventions et aux soutiens seront traitées dans le détail au chapitre III de la partie Quatre. Il suffit ici de noter qu’à l’origine, le régime législatif en place a été prévu comme incluant des interventions indépendantes soutenues par l’entremise de la Commission d’intervention; l’abrogation de la Loi de 1992 sur l’intervention n’a pas été suivie de changements compensateurs de grande envergure ailleurs dans la législation, ce que certains considèrent comme un déséquilibre fondamental du régime.

Cela ne signifie pas pour autant qu’il n’y a pas eu d’efforts considérables consentis dans les interventions et la communication d’information dans les limites de la législation actuelle. De nombreux organismes, y compris le Bureau de l’évaluation de la capacité, l’ARCH Disability Law Centre et le Réseau ontarien de prévention des mauvais traitements envers les personnes âgées, ont déployé des efforts considérables dans l’éducation juridique du grand public. De nombreuses sources proposent des documents rédigés en un langage simple; par exemple, certains hôpitaux ont produit des dépliants et des fiches de renseignements en langage simple sur l’évaluation de la capacité et le rôle des mandataires spéciaux, qu’ils remettent aux personnes qui en ont besoin. Le Bureau de l’intervention en faveur des patients des établissements psychiatriques (BIPEP) joue un rôle de premier plan dans le système actuel, tout comme les cliniques d’aide juridique qui effectuent des interventions individuelles et systémiques sur ces questions dans la mesure de leurs possibilités. Néanmoins, des lacunes importantes ont été constatées et elles demeurent un sujet de préoccupation.

 

  • QUESTION À ABORDER : Y a‑t‑il des obstacles qui limitent l’accès aux systèmes d’évaluation de la capacité de l’Ontario? Si oui, que pourrait-on proposer précisément pour les rendre plus accessibles?

 

E.    Questions à aborder

  1. Comment l’expérience d’évaluation de la capacité diffère‑t‑elle en fonction du sexe, de l’orientation sexuelle, de l’appartenance raciale, de la langue, de la culture, du statut socioéconomique, du statut d’autochtone, de l’emplacement géographique, de différents types de handicaps et d’autres aspects de la diversité?
  2. Est‑ce que chacun des systèmes d’évaluation de la capacité de l’Ontario trouve le juste milieu entre les formalités, les protections procédurales, l’accessibilité et l’efficacité?
  3. Qui doit effectuer les différents types d’évaluation de la capacité requis? Quelle formation est nécessaire? Comment doit-elle être dispensée?
  4. Le contrôle et la surveillance des différents types d’évaluation de la capacité en Ontario sont‑ils adéquats? Si non, que pourrait-on proposer précisément pour améliorer ceux-ci à cet égard?
  5. Les normes d’évaluation de la capacité des différents systèmes sont‑elles claires, cohérentes et rigoureuses? Si non, que pourrait-on proposer précisément pour les améliorer?
  6. L’Ontario pourrait‑il tirer profit d’une harmonisation et d’une simplification plus poussées et d’une coordination accrue de ses différents systèmes d’évaluation de la capacité? Si oui, que pourrait-on proposer précisément pour ce faire?
  7. Les systèmes d’évaluation de la capacité de l’Ontario s’adaptent-ils correctement aux fluctuations de la capacité? Si oui, quelles propositions précises pourraient contribuer à les améliorer sur ce plan?
  8. Y a‑t‑il des obstacles qui limitent l’accès aux systèmes d’évaluation de la capacité de l’Ontario? Si oui, que pourrait-on proposer précisément pour les rendre plus accessibles?

 

 

 

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