I.    Introduction

Le gouvernement de l’Ontario a demandé à la Commission du droit de l’Ontario (CDO) d’examiner de quelle façon les adultes ayant une déficience mentale pourraient avoir un meilleur accès au Régime enregistré d’épargne-invalidité (REEI). Le Conseil des gouverneurs de la CDO a approuvé en avril 2013 ce projet sur La capacité des adultes handicapés mentaux et le REEI fédéral. Le gouvernement de l’Ontario a rendu publique sa demande, ainsi que l’accord de la CDO d’exécuter le projet, dans le budget provincial de 2013, Un Ontario prospère et équitable, en mai 2013.

En règle générale, les personnes handicapées ont un niveau de vie moins élevé que le reste des Canadiens, notamment en raison d’obstacles sur le marché du travail et de leurs besoins non satisfaits en matière de soutien. Le REEI est un instrument créé par le gouvernement fédéral dans le but d’aider les personnes handicapées à assurer leur sécurité financière à long terme. Les institutions financières offrent le REEI aux membres admissibles du public. Les bénéficiaires, ainsi que les membres de leur famille et leurs amis, peuvent faire des cotisations privées à un REEI. En outre, ils peuvent recevoir une subvention du gouvernement qui égalera les cotisations et ceux qui ont un faible revenu peuvent être admissibles à des bons du gouvernement.

Le REEI a des objectifs particuliers en matière de politiques qui comprennent la réduction de la pauvreté ainsi que la promotion de l’autonomie et de la participation active des personnes handicapées à la prise de décisions qui les concernent. En vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu (LIR), un adulte ayant une déficience mentale peut établir un REEI en son nom et décider, à titre de « titulaire du REEI », des dispositions du régime. La LIR prévoit que, lorsqu’un adulte « n’a pas la capacité de contracter un régime d’épargne-invalidité » avec une institution financière, un autre « responsable » doit agir à titre de titulaire en son nom.

Une institution financière peut refuser de conclure un REEI avec un bénéficiaire qui ne satisfait pas au critère de common law sur la capacité juridique de conclure un contrat. En outre, un adulte ou une personne intéressée, comme un membre de la famille, peut estimer que l’adulte a une capacité réduite et souhaiter nommer un responsable avant de s’adresser à une institution financière.

Cependant, les adultes ayant une déficience mentale et leur famille ont exprimé leurs préoccupations au gouvernement fédéral à propos des lois provinciales et territoriales régissant la façon dont un responsable peut être nommé. Aux termes de bon nombre de ces lois, ils doivent être frappés d’une incapacité juridique et recevoir de l’aide d’un tuteur. Ce processus peut être dispendieux et chronophage, et risque d’avoir d’importantes répercussions sur le bien-être des adultes en question. En Ontario, les responsables comprennent les tuteurs et les procureurs aux biens de l’incapable, qui peuvent être nommés aux termes de la Loi de 1992 sur la prise de décisions au nom d’autrui (LPDNA).

Le gouvernement de l’Ontario a reconnu ces préoccupations et a donc demandé à la CDO d’examiner de quelle façon les adultes ayant une déficience mentale pourraient avoir un meilleur accès au REEI. Dans le cadre de ce projet, la CDO recommandera la création d’un processus visant à établir un représentant légal pour les bénéficiaires du REEI comme une solution de rechange uniforme au cadre actuellement en place en Ontario.

L’objet du présent document de discussion consiste à résumer les résultats de nos recherche et consultations préliminaires, en plus de déterminer plusieurs options de réforme. Nous prendrons en considération les réponses que nous avons reçues relativement à ce document de discussion dans le rapport final présentant des recommandations détaillées.

Le document de discussion cerne neuf options de réforme. Celles-ci s’appuient sur notre examen du cadre en vigueur en Ontario en application de la LPDNA et d’autres lois en vigueur au Canada et à l’étranger. Elles intègrent des éléments des lois existantes qui peuvent répondre aux critères d’évaluation – ou « critères de référence » – mis au point par la CDO. Selon nous, un processus de rechange efficace en Ontario doit satisfaire aux critères de référence suivants :

  1. répondre aux besoins individuels en matière de prise de décisions à propos du REEI;
  2. favoriser une véritable participation dans le processus de prise de décisions;
  3. s’assurer que les protections nécessaires des bénéficiaires du REEI sont en place;
  4. être réalisable sur le plan administratif, abordable et facile à utiliser; et
  5. promouvoir la certitude aux tierces parties et aux représentants légaux.

Les options de réforme sont résumées ultérieurement. Au total, nous avons proposé neuf options qui pourraient être administrées par l’intermédiaire des types de processus suivants de nomination d’un représentant légal. Nous accueillons les commentaires sur ces types de processus de nomination ainsi que sur les options de réforme.

Les options de réforme proposées dans le présent document de discussion ont été établies sur mesure en fonction du contexte particulier du REEI. La CDO a réservé une analyse plus exhaustive des lois ontariennes sur la prise de décisions pour son projet pluriannuel en cours sur La capacité juridique, la prise de décisions et la tutelle. Notre projet concernant le REEI est réalisé séparément, étant donné qu’il est prioritaire, et il ne doit pas être interprété comme excluant une option du projet plus général. Pour obtenir de plus amples renseignements sur le projet de la CDO sur La capacité juridique, la prise de décisions et la tutelle, veuillez vous rendre sur le site Web de la CDO à l’adresse www.lco-cdo.org.


II.    Accès au REEI et questions de capacité pour les Ontariens ayant une déficience mentale

Le chapitre II fournit un aperçu du REEI et explique l’importance de la capacité lorsqu’un adulte ayant une déficience mentale tente d’y accéder. La première section du chapitre porte sur les renseignements contextuels concernant le REEI qui sont pertinents pour le projet de la CDO (section A, « Comprendre le REEI fédéral »). Toutes les personnes qui ont droit au crédit d’impôt pour personnes handicapées (CIPH) sont admissibles au REEI. Les bénéficiaires du REEI, aux circonstances diverses, comprennent des personnes ayant des déficiences développementales, psychosociales et cognitives provenant de tous les groupes d’âge.

La deuxième section du chapitre II présente des tensions et des concepts de base pertinents pour définir la capacité (section B, « L’importance de la capacité des adultes tentant d’accéder au REEI »). Comme susmentionné, pour ouvrir un REEI, il faut qu’un titulaire conclue un contrat avec une institution financière. Lorsqu’un bénéficiaire adulte « n’a pas la capacité de contracter un régime d’épargne-invalidité », la LIR permet au responsable d’agir en qualité de titulaire du régime. Un responsable peut être un tuteur ou un autre particulier « qui est légalement autorisé à agir au nom du bénéficiaire ». Si l’Ontario met en place un nouveau processus de nomination d’un représentant légal pour les bénéficiaires du REEI, le gouvernement fédéral devrait probablement le reconnaître comme particulier « légalement autorisé » aux termes du droit provincial, conformément aux termes de la LIR.

La définition de « capacité » varie d’un domaine et d’une administration à l’autre. Dans bien des administrations, on suppose que tout être humain est capable et a le droit de prendre des décisions le concernant, sauf si l’on estime qu’il doit être protégé. Bien que l’Ontario ne reconnaisse pas officiellement la « prise de décisions assistée » dans la loi comme le font certaines administrations (voir ci-dessous), la province reconnaît que la prise de décisions est une activité sociale et contextuelle et que la capacité d’un adulte peut être accrue grâce à des services et à du soutien.

Un adulte ayant une déficience mentale peut avoir la capacité de prendre des décisions quant à ses achats quotidiens, mais pas en ce qui concerne un investissement dans un fonds commun de placement, par exemple. Cela est dû au fait que la capacité est propre à la question qui nous occupe et qu’elle peut varier dans le temps. Il existe plusieurs méthodes pour déterminer si un adulte a la capacité nécessaire pour prendre une décision. La plus répandue est celle de l’approche dite « cognitive ». Elle porte essentie