La présente partie du cadre expose certains aspects essentiels des réalités et des expériences des personnes âgées dont le législateur et les décideurs devraient tenir compte pour s’assurer que les lois, les politiques ou les pratiques n’ont aucune conséquence négative inattendue sur les personnes âgées ou sur certains groupes d’aînés.

Cette partie débute par une brève description des rapports des personnes âgées avec le droit. Une deuxième section donne un aperçu de certains aspects pertinents des réalités et des expériences des personnes âgées, notamment de l’incidence que peuvent avoir certains facteurs, comme la langue, l’origine ethnique ou l’orientation sexuelle, sur les expériences des personnes âgées, ainsi que les préjudices et le risque accru auxquels elles font face. La dernière section présente certains éléments essentiels à la mise en œuvre efficace des lois touchant les personnes âgées, y compris des approches visant à garantir l’accès des aînés au droit.

Pour obtenir de plus amples renseignements, veuillez consulter les sections suivantes du rapport provisoire :

  • Le droit et les personnes âgées : voir la section A du chapitre V;
  • Les réalités des personnes âgées : voir le chapitre II;
  • L’application efficace du droit : voir le chapitre IV;
  • Garantir l’accès au droit : voir le chapitre V.

Bien qu’il soit généralement admis que les personnes âgées représentent une proportion importante et croissante de la population du Canada et qu’elles peuvent avoir des réalités, des expériences et des besoins différents de ceux des autres membres de la société, les lois et les politiques ne tiennent pas toujours compte des particularités des personnes âgées. Par conséquent, les lois et les politiques risquent d’avoir des conséquences négatives non désirées sur les aînés, de s’opposer les unes aux autres ou de faillir à leurs objectifs. Dans certains cas, des stéréotypes ou des préjugés défavorables envers les personnes âgées peuvent orienter la façon dont une loi est élaborée, mise en œuvre ou appliquée. Par conséquent, la loi peut avoir un effet discriminatoire à l’égard des personnes âgées. 

  

A.      Le droit et les personnes âgées – Un aperçu

Il est utile, comme point de départ, d’avoir une compréhension générale du cadre législatif concernant les personnes âgées en Ontario.

La Charte et les lois sur les droits de la personne : En Ontario, toutes les lois et les politiques doivent être appliquées dans le cadre de la Charte des droits et libertés et du Code des droits de la personne de l’Ontario, lesquels proclament les droits à l’égalité et à la non-discrimination pour les personnes âgées, ainsi que tout autre groupe ou personne pouvant être marginalisé ou défavorisé. Bien que les principes du présent cadre s’inspirent de la Charte et du Code et ont pour but de véhiculer les valeurs qui sous-tendent ces documents fondamentaux, l’analyse réalisée aux termes de ce cadre n’est pas destinée à remplacer les vérifications de conformité avec le Code ou la Charte.

Lois fondées sur l’âge : Nombre de lois et politiques utilisent des critères fondés sur l’âge pour cibler les personnes âgées, notamment celles régissant l’accès aux prestations d’assurance-emploi, les exigences du permis de conduire fondées sur l’âge, certaines dispositions des permis de pêche récréative ainsi que des règlements administratifs sur les logements destinés aux aînés. Pour la plupart de ces critères, l’âge sert de variable substitutive pour un autre facteur, par exemple un faible revenu, le retrait du marché du travail, un problème de santé ou une incapacité, ou encore l’incapacité juridique.

Lois touchant principalement les personnes âgées : Il existe également de nombreuses lois qui, bien qu’elles n’emploient aucun critère fondé sur l’âge, touchent principalement les personnes âgées. Ces lois fonctionnent de manière semblable aux programmes axés sur l’âge et sont souvent perçues de la sorte. Les lois régissant les foyers de soins de longue durée en sont un exemple.

Lois d’application générale : Certaines lois, bien qu’elles aient des répercussions sur des personnes de divers âges, ont une incidence sur une grande proportion de personnes âgées. Par exemple, les aînés représentent un pourcentage important des personnes touchées par les lois concernant la capacité juridique et la prise de décision. Les défenseurs des droits des personnes âgées considèrent que ce domaine du droit a une incidence importante sur les droits des aînés. De telles lois obligent les décideurs à chercher des moyens de trouver le juste équilibre entre les besoins et les réalités des personnes âgées, d’une part, et les besoins possiblement différents des autres groupes visés par ces mêmes lois, d’autre part.

Pour comprendre l’incidence du droit sur les personnes âgées, il importe également de tenir compte des lois d’application générale qui ne touchent pas davantage les aînés dans l’ensemble, mais qui peuvent avoir des répercussions différentes sur celles-ci. Ces lois sont les plus difficiles à cerner et exigent un examen attentif de la manière dont les besoins, les expériences et les réalités des personnes âgées peuvent différer de ceux des adultes plus jeunes.

Négligences du droit : Dans certains cas, une loi peut avoir des répercussions négatives sur les personnes âgées, non pas en raison de ses dispositions, mais plutôt parce qu’elle n’aborde pas certaines questions d’une importance particulière pour ce groupe. Cela prive les personnes âgées d’une orientation appropriée pour prendre des décisions importantes ou de mesures de soutien ou de protection adéquates.

Exemple : Lois d’application générale

Capacité juridique de se marier et de faire un testament 

Du point de vue du droit, les normes concernant la capacité juridique de se marier et de faire un testament ont évolué de façon distincte. Le critère régissant la capacité juridique de se marier est différent de celui qui régit la capacité juridique de faire un testament, et moins strict que ce dernier, ce qui reflète la différence des enjeux en cause dans chacune de ces décisions. Ainsi, il est tout à fait possible d’épouser une personne n’ayant pas la capacité de faire un testament. Pour compliquer la chose, aux termes de la Loi portant réforme du droit des successions, le mariage annule automatiquement un testament préalablement rédigé.  

Les différences entre la capacité de se marier et celle de faire un testament peuvent imposer des fardeaux particuliers et involontaires aux personnes âgées. Les personnes âgées sont plus susceptibles que le reste de la population d’être atteintes de conditions qui compromettent leur capacité de tester, mais qui n’ont aucune incidence sur leur capacité de se marier. Sur le plan pratique, une personne ayant la capacité de se marier, mais non celle de rédiger un nouveau testament, sera dans l’impossibilité de préparer un nouveau testament après son mariage. Ainsi, cette personne perdra le contrôle sur ces dispositions testamentaires et mourra sans testament. 

Selon les données démographiques, les aînés sont plus susceptibles d’avoir des arrangements familiaux complexes et, par le fait même, des obligations et un testament compliqués. Le divorce et le remariage, qui imposent des obligations familiales complexes, sont de plus en plus communs. La succession non testamentaire ne tient pas compte de la dynamique des familles reconstituées découlant des mariages subséquents. En outre, les mariages subséquents contractés à un âge avancé peuvent accroître la complexité des dispositions testamentaires d’une personne.

Commentaires généraux sur le droit et les personnes âgées : Certains commentaires de nature générale s’imposent sur les rapports des personnes âgées avec le droit.

Premièrement, la plupart des interactions des personnes âgées avec le droit se situent dans le contexte de leurs relations. Il peut s’agir de relations personnelles avec des parents ou des amis, où peuvent intervenir les lois concernant la constitution et l’éclatement de la famille, la violence envers les personnes âgées, les responsabilités en matière de prestation de soins et les mesures de soutien, ou encore les procurations et la prise de décision au nom d’autrui. Il peut également s’agir de relations institutionnelles, par exemple, avec des fournisseurs de soins à domicile, des ministères responsables des programmes de sécurité du revenu, des exploitants ou des employés de foyers de soins de longue durée, ou encore des fournisseurs de soins de santé. La nécessité de gérer et d’entretenir ces relations a une influence sur les rapports des personnes âgées avec le droit. 

Deuxièmement, il arrive souvent que les aînés entrent en contact avec le droit à des moments décisifs de leur vie. Par exemple, le passage à la retraite peut soulever des enjeux propres aux lois sur le travail et les régimes de retraite, ou encore aux programmes et aux prestations du gouvernement. Le passage d’un logement privé à une habitation collective peut également susciter des rapports avec les lois portant sur les foyers de soins de longue durée ou les résidences pour personnes âgées. Le développement de limitations importantes au chapitre de la santé et des déplacements ou d’une incapacité peut donner lieu à une interaction avec le droit de la santé, les lois en matière d’accessibilité ou les lois liées à la capacité juridique et à la prise de décision au nom d’autrui. Les personnes âgées ont généralement des interactions avec le droit dans les moments où elles sont les plus vulnérables.

Troisièmement, nombre de lois qui touchent principalement les personnes âgées sont extrêmement complexes, que ce soit les lois portant sur les prêts hypothécaires inversés, les procurations et la prise de décision au nom d’autrui, les foyers de soins de longue durée, ou encore les divers programmes de sécurité du revenu. Par conséquent, les aînés peuvent éprouver des difficultés à comprendre les lois, les politiques et les pratiques, même celles qui sont destinées à les avantager ou à les protéger, s’ils n’obtiennent pas l’aide nécessaire. 

 

B.      Tenir compte des réalités des personnes âgées

L’un des points de départ pour établir une démarche efficace à l’égard des lois et des politiques pouvant toucher les aînés consiste à reconnaître que les personnes âgées forment un groupe dont les besoins ou les expériences diffèrent, sur certains aspects, de ceux des autres, que ce soit en raison des changements biologiques, de leurs parcours de vie, des structures sociales ou de la marginalisation et des stéréotypes dont elles sont victimes. En outre, si l’on veut que les aînés soient reconnus comme des citoyens importants, il faut tenir compte des besoins et des réalités qui leur sont propres dans l’élaboration de lois, de politiques et de programmes. 

1.    Comprendre les réalités des personnes âgées

Bien que le vieillissement soit souvent perçu principalement comme un processus biologique inévitable, il ne faut pas oublier qu’il s’agit en fait d’un processus multidimensionnel, façonné par les attitudes sociales à l’égard du vieillissement et des personnes âgées, les structures sociales et les institutions (y compris les lois et les politiques) qui les entourent et la vie qu’elles ont vécue avant d’atteindre le « troisième âge ». Par conséquent, toute description du vieillissement et des personnes âgées est forcément complexe. Pour plus de détails à ce sujet, veuillez consulter le chapitre II du rapport provisoire.

Diversité des personnes âgées : Puisque les personnes âgées représentent une proportion très importante de la population, on doit s’attendre à ce que ce groupe soit aussi diversifié que la population en général. De plus, les effets des différences observées à un plus jeune âge peuvent s’accentuer avec les années, c’est pourquoi les personnes âgées forment peut-être, en réalité, un groupe plus hétéroclite que les membres des autres groupes d’âge, et ce, sur bien des aspects . Il y a donc des limites aux généralisations que l’on peut faire au sujet des personnes âgées, et il faut agir avec prudence afin d’éviter les stéréotypes.

Cela est d’autant plus vrai que le « troisième âge », peu importe sa définition, s’échelonne sur plusieurs décennies. Tout comme une personne de 25 ans et une autre de 55 ans présentent certaines différences (et certains points communs) en raison de leur parcours de vie, il en va de même pour une personne de 55 ans et une autre de 85 ans. 

Bien entendu, le vieillissement n’est qu’un aspect de l’identité d’une personne âgée, et il n’est généralement pas perçu comme le plus important par le principal intéressé. L’expérience du vieillissement varie d’une personne à l’autre en fonction de divers facteurs, y compris :

  • le sexe;
  • l’origine ethnique ou la racialisation;
  • l’appartenance à un groupe autochtone;
  • le statut de nouvel arrivant ou de citoyen;
  • la langue;
  • l’orientation ou l’identité sexuelle;
  • l’incapacité;
  • la situation socioéconomique;
  • la situation familiale;
  • l’emplacement géographique (p. ex. une personne habitant une collectivité rurale ou éloignée);
  • d’autres facteurs.

Les personnes ayant été victimes de marginalisation ou de discrimination tout au long de leur vie en raison d’un ou de plusieurs facteurs mentionnés ci-dessus peuvent juger que le vieillissement empire leur situation ou change leurs perceptions des choses. 

Attitudes sociales à l’égard du vieillissement et préjugés sur les personnes âgées : Bien qu’il n’en soit pas toujours ainsi, le vieillissement et, par extension, les personnes âgées suscitent souvent la crainte et la dérobade au Canada. L’expérience du vieillissement peut être façonnée par des stéréotypes selon lesquels les aînés sont des personnes frêles, incapables, passives et encombrantes, forcément sur leur déclin, qui résistent au changement et qui n’ont plus rien à apporter. Ces perceptions négatives peuvent entraîner de la discrimination ou un mauvais traitement des personnes âgées dans les secteurs de l’emploi, du logement ou des services et mener à l’exclusion des aînés, leur causer des préjudices, ou même inciter à la violence à leur égard. 

De nombreux préjugés courants sur les personnes âgées ne sont que des stéréotypes. Par exemple, contrairement au préjugé selon lequel la plupart des aînés vivent dans un logement collectif, comme les résidences pour personnes âgées et les foyers de soins de longue durée, plus de 90 pour cent des adultes de plus de 65 ans habitent une résidence privée. Bien que les aînés soient perçus comme inévitablement frêles et en mauvaise santé, un pourcentage important d’adultes de plus de 65 ans se considère en bonne ou en excellente santé. Le préjugé selon lequel les personnes âgées sont des gens passifs et dépendants est démenti par le rôle important qu’ils jouent à titre de bénévoles dans leur collectivité, de pourvoyeurs de soins à leur époux, petits-enfants et proches ainsi que par leur engagement civique.

Les effets du parcours de vie sur le vieillissement : La vie et les réalités des personnes âgées sont grandement façonnées non seulement par les lois et les politiques actuelles, mais aussi par celles qui étaient en vigueur lorsqu’elles étaient des enfants, de jeunes adultes et des personnes d’âge mûr. Par exemple, le niveau d’alphabétisation des gens qui sont maintenant d’un âge avancé est le résultat des décisions en matière de politique publique qui ont été prises il y a plusieurs décennies et des conditions socioéconomiques qui régnaient à cette époque. Les défis actuels associés à l’accès des octogénaires d’aujourd’hui à l’information sur leurs droits et responsabilités sont issus des décisions prises il y a longtemps par les gouvernements, les familles et les individus.

Cette situation a deux conséquences sur l’évaluation des lois et des politiques touchant les personnes âgées. Premièrement, les lois et les politiques élaborées pour tenir compte des réalités des personnes faisant actuellement partie du troisième âge doivent reposer sur une compréhension approfondie de la façon dont le parcours de vie de ces personnes a modelé leurs expériences et leurs besoins actuels. Deuxièmement, pour comprendre l’incidence des lois, des politiques et des pratiques sur les personnes âgées, il importe d’évaluer la manière dont les lois et les politiques en vigueur façonnent la vie de ceux qui appartiendront un jour à ce groupe. Quelle influence nos lois et politiques auront-elles sur les vieux jours de ceux qui sont actuellement des enfants, des jeunes ou des adultes d’âge mûr?

Structures et institutions sociales : Le réseau de structures et d’institutions sociales joue un rôle déterminant dans l’expérience du vieillissement, notamment sur les plans de l’accessibilité des services et des immeubles, de l’existence, ou de l’absence, de diverses mesures de soutien formelles ou informelles, ou encore de l’ensemble de lois qui régissent un éventail d’aspects de la vie, des habitations collectives à la prestation de soins, en passant par la violence envers les personnes âgées.

Si l’on se penche sur les facteurs ci-dessus, on se rend d’autant plus compte qu’il est essentiel de se fonder sur les recherches menées actuellement au sujet des personnes âgées et de consulter ces dernières pour éviter de s’appuyer sur des stéréotypes, de faux préjugés et des renseignements qui ne sont plus à jour. Les besoins et les réalités des aînés sont largement influencés par leur parcours de vie et leur environnement actuel, deux facteurs en constante évolution. Par conséquent, il importe de se fonder sur des données actuelles et à jour, de tenir compte des futures tendances et de réévaluer régulièrement les lois et les politiques afin de s’assurer qu’elles sont basées sur des renseignements exacts.

 

2.    Facteurs à prendre en considération pour évaluer l’incidence des lois ou des politiques sur les personnes âgées

La présente section donne un aperçu de certains aspects essentiels de la vie des personnes âgées qui expliquent à quel moment et en quoi les besoins et les réalités de celles-ci et, par le fait même, leurs rapports avec le droit peuvent différer de ceux des adultes plus jeunes. Puisque chaque aîné a des réalités qui lui sont propres, et compte tenu des contraintes d’espace, cette section ne se veut pas un résumé complet de tous ces aspects, mais vise plutôt à souligner certains facteurs clés qui s’avèrent particulièrement pertinents au chapitre de l’interaction des personnes âgées avec le droit. En outre, puisque le « troisième âge » s’échelonne sur plusieurs décennies, certains de ces facteurs s’appliquent davantage à certaines étapes de la vie qu’à d’autres.

Espérance de vie : Dire qu’il est plus probable que les personnes âgées disposent de moins de temps devant elles que les adultes plus jeunes semble être l’évidence même. Néanmoins, la perspective de disposer de moins de temps devant soi peut influer sur la façon dont les personnes âgées perçoivent les options qui leur sont offertes et les conséquences qui en découlent. Par exemple, si les personnes âgées doivent entreprendre des démarches longues et laborieuses pour toucher des prestations ou se prévaloir de leurs droits, il est possible qu’elles renoncent à réclamer ces droits ou ces prestations, car elles auront moins tendance à les percevoir comme une solution concrète à leur problème.

Niveaux de scolarité et d’alphabétisation : Même si les niveaux de scolarité et d’alphabétisation des personnes âgées augmenteront au fil du temps en raison des tendances actuelles en matière d’éducation, les aînés d’aujourd’hui ont, de façon générale, des niveaux de scolarité et d’alphabétisation moins élevés que les Canadiens plus jeunes. De plus, dans l’ensemble, les personnes âgées connaissent moins bien les technologies, y compris les technologies de l’information. Ces faits ont une incidence importante sur leur accès à l’information et, par conséquent, sur leur capacité à comprendre et à exercer leurs droits.

Participation au marché du travail : Les travailleurs âgés sont plus susceptibles d’avoir un travail temporaire, autonome ou à temps partiel. Par ailleurs, plusieurs aînés disent avoir fait face à de la discrimination ou à d’autres obstacles sur le marché du travail. La prévalence du chômage de longue durée a tendance à augmenter avec l’âge. Les femmes âgées, en particulier, sont plus susceptibles d’avoir touché un salaire moins élevé et vécu des interruptions de travail.

Bien que cette situation puisse changer à l’avenir, la plupart des personnes âgées se retirent actuellement du marché du travail avant l’âge de 65 ans et n’ont pour seul gagne-pain que le revenu fixe de leur régime de retraite ou des programmes gouvernementaux, que ce soit par choix ou en raison des obstacles sur le marché du travail. Ainsi, la majorité des aînés peuvent difficilement assumer des dépenses imprévues et élevées, qui pourraient les forcer à passer le reste de leurs jours dans une situation de pauvreté ou de précarité financière. Cela signifie, par exemple, que pour bien des personnes âgées, dépenser des sommes d’argent considérables pour intenter une poursuite n’est pas une solution réaliste aux difficultés qu’elles peuvent éprouver à faire valoir leurs droits.

Sécurité du revenu : Les programmes de sécurité du revenu administrés par le gouvernement, comme le Régime de pensions du Canada, la Sécurité de la vieillesse, le Supplément de revenu garanti et le programme du Régime de revenu annuel garanti (RRAG) de l’Ontario, représentent une source de revenus importante pour la plupart des personnes de 65 ans et plus.

Bien que le taux de personnes âgées touchant un faible revenu soit actuellement assez bas, la pauvreté s’observe de façon disproportionnée chez certains groupes d’aînés, comme les femmes âgées seules. En outre, selon les tendances actuelles en matière de régime de retraite et d’épargne-retraite, y compris les taux décroissants de souscriptions à un régime de retraite et l’éventuelle volatilité du rendement des investissements, on peut présumer que le nombre de personnes âgées à faible revenu risque d’augmenter de nouveau dans l’avenir. Cela signifie, par exemple, que les coûts associés à l’accès aux garanties juridiques et aux recours pourraient constituer un obstacle pour certains groupes importants de personnes âgées.

Milieu de vie : La plupart des personnes âgées habitent un logement privé et préfèrent vieillir dans leur propre maison et au sein de leur collectivité. Cependant, certains aînés peuvent être amenés à se tourner vers une solution d’habitation collective en raison du manque de logements accessibles et abordables, des problèmes associés au fait de toucher un revenu fixe et de la difficulté d’accéder à des services de soutien personnels ou communautaires, ou encore à des soins à domicile, dans un environnement privé.

Un nombre important d’Ontariens du troisième âge habitent des « résidences pour personnes âgées », lesquelles sont exploitées selon divers modèles et offrent un vaste éventail de services. Si certaines d’entre elles n’offrent que les services d’assistance de base, d’autres fonctionnent pratiquement comme des foyers privés de soins de longue durée. Même si, en Ontario, un faible pourcentage de personnes âgées seulement vit dans des foyers de soins de longue durée, la probabilité d’habiter ce genre d’établissements augmente avec l’âge, et les femmes sont beaucoup plus susceptibles d’y vivre un jour. Les foyers de soins de longue durée offrent des mesures de soutien essentielles à ceux qui ont les plus grands besoins et peuvent apporter de véritables avantages à leurs résidents. Les foyers mal exploités, toutefois, représentent une véritable menace pour leurs résidents, principalement en raison du rapport de force très inégal entre les résidents, d’une part, et le personnel et les exploitants, d’autre part.

Un nombre disproportionné de gens de 65 ans et plus habite les régions rurales ou éloignées et, par conséquent, est confronté à des enjeux particuliers sur le plan de l’accès aux services. Le transport peut devenir un problème majeur pour les personnes âgées qui sont incapables de conduire et qui n’ont pas accès à un réseau de transport public en raison de leur lieu de résidence. Le manque de services juridiques et gouvernementaux dans ces régions ne fait qu’aggraver ces problèmes.

La famille, les relations et la prestation de soins : En général, les personnes âgées vivent avec leur époux, bien que le nombre d’aînés habitant en couple varie et diminue avec l’âge. En vieillissant, la probabilité d’habiter seul et le risque d’isolement social augmentent au fur et à mesure que parents et amis, eux aussi, prennent de l’âge et meurent. Compte tenu de l’espérance de vie plus élevée des femmes et du fait que, dans une relation hétérosexuelle, celles-ci sont généralement plus jeunes que leur partenaire, les femmes sont plus susceptibles de vivre seules à un âge avancé.

Les personnes âgées dispensent divers types de soins à leurs parents et amis et en reçoivent de ceux-ci. Elles jouent un important rôle de fournisseur de soins (primaires et secondaires) auprès de leur conjoint, de parents handicapés et leurs petits-enfants. Les soins informels dispensés par un membre de la famille ou un ami peuvent se révéler essentiels pour le bien-être des adultes ayant un problème de santé ou une limitation d’activité, particulièrement dans les endroits où les mesures de soutien officielles sont limitées ou difficiles d’accès.

Enjeu clé

L’incapacité chez les personnes âgées

Il existe, bien entendu, une corrélation importante entre la vieillesse et l’incapacité :

  • Les personnes nées avec une déficience mentale ou physique, ou qui en développent une pendant leur enfance, vieillissent avec cette déficience, et leur expérience du vieillissement est façonnée par la façon dont elles ont vécu cette incapacité tout au long de leur existence.
  • Le risque de développer certains types de déficiences et d’incapacités, comme les déficiences sensorielles, les incapacités liées à la mobilité et la démence, augmente avec l’âge.
  • Il peut arriver que les personnes âgées soient aux prises non pas avec une incapacité, mais plutôt avec le préjugé selon lequel l’âge et l’incapacité vont de pair. Ainsi, on suppose que, si elles ne sont pas handicapées présentement, elles le deviendront sûrement et auront besoin d’un logement ou de soins. La dépression, par exemple, est souvent perçue comme un aspect normal du vieillissement qui ne nécessite pas de traitement chez les personnes âgées. 

Cependant, il est important de garder à l’esprit que cet enjeu ne touche pas tous les aînés.

  • La plupart des personnes âgées ne sont atteintes d’aucune limitation d’activité importante, particulièrement les plus jeunes.
  • Il y a d’importantes différences entre les personnes âgées ayant vieilli avec une incapacité et celles qui ont développé une incapacité avec l’âge. Les aînés qui ont toujours eu une incapacité et, par le fait même, qui ont fait face à des obstacles sur les plans de l’éducation, de l’emploi et de l’inclusion sociale, disposent généralement de ressources sociales et économiques inférieures à celles qui développent une incapacité à un âge avancé.
     

Problème de santé, limitation d’activité et incapacité : En vieillissant, les personnes âgées sont plus susceptibles de développer des déficiences, des problèmes de santé ou des incapacités ayant une incidence sur leur accès à l’information, aux processus ou aux immeubles. Pour certains aînés, il devient plus difficile d’attendre dans les longues files d’attente, de lire les petits caractères, d’accéder aux immeubles par les escaliers et de comprendre des directives dans un milieu bruyant. La conception universelle des sites Web, des immeubles, des services et des programmes prend alors une tout autre importance.

De plus, les personnes âgées font face à des obstacles disproportionnés au chapitre des transports : avec l’âge, elles ont moins tendance à conduire, et les services de transport public peuvent être inexistants (dans les collectivités rurales ou éloignées) ou physiquement inaccessibles pour elles. Elles peuvent, par exemple, avoir de la difficulté à se déplacer jusqu’aux services de justice.

En outre, une personne âgée souffrant d’un problème de santé n’aura pas nécessairement l’énergie requise pour entreprendre des procédures longues ou pénibles.

Bien que la plupart des aînés n’aient aucun trouble cognitif important, certains d’entre eux vieillissent avec une déficience intellectuelle ou un trouble du développement. Avec l’âge se pose également le risque de développer des déficiences cognitives, comme la démence. De telles déficiences peuvent troubler la mémoire ou influer sur la capacité de prendre des décisions éclairées, ce qui risque d’avoir une incidence importante sur la capacité d’une personne à comprendre ses droits et avantages et à s’en prévaloir, sur ses relations, son intégration au sein de la collectivité et son milieu de vie.

Enjeu clé

Le vieillissement chez les hommes et les femmes

Il est particulièrement important d’examiner la différence de l’expérience du vieillissement chez l’homme et la femme. Selon les tendances démographiques actuelles, la majorité des aînés sont des femmes, et cette proportion augmente avec l’âge. Les expériences des femmes et des hommes âgés diffèrent de plusieurs façons. Par exemple, compte tenu de leur plus longue espérance de vie et du fait qu’elles ont tendance à épouser un homme plus vieux qu’elles, les femmes sont plus susceptibles de devenir veuves et de vivre seules, ce qui a de nombreuses conséquences sur les plans du revenu, des soins et des conditions de vie. En raison des rôles distincts attribués traditionnellement à chaque sexe, les femmes âgées d’aujourd’hui ont généralement un niveau de scolarité moins élevé que celui des hommes du même âge. Étant donné leur participation moins importante à la vie active, elles ont également un revenu plus faible que leurs homologues masculins. Les femmes âgées sont également victimes de stéréotypes négatifs particuliers et davantage traitées avec dédain en raison de leur âge et de leur sexe. Une analyse basée sur le sexe est donc essentielle dans le cadre de toute évaluation des lois et des politiques pouvant toucher les personnes âgées.

 

3.    Identités croisées

Lorsqu’on examine les réalités des personnes âgées, il importe de tenir compte des expériences particulières des aînés associés à une race, à la population autochtone, aux gais, lesbiennes, bisexuels et transgenres (GLBT), aux handicapés, aux nouveaux arrivants ou à toute autre identité pouvant donner lieu à la marginalisation ou à un préjudice.

Les personnes ayant été victimes de discrimination tout au long de leur vie en raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle, de leur race, de leur appartenance à un groupe autochtone ou d’autres facteurs sont plus susceptibles d’entrer dans le troisième âge avec des ressources sociales ou économiques moindres et, par conséquent, d’avoir plus de difficulté à affronter les réalités du vieillissement. Par exemple, un jeune qui subit de la discrimination et qui décide d’abandonner l’école plus tôt aura un niveau d’alphabétisation plus faible, ce qui, par le fait même, peut faire en sorte qu’il touchera un revenu moins élevé tout au long de sa vie. Par conséquent, ce même jeune risque, à un âge avancé, de dépendre davantage des programmes de soutien du revenu du gouvernement. Il pourrait également avoir plus de difficulté à trouver des renseignements sur ses droits et à s’en servir. De façon plus subtile, les personnes appartenant à un groupe marginalisé qui ont survécu à la stigmatisation et à la discrimination en se faisant silencieuses et invisibles peuvent être particulièrement difficiles à atteindre au moyen des services et des programmes habituels, et leurs besoins, passer inaperçus pour la collectivité dans son ensemble.

Certains stéréotypes ou certaines attitudes sont associés à des groupes particuliers de personnes âgées. Par exemple, le vieillissement chez la femme est perçu comme une perte du pouvoir de séduction, et les femmes âgées sont plus souvent traitées avec condescendance ou dédain. Les immigrants âgés dont l’anglais est la langue seconde sont souvent victimes de l’irritation des autres, ce qui reflète l’impatience dont ont fait preuve généralement à l’endroit des personnes âgées et des nouveaux immigrants.

Certains aspects relativement courants du vieillissement peuvent avoir des répercussions particulières sur des groupes de personnes âgées en raison des réalités qui leur sont propres. Par exemple, vieillir chez soi est important pour le bien-être de tous. Cependant, cet aspect peut se révéler particulièrement important – et difficile à réaliser – pour certaines personnes. Par exemple, les membres des Premières nations qui ont vécu presque toute leur vie dans leur collectivité éprouveront d’autant plus de difficulté d’être coupés de leur langue, de leur culture et de leur collectivité. Pour les membres des Premières nations qui ont subi l’expérience des pensionnats dans leur jeunesse, la réintégration dans un établissement peut causer un traumatisme particulier.

Exemple : En finir avec les préjudices qui s’accumulent

Foyers de soins de longue durée prônant une attitude positive envers les GLBT 

Reconnaissant que les personnes âgées gaies, lesbiennes, bisexuelles et transgenres (GLBT) peuvent être confrontées à des difficultés particulières à leur arrivée dans un foyer de soins de longue durée, y compris aux comportements homophobes des résidents et du personnel, et que cela risque d’entraîner leur isolement ou leur retour « dans le placard », la ville de Toronto a construit des foyers de soins de longue durée offrant un environnement accueillant à ces personnes. Les activités qui y sont organisées reflètent une atmosphère d’ouverture, et le personnel fait preuve d’une attitude positive et accueillante envers tous.

4.    Préjudice et risque accru

Les personnes âgées sont souvent considérées comme « vulnérables » dans l’ensemble, et cette vulnérabilité sert parfois à justifier des mesures prises qui briment considérablement leur autonomie. Il est inexact de présumer que tous les aînés sont des êtres fragiles, dépendants et, par le fait même, à protéger (qu’ils en aient fait ou non la demande). Il est également problématique de supposer que la seule solution, ou la plus appropriée, à la vulnérabilité est de limiter leur autonomie, une forme courante de paternalisme envers les personnes âgées.

Cependant, il est aussi faux de présumer que tous les aînés sont privilégiés, vivent dans l’abondance et sont en pleine possession de leurs moyens. Le vieillissement peut exposer davantage les personnes âgées à certains types de risques et de préjudices, comme ceux qui sont associés à une espérance de vie plus courte, à l’isolement social et à l’incapacité. Lorsqu’elles entament ce stade de la vie, certaines personnes disposent de moins de ressources (financières ou autres) que d’autres. Cela peut être le cas des personnes qui touchent un faible revenu, des GLBT ou des personnes racialisées ou marginalisées d’une autre façon, qui se retrouvent défavorisées par rapport aux autres personnes âgées et aux plus jeunes adultes. Pour ces aînés qui subissent de plus grands préjudices, qui sont exposés à des risques plus élevés ou qui sont plus défavorisés que d’autres, un niveau d’attention ou de protection plus élevé de la part du législateur ou des décideurs peut se révéler essentiel. 

Bien que la nature du risque diffère selon les personnes, il faut néanmoins tenir compte du contexte social plus vaste dans lequel ce risque surgit. Les relations qu’un aîné entretient avec les membres de sa famille et d’autres personnes, ses conditions de vie, ses sources et son niveau de revenu et son accès à des mesures de soutien constituent des facteurs qui, selon leur qualité et leur importance, peuvent contribuer à hausser ou à diminuer le niveau de risque et d’inégalité auquel il est exposé. Le droit peut également hausser ou diminuer le niveau de risque et d’inégalité auquel sont exposées les personnes âgées. Par exemple, les régimes légaux visant les procurations perpétuelles ou la protection des résidents d’un logement collectif peuvent soit garantir la protection des droits des personnes âgées, soit exposer celles-ci à la violence ou aux mauvais traitements. Les lois d’application générale qui ne tiennent pas compte des besoins des personnes âgées peuvent faire en sorte que celles-ci ont plus de difficulté à défendre leurs droits. La discrimination et les attitudes sociales négatives envers les personnes âgées peuvent limiter leur accès à l’emploi, au logement ou aux services et, par conséquent, accroître leur niveau de risque. 

Ainsi, bien que les lois, les programmes et les politiques doivent reconnaître les capacités et l’individualité des personnes âgées, cette reconnaissance doit être contrebalancée par la prestation de mesures de soutien supplémentaires aux aînés plus défavorisés ou vulnérables de manière à garantir que le droit favorise la dignité, l’autonomie, la participation et la sécurité de toutes les personnes âgées.

Exemple : Venir en aide aux personnes âgées vulnérables

 Services de police axés sur les aînés

Plusieurs corps policiers de l’Ontario et de partout au Canada ont mis sur pied des services destinés à aborder les problèmes ou les risques particuliers auxquels font face les personnes âgées. Par exemple, le corps de police d’Elliot Lake a établi un bureau responsable des questions concernant les aînés qui combine les fonctions de travail social et de service de police dans le but d’appuyer et de promouvoir l’indépendance et la sécurité des aînés d’Elliot Lake. Ce bureau a été mis sur pied pour fournir de l’assistance aux personnes âgées seules ou isolées qui se confinent parfois dans leur domicile pendant des mois. Il est constitué de deux principales composantes :

  • un projet de développement communautaire pour les aînés qui se concentre sur les aspects positifs du soutien social, à savoir la familiarité, l’interdépendance, un sentiment d’appartenance et un sentiment de connexion avec la collectivité;
  • un projet de prévention et d’intervention ciblant les aînés considérés comme vulnérables aux préjudices.

Des partenariats ont été établis avec les résidences Elliot Lake Retirement Living par l’intermédiaire de services d’aiguillage et d’une collaboration avec le coordonnateur du service à la clientèle et l’ensemble du personnel. Ainsi, le bureau responsable des questions concernant les aînés peut accéder à tous les immeubles locatifs et obtenir de l’aide du directeur de l’immeuble en vue de prêter main‑forte aux aînés vulnérables.

 C.  Veiller à une application efficace

Même lorsque les lois reposent sur une compréhension approfondie et nuancée des réalités des personnes âgées et visent à promouvoir des principes positifs, la façon dont elles sont appliquées peut nuire à l’atteinte de leurs objectifs. Ce phénomène, parfois désigné sous le terme de « mauvais exercice du droit », n’est pas inhabituel dans le domaine du droit concernant les personnes âgées. Le rapport découlant de la réunion du groupe d’experts des Nations Unies sur les droits des personnes âgées (Report of the United Nations Expert Group Meeting on the Rights of Older Adults) exhorte les gouvernements à combler l’écart entre le contenu du droit et son application Cette question comporte deux volets : des stratégies visant l’application du droit et des mécanismes faisant en sorte que les personnes âgées soient en mesure d’exercer et de faire valoir leurs droits.

1.                Application du droit

Les recherches et les consultations menées par la CDO ont permis de mettre en lumière certains enjeux clés qui nuisent à l’application efficace de lois, de politiques et de programmes louables concernant les personnes âgées. Les éléments suivants peuvent améliorer l’efficacité avec laquelle on applique les lois et les politiques pouvant toucher les personnes âgées : 

  1. Formation sur la lutte contre la discrimination fondée sur l’âge pour les personnes responsables de l’interprétation ou de l’application des lois et des politiques : Les personnes œuvrant dans le domaine du droit des aînés ont souligné à maintes reprises l’importance d’élaborer et d’instaurer des stratégies visant à lutter contre les attitudes âgistes et paternalistes chez les personnes chargées de la mise en œuvre des lois et des politiques ayant une incidence sur les personnes âgées. Car, à moins d’être modifiées, ces attitudes entacheront inévitablement l’application du droit, si bien conçu soit-il. 
  2. Formation sur les réalités et les besoins pertinents des personnes âgées : Il est essentiel que les prestataires de programmes et de services aux personnes âgées comprennent les réalités des aînés qui cherchent à se prévaloir de leurs droits et avantages. 
  3. Formation appropriée sur le droit et ses conséquences à l’intention des personnes chargées de son application : Étant donné la complexité de nombreux domaines du droit des aînés, il n’est pas surprenant que plusieurs personnes chargées d’appliquer ces lois aient une compréhension insuffisante de celles-ci et disposent de renseignements inadéquats à leur sujet. Les fournisseurs de services, les fonctionnaires et même les avocats peuvent agir en fonction d’une compréhension erronée du droit ou donner aux personnes âgées de l’information inexacte. Il est essentiel que les personnes responsables de l’application du droit bénéficient d’une formation et de ressources appropriées pour s’assurer que l’intention des lois est respectée. 
  4. Ressources appropriées pour l’application efficace du droit : Dans certains cas, on ne dispose pas de ressources humaines ou financières suffisantes pour garantir l’exécution efficace d’une loi ou d’un programme, de sorte que l’accès aux droits et aux avantages est, en fait, limité. Par exemple, un système d’assurance de la conformité basé sur des vérifications ne sera efficace que si suffisamment d’employés peuvent mener des vérifications sur une base régulière. 
  5. Mécanismes de contrôle visant à garantir que le droit fonctionne comme prévu : Pour améliorer les mécanismes d’application et d’exécution des lois et des programmes touchant les personnes âgées, particulièrement celles qui sont vulnérables, il conviendrait de recourir systématiquement à des mesures visant à assurer la reddition de comptes, la transparence et l’efficacité. Lorsque de telles mesures de contrôle et de surveillance sont inexistantes, il est impossible de savoir dans quelle mesure les personnes âgées ont véritablement accès à leurs droits et avantages ou sont victimes d’abus ou de violations de leurs droits. Par conséquent, il est très difficile d’assurer le fonctionnement efficace de ces lois et politiques. Les mécanismes destinés à contrôler l’application et l’incidence d’une loi ou d’une politique doivent être intégrés dès le départ à cette loi ou politique.

Exemple : Mécanismes de contrôle

Projet de réforme des procurations perpétuelles

Des préoccupations ont souvent été soulevées à propos du manque de mécanismes pour contrôler le fonctionnement des procurations perpétuelles, compte tenu des pouvoirs très étendus qui sont conférés aux fondés de pouvoir en vertu de la loi, des conséquences importantes des abus sur les personnes âgées et de l’absence de mesures de protection efficaces contre ces abus. 

L’Alberta Law Reform Institute, dans le cadre des évaluations qu’il a menées récemment sur les lois relatives aux procurations perpétuelles, a recommandé que l’on renforce la transparence de l’exercice des procurations et la responsabilité qui y est associée en ajoutant des dispositions selon lesquelles le procureur, ou fondé de pouvoir, dès qu’il devient responsable d’une personne frappée d’une incapacité juridique, serait tenu d’émettre un avis formel dans lequel il reconnaît et accepte officiellement une liste précise de tâches à exécuter dans le cadre de la procuration. L’organisme a également recommandé l’ajout de dispositions permettant aux personnes qui soupçonnent un abus de faire connaître leurs préoccupations à un fonctionnaire désigné ayant le pouvoir discrétionnaire de mener une enquête.

 

2.    Accès des personnes âgées au droit

Pour diverses raisons, les personnes âgées peuvent avoir de la difficulté à exercer et à faire valoir leurs droits et avantages prévus par la loi. Les mesures visant à garantir l’accès des personnes âgées au droit comprennent les suivantes :

  1. Veiller à ce que les mécanismes d’accès et d’exécution tiennent compte des besoins et des réalités des personnes âgées : Les mécanismes dont disposent les personnes âgées pour exercer et faire valoir leurs droits ne tiennent pas nécessairement compte de leurs besoins et réalités de manière appropriée. Par exemple, les mécanismes de présentation des plaintes qui tablent sur le fait que les personnes âgées vont accéder aux renseignements sur Internet ainsi que télécharger et remplir de longs formulaires peuvent constituer un obstacle pour les personnes âgées dont le niveau d’alphabétisation est inférieur ou qui ne sont pas à l’aise avec les nouvelles technologies. En ce qui a trait aux lois d’application générale, il peut être approprié d’élaborer des mécanismes d’accès ciblant précisément les personnes âgées afin de s’assurer que ce groupe bénéficie d’un accès véritable au droit.
  2. Habiliter les personnes âgées : Il est possible que les personnes âgées ne connaissent pas leurs droits, ni la façon de les exercer ou de les faire valoir, ou encore qu’elles aient besoin d’aide pour utiliser des systèmes complexes. Puisque le droit touchant les personnes âgées est composé de lois très complexes – par exemple, les lois ayant trait à la capacité et au consentement et celles régissant les soins de longue durée –, les personnes âgées peuvent éprouver de la difficulté à se prévaloir de leurs droits sans recourir à une aide extérieure. Parmi les mécanismes habilitant les personnes âgées, mentionnons des établissements tels que l’Advocacy Centre for the Elderly ou de lois exigeant que les patients d’établissements psychiatriques dont le statut juridique change dans certaines circonstances reçoivent des conseils concernant leurs droits. 
  3. Aborder les enjeux systémiques : Les mécanismes d’exécution qui comptent largement sur les personnes âgées pour instruire des plaintes et intenter des recours risquent de ne pas se révéler efficaces pour garantir que les systèmes complexes fonctionnent comme prévu et que les droits des personnes âgées défavorisées ou à risque élevé sont respectés. Lorsque des systèmes complexes sont en jeu et que des personnes âgées défavorisées ou vulnérables sont concernées, il importe de mettre en place des mécanismes de surveillance et d’exécution proactifs. En outre, au besoin, les recours doivent offrir la possibilité d’utiliser un autre système. Par exemple, lorsque le Tribunal des droits de la personne de l’Ontario conclut à la discrimination, il a le pouvoir d’ordonner à l’organisation d’élaborer de nouvelles politiques ou pratiques, ou encore de revoir celles en vigueur, de sorte que l’incident ne se reproduise pas. 
  4. Solutions de rechange aux systèmes accusatoires : Comme cela est mentionné plus haut, de nombreuses lois ayant une incidence notable sur la vie des personnes âgées concernent d’une certaine façon des relations auxquelles celles-ci attachent de l’importance. Puisque ces relations peuvent être primordiales sur le plan affectif ou pratique pour les personnes âgées, celles-ci peuvent se montrer réticentes à entamer des procédures de règlement de conflits susceptibles de provoquer la rupture de la relation. Les solutions de rechange peuvent comprendre des programmes de médiation, ou encore le recours à des mécanismes qui ne sont pas basés sur la présentation de plaintes, comme des vérifications proactives ou des systèmes de défense des droits. 

Pour être efficaces, les mécanismes visant à faciliter l’accès au droit des personnes âgées doivent tenir compte de ces réalités.

 

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