A.              Nécessité pratique de l’homologation dans l’administration des successions en Ontario

L’obtention d’un certificat de nomination à titre de fiduciaire de la succession est un processus judiciaire qui donne lieu à la délivrance d’un document attestant des pouvoirs d’un représentant de la succession d’administrer la succession d’un défunt. Lorsque le défunt a laissé un testament nommant un exécuteur testamentaire, ce dernier est autorisé à agir suivant les modalités du testament. L’obtention du certificat de nomination confirme simplement cette nomination en établissant la validité du testament et le fait que le représentant de la succession est en effet l’exécuteur testamentaire nommé dans le testament. D’autre part, lorsqu’un défunt décède intestat (sans testament) ou lorsqu’il laisse un testament sans nommer d’exécuteur testamentaire, c’est le certificat de nomination qui confère au représentant de la succession l’autorisation légale pour administrer la succession du défunt.

Le représentant de la succession n’est pas tenu d’obtenir un certificat de nomination. Cependant, il est en quelque sorte nécessaire d’en obtenir un dans la plupart des cas, selon la nature des biens de la succession[42]. Pour l’institution financière qui détient les biens du défunt, le certificat de nomination constitue une preuve officielle qu’elle peut transmettre les biens au représentant de la succession sans risque lié à la responsabilité. Même dans le cas où un exécuteur testamentaire est nommé dans un testament, un certificat de nomination est habituellement nécessaire pour garantir aux institutions financières que le testament est valide et que le testateur n’a pas signé un autre testament dans lequel il nomme une autre personne à titre d’exécuteur testamentaire. Par conséquent, les institutions financières exigent la plupart du temps un certificat de nomination avant de céder les biens.

Le représentant de la succession qui administre celle-ci sans obtenir de certificat de nomination prend un risque important. Il peut être tenu personnellement responsable envers les bénéficiaires, les créanciers ou les autres demandeurs de tous les paiements inappropriés effectués à partir de la succession[43]. C’est le cas même si les paiements ont été faits en vertu des modalités d’un testament qui sera ultérieurement déclaré invalide[44]. En revanche, les fiduciaires de la succession qui détiennent un certificat de nomination sont protégés en vertu du paragraphe 47(1) de la Loi sur les fiduciaires qui prévoit que les agissements faits de bonne foi demeurent valides même si le certificat de nomination est révoqué ultérieurement[45].

On conseille souvent au représentant de la succession d’obtenir un certificat de nomination afin d’établir un certain délai de prescription pour les réclamations successorales. Par exemple, en vertu de l’article 61 de la Loi portant réforme du droit des successions (LRDS), une personne à charge du défunt dispose d’un délai de six mois suivant la délivrance d’un certificat de nomination pour présenter une requête en vue d’obtenir une ordonnance alimentaire si le défunt n’y a pas pourvu suffisamment[46].

 

B.    Actuelle procédure de demande d’homologation

Un certificat de nomination a essentiellement le même effet, qu’il soit fondé sur une succession avec testament ou sans testament. Le certificat confirme, dans les deux cas, les pouvoirs du fiduciaire de la succession d’administrer la succession. Cependant, les différents objectifs que vise le certificat de nomination pour une succession avec ou sans testament (confirmer les pouvoirs de l’exécuteur testamentaire en vertu du testament dans le premier cas et procéder à une nomination initiale dans le deuxième cas) exigent que le tribunal établisse des critères différents de délivrance de ces certificats. Par exemple, dans le cas d’une succession avec testament, un objectif important du certificat de nomination consiste à vérifier sa validité en examinant si les exigences officielles de la LRDS sont satisfaites[47]. Cela témoigne de l’importance qu’accorde notre société à l’exécution des volontés d’un testateur.

Les règles qui s’appliquent à l’obtention d’un certificat de nomination sont résumées dans l’annexe B ci-après. En général, la règle 74.04 des Règles de procédure civile traite des successions avec testament[48]. Le formulaire de demande comprend un certain nombre de questions au sujet du défunt et sur le testament (afin d’en établir la validité) et une question sur la valeur des biens qui composent la succession[49]. Le demandeur doit également joindre plusieurs documents destinés à établir ce qui suit :

  • la validité du testament (l’original du testament et de tous les codicilles, un affidavit de signature du testament ou toute autre preuve de sa validité);
  • l’avis de requête a été signifié aux bénéficiaires, en particulier aux bénéficiaires vulnérables (l’avis doit être signifié au Bureau de l’avocat des enfants et au Tuteur et curateur public dans certains cas);
  • le droit du demandeur d’agir à titre de fiduciaire de la succession (lorsque le demandeur n’est pas nommé exécuteur testamentaire dans le testament ou lorsqu’il réside en dehors du territoire de compétence, par exemple).

La règle 74.05 traite des situations où le défunt n’a pas laissé de testament. Ce formulaire de demande comprend des questions destinées à établir que le demandeur est légalement autorisé à administrer la succession ainsi que des questions sur la recherche d’un testament, les personnes qui ont droit à une part de la succession et d’autres éléments qui influent sur le droit qu’a le demandeur d’être nommé fiduciaire de la succession, en plus d’exiger de fournir la valeur de la succession[50]. Le demandeur doit joindre à ce formulaire des documents destinés à établir ce qui suit :

  • l’avis de requête a été signifié aux bénéficiaires, en particulier aux bénéficiaires vulnérables;
  • les bénéficiaires ayant droit à la majeure partie de la valeur des biens consentent à la nomination du demandeur à titre de fiduciaire de la succession;
  • toute personne ayant un droit prioritaire d’administration de la succession a renoncé à ce droit;
  • le demandeur a versé un cautionnement de l’administrateur dont le montant est égal au double de la valeur de la succession[51].

Les deux formulaires de requête (avec et sans testament) exigent du requérant qu’il atteste sous serment la véracité du contenu et s’engage à administrer la succession conformément à la loi.

En plus des documents qu’il doit joindre à la requête, le représentant de la succession doit verser un dépôt dont le montant est égal au montant de l’impôt sur l’administration des successions payable en vertu de la Loi de 1998 de l’impôt sur l’administration des successions[52]. Le montant à verser au titre de l’impôt sur l’administration des successions (ou « frais d’homologation ») est calculé en fonction d’un pourcentage de la valeur de la succession. Les successions dont la valeur ne dépasse pas 1 000 $ sont exonérées de l’impôt. Les successions dont la valeur dépasse 1 000 $ doivent payer un montant calculé de la manière suivante :

  • d’une part, de 5 $ par tranche complète ou partielle de 1 000 $ de la première tranche de 50 000 $ de la valeur de la succession;
  • d’autre part, de 15 $ par tranche complète ou partielle de 1 000 $ de l’excédent de la valeur de la succession sur 50 000 $[53].

Par exemple, une succession d’une valeur de 50 000 $ entraîne des frais de 250 $ et une succession d’une valeur de 100 000 $ des frais de 1 000 $.

Le greffier peut délivrer un certificat de nomination une fois que les documents joints à la requête ont été reçus et le dépôt payé, ou, si les renseignements remis sont insuffisants, renvoyer les documents au requérant afin qu’il les corrige et les soumette de nouveau. Si la requête est incomplète ou s’il existe un doute au sujet des renseignements qu’elle contient, le greffier renvoie celle-ci à un juge[54].

Une fois le certificat de nomination délivré, le fiduciaire de la succession recueille les biens, identifie les créanciers, paye les dettes et les impôts et distribue les biens qui restent aux bénéficiaires, conformément aux modalités du testament ou du droit successoral dans le cas d’une succession sans testament. À moins qu’un différend survienne, cette procédure se déroule souvent sans autre participation du tribunal.

À l’heure actuelle, il n’existe aucune procédure spécialisée d’administration des petites successions en Ontario. La seule loi qui vise spécialement les petites successions est la Loi de l’impôt sur l’administration des successions qui prévoit que les successions dont la valeur ne dépasse pas 1 000 $ sont exonérées de l’impôt[55]. Cependant, même ces très petites successions doivent passer par le processus de requête intégral pour obtenir un certificat de nomination.

 

C.    Coût d’obtention d’une homologation

Le coût d’obtention d’une homologation comprend le coût associé à la compilation des documents nécessaires au succès d’une requête en homologation ainsi que l’impôt sur l’administration des successions payable. Le présent projet s’intéresse principalement aux droits à payer pour une requête qui ne sont pas proportionnels à la valeur de la succession, comme l’est le montant de l’impôt sur l’administration des successions.

Les droits à payer pour une requête peuvent varier beaucoup selon la complexité de la succession, entre autres facteurs, comme l’existence ou non d’un testament, le nombre de bénéficiaires et leur lieu de résidence, si des bénéficiaires sont mineurs ou frappés d’incapacité, la probabilité de conflit familial, le type de biens de la succession ou s’il y a ou non des créanciers à payer. Les droits à payer peuvent dépendre aussi de la disponibilité et des coûts des services juridiques dans la région ainsi que du soin qu’apporte le greffier des successions régional à l’examen des requêtes.

Il existe des preuves anecdotiques que les Ontariens retiennent généralement les services d’un avocat pour préparer et déposer les documents accompagnant la requête pour obtenir une homologation. Dans la mesure où cela est le cas, la majeure partie des droits à payer pour une requête sont des frais juridiques. Les frais juridiques peuvent être calculés selon un taux tarifé, un taux horaire ou une combinaison des deux. La CDO a entendu parler d’estimations des frais de préparation d’une requête en homologation ne dépassant pas 1 000 $, mais pouvant atteindre 30 000 $ (selon la valeur et la complexité des successions). Dans le cadre du présent processus de consultation, la CDO espère que beaucoup d’autres Ontariens viendront raconter leur expérience de l’homologation de successions, en indiquant s’ils ont estimé nécessaire de recourir aux services d’un avocat ainsi que le coût total de l’homologation.

La valeur de la succession est un facteur qui n’a pas nécessairement de conséquence sur les droits à payer pour une requête[56]. Les coûts d’homologation d’une petite succession, qui peuvent être égaux ou supérieurs à ceux d’une succession importante, dépendent des facteurs susmentionnés[57].

Une succession d’une valeur de 300 000 $ peut consister d’une résidence, d’une pension et de deux comptes bancaires, par exemple. La testatrice a laissé un testament nommant sa fille adulte exécutrice testamentaire et unique bénéficiaire. Même s’il semble nécessaire d’obtenir une homologation dans cette situation, les frais devraient être relativement petits. Il n’est pas nécessaire de retrouver les autres bénéficiaires, les biens sont ordinaires et devraient être faciles à évaluer. Même en payant des frais d’avocats raisonnables et un montant d’impôt sur l’administration des successions de 4 000 $, la bénéficiaire se retrouve avec un héritage significatif.

Examinons maintenant une succession d’une valeur de 60 000 $. Le testateur a laissé un testament dans lequel il nomme un membre adulte de sa fratrie à titre d’exécuteur testamentaire et désigne ses parents, ses frères et ses sœurs comme bénéficiaires. Ce testament olographe (écrit à la main) soulève des questions de validité. Comme il n’y a aucun affidavit de signature, l’exécuteur testamentaire doit trouver une personne qui confirme qu’il s’agit bien de l’écriture du testateur. Le bureau du greffier rejette plusieurs fois la demande d’homologation pour cette raison. De plus, le testateur était un entrepreneur autonome et les biens de la succession comprennent plusieurs comptes dont le montant est peu élevé. Vu la mauvaise tenue des dossiers, il est difficile de retrouver ces biens et de les évaluer. Dans les circonstances, les frais juridiques nécessaires pour homologuer la succession peuvent gruger une grande part de celle-ci. Selon le nombre de bénéficiaires ayant droit au partage des biens qui reste, le montant que recevra chacun d’eux peut sembler très faible par rapport à l’importance de la succession et aux frais d’homologation.

En pareil cas où l’homologation est coûteuse par rapport à la valeur de la succession, la décision d’en demander l’homologation suppose une certaine analyse coût/bénéfice. Les autres dépenses associées à l’administration de la succession, comme les frais d’exécuteur testamentaire, doivent également être prises en compte[58]. Dans ces circonstances, on s’inquiète du fait que les représentants de la succession administreront peut-être la succession sans la protection de l’homologation ou décideront de ne pas l’administrer.

Il arrive aussi que l’obtention de l’homologation ne soit pas possible sur le plan financier, une situation légèrement différente. C’est le cas d’une succession si petite qu’il n’y a réellement rien à administrer, mais dont l’homologation est nécessaire pour des fins juridiques, comme la production de la dernière déclaration de revenus du défunt. Dans cette situation, il n’y a pas d’analyse coût/bénéfice, mais simplement une obligation juridique que le représentant de la succession pourrait devoir financer personnellement. Par exemple, la CDO a entendu parler d’un parent dont l’enfant adulte est décédé sans testament. Comme la succession ne comportait aucun bien, le parent n’a pas déposé de demande d’homologation. Plus tard, on a découvert une pension très peu élevée pour laquelle le bénéficiaire désigné était la succession. Le parent a dû produire une déclaration de revenus, et l’Agence du revenu du Canada a exigé l’homologation de la succession comme preuve des pouvoirs du parent. Comme le parent résidait à l’extérieur de l’Ontario, l’obtention de l’homologation était compliquée et supposait le dépôt d’une demande de nature judiciaire. La valeur de la pension était loin de suffire à financer une telle demande.

Il existe une multitude de situations et de combinaisons de circonstances qui peuvent compliquer une demande d’homologation et faire monter les coûts. La procédure d’homologation pourrait également faire augmenter les frais d’administration étant donné que celle-ci se déroulera sous l’examen minutieux des bénéficiaires et, possiblement, du tribunal. De toute façon, le point essentiel est que ces coûts éventuels ne correspondent pas nécessairement à la valeur de la succession.

 

Questions de rétroaction

1. Avez-vous participé à l’administration de ce que vous considérez être une ou des petites successions? Veuillez donner une brève description de votre expérience.

2. Selon vous, quelle est la valeur maximale que peut avoir une succession pour être considérée comme une « petite » succession?

3.  Croyez-vous que les frais d’homologation exigés en Ontario pour une petite succession sont raisonnables par rapport à sa valeur? Si ce n’est pas le cas, quels sont les éléments de la procédure pour lesquels les coûts sont excessifs?

 

D.   Administration des successions par le Tuteur et curateur public de l’Ontario

Le Tuteur et curateur public (TCP) de l’Ontario joue deux rôles distincts dans l’administration des successions. Tout d’abord, le TCP représente les personnes frappées d’incapacité mentale qui ont un intérêt dans des successions administrées par d’autres personnes et n’ont pas de tuteur ni d’avocat autorisé à agir[59]. Ensuite, le TCP peut présenter une demande d’administration de successions dans les cas où aucun exécuteur testamentaire n’est désigné et aucun membre de la famille ou bénéficiaire vivant en Ontario n’est disposé à exercer ce rôle et capable de le faire[60].

Ce second rôle ne doit être exercé qu’en dernier recours. Lorsque le TCP veut être nommé fiduciaire de la succession, il doit présenter une requête en vue d’obtenir un certificat de nomination et suivre essentiellement la même procédure qu’un autre requérant[61]. Il n’existe aucun raccourci procédural, sauf que le TCP n’est pas tenu de verser un cautionnement[62]. En l’absence de testament, le TCP doit obtenir, comme tout autre demandeur, le consentement des bénéficiaires ayant droit à la majeure partie de la valeur des biens de la succession[63].

Le TCP administre plus de 1 400 successions en tout temps[64]. Il a pour politique de demander l’homologation des successions dont la valeur nette est d’au moins 10 000 $ uniquement[65].

 

E.     Administrer des petites successions sans homologation

Même s’il n’existe aucune procédure distincte d’administration des petites successions en Ontario, diverses lois et politiques permettent de contourner la procédure d’homologation, dans certaines circonstances, afin de faciliter le transfert des biens de la succession au moment du décès[66]. Ces lois et ces politiques varient selon l’institution qui détient les biens et selon le type de biens visés, et elles exigent habituellement, mais pas toujours, un testament dans lequel le représentant de la succession est nommé à titre d’exécuteur testamentaire.

1.     Biens détenus par des institutions financières

La Loi sur les banques (Canada) autorise les banques à s’en remettre aux régimes d’homologation provinciaux pour la remise de « lettres d’homologation », de « lettres d’administration » ou d’un « autre document de portée semblable » comme preuve des pouvoirs conférés de recevoir les biens de la personne décédée[67]. Cette disposition protège les banques contre les responsabilités découlant d’une transmission des biens fondée sur un certificat de nomination ou sur un autre document délivré par un tribunal, lorsqu’il se révèle ultérieurement que le destinataire n’avait pas droit aux biens après tout. Elle autorise les banques à se fier à un certificat de nomination comme preuve de l’autorisation. Cependant, elle n’exige pas des banques qu’elles se fient à un certificat de nomination, et, en fait, elle les autorise à se réserver le droit d’exiger toute autre preuve qu’elles jugent nécessaire.

Les caisses populaires de l’Ontario sont assujetties à la Loi de 1994 sur les caisses populaires et les credit unions qui est plus souple que la Loi sur les banques (Canada)[68]. La loi autorise les caisses populaires à distribuer, sans certificat de nomination, les biens dont la valeur est inférieure à un montant prescrit lorsqu’une déclaration solennelle ou toute autre preuve permet d’établir le droit d’une personne à ce montant. À l’heure actuelle, le montant prescrit par règlement s’élève à 50 000 $[69]. Cette disposition contourne efficacement la procédure d’obtention d’un certificat de nomination pour les petites successions en exigeant des preuves moins rigoureuses, proportionnelles aux montants plus faibles concernés. Toutefois, la CDO a entendu dire au cours des entrevues préliminaires que, dans la pratique, les caisses populaires ont tendance à exiger l’homologation.

En plus d’être assujetties à ces dispositions législatives, les institutions financières ont élaboré des politiques internes traitant de la décision de présenter ou pas une requête en vue d’obtenir un certificat de nomination avant de distribuer les biens d’un client[70]. Il existe une multitude de politiques pour diverses institutions et différents types de biens. Par exemple, les Directives opérationnelles de la Banque du Canada renferment un tableau détaillant la preuve documentaire requise pour transférer des obligations d’épargne du Canada dans différentes circonstances. Dans le cas d’une succession avec testament qui comprend des obligations d’épargne, la Banque exige généralement un certificat de nomination, peu importe la valeur des obligations. Cependant, lorsqu’un conjoint est le seul bénéficiaire nommé au testament, la Banque distribue un montant maximal en obligations de 75 000 $ à la réception d’une copie certifiée du testament et d’une preuve de décès du propriétaire. Ce montant baisse à 50 000 $ lorsque le conjoint et les enfants sont bénéficiaires de la succession[71]. Les institutions financières ont élaboré ces politiques en s’appuyant sur leur propre matrice de facteurs de risque. Il n’y a pas d’approche uniforme.

La décision des institutions financières de transmettre ou non les biens sans homologation est souvent considérée comme une décision de gestion du risque. Cependant, une telle perception est peut-être trop simplifiée. Les institutions financières ont l’obligation juridique de protéger les biens que leurs clients leur confient. Selon un intervenant d’une institution financière, il n’est pas pertinent qu’il soit plus logique de se fonder sur une analyse coût/bénéfice pour distribuer les biens de peu de valeur que de subir l’inconvénient de les détenir jusqu’à ce que l’homologation soit accordée. La loi prévoit que la banque doit protéger les biens et la confidentialité du propriétaire en faisant affaire uniquement avec un représentant légalement autorisé[72].

La réticence que montrent les institutions financières à l’égard de l’ouverture des comptes des successions sans une telle preuve d’autorisation légale est un autre obstacle pratique à l’administration d’une succession sans homologation. L’ouverture d’un compte de succession soulève des préoccupations d’ordre juridique à l’égard du transfert des biens. Cependant, un compte de succession suppose de nombreux transferts de biens au compte et à l’extérieur de celui-ci au cours d’une certaine période de temps, et les institutions financières peuvent mener une évaluation des risques qui diffère de celle qui s’applique à un transfert de biens singulier.

 

2.     Biens sous le contrôle d’autres institutions

Il est possible de transférer des biens immeubles sans homologation dans certaines circonstances. En vertu de la Loi sur l’enregistrement des droits immobiliers, le directeur des droits immobiliers est autorisé à déterminer les preuves nécessaires pour établir le droit de propriété d’un bien immeuble en raison du décès du propriétaire enregistré[73]. Le directeur a établi une politique relative à la suspension de la procédure officielle d’homologation dans le cas des successions avec testament dont la valeur des biens est inférieure à 50 000 $. Plutôt que de procéder à l’homologation de la succession, le représentant de la succession doit déposer une copie du testament et du certificat de décès, un affidavit attestant la valeur de la propriété et une convention d’indemnisation de la Caisse d’assurance des droits immobiliers de toute réclamation que pourraient faire les bénéficiaires[74]. Une autre politique de première opération permet une unique suspension de l’exigence d’homologation pour le premier transfert de biens immeubles effectué après la conversion du régime d’enregistrement des actes au régime d’enregistrement des droits immobiliers. Les exigences requises sont semblables. La politique exige également la présentation d’un testament, d’un affidavit et d’une convention d’indemnisation de la Caisse d’assurance des droits immobiliers[75].

Pour ce qui est des biens immeubles qui demeurent sous le régime d’enregistrement des actes, la Loi sur l’enregistrement des actes autorise le transfert des biens, peu importe leur valeur, sur présentation du testament original ou d’une copie notariée de celui-ci, d’une preuve que la signature figurant sur le testament est bien celle du testateur ou d’un affidavit de passation et d’une copie du certificat de décès[76].

La Loi sur l’administration des successions prévoit le transfert des biens immobiliers sans homologation dans certaines situations, même en l’absence de testament. Les biens immeubles qui ne sont pas aliénés dans les trois ans sont automatiquement dévolus aux bénéficiaires qui y ont droit[77].

La Loi sur les sociétés par actions prévoit la transmission, au décès du détenteur enregistré de valeurs mobilières, au représentant de la succession si ce dernier est en mesure de fournir une preuve raisonnable de son droit de devenir le détenteur enregistré, dans certaines situations et sans certificat de nomination[78].

Ces lois et ces politiques ainsi que le pouvoir discrétionnaire des personnes qui les appliquent ont des conséquences pratiques sur la nécessité qu’un représentant de la succession engage des coûts pour obtenir une homologation dans certains cas. Il est donc important, dans le cadre du présent projet, d’examiner les liens qui existent entre ces lois et politiques et le régime d’homologation en Ontario, particulièrement leur incidence sur les petites successions.

 

 

 

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