A.    Introduction

Comme la CDO l’a souligné dans les cadres, les personnes handicapées et les personnes âgées, de même que celles qui les représentent, travaillent avec elles ou interviennent pour elles, ont souvent observé les défis auxquels elles font face lorsqu’elles obtiennent des services ou font valoir leurs droits, même en rapport avec la loi ou des services qui sont censés être en leur faveur.  Ces défis découlent de diverses sources, notamment les suivantes :

  • des attitudes négatives ou stéréotypées de la part des prestataires de services ou ancrées dans les systèmes de services;
  • des difficultés inhérentes à se frayer un chemin dans une bureaucratie large et complexe, particulièrement pour les personnes qui sont d’une manière ou d’une autre vulnérables ou marginalisées;
  • des déséquilibres de rapports de force entre les personnes qui fournissent les services et celles qui les obtiennent, encore ici particulièrement à l’égard des personnes vulnérables;
  • des défis provenant du croisement d’autres types de diversité, comme la langue, la culture, la racialisation, le sexe ou bien d’autres, avec leur handicap ou leur vieillesse;
  • les impératifs inévitables au sein de grandes institutions, comme des contraintes en matière de ressources et des objectifs institutionnels contradictoires.

Tous ces obstacles et tous ces défis doivent être compris dans le contexte plus large que peuvent connaître les personnes âgées et les personnes handicapées, en ce qu’elles sont plus susceptibles d’avoir un faible revenu, de vivre de l’isolement social et d’avoir peu d’occasions de participation, et en ce qu’elle peuvent être réduites au silence ou faire face à une stigmatisation de façon persistante.

En conformité avec ce portrait plus global, pendant les consultations préliminaires de la CDO, des participants ont soulevé plusieurs préoccupations connexes à propos du fonctionnement des lois ontariennes en matière de capacité, de prise de décision et de tutelle : la vulnérabilité des personnes qui se retrouvent dans le système face aux violations des droits que la loi leur accorde, parfois avec des conséquences profondes; les défis qu’ont les personnes à utiliser efficacement un système très complexe; et les lacunes perçues dans les mécanismes de règlement des différends, l’exécution et les recours. Ils ont souligné plusieurs causes sous-jacentes à ces problèmes, notamment le manque d’accès réel à de l’information pour les personnes visées par les lois, les déséquilibres importants de rapports de force entre les grands prestataires de services institutionnels et des personnes qui sont souvent marginalisées ou démunies ainsi qu’un manque de mécanismes efficaces pour la reddition de comptes des institutions qui prennent part à la mise en œuvre de la loi. Ces préoccupations ont déjà été soulignées ici.

Comme on l’a déjà mis en évidence, les préoccupations touchant l’accès au droit sont encore plus urgentes dans ce domaine, en raison de l’effet profond des lois relatives à la capacité juridique, à la prise de décision et à la tutelle sur de nombreux aspects de la vie des personnes touchées.

L’une des principales priorités de réforme qui s’est dégagée des consultations préliminaires de la CDO a donc été la prestation de mesures de soutien afin de permettre aux personnes d’avoir un accès plus efficace aux droits que la loi leur accorde. On a particulièrement insisté sur l’élaboration de systèmes, d’orientations ou de méthodes qui assureraient ce qui suit :

  • les personnes dont les droits risquent d’être touchés par ces lois ont un accès véritable à des informations sur le droit, ses répercussions potentielles sur elles et sur les options qui s’offrent à elles afin de faire valoir leurs droits;
  • tant les personnes directement touchées que celles qui les soutiennent reçoivent de l’assistance pour utiliser les systèmes souvent complexes d’évaluation de la capacité, de création ou de fin d’une tutelle, ou encore de contestation des décisions relatives aux activités ou des activités des mandataires spéciaux;
  • les personnes dont les déficiences touchent leur aptitude à déterminer ou à articuler leurs besoins obtiennent des mesures de soutien et d’adaptation afin de les aider à cet égard;
  • lorsque des personnes doivent faire face à des structures juridiques à plusieurs niveaux, exigeantes sur le plan procédural ou de longue durée en vue de régler des différends ou de mettre en œuvre leurs droits, elles obtiennent l’aide nécessaire afin de veiller à ce qu’elles puissent véritablement défendre leurs droits.

Ces questions font l’objet du présent chapitre.                  

Le présent chapitre se concentre sur les mesures de soutien officielles. Il est important de reconnaître que les familles et les amis fournissent des mesures de soutien informelles très complètes et essentielles. Comme le fait remarquer le Rapport O’Sullivan : 

Ce genre d’intervention [informelle] peut avoir bien des avantages. Étant donné que l’intervenant est susceptible de connaître à fond l’adulte vulnérable, y compris ses antécédents personnels et ses besoins spéciaux, il est particulièrement bien placé pour le comprendre et intercéder en sa faveur. En plus, les rapports continus entre ces personnes stabilisent la relation. Il serait difficile d’intervenir avec plus de dévouement que la personne dont la ferveur est renforcée par l’amour et la confiance qui existent normalement entre les membres d’une famille et les amis[818].

Cependant, les défis qui ont été relevés relativement à l’accès au droit dans ce domaine mettent en lumière les limites inhérentes au fait de confier autant de responsabilités en ce qui a trait au soutien aux amis et à la famille. On a souligné qu’il pouvait exister des tensions entre la fonction d’intervenant informel et les fonctions en dehors de l’intervention qu’exercent les amis et les membres de la famille, notamment celui d’aidant informel[819]. De plus, comme nous l’avons vu au chapitre II de la partie Trois, les responsabilités qui incombent déjà à la famille et aux amis sont énormes et très éprouvantes dans le contexte de la limitation des ressources existantes. Bien des amis et des membres de la famille qui se sont démenés pour défendre les personnes qui leur sont chères et les soutenir profiteraient énormément de l’obtention d’aide pour s’acquitter de cette fonction.

Des questions touchant aux mesures de soutien sont clairement reliées de près à celles examinées dans les chapitres sur l’évaluation de la capacité, les processus de nomination, le règlement des différends ainsi que l’information et la vulgarisation. Il est certain que, plus les systèmes d’exercice des droits, de nomination et d’évaluation sont simples et transparents, plus il y a de chance que les personnes touchées soient en mesure d’avoir accès aux systèmes sans mesures de soutien étendues. Des systèmes plus complets de contrôle et de surveillance proactifs des mandataires spéciaux ou une réévaluation régulière de la capacité réduiront l’obligation pour les personnes d’utilisation par elles-mêmes le système de règlement des différends et celui de l’exercice des droits. Il faut appréhender le système dans son ensemble. Le système ontarien actuel en est un d’une complexité très considérable : il comprend beaucoup de mesures de protection procédurales et de mécanismes de contestation des décisions, mais il propose peu de mécanismes proactifs ou de surveillance, et les niveaux de soutien et d’intervention disponibles pour les personnes varient énormément dans le système.

 

  • QUESTION À ABORDER : quels types de mesures de soutien sont les plus importants afin d’aider les personnes visées par ce domaine du droit à comprendre et à faire valoir leurs droits? Le soutien devrait-il se concentrer sur la fourniture rapide de renseignements accessibles et appropriés, sur l’aide pour s’y retrouver dans des systèmes complexes, sur le fait de soutenir les personnes touchées pour qu’elles expriment leurs valeurs et leurs souhaits, sur le soutien à défendre leurs droits, ou sur d’autres besoins?

 

B.    Un peu d’histoire : intervention, réforme du droit et régime législatif actuel

Comme nous l’avons déjà mentionné dans le présent document de travail, c’est lors de l’élaboration du cadre législatif actuel qu’est ressorti le besoin de mesures de soutien afin d’assurer un accès efficace au droit. Ce sont au départ la Loi de 1992 sur l’intervention ainsi que les dispositions corrélatives de la Loi de 1992 sur la prise de décisions au nom d’autrui (LPDNA) et la loi qui a précédé la Loi de 1996 sur le consentement aux soins de santé (LCSS) qui se sont penchées sur ce besoin. Un examen de l’histoire législative illustre à la fois les défis de la législation actuelle et les difficultés de la conception et de la mise en œuvre de mesures de soutien efficaces dans ce domaine.

1.     Le Rapport Fram et l’Examen O’Sullivan

À la fin 1986, le procureur général de l’Ontario a annoncé un Examen des mesures d’intervention en faveur des adultes vulnérables, en réponse à des préoccupations relatives à « un besoin non satisfait de services d’intervention non juridiques pour les adultes vulnérables qui vivent dans des établissements ou les collectivités ». L’intervention a été définie de différentes manières, mais dans sa plus simple expression, il s’agit d’un mécanisme visant à assurer le respect des droits; à favoriser la participation, l’autonomisation et la responsabilité ainsi qu’à faciliter la résolution créative et pratique de problèmes que causent les lois ou les systèmes s’appliquant à des groupes vulnérables et marginalisés, notamment aux personnes âgées et aux personnes handicapées. Ainsi, elle est reliée à des notions plus larges d’accès à la justice, et un examen des éléments de l’intervention peut apporter une contribution importante à la réforme des lois, des orientations et des méthodes applicables à ces groupes.

Le gouvernement avait demandé à l’abbé Sean O’Sullivan de faire un rapport, dans les six mois, sur la ou les meilleures méthodes de prestation de services d’intervention, et notamment d’examiner les manières dont les mesures d’intervention pourraient être coordonnées avec les systèmes existants de gestion des dossiers et les autres systèmes de prestation de services, de même qu’avec les services d’intervention juridiques et volontaires communautaires alors en place[820].

Fait intéressant, la question de l’intervention avait d’abord été soumise au Comité Fram, qui examinait les réformes des lois sur la prise de décision au nom d’autrui, prouvant ainsi l’importance du lien entre ce domaine du droit et l’intervention. Lorsqu’après plusieurs mois de travail ce Comité a eu de la difficulté à parvenir à un consensus et qu’il est devenu manifeste que cela retardait le progrès sur le mandat original, l’examen indépendant a été mis sur pied. Quoi qu’il en soit, le Comité Fram a accompli un travail préliminaire important en dégageant les principes et objectifs de l’intervention, de même qu’en déterminant les étapes clés où l’intervention était nécessaire. Le Comité Fram a déterminé que la fonction des intervenants consistait à expliquer la signification de la mesure juridique qui était prise et les options juridiques disponibles pour la personne et, quand cela était indiqué, à mettre la personne en lien avec des ressources juridiques. Le Comité a recommandé que des intervenants soient fournis aux personnes visées à plusieurs étapes au cours des processus entourant l’évaluation de la capacité et la prise de décision au nom d’autrui, soit les suivantes :

  1. la nomination d’origine judiciaire de tuteurs ou de curateurs;
  2. la fin de la tutelle ou de la curatelle;
  3. une ordonnance d’évaluation et de mise en œuvre; 
  4. avant une évaluation de la capacité en vue d’une curatelle légale ou de procurations au soin de la personne; 
  5. le refus de décisions au nom d’autrui à propos d’un traitement;
  6. la visite annuelle à toutes les personnes visées par une tutelle ou une procuration au soin de la personne[821].

Le Comité Fram recommandait que, compte tenu de l’importance de l’intervention pour la mise en œuvre efficace de la LPDNA, cette loi n’entre pas en vigueur tant que la Loi de 1992 sur l’intervention ne serait pas mise en application.

L’Examen O’Sullivan se concentrait sur l’intervention sociale plutôt que juridique, et sur les intervenants officiels plutôt qu’informels. Il a dégagé quatre principes fondamentaux de l’intervention[822] :

  1. elle doit être axée sur le client : les actions de l’intervenant doivent être guidées par les instructions du client, et l’intervenant doit servir le client sur une base volontaire et consensuelle. L’intervenant ne devrait pas remplacer les instructions du client par la conception de « l’intérêt véritable »;
  2. elle devrait être indépendante : afin d’éviter tout conflit d’intérêts perçu ou réel, les intervenants devraient être indépendants sur le plan administratif et financier des systèmes de prestation de services sociaux dans lesquels ils doivent intervenir;
  3. elle devrait être accessible : les clients doivent être en mesure d’avoir accès à l’intervention tant dans les institutions que dans la collectivité, et les intervenants doivent être en mesure de communiquer librement avec les clients, sans interférence d’autres personnes. L’accessibilité comprend également des mesures de protection de la confidentialité des clients ainsi que la possibilité pour les intervenants d’avoir accès (avec le consentement du client) aux dossiers et aux personnes nécessaires;
  4. elle ne devrait être ni contradictoire, ni passive : le concept d’intervention a parfois fait l’objet de réticences parce qu’on considérait qu’il adoptait une démarche trop contradictoire, et qu’il constituait une menace aux relations interpersonnelles et professionnelles traditionnelles. Une intervention appropriée ne devrait pas avoir pour effet de polariser les relations, ni ne devrait-elle être exagérément passive et complaisante, évitant les questions délicates, difficiles ou impopulaires. Il faudrait la voir comme une manière de parvenir à la collaboration, gardant les démarches plus contradictoires comme dernier recours.

L’Examen a établi plusieurs objectifs pour un régime d’intervention en Ontario. Le régime devrait proposer des garanties contre la tutelle inutile, être indépendant, encourager la faculté d’intervenir pour soi-même (liberté de choisir) quand cela est possible, renforcer le rôle de la famille et des amis, vulgariser, mettre fin aux stéréotypes et déstigmatiser, faire preuve de souplesse, de réactivité, favoriser la collaboration avec les prestataires et les ministères, être accessible, savoir se réformer (s’efforcer d’améliorer les programmes), faire preuve d’autorité, et enfin rendre des comptes[823].

L’Examen a étudié plusieurs modèles de système d’intervention, notamment un « ombudsman de l’intervention » indépendant et financé par l’État; un programme d’intervention civique bénévole; l’élaboration de mécanismes visant à donner de la formation et des pouvoirs aux personnes agissant déjà en tant qu’intervenant et à assurer leur coordination; et une Commission des mesures d’intervention, qui élaborerait des normes et des procédures, de même que des bureaux régionaux qui seraient dirigés par des conseils formés par la collectivité et dont le personnel comprendrait des coordonnateurs de l’intervention. L’Examen a finalement recommandé que cette dernière méthode, soit une « Commission des mesures d’intervention », soit retenue. 


2.     La Loi de 1992 sur l’intervention et les dispositions relatives à l’intervention dans la Loi de 1992 sur la prise de décisions au nom d’autrui et la Loi de 1992 sur le consentement au traitement

Comme nous l’avons vu à la partie Un, l’Assemblée législative de l’Ontario a adopté en 1992 une série de lois qui apportaient des changements radicaux au droit relatif à la capacité juridique, à la prise de décision et à la tutelle. Cette législation était le point culminant d’un processus long et intensif de réforme du droit qui comprenait l’Examen O’Sullivan, le Rapport Fram et l’Enquête Weisstub sur la capacité mentale. La question de l’intervention se trouvait au cœur des trois principales lois, la Loi de 1992 sur l’intervention, la LPDNA, et la Loi de 1992 sur le consentement au traitement.

La Loi de 1992 sur l’intervention

Bien que la Loi de 1992 sur l’intervention ait été liée de près à la réforme des lois en matière de capacité et de tutelle, son objet était beaucoup plus large. Elle visait en effet à avoir une incidence sur la vie de nombreuses personnes qui n’entraient pas dans la portée du droit relatif à la capacité juridique et à la tutelle. Les objets de la Loi de 1992 sur l’intervention étaient les suivants :

a)               contribuer à accroître le pouvoir des personnes vulnérables et promouvoir le respect de leurs droits, de leurs libertés, de leur autonomie et de leur dignité;

b)              fournir des services d’intervention :

               (i) pour aider les personnes vulnérables individuellement à exprimer leurs désirs et à leur donner suite, à s’informer de leurs droits et à les exercer, à parler en leur propre nom, à s’entraider et à former des organisations qui fassent valoir leurs intérêts,

               (ii) pour aider individuellement les personnes vulnérables qui sont incapables de donner des instructions à un intervenant, s’il existe des motifs raisonnables de croire qu’il y a un risque de préjudice grave pour leur santé ou leur sécurité,

               (iii) pour aider les personnes vulnérables à obtenir des changements systémiques sur les plans gouvernemental, juridique, social, économique et institutionnel;

c)               faire en sorte que les stratégies de développement communautaire soient appliquées dans la prestation de services d’intervention;

d)              tenir compte de la religion, de la culture et des traditions des personnes vulnérables;

e)               faire en sorte que les collectivités autochtones puissent fournir leurs propres services d’intervention lorsque cela est possible;

f) reconnaître, encourager et accroître l’appui des particuliers, des familles et des collectivités visant la sécurité et le bien-être des personnes vulnérables[824].

La Loi s’appliquait aux « personnes vulnérables » de 16 ans et plus, expression qui s’entendait d’une personne qui « en raison d’une déficience, d’une maladie ou d’un trouble physiques ou mentaux modérés ou graves, qu’ils soient temporaires ou permanents, réels ou perçus : a) ou bien est incapable d’exprimer ses désirs ou d’y donner suite, ou de s’informer de ses droits ou de les exercer; b) ou bien a de la difficulté à exprimer ses désirs ou à leur donner suite, ou à s’informer de ses droits ou à les exercer »[825]. Elle s’appliquait également aux fins de la prestation de conseils en matière de droits et des autres services d’intervention qu’exigeaient la Loi sur la santé mentale, la LPDNA et la Loi de 1992 sur le consentement au traitement[826].

La Loi constituait la Commission d’intervention dont les fonctions étaient larges et comprenaient notamment les suivantes : promouvoir le respect des personnes vulnérables ainsi que le respect de leurs droits; fournir des services d’intervention sur le plan individuel et systémique, fournir des conseils en matière de droits et d’autres services d’intervention exigés en vertu des lois sur la capacité et la tutelle, fournir de la formation pour les intervenants, faire en sorte que les stratégies de développement communautaire soient appliquées dans la prestation des services d’intervention, encourager et accroître l’appui individuel, familial ou communautaire envers la sécurité et le bien-être des personnes vulnérables, établir les qualités minimales et les normes applicables aux intervenants et mettre en œuvre des programmes d’information et de vulgarisation[827].

Les intervenants n’étaient pas des mandataires spéciaux, ni n’avaient-ils l’autorité de prendre des décisions à la place d’une personne vulnérable ou en son nom[828]. Il leur était interdit de faire quoi que ce soit qui soit incompatible avec les instructions que la personne avait données ou les désirs qu’elle avait exprimés alors qu’elle était capable de donner des instructions à l’intervenant. Une personne était considérée capable de donner des instructions à l’intervenant si elle était en mesure d’indiquer qu’elle désirait recevoir des services d’intervention ainsi que la raison pour laquelle elle désirait en recevoir et qu’elle était en mesure d’exprimer, de quelque manière que ce soit, ses instructions ou ses désirs. Cependant, l’intervenant pouvait également agir lorsque la personne vulnérable était incapable de donner des instructions, s’il y avait un risque de préjudice grave pour la santé ou la sécurité de la personne vulnérable; avant d’agir ainsi, l’intervenant devait prendre toutes les mesures raisonnables qui étaient nécessaires pour déterminer si la personne vulnérable était vraiment incapable de lui donner des instructions[829].

Si la personne vulnérable était incapable ou y avait consenti, l’intervenant pouvait obtenir les instructions d’un mandataire spécial, notamment un tuteur ou une personne agissant aux termes d’une procuration[830].

La Loi conférait aux intervenants des droits d’entrée et d’accès aux dossiers, et ces intervenants étaient liés par des devoirs de confidentialité et assujettis à des exigences précises relativement à la divulgation dans des situations limitées.

 

Loi de 1992 sur la prise de décisions au nom d’autrui et Loi de 1992 sur le consentement au traitement

Les recommandations du Comité Fram relativement à l’intervention et à la prise de décision au nom d’autrui ont été examinées brièvement ci-dessus. La loi, dans sa version au moment de son adoption en 1992, s’en tenait de près à ces recommandations. En vertu de la LPDNA et de la Loi de 1992 sur le consentement au traitement, les intervenants se voyaient accorder un rôle à des points de transition clés dans les vies des personnes touchées par la loi, lorsque des droits importants étaient en jeu. À ces points, les responsabilités suivantes incombaient de façon générale aux intervenants :

  • aviser la personne de la décision prise ou de la détermination faite à son égard;
  • expliquer la signification de la décision ou de la détermination d’une matière qui tienne compte des besoins spéciaux de cette personne;
  • expliquer les droits qu’avait la personne dans cette situation, comme un droit d’interjeter appel de la décision ou de la détermination;
  • dans certains cas, l’intervenant était tenu de vérifier les désirs de la personne (par ex. si elle souhaitait contester la décision ou la détermination) et de transmettre ces désirs à l’organisme approprié (par ex. le TCP).

Aucune action relative à ces décisions ou déterminations ne pouvait être prise tant que l’intervenant ne s’était pas acquitté de ces devoirs, ou qu’il ait fait des efforts à cette fin et en ait été empêché.

L’intervention envisagée était donc d’un type relativement restreint (quoique important) : l’intervenant ne devait pas parler au nom de la personne, afin d’entreprendre des négociations ou de présenter des observations pour elle. Le cœur du rôle de l’intervenant était de s’assurer que la personne était consciente de sa situation, qu’elle comprenant ses droits et qu’elle disposait des renseignements nécessaires afin d’exercer ces droits. Ainsi, la fonction de l’intervenant en vertu des lois susmentionnées était très similaire à celle des conseillers en matière de droits que l’on trouve aujourd’hui.

Les situations dans lesquelles les intervenants (appelés « conseillers en matière de droits » dans le contexte de la Loi de 1992 sur le consentement au traitement, bien qu’ils aient eu l’obligation d’être des intervenants autorisés en vertu de la Loi de 1992 sur l’intervention) devaient agir comprenaient les suivantes :

  • la nomination d’un tuteur légal aux biens à la suite d’un examen effectué en vertu de la Loi sur la santé mentale;
  • la nomination du TCP à titre de tuteur temporaire à la suite d’une enquête sur des conséquences préjudiciables;
  • les requêtes en vue de faire valider ou enregistrer des procurations au soin de la personne;
  • les requêtes en mise sous tutelle d’origine judiciaire;
  • les ordonnances judiciaires d’évaluation de la capacité, notamment les ordonnances visant l’appréhension de la personne pour la contraindre à l’évaluation;
  • les constatations d’incapacité relativement à un traitement dans un établissement psychiatrique;
  • les constatations d’incapacité relativement à des actes autorisés dans un établissement non psychiatrique;
  • les requêtes à la CCC pour l’obtention de directives concernant les désirs exprimés précédemment par une personne;
  • les requêtes à la CCC en vue d’obtenir la permission de ne pas respecter les désirs exprimés précédemment par une personne.

 

3.     L’abrogation de la Loi de 1992 sur l’intervention et les modifications aux lois relatives à la capacité et à la tutelle

La Loi de 1992 sur l’intervention a été abrogée en 1996, tout de suite après une élection qui a entraîné un changement de gouvernement et avant son déploiement à grande échelle. (Malgré son adoption en 1992, la loi n’a été proclamée qu’au printemps 1995, quelques mois avant l’élection). L’abrogation de la Loi de 1992 sur l’intervention s’est accompagnée de modifications à la LPDNA et à la Loi de 1992 sur le consentement au traitement (qui a finalement été remplacée par la LCSS). Toutes les mentions des « intervenants » ont été retirées de la LPDNA et la fonction des conseillers en matière de droits en vertu de la Loi de 1992 sur le consentement au traitement a été remplacée par une disposition beaucoup plus limitée prévoyant des renseignements relatifs aux droits dans des circonstances limitées.

On a soutenu que l’échec flagrant de cette initiative découlait d’une tentative d’en faire « trop, trop tard ». La Loi était la cible de larges critiques qui se concentraient non seulement sur les coûts qui y étaient associés, mais également sur la perception d’intrusion au sein des familles et dans les droits privés et sur ce qui a été vu comme un risque de miner les groupes professionnels et communautaires qui œuvraient dans ce domaine. Certains commentateurs ont dit que la loi reposait sur la compréhension que les intérêts des personnes vulnérables n’étaient pas nécessairement identiques à ceux de leur famille et des prestataires de services et, qu’en conséquence, elles avaient besoin d’une voix indépendante; le gouvernement n’a toutefois pas  [traduction] « reconnu (au départ à tout le moins) que ses actions avaient pour effet de transformer les familles, les professionnels, les prestataires de logement – en fait toutes les « autres personnes » dans la vie d’une personne vulnérable – en adversaires potentiels »[831]. En conséquence, même si le concept d’intervention recevait un vaste soutien, il a été difficile de rallier un large appui de la part des intéressées relativement à cette loi, et le processus de mise en œuvre a été tellement retardé qu’il restait peu de chance de développer le soutien public à la suite de celle-ci.

 

  • QUESTION À ABORDER : que peut-on apprendre de l’histoire de la Loi de 1992 sur l’intervention afin de guider les réformes relativement à la prestation de mesures de soutien aux personnes visées par ce domaine du droit?

 

C.    Mesures de soutien existantes relativement à l’accès aux lois de l’Ontario concernant la capacité, la prise de décision et la tutelle

La présente section examine les mécanismes officiels et professionnels qui soutiennent l’accès au droit pour les personnes directement touchées qui se retrouvent au cœur, ou gravitent autour, des lois ontariennes sur la capacité juridique, la prise de décision et la tutelle. Il faudrait prendre note qu’il ne s’agit pas d’une description exhaustive de toutes les mesures de soutien dont disposent actuellement les personnes visées par ces lois. Comme nous l’avons déjà mentionné, les membres de la famille et les amis agissent souvent en tant qu’intervenants informels. Les personnes peuvent recevoir du soutien de la part d’organismes d’intervention ou de consommateurs offrant des services bénévoles ou non. Certaines personnes sont en mesure d’avoir accès à des prestataires de services juridiques privés pour agir pour elles. Ce sont toutes des sources de soutien importantes pour les personnes qui ont recours aux lois ontariennes sur la capacité juridique, la prise de décision et la tutelle, et elles le resteront dans un avenir prévisible. La présente section traite plutôt des mécanismes de soutien officiels qui visent expressément ce domaine du droit.

 

1.     Les conseillers en matière de droits et le Bureau de l’intervention en faveur des patients des établissements psychiatriques

Conseillers en matière de droits

La Loi sur la santé mentale crée une catégorie de conseillers en matière de droits désignés qui fournissent des conseils relatifs aux droits aux personnes dans certaines circonstances précises. Ces conseillers se trouvent dans les établissements psychiatriques désignés en vertu de la LSM, et ils sont également désignés relativement à la prise ou au renouvellement d’ordonnances de traitement en milieu communautaire en dehors d’un établissement psychiatrique[832]. La vaste majorité des conseillers en matière de droits en Ontario sont fournis par le Bureau de l’intervention en faveur des patients des établissements psychiatriques (BIPEP), qui fournit des conseillers en matière de droits aux dix établissements de soins psychiatriques spécialisés ou tertiaires et à 71 des 74 hôpitaux communautaires ou généraux ayant des unités psychiatriques (hôpitaux visés à l’annexe 1)[833]. Par ailleurs, les conseils en matière de droits sont donnés aux personnes (et à leur mandataire spécial le cas échéant) pour lesquelles on envisage la prise ou le renouvellement d’une ordonnance de traitement en milieu communautaire. Par ailleurs, le BIPEP forme tous les autres conseillers en matière de droits[834]. En 2011, le BIPEP a signalé avoir fourni des conseils en matière de droits à 350 patients dans des établissements de soins tertiaires qui avaient été reconnus incapables de gérer leurs biens et à 322 dont l’incapacité de gérer leurs biens avait été maintenue, les deux totalisant 9,1 p. cent des visites relatives à des conseils en matière de droits aux établissements de soins tertiaires[835]. Il a fourni des conseils en matière de droits à 646 patients d’établissements psychiatriques d’hôpitaux communautaires qui avaient été reconnus incapables de gérer leurs biens et à 353 dont l’incapacité avait été maintenue, ce qui compte pour 4,2 p. cent de ces visites[836].

Le BIPEP écrit ceci :

[traduction] Le conseil en matière de droits garantit que les patients ayant des problèmes de santé mentale et dont le statut juridique a été modifié à titre de patient en cure obligatoire ou patient incapable reçoivent la même protection en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés que tout autre citoyen, notamment le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne; le droit de ne pas être détenu ou emprisonné de façon arbitraire; et le droit, lorsqu’ils sont détenus, d’être informés des motifs de leur détention, de retenir les services d’un avocat sans délai et de contester les motifs de leur détention[837].

Il est notamment obligatoire de donner des conseils en matière de droits dans la situation où une personne est jugée incapable de gérer ses biens en vertu de la partie III de la LSM[838]. Comme nous l’avons vu plus en détail au chapitre II de la partie Trois, lorsqu’un médecin délivre un certificat d’incapacité ou un certificat de prorogation en vertu de la LSM, il doit en aviser promptement le patient et le conseiller en matière de droits. Ce conseiller doit alors rencontrer le patient, à moins que celui-ci refuse de le faire, et lui expliquer l’importance du certificat et le droit de faire examiner la question de son incapacité de gérer ses biens par la Commission du consentement et de la capacité (CCC). Si le patient le demande, le conseiller en matière des droits doit aider le patient à présenter sa requête à la CCC et à obtenir des services juridiques. L’obligation de fournir une explication sur une question est remplie en autant que le conseiller « l’explique de son mieux en tenant compte des besoins particuliers de la personne, même si celle-ci ne comprend pas l’explication »[839].

Le rôle des conseillers en matière de droits ne comprend donc pas de fonction de représentation ou de négociation pour la personne. Ceci est en partie dû au fait que les personnes ayant accès aux conseils en matière de droits auront dans la plupart des cas accès à un intervenant juridique, que ce soit par l’entremise de financement d’Aide juridique Ontario ou de la part d’un avocat du privé : il entre dans la fonction du conseiller en matière de droits de mettre les personnes en lien avec des services juridiques si elles le désirent.

Les conseillers en matière de droits ne doivent pas être eux-mêmes des prestataires de services : ils ne peuvent pas être des personnes qui participent directement aux soins cliniques à la personne qui reçoit les conseils, ni une personne qui fournit un traitement ou qui fournit des soins et exerce une surveillance aux termes d’une ordonnance de traitement en milieu communautaire (OTMC)[840]. Les conseillers en matière de droits doivent :

  • être bien renseignés sur le droit de présenter une requête à la CCC que prévoient la LSM, la LCSS et la Loi de 2004 sur la protection des renseignements personnels sur la santé;
  • être bien renseignés sur le fonctionnement de la CCC et sur la façon de se mettre en rapport avec elle et de lui présenter des requêtes;
  • être bien renseignés sur la façon d’obtenir des services juridiques;
  • posséder les aptitudes à la communication nécessaires pour remplir efficacement les fonctions de conseiller en matière de droits;
  • avoir suivi avec succès un cours de formation approuvé qui est destiné aux conseillers en matière de droits et avoir été reconnus comme ayant suivi ce cours[841].

Bien qu’il existait au départ des préoccupations sur la possibilité que le système de conseillers en matière de droits soit exagérément contradictoire ou qu’il entre en conflit avec la capacité des professionnels de la santé de s’acquitter de leurs responsabilité, les conseillers en matière de droits sont maintenant un élément bien établi et respecté du système relatif à la capacité et à la tutelle de l’Ontario.

Les critiques du système de conseils en matière de droits portent en général sur deux questions principales. La première est la fonction limitée qu’ont ses conseillers en matière de droits, qui se limite à certaines décisions prises en vertu de la LSM. Les exigences relatives aux renseignements en matière de droits en vertu de la LPDNA et de la LCSS font souvent l’objet de critiques voulant qu’ils ne soient pas assez efficaces. En vertu de la LCSS, plutôt que des conseils en matière de droits soient donnés à la suite d’une constatation d’incapacité juridique, c’est le professionnel qui évalue la capacité qui donne des renseignements relatifs aux droits. ACE a fait les commentaires suivants :

[traduction] Les renseignements relatifs aux droits n’exigent pas que des documents particuliers soient remplis. Malheureusement, de nombreux praticiens de la santé ne respectent pas cette exigence minimale pour fournir des renseignements sur les droits aux personnes, ce qui signifie que celles-ci ne sont pas au courant des droits que la loi leur accorde et des procédures nécessaires pour exercer ces droits.
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Il existe également des problèmes avec les orientations relatives aux renseignements sur les droits des différents ordres professionnels … Si l’on exigeait des professionnels de la santé qu’ils suivent les orientations de leurs ordres professionnels, ils pourraient faire l’objet d’instances disciplinaires lorsqu’ils ne fournissent pas de renseignements sur les droits. Les orientations des ordres professionnels ne veillaient toutefois pas nécessairement à ce que le patient obtienne les renseignements à des fins d’application régulière de la loi. En outre, certains se demandent si les ordres professionnels font respecter cette exigence relative aux renseignements sur les droits et prennent des mesures disciplinaires à l’égard des praticiens qui ne l’observent pas[842].

En outre, en vertu de la LPDNA, c’est au tuteur ou au procureur constitué en vertu d’une procuration qu’incombe la tâche d’expliquer les attributions du mandataire spécial à la personne visée par la prise de décision au nom d’autrui : non seulement cela risque de soulever des problèmes de conflits d’intérêts, mais puisque de nombreux, sinon la plupart, des procureurs et tuteurs n’ont qu’une connaissance imparfaite du droit, il s’agit d’un moyen de donner de l’information qui risque d’être peu efficace[843]. Il a été souligné que, dans au moins certaines des situations où des « renseignements sur les droits » sont actuellement offerts, il serait utile de fournir quelque chose de similaire à des conseils en matière de droits. 

L’Arch Disability Law Centre appuie l’élargissement des services de conseils en matière de droits à toutes les personnes qui sont jugées incapables, peut-être par l’entremise d’un système de « visiteur » dans le cadre duquel des professionnels ou des bénévoles formés rendraient visite à toutes les personnes qui n’ont pas la capacité juridique, leur fourniraient des conseils en matière de droits et répondraient à toute question qu’elles pourraient avoir à propos de l’arrangement concernant la prise de décision[844]. ARCH fait les observations suivantes :

[traduction] Fournir des conseils en matière de droits aux personnes « incapables » est une manière pratique de promouvoir l’autonomie et l’indépendance, ainsi que la participation pleine et efficace. Le premier principe exige que les personnes ayant un handicap aient accès aux renseignements nécessaires afin de comprendre leurs droits et de les exercer. La prestation de conseils en matière de droits contribuera à garantir que les personnes « incapables » soient conscientes qu’elles peuvent participer aux décisions qui les concernent ou qu’elles peuvent contester les décisions des personnes qui prennent des décisions pour elles. Le fait d’avoir des connaissances sur les droits et les mécanismes pour les faire valoir procurerait un certain degré d’autonomisation aux personnes « incapables ». La prestation de conseils en matière de droits à chaque personne qui est assujettie à une certaine forme de prise de décision est une étape fondamentale vers la protection et la promotion des droits des personnes « incapables »[845].

D’autres critiques portaient sur des problèmes de mise en œuvre, surtout des défis que pose le fait de s’assurer que la fonction des conseillers en matière de droits est pleinement respectée, de sorte que ceux-ci soient en mesure de s’acquitter efficacement de leur mandat. Selon certains, des mécanismes plus efficaces sont nécessaires afin de garantir que les professionnels de la santé comprennent, respectent et appuient les exigences législatives relatives aux conseils en matière de droits.

 

Le Bureau de l’intervention en faveur des patients des établissements psychiatriques

Comme nous l’avons vu plus haut, le BIPEP joue un rôle essentiel dans la prestation de services d’intervention soutenus, indépendants et cohérents grâce à sa fonction de conseils en matière de droits. Surtout, cette fonction axée sur la personne se conjugue à un rôle systémique. Le mandat du BIPEP énonce les fonctions suivantes :

  • faire progresser les droits légaux et civils des patients grâce au travail social individualisé et à l’intervention systémique;
  • informer le patient, les membres de la famille, le personnel hospitalier et la collectivité sur les droits légaux et civils des patients;
  • aider les patients des établissements psychiatriques à résoudre les plaintes qu’ils ont déposées, le cas échéant, par voie de négociation et selon leurs directives, et leur faciliter la tâche à cette fin (autonomie sociale);
  • enquêter sur les incidents présumés et évaluer les réactions relatives à ces cas aux niveaux des institutions et du système;
  • au besoin, recommander aux patients des ressources en matière de défense des droits dans la collectivité comme des organismes communautaires, des avocats ou des médecins pouvant leur donner une seconde opinion.

Le BIPEP propose de la documentation en langage clair relativement aux droits des patients et mène des activités de vulgarisation. Il a pris part à une large gamme d’initiatives de réforme du droit liées à son mandat, et il a été actif auprès des médias afin d’accroître la sensibilisation du public sur les questions des droits des patients. Il a également partagé son expertise avec d’autres institutions dans plusieurs territoires. Le BIPEP a eu une incidence considérable par son programme d’intervention systémique, notamment par des campagnes visant à accroître l’allocation pour besoins personnels, à veiller à l’accès aux droits de vote, à constituer des conseils des patients dans les hôpitaux psychiatriques provinciaux et à traiter de la question de la divulgation par la police de contacts non criminels liés à la santé mentale dans le cadre des vérifications de casiers judiciaires[846].

 

2.     Avocat selon l’article 3

En vertu de la LPDNA (et donc aux fins de la capacité de gérer les biens ou de prendre des décisions relatives au soin de la personne), si la capacité d’une personne qui n’est pas représentée par un avocat est une question en litige dans une instance introduite en vertu de la présente loi, le tribunal peut faire prendre des dispositions pour faire représenter la personne par un avocat, et la personne est réputée capable de retenir les services d’un avocat et de le mandater.

Dans certains cas de ce genre, la personne peut être admissible à l’aide juridique et un certificat peut être délivré à cette fin. Si ce n’est pas le cas, la personne est responsable de ses propres frais de justice. La personne ou son tuteur aux biens ou son procureur constitué en vertu d’une procuration relative aux biens peut demander l’examen des honoraires juridiques demandés par l’avocat nommé aux termes de cet article.

« L’avocat selon l’article 3 » joue un rôle vital en vue d’assurer que les droits des personnes dont le manque de capacité juridique est allégué soient reconnus et défendus. Cependant, des avocats agissant à ce titre ont souligné à la CDO que, dans un nombre non négligeable de causes, la personne agissant alors à titre de tuteur ou exerçant une procuration pour la personne visée, a des intérêts contraires à ceux de cette personne, et que ces mandataires spéciaux ont une possibilité et un incitatif considérables à tenter de faire dérailler la représentation efficace par un avocat selon l’article 3. S’ils ont la garde physique de la personne, ils peuvent essayer de bloquer ou de limiter l’accès à l’avocat, ou ils peuvent tenter de surveiller les conversations entre l’avocat et le client, ou de les écouter clandestinement. Ils peuvent utiliser le contrôle qu’ils exercent sur les finances de la personne afin de bloquer ou de retarder déraisonnablement le paiement des honoraires juridiques. Ces difficultés peuvent miner la capacité de l’avocat selon l’article 3 de s’acquitter efficacement de son rôle et peut décourager les avocats d’accepter des clients en vertu de cet article. Il a été mentionné que des réformes étaient nécessaires afin de réduire les possibilités que les mandataires spéciaux contrecarrent l’intention des dispositions de l’article 3.

 

3.     Aide juridique

La Loi de 1998 sur les services d’aide juridique prévoit des services dans le domaine du droit de la santé mentale[847]. AJO fournit notamment des certificats aux clients qui se trouvent dans le système civil de santé mentale et qui exercent des droits à un examen devant la CCC en vertu de la LSM et de la LCSS. Les exigences d’admissibilité à un certificat d’aide juridique pour une audience devant la CCC sont assez souples en comparaison à d’autres domaines. Au cours de l’exercice 2010-2011, AJO a dépensé 2,8 millions de dollars pour des certificats relatifs à des requêtes à la CCC, ce qui comprenait la délivrance de 2 836 certificats et la tenue de 2 566 audiences. Pour mettre ces nombres en contexte, au cours de cet exercice, un total de 5 216 requêtes a été déposé devant la CCC.

L’article 81 de la LCSS énonce que si une personne qui est une partie à une instance devant la CCC peut être incapable et n’a pas de représentant en justice, la CCC peut ordonner à AJO de prendre des dispositions en vue de la représentation de la personne. Il faudrait prendre note que ceci n’oblige en rien AJO à délivrer un certificat relativement à cette représentation en justice si la personne n’est pas par ailleurs admissible. La personne sera alors responsable du paiement des frais de justice qui en découlent.

AJO possède des normes relatives aux listes qui régissent les avocats représentant des clients devant la CCC. En vertu de ces normes, les avocats inscrits sur la liste de la CCC devront répondre aux exigences suivantes :

  • suivre une formation obligatoire sur la représentation devant la CCC;
  • assister en tant qu’observateur à au moins une audience de la CCC avant de représenter un client d’AJO devant la CCC;
  • conserver un niveau minimum d’expérience (en règle générale, trois mandats tous les deux ans);
  • respecter les « Attentes d’AJO à l’égard des avocats inscrits sur la liste de la CCC », lesquelles comprennent entre autres des exigences liées aux communications avec les clients, aux mesures d’adaptation aux besoins des clients, à la préparation adéquate en vue des audiences et à la capacité de s’adapter aux situations.

Environ 100 avocats et avocates fournissent activement des services d’aide juridique en droit de la santé mentale (y compris relativement aux audiences devant la Commission ontarienne d’examen et devant la CCC).

AJO ne finance généralement pas les appels des décisions de la CCC devant la Cour supérieure. Comme nous l’avons vu dans le chapitre précédent, le manque d’accès à une représentation pour les personnes qui interjettent appel des décisions de la CCC et les retards que cela entraîne pour les règlements définitifs de questions urgentes constituaient un point de préoccupation considérable pour plusieurs des intéressés pendant les consultations préliminaires de la CDO.

AJO élabore actuellement une stratégie globale en matière de santé mentale, dont plusieurs aspects peuvent avoir une incidence importante sur les personnes qui sont visées par les lois sur la capacité juridique, la prise de décision et la tutelle. L’objectif de la stratégie est d’augmenter et d’améliorer les services qu’AJO propose actuellement tout en consacrant de nouveaux programmes et de nouvelles ressources aux clients ayant des problèmes de santé mentale ou de toxicomanie. AJO a publié un document de consultation sur la stratégie et elle devrait publier officiellement la stratégie pour commentaires plus tard en 2014[848].

 

4.     Cliniques juridiques spécialisées

Les cliniques juridiques spécialisées fournissent des services d’intervention tant systémique qu’auprès des personnes à propos d’une large gamme de questions auxquelles font face les groupes marginalisés de l’Ontario. Deux de ces cliniques, l’Arch Disability Law Centre (ARCH) et l’Advocacy Centre for the Elderly (ACE), ont consacré une part importante de leurs ressources aux questions liées à la capacité mentale, à la prise de décision et à la tutelle. Il faut toutefois prendre note que les deux cliniques disposent de ressources limitées et d’un personnel peu nombreux et qu’elles ne peuvent pas fournir de services de représentation directe aux personnes qui pourraient en avoir besoin, mais ne disposent pas des moyens de se les payer.

ACE, qui existe depuis 1984, propose des services juridiques aux personnes âgées à faible revenu de partout en Ontario. Ces services comprennent des conseils et une représentation individuels ou de groupe, de la vulgarisation juridique, du développement communautaire ainsi que des activités liées à la réforme du droit. Puisque les lois relatives à la capacité juridique, à la prise de décision et à la tutelle peuvent avoir un effet disproportionné sur les Ontariens âgés, ACE y a accordé une importante centrale. ACE fournit des conseils et des renseignements sur des questions reliées à la capacité, au consentement aux soins de santé et à la planification préalable des soins et il prend part à des litiges stratégiques, y compris récemment à une intervention conjointe avec ARCH dans l’affaire Cuthbertson c. Rasouli, une décision de la Cour suprême du Canada portant sur le consentement au retrait d’un traitement[849]. ACE a contribué grandement à vulgarisation les questions liées à la capacité et à la prise de décision au nom d’autrui, de même qu’à l’élaboration de nombreuses publications sur le sujet, y compris des webinaires, des documents en langage clair et un outil destiné aux professionnels produit en collaboration avec l’Initiative nationale pour le soin des personnes âgées (INSPA). ACE joue également un rôle dans les efforts de réforme du droit dans le domaine et prépare notamment des observations.

ARCH fournit une gamme semblable de services aux personnes handicapées. Ce centre possède une expérience considérable dans le travail avec les personnes ayant des problèmes liés à la capacité juridique ou pour lesquelles on tient erronément pour acquis qu’elles ont des problèmes de capacité en raison de leur handicap ou de leur médication. ARCH a déterminé que la capacité juridique constituait un domaine prioritaire de travail. ARCH a rédigé des documents d’orientation sur des questions liées à la capacité, par exemple sur le traitement de la question de la capacité devant les tribunaux administratifs, a offert des ateliers sur le droit relatif à la capacité à des personnes handicapées et à des travailleurs qui soutiennent les personnes ayant des déficiences intellectuelles. Sur le plan individuel, ARCH fournit des conseils aux personnes handicapées qui sont assujetties à une tutelle ou à d’autres formes de prise de décision au nom d’autrui, assiste les clients dans leurs négociations avec le TCP ou d’autres mandataires spéciaux, aide les clients à obtenir des évaluations de la capacité et à s’y préparer et assiste les clients dans les démarches visant à mettre fin à une tutelle. ARCH a participé à plusieurs causes importantes reliés au droit de la capacité et du consentement, y compris récemment l’affaire Zheng v. Zheng, une cause importante portant sur les ordonnances d’évaluation de la capacité dans le contexte des requêtes en vue de mettre fin à la tutelle[850].

 

5.     Commentaires généraux

Comme le démontre ce qui précède, le système ontarien relatif à la capacité juridique, à la prise de décision et à la tutelle n’est pas dépourvu de mécanismes d’intervention et de soutien. Il existe un certain nombre de personnes et d’organismes qui visent à fournir des mesures de soutien tant officielles qu’informelles afin de donner du pouvoir aux personnes et de protéger les droits et qui sont vus à juste titre comme des éléments vitaux des lois sur la capacité juridique, la prise de décision et la tutelle de l’Ontario. 

Il est toutefois exact de dire que le système actuel n’est pas fondamentalement différent de ce qui était décrit, et jugé inadéquat, dans le rapport du Comité Fram  et dans l’Examen O’Sullivan. Bon nombre des personnes qui sont vulnérables en raison d’un handicap, de l’isolement, d’un déséquilibre des rapports de force ou d’autres facteurs utilisent un système de justice et de prestation de services complexe sans avoir accès à du soutien officiel pour ce faire. Les services et les mesures de soutien qui existent sont fragmentés et ont une portée limitée.

Comme on l’a mentionné ici, deux des principales préoccupations dégagées au cours des consultations préliminaires étaient d’une part les difficultés que vivent les personnes lorsqu’elles utilisent les systèmes et les défis auxquels font face les prestataires de services qui les aident à le faire et, d’autre part, les préoccupations voulant que le système n’ait pas de mécanismes efficaces pour garantir que les droits qu’énonce la législation soient respectés. Ces préoccupations peuvent être considérées directement reliées au manque d’accès à des renseignements, à des conseils et à une aide à l’utilisation qui soient indépendants, bien informés et destinés aux personnes directement touchées par la loi et à celles qui les soutiennent.

La Loi de 1992 sur l’intervention et les mesures connexes dans la LPDNA et la Loi de 1992 sur le consentement au traitement ont échoué parce qu’on a estimé que leur coût était élevé, parce qu’on s’est inquiété de ce qu’elles étaient trop contradictoires et que l’on espérait que les personnes assurant le soutien informel, comme les membres de la famille et les amis, allaient s’acquitter de cette fonction. Que la Loi de 1992 sur l’intervention ait pu ou non être un mécanisme viable pour répondre aux besoins identifiés, son abrogation n’a pas supprimé le besoin d’avoir certains mécanismes pour exercer cette fonction, peu importe le nom qu’on pourrait leur donner.

Un examen de ce qui se fait dans d’autres administrations et dans d’autres domaines du droit en Ontario à l’égard des populations vulnérables a révélé que plusieurs systèmes comprennent des mécanismes, constitués de différentes manières, destinés à remplir cette fonction. Les sections qui suivent montrent certains modèles possibles. Il ne s’agit pas d’un examen exhaustif; il vise simplement à souligner certaines possibilités existantes. S’il est peu vraisemblable qu’un de ces modèles puisse être simplement transféré tel quel dans le système ontarien en matière de capacité juridique et de tutelle afin de remplir efficacement les besoins, ils peuvent néanmoins aider à dégager les éléments de certaines options susceptibles d’être envisagées dans la conception d’un mécanisme approprié à l’Ontario. 

 

  • QUESTION À ABORDER : existe-t-il des manières de renforcer les mesures de soutien existantes pour l’accès aux droits en vertu des lois relatives à la capacité juridique, à la prise de décision et à la tutelle, notamment des conseils en matière de droits, des avocats selon l’article 3 et des services d’aide juridique à l’intention des personnes qui se retrouvent visées par ces lois? Y aurait-il moyen d’étendre ces mesures de soutien afin de toucher un plus vaste éventail de besoins?

 

D.   Modèles pour la prestation de mesures de soutien à l’accès au droit

Des mesures de soutien à l’accès au droit peuvent être fournies de différentes façons. Ci-dessous se trouvent des exemples de mesures de soutien fournis par des institutions publiques indépendantes et spécialisées, par des services intégrés dans des institutions qui entrent en contact avec les personnes susceptibles d’avoir besoin d’aide, et par du financement à des organismes communautaires. Ces exemples ne sont pas mentionnés à titre de propositions particulières dans le cadre des réformes des lois et des systèmes ontariens, mais plutôt en tant qu’exemple à prendre en considération pour de possibles manières d’aborder les mesures de soutien dans le contexte ontarien.

 

1.     Institutions d’intervention publiques spécialisées

La prestation de mesures de soutien par l’entremise d’un organisme d’intervention indépendant et financé par l’État vise à créer une organisation spécialisée, centralisée et experte, en mesure d’acquérir une compréhension profonde des questions en jeu et de la population qu’elle dessert, et de faire des liens entre les questions individuelles et systémiques. Deux exemples sont donnés ci-dessous. Le Victoria a dans son système pour la capacité juridique, la prise de décision et la tutelle un « défenseur des personnes handicapées » spécialisé qui fournit un éventail de services et de mesures de soutien, notamment du soutien afin d’aider les personnes à avoir accès aux droits que la loi leur accorde. En Ontario, l’intervenant provincial en faveur des enfants et des jeunes procure un point central pour l’intervention en faveur d’une population qui vit des restrictions importantes en ce qui a trait à l’expression et à l’accès au droit.

État du Victoria : Bureau du défenseur des personnes handicapées 

Les institutions australiennes de « défenseur des personnes handicapées » fournissent un modèle d’intervention publique globale, indépendante et institutionnelle dans le contexte des lois sur la capacité et la tutelle. Plusieurs États australiens, notamment ceux du Queensland, du Victoria et de l’Australie-Méridionale, ont des « défenseurs des personnes handicapées » ou des organismes s’acquittant de fonctions semblables.

Depuis le milieu des années 1980, le Victoria a un fonctionnaire indépendant prévu par la loi appelé « Public Advocate », soit le défenseur des personnes handicapées, à qui incombe la vaste responsabilité de promouvoir et de protéger les droits et les intérêts des personnes handicapées. Le défenseur des personnes handicapées joue un double rôle de tuteur de dernier recours et d’« organisme de surveillance officiel » pour les droits des personnes handicapées en général. Les fonctions du défenseur des personnes handicapées sont les suivantes [traduction] :

a)      promouvoir, faciliter et encourager la prestation, le développement et la coordination de services et d’institutions fournis par des organismes publics, communautaires et bénévoles en faveur de personnes handicapées dans le but de promouvoir le développement de l’aptitude et de la capacité de ces personnes d’agir de façon indépendante; de réduire au minimum les restrictions relatives aux droits des personnes handicapées; d’assurer l’utilisation maximale par les personnes handicapées de ces services et institutions; et d’encourager les organisations bénévoles ainsi que les membres de la famille, les tuteurs et les amis à participer à la prestation et à la gestion de ces services et institutions;

b)      soutenir la création d’organisations œuvrant auprès des personnes handicapées, des membres de leur famille, des tuteurs et des amis dans le but de mettre sur pied des programmes d’intervention citoyenne et d’autres programmes d’intervention; d’entreprendre des projets de vulgarisation communautaire; et de promouvoir la responsabilité familiale et communautaire à l’égard des tutelles;

c)      organiser, coordonner et promouvoir la sensibilisation et la compréhension avertie du public par la diffusion d’information relative aux dispositions de la loi intitulée Guardianship and Administration Act et d’autres textes législatifs relatifs les personnes handicapées;

d)      enquêter, faire rapport et faire des recommandations au ministre sur tout aspect de l’application de la Loi que le ministre a renvoyé au défenseur des personnes handicapées[851].

Les fonctions du défenseur des personnes handicapées concernant les mesures de soutien individuelles comprennent l’obtention d’aide pour une personne handicapée auprès de tout ministère, établissement, « organisme d’aide sociale » ou prestataire de services, la présentation d’observations pour le compte d’une personne handicapée ou la représentation de celle-ci, ainsi que la prestation de conseils à toute personne à propos de la Loi[852].

La Commission de réforme du droit du Victoria déclare ce qui suit :

[traduction] Le défenseur des personnes handicapées effectue de l’intervention tant systémique qu’individuelle. Ces expressions ont tendance à être employées dans des sens différents au sein de la collectivité. L’intervention peut toutefois se comprendre en termes larges comme étant « essentiellement le processus très ordinaire de se porter à la défense des droits des personnes qui sont traitées injustement ». Le défenseur des personnes handicapées décrit son travail d’intervention comme un service de « dernier ressort » qui « se concentre sur l’intérêt véritable de la personne handicapée qui présente des risques d’abus, d’exploitation ou de négligence[853].

L’intervention individuelle peut comprendre des appels téléphoniques, la rédaction de lettres, l’organisation de réunions, ou de l’aide pour la présentation de plaintes officielles, la médiation ou des instances judiciaires. L’intervention systémique découle du travail stratégique du défenseur des personnes handicapées, et comprend de la recherche, des mémoires et des rapports.

Au cours de l’exercice 2012-2013, le défenseur des personnes handicapées a fourni des services d’intervention à 394 personnes[854], en plus d’activités systémiques telles que des présentations relatives à des projets de loi, d’orientation, de règlement et de ligne directrice. Les dossiers d’intervention peuvent être renvoyés à partir du tribunal civil et administratif du Victoria (VCAT) (examiné au chapitre précédent), peuvent découler de demandes directes présentées au Bureau du défenseur des personnes handicapées ou peuvent venir de la propre initiative du défenseur des personnes handicapées. Ce dernier souligne également [traduction] « l’intention du bureau de rester centré sur l’intervention en faveur de toutes les personnes handicapées »[855]. Les services d’intervention individuelle peuvent viser des questions complexes, ou à court et à long terme. Le défenseur des personnes handicapées a récemment entrepris un projet d’intervention dans une unité sécurisée de soins prolongés, qui identifie les personnes ayant résidé dans ces unités pour de longues périodes afin de parler avec elles et avec leurs fournisseurs de soins et de clarifier les questions menant à la longue résidence dans ces unités. Dans certains cas, une telle intervention peut mener à des changements dans le statut relatif à la résidence[856].

Lors des consultations de la Commission de réforme du droit du Victoria sur les réformes au droit de la tutelle, les fonctions d’intervention du défenseur des personnes handicapées ont reçu un fort appui, même si des suggestions ont été faites voulant qu’il serait utile de clarifier et de renforcer les dispositions législatives relatives à cette fonction. Certains ont fait part de préoccupations selon lesquelles, en raison du double rôle du défenseur des personnes handicapées en tant qu’intervenant et tuteur de dernier recours, les fonctions d’intervention étaient négligées en faveur de ses responsabilités en matière de tutelle.

Le défenseur des personnes handicapées a laissé entendre que ses fonctions d’intervention (particulièrement l’intervention individuelle) devaient reposer sur un ensemble de principes, et qu’en particulier, l’intervention devait :

  • être fournie d’une manière qui fait la promotion du bien-être personnel et social de la personne;
  • donner effet, dans la mesure du possible, aux désirs de la personne;
  • être accomplie, si possible, en consultation avec la personne;
  • être fournie de la manière la moins restrictive possible dans les circonstances pour la liberté de décision et d’action de la personne;
  • aider la personne à vivre en sécurité et sans qu’elle subisse d’abus, d’exploitation ni de négligence;
  • permettre à la personne de participer à la collectivité et d’y jouer un rôle dans toute la mesure du possible compte tenu des circonstances[857].

La Commission de réforme du droit du Victoria a recommandé des modifications afin de clarifier la fonction d’intervention du défenseur des personnes handicapées, y compris sa capacité à effectuer des interventions tant individuelles que systémiques et sa capacité d’intervenir dans des instances devant des tribunaux judiciaires ou administratifs dans le cadre de cette fonction, et de préciser que la fonction d’intervention devrait être guidés par un ensemble de principes en harmonie avec ceux de la législation en matière de tutelle dans son ensemble[858].

Le système de défenseur des personnes handicapées, bien qu’il ait une portée plus large que les personnes jugées incapables, est lié de près au système de capacité et de tutelle. Sa démarche est réactive (il n’est pas obligatoire de recourir à des défenseurs) et, pour la plus grande part, ponctuelle. L’échelle de ses activités d’intervention est relativement petite, mais ces activités sont intégrées dans ses activités de tuteur, d’enquêteur et de point central global pour les problèmes touchant les personnes handicapées. Il est en mesure d’entreprendre des interventions individuelles et systémiques, et dans certains cas, les deux sont liées, comme dans le cas de l’initiative relative à l’unité sécurisée de soins prolongés susmentionnée.

 

Ontario : Intervenant provincial en faveur des enfants et des jeunes

L’intervenant provincial en faveur des enfants et des jeunes de l’Ontario propose un exemple ontarien d’un programme officiel d’intervention qui fonctionne en dehors d’une structure institutionnelle organisée. L’intervenant provincial a une longue histoire remontant à la création de « l’Avocat des enfants » en 1978. Le bureau était situé au sein du ministère des Services sociaux et communautaires, et relevait du sous-ministre; il se concentrait sur la prestation de services d’intervention pour les enfants « difficiles à contenter » ou « incorrigibles ». Le poste a été reconnu en 1982 par la Loi sur les services à l’enfance et à la famille en tant que Bureau d’assistance à l’enfance et à la famille et, au fil du temps, il a graduellement commencé à entreprendre des interventions systémiques en plus des interventions individuelles[859].

En 2007, l’Assemblée législative a adopté la Loi de 2007 sur l’intervenant provincial en faveur des enfants et des jeunes avec le soutien de tous les partis. L’intervenant est nommé a par le lieutenant-gouverneur en conseil pour un mandat de cinq ans[860], sur recommandation d’un comité composé de tous les partis. Il relève directement de l’Assemblée législative plutôt que d’un ministère. L’intervenant doit déposer un rapport annuel devant l’Assemblée législative. Il intervient en faveur des enfants en vertu de la Loi sur les services à l’enfance et à la famille, à l’égard d’enfants dans des écoles provinciales ou des écoles d’application et des enfants et des jeunes en ce qui concerne les questions soulevées lors de leur détention dans des cellules de détention des palais de justice (ou de leur transport à destination ou en provenance de celles-ci)[861]. L’intervenant a adopté son énoncé de mission : « Le Bureau de l’intervenant provincial en faveur des enfants et des jeunes sert les jeunes qui sont pris en charge par l’État et ceux qui vivent en marge des soins fournis par l’État au moyen d’une intervention individuelle, systémique et stratégique. Le Bureau s’efforce, à tous ses niveaux d’activité, d’être une référence quant à la participation auprès des jeunes »[862].

L’intervenant est investi de larges pouvoirs afin de s’acquitter de ses fonctions. Il peut, entre autres, recevoir des plaintes, représenter les points de vue et les préférences des personnes auprès des agences et des prestataires de services, recourir à des méthodes informelles de règlement des différends entre les personnes et les prestataires de services, effectuer des examens (soit en réponse à des plaintes, soit de sa propre initiative), faire des rapports, fournir des conseils et faire des recommandations, fournir des renseignements sur la manière d’avoir accès à des services approuvés, et procéder à des examens systémiques. Il ne peut pas représenter des personnes devant un tribunal judiciaire ou administratif[863].

Selon l’intervenant, son travail porte sur trois fronts : intervention individuelle, intervention systémique et développement communautaire[864]. En 2011-2012, l’intervenant a reçu près de 3 500 demandes d’assistance et a entrepris un large éventail d’activités, notamment la prestation d’aide à des enfants et jeunes des Premières Nations dans la rédaction d’un contre-rapport au Comité des droits de l’enfant des Nations Unies relativement aux injustices dans le financement de la vulgarisation; la création du Livre de ma véritable histoire qui donne un aperçu du système de bien-être de l’enfance du point de vue des enfants et des jeunes pris en charge par ce système; le rapport et les tournées Notre voix, Notre tour sur les enfants qui sortaient du réseau de soins, l’élaboration d’une soumission à la Commission d’examen du système d’aide social, la création d’une base de données sur les enquêtes pour soutenir les interventions en lien avec les décès des enfants qui étaient visés par le mandat de l’Intervenant, des examens réguliers de foyers de groupe, et bien d’autres encore.

Les prestataires de services et les agences sont tenus d’informer les enfants confiés à leurs soins de l’existence et du rôle de l’Intervenant. Ils doivent également leur fournir des renseignements sur la manière de communiquer avec l’Intervenant et, lorsque l’enfant ou le jeune le souhaite, ils doivent lui fournir les moyens de le faire de façon privée et sans délai[865]. La loi prévoit en outre un accès à l’information et la protection de la confidentialité[866].

Reflet d’une démarche large et fondée sur les principes, la Loi précise que, pour son interprétation et son application, il faut tenir compte des principe formulés dans la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant et du fait qu’il est souhaitable que la charge de l’Intervenant donne « l’exemple en ce qui concerne la participation constructive des enfants et des jeunes dans tous les aspects de ses services d’intervention »[867].

 

2.     Mesures de soutien institutionnelles intégrées

Outre la prestation de mesures de soutien adaptées par l’entremise d’institutions spécialisées, des mesures de soutien et d’intervention peuvent également être intégrées dans des structures institutionnelles plus larges, ayant le mandat de fournir des mesures de soutien proactives et universelles à des points déterminés où des droits sont en jeu. Il s’agit du modèle selon lequel fonctionnent les conseils en matière de droits qui existent en ce moment en Ontario. Comme nous l’avons vu dans la discussion relative aux conseillers en matière de droits, ce programme reçoit un soutien ferme de la part des intéressés, et il a été proposé que ce programme, ou un autre semblable, soit étendu à d’autres domaines ou populations. Deux exemples de programmes de soutien et d’intervention dans ce domaine du droit qui fonctionnent dans des contextes différents ou plus larges que le programme des conseillers en matière de droits sont examinés ci-dessous. Les intervenants indépendants en matière de capacité mentale (Independent Mental Capacity Advocates) (les IICM) du Royaume-Uni fonctionnent sous l’égide du service de santé national de ce pays afin de fournir des services d’intervention dans le contexte du traitement et des soins à long terme de personnes dépourvues de la capacité juridique qui n’ont pas le soutien de membres de leur famille ou d’amis. Les agents d’examen (Review Officers) en Alberta proposent des services et du soutien aux personnes faisant l’objet de processus de nomination par le tribunal liés à la capacité juridique et à la prise de décision.

 

Royaume-Uni : intervenants indépendants en matière de capacité mentale

La loi intitulée Mental Capacity Act 2005 comprend un cadre de droits légaux à l’intervention dans des circonstances déterminées. Elle crée un service d’intervenants indépendants en matière de capacité mentale (IICM), qui est responsable d’aider [traduction] « les personnes particulièrement vulnérables n’ayant pas la capacité de prendre des décisions importantes à propos de traitements médicaux graves et de changements dans leur logement et qui n’ont aucun membre de leur famille ou ami qu’il serait indiqué de consulter relativement à ces décisions »[868]. Un IICM doit entrer en jeu relativement à une personne incapable qui n’a personne pour la soutenir, chaque fois qu’un traitement médical sérieux est proposé, ou qu’un hébergement résidentiel de longue durée est envisagé[869]. Les IICM peuvent jouer un rôle dans les examens des dossiers et dans les cas de protection des adultes[870]. Les autorités locales ou le service de santé national (selon ce qui est pertinent) (« la partie responsable ») sont responsables de prendre les dispositions pour une intervention de l’IICM lorsqu’elle est exigée ou appropriée.

La fonction de l’IICM est de soutenir et de représenter la personne. Pour faciliter cette fonction, la loi lui accorde un droit d’accès aux dossiers de soins de santé et de soins sociaux nécessaires et elle lui permet de rencontrer la personne de façon privée. Tout renseignement ou dossier que fournit l’IICM doit être pris en compte relativement à la décision en cause. Le Code de pratique définit les devoirs de l’IICM et précise qu’il doit :

  • être indépendant de la personne prenant la décision;
  • fournir du soutien à la personne n’ayant pas la capacité juridique;
  • représenter la personne dépourvue de capacité dans le cadre de discussions visant à déterminer si la décision proposée est dans [traduction] « l’intérêt véritable » de la personne au sens de la Loi;
  • fournir des renseignements afin d’aider à déterminer ce qui est dans l’intérêt véritable de la personne;
  • soulever des questions ou contester des décisions qui semblent ne pas être dans l’intérêt véritable de la personne[871].

Le Code de pratique pris en application de la Mental Capacity Act 2005 insiste sur le devoir de l’IICM de s’assurer des désirs, des valeurs et des préférences de la personne :

[traduction] L’IICM se doit d’essayer de déterminer quels pourraient être les désirs et sentiments de la personne, et quelles pourraient être ses croyances et valeurs sous-jacentes. L’IICM devrait tenter de communiquer tant oralement qu’autrement avec la personne qui peut être incapable, de la manière qui est appropriée. Par exemple, ce pourrait être en utilisant des images ou des photographies. Il existera toutefois des situations où la personne ne peut pas communiquer du tout (par exemple, si elle est inconsciente). L’IICM peut alors parler avec d’autres professionnels ou des aidants rémunérés qui ont pris part aux soins ou aux traitements actuels ou antérieurs. L’IICM pourrait également devoir examiner les dossiers de santé et de soins sociaux de la personne ainsi que tout écrit énonçant ses préférences que la personne peut avoir fait pendant qu’elle avait la capacité de le faire[872].

Les IICM sont tenus d’avoir une expérience particulière, d’avoir suivi la formation des IICM et d’être des personnes intègres et de bonne réputation, en mesure d’agir de façon indépendante[873]. Les « organismes responsables » devraient mettre sur pied des mécanismes de règlement des différends, de même que des procédures, de la formation et des programmes de sensibilisation afin de garantir que le personnel sache quand ils doivent informer un IICM et à ce qu’ils disposent de l’information pertinente pour ce faire; conserver les dossiers pertinents relatifs aux activités de l’IICM; consigner la manière dont le prestataire de services a tenu compte du rapport de l’IICM et des renseignements qu’il a donnés dans le cadre du processus de détermination de l’intérêt véritable de la personne; donner accès à tous les dossiers pertinents selon ce qui a été demandé et transmettre les renseignements pertinents; informer toutes les personnes pertinentes qu’un IICM a été avisé, et enfin informer l’IICM de la décision définitive et des motifs de celle-ci[874].

Comme dans le cas des conseillers en matière de droits, les activités des IICM :

  • sont prévues par la loi, celle-ci imposant aux institutions pertinentes la responsabilité de faciliter leur travail;
  • sont orientées vers des décisions précises ou des points tournants où les personnes sont particulièrement vulnérables;
  • portent principalement sur l’intervention en faveur de la personne.

La fonction des IICM comporte quelques différences importantes par rapport à celle des conseillers en matière de droits. Le soutien cible un éventail plus large de situations, notamment celles qui, en Ontario, sont visées par des renseignements relatifs aux droits plutôt que par des conseils en matière de droits. Cependant, les mesures de soutien ne visent que les personnes les plus vulnérables, soit celles qui ne disposent d’aucun soutien informel.

Deuxièmement, la tâche des IICM ne consiste pas uniquement à fournir des renseignements et à faciliter la contestation d’une décision, mais plus largement à représenter la personne. 

Cette fonction des IICM doit se comprendre dans le contexte du régime de la capacité juridique et de la tutelle de l’Angleterre et du Pays de Galles, lequel est très différent de celui de l’Ontario sur plusieurs aspects importants. Tout d’abord, la loi reconnaît explicitement le rôle que les accompagnateurs jouent pour aider une personne à prendre une décision : l’un des principes clés de la MCA est que les personnes doivent être soutenues autant que possible dans la prise d’une décision avant de parvenir à la conclusion qu’elles n’ont pas la capacité de la prendre. Le soutien peut comprendre la fourniture de renseignements dans des médias substituts, le fait de s’assurer que les contextes sont appropriés et que du temps est accordé pour les discussions, ou le fait de permettre à des membres de la famille ou à des amis de fournir de l’aide ou du soutien. Dans ce contexte, l’IICM pourrait être considéré comme jouant le rôle d’accompagnateur pour une personne qui n’a pas de soutien informel.

D’autre part, lorsqu’une personne est jugée incapable, et qu’elle n’a pas de procuration permanente ou de mandataire nommé par le tribunal, le travailleur de la santé ou le travailleur social prendra la décision dans l’intérêt véritable de la personne visée. En conséquence, la fonction de l’IICM devient un contrepoids essentiel au pouvoir des professionnels qui décideront pour le compte de leur client. L’IICM est la dernière protection pour les droits de la personne jugée incapable : son rôle de représentation de la personne et de contestation des décisions constitue une protection procédurale fondamentale. 

Alberta : agents d’examen

Dans le cadre de son système de requêtes en vue d’obtenir des ordonnances de prise de décision en commun, de tutelle et portant nomination d’un fiduciaire, la nouvelle loi albertaine relative à la mise sous tutelle d’adultes, intitulée Guardianship and Trusteeship Act, crée une fonction d’agent d’examen rattaché au tuteur et curateur public. Lorsque le tribunal reçoit une requête en vue de la nomination d’un codécideur, d’un tuteur (à la personne) ou d’un fiduciaire (pour les questions financières) autre que le tuteur et curateur public, un agent d’examen doit fournir au tribunal un rapport écrit qui énonce ce qui suit :

  • les opinions et les désirs de la personne qui fait l’objet de la requête;
  • le caractère convenable de chacun des codécideurs, tuteurs ou fiduciaires, de même que toute solution de rechange proposée[875];
  • dans le cas des « requêtes administratives », le respect, par l’agent d’examen, d’un certain nombre d’exigences procédurales[876];
  • tout autre commentaire que l’agent d’examen estime pertinent à la requête[877].

Le tribunal doit tenir compte de ces rapports pour prendre sa décision[878], à moins que la requête ne soit urgente[879].

Les requérants qui veulent obtenir une ordonnance de prise de décision en commun, de tutelle ou portant nomination d’un fiduciaire doivent présenter à l’agent d’examen un ensemble complet de documents dans les formats exigés, qui comprend notamment des références personnelles, un consentement à une vérification du casier judiciaire et, dans le cas des nominations de tuteur et de fiduciaire, un plan détaillé[880].

L’agent d’examen est tenu :

  • de rencontrer personnellement la personne qui fait l’objet de la requête;
  • d’expliquer la nature et l’objet de la requête, et le fait que la personne a le droit de demander la tenue d’une audience ainsi que d’assister à cette audience et d’y présenter des observations;
  • de vérifier les opinions et désirs de la personne à propos de la requête[881].

La fonction de l’agent d’examen est en quelque sorte analogue à celle d’un conseiller en matière de droits, en ce qu’il se concentre sur les questions individuelles; il a un rôle proactif (c’est-à-dire que chaque personne qui fait l’objet d’un type particulier de décision y a un accès obligatoire); et il se concentre sur la fourniture de renseignements et sur la communication des points de vue plutôt que sur la représentation ou la négociation.

Les conseillers en matière de droits intègrent le processus lorsqu’une détermination modifiant le statut de la personne a déjà été faite. Les agents d’examen jouent leur rôle au début du processus, avant qu’une décision ne soit prise. Cette façon de faire a plusieurs ramifications importantes sur leur rôle dans le système global en matière de capacité juridique, de prise de décision et de tutelle. On retrouve par ailleurs des différences importantes dans la manière dont la fonction de soutien est envisagée, notamment les suivantes :

  • l’exigence de vérifier les opinions et désirs de la personne touchée et d’en faire rapport donne à l’agent d’examen un rôle important de promotion de la voix de la personne;
  • l’agent d’examen a également une fonction d’évaluation des options qui est assez différente de celle du conseiller en matière de droits;
  • puisqu’il relève du TCP, l’agent d’examen n’est pas une structure indépendante;
  • la fonction de l’agent d’examen n’a pas l’élément systémique que le Bureau de l’intervention en faveur des patients des établissements psychiatriques fournit au système ontarien.

 

3.     Mesures de soutien fournies par des organismes

Les mesures de soutien peuvent par ailleurs être fournies d’une manière décentralisée, par le financement d’organismes communautaires qui ont des liens avec les collectivités concernées. Cette façon de faire permet de fournir les mesures de soutien dans le cadre d’une conception plus générale des besoins de la personne touchée, par l’entremise d’organisations qui possèdent déjà des profils et des relations solides avec les collectivités et les personnes visées. Le Programme de protection des adultes de l’Ontario est un exemple d’un tel service de soutien.


Ontario : Programme de protection des adultes

Le Programme de protection des adultes (PPA) existe en Ontario depuis 1974. Il est actuellement régi par la Loi de 2008 sur les services et soutiens favorisant l’inclusion sociale des personnes ayant une déficience intellectuelle (LSSFISPDI), sous l’égide du ministère des Services sociaux et communautaires (MSSC). En vertu de la LSSFISPDI, le MSSC finance les organismes parrains appropriés (habituellement des prestataires de services généraux) afin qu’ils offrent des programmes gratuits de protection des adultes aux personnes admissibles. 

Le PPA vise à proposer un soutien aux adultes ayant une déficience intellectuelle qui habitent seuls (sauf quelques exceptions) afin qu’ils vivent « dans la collectivité de la façon la plus autonome, la plus sûre et la plus sécuritaire possible ». Les travailleurs du PPA œuvrent directement avec les personnes admissibles sur une base volontaire, celles-ci étant des participants actifs à toutes les étapes de la relation.

Le PPA fournit les services suivants :

1)     Intervention en faveur des personnes qu’il dessert, afin de les aider à avoir accès à des soutiens communautaires généraux, à demander des services financés par l’État et à les aider par ailleurs à vivre en sécurité dans la collectivité;

2)     Aide aux personnes afin de définir leurs points forts et leurs besoins et leur fournir des renseignements et des recommandations;

3)     Coordination et gestion de cas des ressources communautaires, des plans de services et de la liaison avec les autres prestataires de services;

4)     Offre de soutien dans d’autres domaines, comme la résolution de problèmes, le développement des aptitudes à la vie quotidienne, l’éducation générale et la conscientisation.

Les Lignes directrices du Programme de protection des adultes de 2012 du MSSC énoncent ce qui suit :

Dans le rôle de défenseur, l’intervenante ou intervenant en protection des adultes travaille avec des services et organismes communautaires pour :

  • veiller, dans le cadre de son mandat et de ses pouvoirs, à ce que les droits de l’adulte ayant une déficience intellectuelle soient reconnus et respectés
  • informer cette personne de ses droits.

Avant d’agir à titre de défenseur, l’intervenante ou intervenant en protection des adultes détermine la mesure dans laquelle la personne ayant une déficience intellectuelle comprend une situation potentiellement dangereuse ou complexe et peut parler en son nom propre[882].

Les travailleurs du PPA ne prennent pas de décisions pour le compte des personnes, ni n’agissent à titre de tuteur ou aux termes d’une procuration. Les Lignes directrices insistent : « Bien que l’intervenante ou intervenant en protection des adultes puisse aider les personnes à prendre des décisions saines et sécuritaires, en fin de compte, la décision définitive appartient à l’adulte ayant une déficience intellectuelle qui est capable de prendre les décisions en question »[883]. Dans des cas exceptionnels, l’intervenant du PPA peut agir temporairement à titre de fiduciaire pour le soutien du revenu du POSPH, pendant que des solutions de rechange pour ce service sont mises en place[884].

 

  • QUESTION À ABORDER : que peut-on apprendre des mesures de soutien relatives à l’accès au droit dans d’autres administrations ou dans d’autres programmes ontariens?

 

  • QUESTION À ABORDER : faudrait-il proposer du soutien de manière proactive, ou à la suite de la demande de la personne? Est-ce que cela est différent à divers points du système?

 

  • QUESTION À ABORDER : qui devrait proposer des mesures de soutien à l’accès au droit dans ce domaine? Par exemple, devraient-elles être fournies par des organismes communautaires ou une institution publique spécialisée ou devrait-il s’agir de mesures de soutien institutionnelles intégrées?

 

E.    Questions à aborder

  1. Quels types de mesures de soutien sont les plus importants afin d’aider les personnes visées par ce domaine du droit à comprendre et à faire valoir leurs droits? Le soutien devrait-il se concentrer sur la fourniture rapide de renseignements accessibles et appropriés, sur l’aide pour s’y retrouver dans des systèmes complexes, sur le fait de soutenir les personnes touchées pour qu’elles expriment leurs valeurs et leurs souhaits, sur le soutien à défendre leurs droits, ou sur d’autres besoins?
  2. Que peut-on apprendre de l’histoire de la Loi de 1992 sur l’intervention afin de guider les réformes relativement à la fourniture de mesures de soutien aux personnes visées par ce domaine du droit?
  3. Existe-t-il des manières de renforcer les mesures de soutien existantes pour l’accès aux droits en vertu des lois relatives à la capacité juridique, à la prise de décision et à la tutelle, notamment des conseils en matière de droits, des avocats selon l’article 3 et des services d’aide juridique à l’intention des personnes qui se retrouvent visées par ces lois? Y aurait-il moyen d’étendre ces mesures de soutien afin de toucher un plus vaste éventail de besoins?
  4. Que peut-on apprendre des mesures de soutien relatives à l’accès au droit dans d’autres administrations ou dans d’autres programmes ontariens?
  5. Faudrait-il proposer du soutien de manière proactive, ou à la suite de la demande de la personne? Est-ce que cela est différent à divers points du système?
  6. Qui devrait proposer des mesures de soutien à l’accès au droit dans ce domaine? Par exemple, devraient-elles être fournies par des organismes communautaires ou une institution publique spécialisée ou devrait-il s’agir de mesures de soutien institutionnelles intégrées?

 

 

 

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